M. le président. La parole est à M. Lesein, auteur de la question n° 113, adressée à M. le secrétaire d'Etat au budget.
M. François Lesein. Monsieur le secrétaire d'Etat, j'aimerais vous faire part des difficultés soulevées par la TVA dans la vente d'électricité. Cette dernière, rappelons-le, est assujettie au taux normal de 20,6 %. Un tel taux me semble excessif au vu du niveau de vie des ménages français. En effet, les derniers mouvements sociaux ont révélé que l'insatisfaction des personnes les plus démunies liée au coût excessif de l'électricité est un facteur aggravant de fracture sociale.
C'est pourquoi une nette diminution du taux de la TVA perçue sur les ventes d'électricité faciliterait le paiement de leurs factures par tous les usagers.
La revendication des chômeurs relative à l'arrêt des coupures d'électricité dans les logements des familles les plus défavorisées est particulièrement significative. Pourquoi imposer à des millions de ménages le taux maximum de TVA alors qu'EDF fournit un produit de première nécessité et que le taux adéquat devrait donc être réduit à 5,5 % ?
Aujourd'hui, il semble difficilement concevable de ne pas considérer l'électricité comme un élément indispensable au bien-être de nos concitoyens, au même titre que l'eau, les produits alimentaires. Pourtant, on constate aisément que, si l'achat de chocolat, de caviar ou d'oeuvres d'art est une opération de première nécessité, la consommation d'électricité, quant à elle, ne parvient pas à entrer dans la catégorie des taux réduits de TVA.
A ce propos, monsieur le secrétaire d'Etat, permettez-moi d'étayer mes arguments par deux remarques.
La première s'appuie sur le taux de TVA normal en vigueur dans les Etats membres de l'Union européenne. Ici encore, on constate à quel point le taux français est particulièrement élevé : 20,6 %, contre 15 % en Allemagne, 16 % en Espagne, 18 % en Grèce, 19 % en Italie, 15 % au Luxembourg et 17,5 % au Royaume-Uni. Et je ne parlerai pas des Açores et de Madère, où le taux maximum de TVA s'établit à 12 %.
Ma seconde remarque se réfère au système italien, qui est intéressant. En effet, l'Etat italien impose un taux réduit de TVA de 10 % pour les ventes d'électricité « domestique », c'est-à-dire l'électricité consommée par l'ensemble des ménages, et un taux de TVA de 10 % à 19 % sur les ventes d'électricité « non domestique ». Cela revient à faire payer plus cher l'utilisation industrielle d'électricité avec un taux variant en fonction de critères bien définis, tels que la pollution, la surconsommation, etc.
En conséquence, monsieur le secrétaire d'Etat, pourquoi la France, à l'instar de ce qui se fait chez nos voisins italiens comme dans d'autres pays européens, tels l'Irlande et de Luxembourg, où les taux de TVA sont extrêmement réduits, n'instaurerait-elle pas un taux de TVA à 5,5 % qui assimilerait la vente d'électricité à l'usage de produits de première nécessité ?
M. Charles Descours. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement. Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de M. Sautter, retenu par une obligation.
Comme vous le savez, monsieur le sénateur, le Gouvernement souhaite tout à la fois rendre la fiscalité plus équitable, notamment en rééquilibrant fiscalité indirecte et fiscalité directe, la première pesant lourdement sur les revenus les plus modestes, et accélérer le dynamisme de notre économie et la création d'emplois tout en améliorant la protection de l'environnement.
C'est bien sûr dans cette perspective qu'il convient d'apprécier votre proposition d'abaissement du taux de la taxe sur la valeur ajoutée sur la consommation d'électricité.
Bien évidemment, il faut s'interroger sur les répercussions d'une telle mesure en matière d'emploi, d'environnement et d'économie d'énergie. Sa compatibilité avec le droit communautaire doit également être expertisée.
Il est clair que, comme vous en avez conscience, cette mesure poserait un problème budgétaire significatif puisque l'application du taux réduit de la taxe sur la valeur ajoutée à la consommation de gaz, d'électricité et de fioul domestique entraînerait des pertes de recettes de l'ordre de 20 milliards de francs.
Le Gouvernement est tout à fait conscient des difficultés qu'éprouvent un certain nombre de personnes et de ménages dans notre pays devant cette charge de l'énergie liée à l'habitat. Il a ouvert un dialogue avec EDF, qui a d'ores et déjà pris certaines mesures et qui a décidé de les amplifier, comme l'a indiqué la semaine dernière, à l'Assemblée nationale, Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, dans sa réponse à une question posée par Mme Muguette Jacquaint, réponse à laquelle je vous invite à vous reporter.
En tout état de cause, s'agissant de l'abaissement du taux de TVA applicable à la consommation d'électricité, de gaz et de fioul domestique, seules pourront être étudiées des solutions compatibles avec l'état de nos finances publiques et susceptibles de s'inscrire dans les priorités que le Gouvernement s'est fixées pour la réforme de la fiscalité. Cette réforme sera élaborée en 1998 et trouvera sa traduction dans le budget de 1999.
La loi de finances pour 1998 a déjà fait un pas très important en direction de l'habitat avec la baisse du taux de la TVA applicable aux travaux réalisés par les organismes d'HLM dans leur patrimoine immobilier. L'évaluation du coût pour les finances publiques, en année pleine, est de 2,8 milliards de francs, car sont visées non seulement les opérations de type PALULOS, c'est-à-dire les opérations ouvrant droit à la prime à l'amélioration des logements à usage locatif et à occupation sociale, mais également les grosses réparations réalisées sur fonds propres.
A cet effort s'ajoute un avantage fiscal nouveau, sous forme de crédit d'impôt ou de remboursement de la TVA sur facture acquittée par ménage, dans la limite de 10 000 francs de travaux par an. L'évaluation de la dépense pour le budget de l'Etat est de 1 milliard à 1,2 milliard de francs.
Des efforts importants ont été réalisés cette année pour l'habitat.
Le Gouvernement ne manquera pas d'être attentif à vos suggestions sur les problèmes d'énergie, tels que vous venez de les exposer, monsieur le sénateur.
M. François Lesein. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Lesein.
M. François Lesein. Monsieur le secrétaire d'Etat, j'ai tout à fait conscience des contraintes budgétaires. Il n'en reste pas moins vrai qu'EDF a obtenu tout récemment de conserver l'essentiel de ses prérogatives sur le plan européen, à la seule condition que soit respectée la transparence de ses comptes.
Or la lecture des comptes permettra d'opérer des comparaisons qui risquent d'être peu flatteuses pour EDF : si les élus et les gouvernants comprendront les difficultés, les utilisateurs n'ayant pas de quoi payer leur facture en fin de mois, eux, se fâcheront en voyant l'affectation des comptes d'EDF ; et je ne citerai à cet égard que le comité d'entreprise.
La somme de 20 milliards de francs que vous indiquez, monsieur le secrétaire d'Etat, est certes importante. Mais il serait bon, à mon avis, de faire quand même un geste important sur ce point, en tout cas vis-à-vis des personnes les plus déshéritées. En effet, l'électricité est devenue un produit de consommation courante. Il n'y a donc pas de raison qu'elle supporte un taux de TVA plus élevé que les autres produits de première nécessité.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous remercie de votre réponse, tout en notant que l'effort n'est pas suffisant.
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