Séance du 3 juin 1998
M. le président. « Art. 5. _ Il est inséré, dans le code général des collectivités territoriales, un article L. 2212-9 ainsi rédigé :
« Art. L. 2212-9 . _ A l'occasion d'une manifestation exceptionnelle à caractère culturel, récréatif ou sportif, ou en cas de catastrophe naturelle, les maires de communes limitrophes ou appartenant à une même agglomération peuvent mettre en commun, sur le territoire d'une ou plusieurs communes, pour un délai déterminé et uniquement pour l'exercice de missions de police administrative, tout ou partie des moyens et des effectifs de leurs services de police municipale.
« Cette faculté est subordonnée à un arrêté du représentant de l'Etat dans le département qui en détermine les conditions et les modalités. »
Par amendement n° 22, M. Delevoye, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit le premier alinéa du texte présenté par cet article pour insérer un article L. 2212-9 dans le code général des collectivités territoriales :
« Lors d'une manifestation exceptionnelle, notamment à caractère culturel, récréatif ou sportif, à l'occasion d'un afflux important de population ou en cas de catastrophe naturelle, les maires de communes limitrophes ou appartenant à une même agglomération peuvent être autorisés à utiliser en commun, sur le territoire d'une ou plusieurs communes, pour un délai déterminé, tout ou partie des moyens et des effectifs de leurs services de police municipale. Cette faculté s'exerce exclusivement en matière de police administrative. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 104, présenté par le Gouvernement, et tendant, dans la première phrase du texte proposé par l'amendement n° 22 pour le premier alinéa de l'article L. 2212-9 du code général des collectivités territoriales, après les mots : « à l'occasion d'un afflux important de population », à insérer les mots : « lié à la saison touristique ».
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 22.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Il s'agit d'une situation très difficile vécue par les collectivités locales. L'Assemblée nationale a supprimé la notion d'« afflux important de population lié à la saison touristique » et a inclus la notion de « catastrophe naturelle », que nous soutenons. La commission des lois du Sénat a réintroduit la notion d'afflux important de population, mais sans la limiter exclusivement à la saison touristique. Cela correspond à une attente très importante des élus locaux.
M. le président. La parole est à M. le ministre, pour présenter le sous-amendement n° 104 et pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 22.
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Le Gouvernement accepte l'amendement n° 22, sous réserve de l'adoption du sous-amendement n° 104 tendant à insérer, après les mots « afflux important de population », les mots « lié à la saison touristique ». Il importe de bien préciser, en effet, les hypothèses dans lesquelles les moyens effectifs de police municipale peuvent être mis en commun, et, dans l'esprit du Gouvernement, c'est bien cette hypothèse qui est visée dans l'article L. 2212-9 du code général des collectivités territoriales.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 104 ?
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur ce sous-amendement. En effet, un certain nombre d'élus nous ont fait part d'afflux importants de population, quelquefois non souhaités, qui créent une véritable contrainte et appellent une réponse momentanée. Certains ont évoqué, notamment, les rave parties , qui nécessitent, à l'évidence, la mobilisation d'un certain nombre de forces de police.
M. Alain Gournac. Et pas seulement pendant la saison touristique !
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Par conséquent, il est important que l'afflux important de population ne soit pas limité à la saison touristique.
M. le président. Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 104.
M. Jean-Jacques Hyest Je demande la parole contre le sous-amendement.
M. le président. La parole est à M. Hyest.
M. Jean-Jacques Hyest. Le sous-amendement du Gouvernement est trop limitatif. La saison touristique peut se prolonger et, pour certains, il peut même y avoir plusieurs saisons. Des manifestations locales comme les grandes foires ou les pélerinages, notamment, peuvent donner lieu à de grands rassemblements de population qui ne sont pas liés à la saison touristique.
Dans ces cas-là également, monsieur le ministre, et conformément à l'esprit même de votre texte, ne peut-on admettre de renforcer les moyens et d'instaurer une coopération ? Cela me paraît possible.
Les rave parties ne me semblent pas être un bon exemple, pour en avoir connu une superbe dans notre département ! En effet, police municipale, police nationale et gendarmerie nationale ont vite été dépassées devant un afflux de 12 000 personnes dans un champ le 1er mai. De toute façon, les autorités n'ont pas le temps de réunir et de coordonner les forces de police.
En revanche, il existe d'autres manifestations qui sont de caractère culturel ou autres et qui réunissent une population importante. Dans ce cas, la coordination entre les polices municipales est souhaitable.
