Séance du 23 juin 1998
DE LA PSYCHOLOGIE SCOLAIRE
M. le président.
La parole est à Mme Beaudeau, en remplacement de Mme Luc, auteur de la
question n° 283, adressée à Mme le ministre délégué chargé de l'enseignement
scolaire.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Madame la ministre, retenue par des engagements impératifs pris antérieurement
à la décision de report à ce jour de la séance des questions orales, Mme Hélène
Luc m'a demandé de bien vouloir la remplacer. Je le fais d'autant plus
volontiers que la question concernant la fonction de la psychologie scolaire au
sein du système éducatif pour favoriser la réussite de chaque enfant est une
question d'importance.
Il est établi depuis longtemps que l'école ne saurait se réduire à une
relation exclusive maître-élève et que la construction du parcours scolaire, du
développement et de la valorisation du potentiel de chaque enfant passe par la
mobilisation de toutes les compétences de l'éducation nationale, qui doivent se
compléter au sein d'un travail d'équipe.
Enseignants et non enseignants sont tous appelés à remplir pleinement leur
mission par une approche de l'enfant qui doit être à la fois globale et la plus
individualisée possible, dans une société où les difficultés économiques et
sociales pèsent fortement sur les comportements, sur la disponibilité et même
sur des conditions de base agissant sur les capacités physiologiques et
psychiques. Et tous ont à faire face à des situations aujourd'hui de plus en
plus lourdes et complexes.
Or, et sans qu'il soit question d'opposer les uns aux autres, les psychologues
exerçant dans l'éducation nationale, les psychologues scolaires et les
conseillers d'orientation psychologues observent une constante minoration de
leur rôle, de la reconnaissance de leur mission, de leur qualification, des
besoins en postes et en moyens. Cette appréciation unanime ressort de
l'audience que le groupe communiste républicain et citoyen a accordée, à leur
demande, à l'ensemble des syndicats, rassemblés en intersyndicale, sur cette
question de la psychologie scolaire.
Madame la ministre, vous le savez, les difficultés sociales, relationnelles et
de repères, les phénomènes de violence, de maltraitance, une prévention de
l'échec scolaire qui soit la plus précoce possible, l'écoute, le soutien,
l'orientation vers des rééducations diverses sont autant d'exigences qui
appellent des besoins importants, insuffisamment satisfaits actuellement. Il
faut donc engager une nouvelle logique pour ce secteur.
Les zones d'éducation prioritaires, à la relance desquelles le Gouvernement a
déclaré vouloir procéder, sont d'évidence très concernées par les interventions
de la psychologie scolaire.
Ce n'est bien sûr pas exclusif d'autres moyens pour les zones d'éducation
prioritaires et, à cet égard, il faut déplorer que le recours à la calculette
reste encore en vigueur pour la carte scolaire.
Mon amie Hélène Luc, à titre d'illustration, tenait à évoquer devant vous le
cas du collège Henri-Matisse, situé dans une zone d'éducation prioritaire à
Choisy-le-Roi, sa commune, collège qui, grâce à l'extraordinaire mobilisation
de son équipe et de ses élèves, a réalisé un projet très réussi contre la
violence. Celui-ci s'est conclu par une charte du
fair-play
que Michel
Platini et Joseph Blatter ont retenue pour la Coupe du monde et que la jeune
Sarah, élève de 4e, a pu lire au Stade de France devant les téléspectateurs du
monde entier. Mais dans le même temps, madame la ministre, ce collège se voit
ponctionner deux postes et demi pour la rentrée. Imaginez le découragement et
la colère qui peuvent en résulter ! Dans mon département du Val-d'Oise, je
pourrais citer de nombreux exemples semblables. Les actes doivent être en
conformité avec les décisions et les orientations annoncées.
Concernant la psychologie scolaire, des créations de postes nouveaux et à
hauteur des besoins que je viens de rappeler, auxquels s'ajoute le nécessaire
renouvellement consécutif aux départs en retraite qui vont être nombreux,
appellent des recrutements externes, car le vivier des instituteurs se révèle
insuffisant. De plus, de nombreux étudiants en psychologie y trouveraient le
débouché qui leur fait souvent défaut aujourd'hui.
Cela induit également une reconnaissance statutaire précise. Des discussions
avec les personnels ont commencé, et elles doivent donc se poursuivre. Les
réponses à ces questions sont constitutives d'une véritable politique de la
psychologie scolaire pour laquelle je vous demande, madame la ministre, de
m'indiquer vos intentions et vos orientations.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Ségolène Royal,
ministre délégué chargé de l'enseignement scolaire.
Madame la sénatrice,
la nécessité de la psychologie à l'école et de l'intervention de psychologues,
qui est une tradition ancienne au sein de l'institution scolaire, a été conçue
au lendemain de la guerre par le professeur Wallon dans le cadre des réflexions
qui ont conduit au « plan Langevin - Wallon ».
