M. le président. « Art. 4. - Il est inséré, dans le même titre, un article 1386-3 ainsi rédigé :
« Art. 1386-3. - Est un produit tout bien meuble, même s'il est incorporé dans un immeuble, y compris les produits du sol, de l'élevage, de la chasse et de la pêche. L'électricité est considérée comme un produit.
« Les dispositions du présent titre ne sont pas applicables aux éléments du corps humain et aux produits qui sont issus de celui-ci. »
Par amendement n° 2, M. Fauchon, au nom de la commission, propose de supprimer le second alinéa du texte présenté par cet article pour insérer un article 1386-3 dans le code civil.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer l'exclusion du nouveau régime issu de la directive des éléments du corps humain et des produits issus de celui-ci. Ces derniers ont été au centre de la discussion générale, et je vous renvoie donc, mes chers collègues, aux explications que j'ai données dans mon intervention liminaire.
L'Assemblée nationale, au début de l'année dernière, a voulu exclure les éléments et produits du corps humain du système de la directive.
Or, la directive ne permet pas cette exclusion, et cet argument devrait se suffire à lui-même puisque nous devons impérativement transposer la directive.
En outre, je ne vois pas pourquoi exclure de ce nouveau système les éléments et produits du corps humain. D'ailleurs, sur ce point, comme sur beaucoup d'autres, on risque de se tromper, car, dans ce cas, les produits du corps humain restent dans le système de droit français classique lequel est probablement encore plus protecteur.
De toute façon, cela ne change pas grand-chose. La directive apporte essentiellement une simplification dans la mise en oeuvre des responsabilités. Il n'y a pas de raison de ne pas étendre cette simplification aux éléments et produits du corps humain.
Nous pensons donc qu'il y a lieu de ne pas exclure les éléments et produits du corps humain du nouveau régime issu de la directive.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Le Gouvernement émet un avis favorable. Nous comprenons que la commission ne souhaite pas opérer de distinction entre les produits et, en conséquence, inclure dans le champ d'application de la loi de transposition les éléments du corps humain et les produits qui sont issus de celui-ci.
Son choix s'explique par son souci de n'exonérer aucun producteur pour risque de développement quelle que soit la nature des biens qu'il met en circulation.
Si le Gouvernement n'entend pas faire du risque de développement une cause générale d'exonération, du moins est-il, pour des raisons éthiques évidentes, en accord avec la commission s'agissant des éléments et produits du corps humain.
J'aurai l'occasion de m'expliquer sur ce point lors de l'examen de l'article 12. Dans l'immédiat, je me rallie à la suppression proposée.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 2.
Mme Odette Terrade. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade. Le second alinéa de l'article 4, tel qu'il est rédigé et tel que nous voudrions le voir maintenu, nous paraît de nature à clarifier la volonté du législateur de bien distinguer les éléments et produits du corps humain de l'ensemble des autres produits. Introduire ceux-là dans le champ d'application du régime de la responsabilité du fait des produits défectueux conduirait inéluctablement à leur donner un caractère industriel et commercial, ce que nous refusons catégoriquement.
Nous redoutons une telle perspective. Or adopter cet amendement de suppression constituerait un premier pas que nous ne voulons pas franchir.
De plus, il nous semble que le régime de responsabilité du fait des produits défectueux est moins protecteur pour le consommateur que notre droit actuel.
Certes, M. le rapporteur nous explique que la victime aura le choix entre les deux régimes. On risque, en réalité, de créer des confusions sur cette question très délicate des produits du corps humain.
Un système cohérent et clair est la meilleure garantie pour l'exercice des droits de la victime. Monsieur le rapporteur, le groupe communiste républicain et citoyen est opposé à votre amendement n° 2 pour des raisons d'éthique et de transparence.
M. Marcel Charmant. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Charmant.
M. Marcel Charmant. Nous suivrons le Gouvernement et voterons donc l'amendement n° 2. J'indique néanmoins que Mme le garde des sceaux et M. le rapporteur ne se situent pas tout à fait dans la même perspective.
Lors de l'examen par l'Assemblée nationale du premier texte, dont j'étais le rapporteur, la notion de produits du corps humain avait été introduite. En effet, en 1991, le débat autour du sang contaminé mettait en exergue ce point.
M. le rapporteur considère qu'il serait contraire à la directive de faire figurer cette notion dans le texte de loi. Non ! En effet, la directive évoque les produits, notamment les produits industriels, mais ne fait en aucun cas référence au corps humain.
Par conséquent, nous voterons l'amendement n° 2 compte tenu non pas de l'interprétation de la commission, mais de celle du Gouvernement, qui, par ailleurs, propose de maintenir l'exonération du risque de développement. (Mme le garde des sceaux opine.)
M. Philippe Marini. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. Monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, je suis favorable à l'amendement de la commission, car il nous appartient, me semble-t-il, d'établir un régime de responsabilité homogène quelle que soit la nature des activités et des branches industrielles concernées.
Cela ne doit pas s'opposer à la prise de conscience de l'existence de risques spécifiques à certaines activités, et je pense ici à un problème de fond qui est présent à beaucoup de nos esprits, à savoir le risque thérapeutique. En ce domaine, bien des réflexions se sont exprimées et bien des propositions ont été faites. Je crois important de rappeler l'urgence qu'il y a à prendre des dispositions législatives en la matière, en instaurant en particulier un système d'assurance bien spécifique compte tenu des besoins sociaux qui s'expriment et de la complexité sans cesse croissante des techniques biomédicales.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 4, ainsi modifié.
(L'article 4 est adopté.)
Article 5