La définition que vous proposez, monsieur le ministre, est un peu trop restrictive. C'est pourquoi la commission des lois du Sénat préfère l'expression « afflux important de population », sans autre précision.
M. Jean-Claude Peyronnet. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Peyronnet.
M. Jean-Claude Peyronnet. Je suis favorable au sous-amendement du Gouvernement.
Les rassemblements de polices municipales de commune à commune provoquent chez moi, sans que je puisse en préciser la raison, une vague inquiétude. Aussi me semble-t-il souhaitable de bien préciser les cas dans lesquels ces rassemblements peuvent s'opérer.
Le texte adopté par l'Assemblée nationale est déjà large puisqu'il vise, notamment, les rassemblements à caractère culturel, récréatif ou sportif. Il convient de délimiter de façon précise, d'une part, les cas dans lesquels l'Etat peut intervenir en priorité et presque exclusivement, et, d'autre part, les cas dans lesquels il appartient aux polices municipales d'intervenir.
Lorsqu'il s'agit d'un rassemblement occasionnel imprévisible, ou que personne ne souhaitait - les rave parties par exemple - le maintien de l'ordre doit être assuré par l'Etat. Lorsqu'il s'agit, au contraire, d'un évènement prévisible qui intervient à titre annuel ou exceptionnel mais en présentant un caractère répétitif, le maintien de l'ordre revient aux polices municipales.
Je suis donc favorable à l'ajout proposé par le Gouvernement et concernant la référence à la saison touristique.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Si je conçois les interrogations de M. Peyronnet, je crois néanmoins que le sous-amendement du Gouvernement n'a plus d'objet. En effet, la commission des lois vise les cas dans lesquels les maires peuvent proposer au préfet d'accepter la mise en commun de leurs polices municipales. Cela signifie que, à l'évidence, l'autorisation du préfet est nécessaire.
Nous multiplions donc les possibilités de concertation entre les maires et l'Etat en vue d'apporter les meilleures réponses en matière de sécurité. Mais il appartient bien évidemment à l'Etat d'éviter les dérapages qui nourrissent la crainte, très légitime, que vous exprimez et que jepartage.
Nous estimons - M. Hyest l'a fortement indiqué tout à l'heure - que la formulation : « à l'occasion d'un afflux important de population lié à la saison touristique » pose bien évidemment un problème aux maires, qui vont se tourner vers le préfet pour proposer la mise en commun de moyens en vue d'apporter la réponse la plus efficace.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 104, repoussé par la commission.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement.
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Je trouve cette rédaction un peu trop large. Le projet de loi adopté par l'Assemblée nationale vise expressément les manifestations exceptionnelles à caractère culturel, récréatif ou sportif, ou les catastrophes naturelles. S'agissant de l'« afflux important de population », prévu par l'amendement n° 22, j'avais souhaité qu'il soit « lié à la saison touristique ». Si tout cela ne suffit pas, c'est que l'on vise encore d'autres hypothèses. Lesquelles ? Que les bouches s'ouvrent !
Il me semble donc qu'il faut cadrer un peu l'action des préfets. Eux aussi ont besoin que la loi leur fixe un chemin, même s'ils peuvent naviguer un peu.
S'agissant des rave parties, c'est un problème difficile, même pour la police nationale.
M. Jean-Jacques Hyest. Ça, oui !
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur l'amendement n° 22, qui est beaucoup trop général.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 22, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 23, M. Delevoye, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit le second alinéa du texte présenté par l'article 5 pour insérer un article L. 2212-9 dans le code général des collectivités territoriales :
« Cette utilisation en commun des moyens et effectifs est autorisée par arrêté du représentant de l'Etat dans le département qui en fixe les conditions et les modalités au vu des propositions des maires des communes concernées. »
Par amendement n° 53, M. Gélard et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent, dans le second alinéa du texte présenté par l'article 5 pour l'article L. 2212-9 du code général des collectivités locales, de remplacer les mots : « représentant de l'Etat dans le département » par le mot : « préfet ».
Je vous informe qu'en raison des votes intervenus l'amendement n° 53 n'a plus d'objet.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 23.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Cet amendement de clarification rédactionnelle vise à prendre en compte les propositions des maires. Il reprend d'ailleurs une disposition du projet de loi initial qui avait été supprimée par l'Assemblée nationale.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 23, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 5, modifié.
(L'article 5 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 5