Dès la mise en place de la psychologie scolaire en 1960, un principe a été
affirmé : le psychologue scolaire n'est pas un spécialiste venu de l'extérieur
de l'institution, mais il fait partie de l'institution scolaire.
Lors de la création en 1970 des groupes d'aide psychopédagogiques, leur place
a été reconnue dans le dispositif de prévention des inadaptations scolaires. La
circulaire de 1990 redéfinit leurs missions et fonde la spécificité de
l'exercice de la psychologie en milieu scolaire et l'identité professionnelle
des psychologues scolaires.
Les psychologues scolaires, dans le cadre des réseaux d'aides spécialisées aux
élèves en difficulté, apportent l'appui de leurs compétences pour la prévention
des difficultés scolaires, pour l'élaboration du projet pédagogique de l'école,
pour la conception, la mise en oeuvre et l'évaluation des aides aux élèves en
difficulté. C'est pourquoi une expérience pédagogique préalable a toujours
semblé nécessaire pour exercer ces fonctions.
Aujourd'hui, les psychologues scolaires sont donc des enseignants choisis pour
recevoir une formation spécifique, dispensée dans un institut universitaire de
psychologie, leur permettant de répondre aux exigences de la loi du 25 juillet
1985 relative à l'usage professionnel du titre de psychologue. L'autorisation
de faire usage du titre de psychologue scolaire leur a été accordée par le
décret du 22 mars 1990.
C'est la raison pour laquelle il n'est pas souhaitable d'avoir recours à des
psychologues complètement extérieurs à l'école. Je tiens d'ailleurs à maintenir
tout particulièrement ce lien entre le métier d'enseignant et celui de
psychologue scolaire, et je ne dérogerai pas à ce principe. Nous avons besoin,
en effet, que les adultes éducateurs au service de l'enfant aient la même
vision de l'intérêt de l'enfant et soient associés à la même démarche
pédagogique.
Les instructions adressées aux inspecteurs d'académie relativement aux
conditions d'exercice de la profession de psychologue scolaire et, notamment, à
la spécificité des horaires consacrés aux diverses activités que les
psychologues scolaires exercent au cours de la semaine scolaire constituent la
reconnaissance de fait de l'importance de leur rôle, que je tiens à souligner
ici sans aucune ambiguïté.
Compte tenu du profil démographique de la profession, un nombre important de
psychologues scolaires fera valoir ses droits à la retraite dans les années à
venir. Une réflexion est d'ores et déjà engagée au ministère pour que leur
remplacement soit assuré de la meilleure façon.
Par ailleurs, le Gouvernement a réaffirmé dans le projet de loi d'orientation
relatif à la lutte contre les exclusions le rôle des psychologues scolaires :
en tant que tels, ils font partie des comités d'éducation à la santé et à la
citoyenneté que j'ai créés dans l'ensemble des établissements scolaires et qui
vont commencer à se mettre en place dès la rentrée prochaine.
J'ajoute que les organisations représentatives des psychologues scolaires sont
reçues régulièrement au ministère de l'éducation nationale, de la recherche et
de la technologie. Les psychologues scolaires savent donc que leurs
préoccupations sont prises en compte dans le cadre de la réflexion qui se
déroule actuellement avec beaucoup de sérieux et de détermination.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Madame la ministre, vous avez rappelé la tradition ancienne de la psychologie
scolaire dans notre pays, et vous avez cité le plan Langevin-Vallon. Si ce plan
est un grand principe, ce qui manque, aujourd'hui, ce sont les moyens. C'est
pourquoi, madame la ministre, votre réponse ne me satisfait pas totalement dans
la mesure où elle ne va pas plus loin et n'est pas plus précise que la réponse
écrite publiée au
Journal officiel
du 11 juin.
Vous indiquiez déjà, dans cette réponse écrite, que nombre de psychologues
scolaires allaient faire valoir leurs droits à pension de retraite et qu'une
réflexion était d'ores et déjà engagée au ministère pour que leur remplacement
soit assuré de la meilleure façon. C'est de cela que j'aurais souhaité que nous
parlions plus longuement ce matin.
Mais surtout, je voudrais qu'une telle situation soit prise en compte dans le
projet de loi de finances pour 1999. Nous en sommes actuellement au stade des
orientations budgétaires. Il est encore temps, madame la ministre, de clarifier
et de chiffrer. Si le rôle des psychologues scolaires est déjà reconnu, ce dont
je me félicite, il est nécessaire, aujourd'hui, de préciser le développement de
leurs activités comme support et moteur pédagogique, humain et social.
PLAN D'ACTION GENDARMERIE 2002