Séance du 29 octobre 1998







M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Hyest, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Hyest. La langue évolue ; des mots naguère utilisés ne le sont plus aujourd'hui ou le sont dans un autre sens. Il n'aurait pas été envisageable, vingt ans plus tôt, de dire : madame la ministre. Maintenant, cela est admis et entraîne des conséquences sur toutes les professions.
M. Guy Allouche. Mme la sénatrice !
M. Jean-Jacques Hyest. Après tout, le sens de certains mots a évolué et ces mots ne sont plus compris de la même façon.
Bien entendu, mon groupe votera ce projet de loi tel qu'il a été amendé, dans la ligne indiquée hier à la fois dans la discussion générale et lors du vote du projet de loi organique. Ces deux projets vont de pair.
Sur le projet de loi ordinaire concernant les incompatiblités entre mandats, de réels problèmes existent. Nous devons les examiner mais, contrairement à ce qu'affirment certains, nous ne devons pas bouleverser le statut de l'écu local par le biais de quelques petits amendements. Une réforme d'ensemble est nécessaire.
De même, nous ne devons pas attendre trente ans pour faire évoluer la décentralisation. On s'aperçoit - je le disais hier soir - que le parti des décentralisateurs est en fait bien affaibli. De nombreux éléments tendent à une recentralisation. J'en veux pour preuve, par exemple, la réforme de la taxe professionnelle qui risque d'aboutir à une recentralisation.
C'est pourquoi le texte proposé par la commission des lois, assorti des amendements que nous avons adoptés, me paraît être une pierre d'attente pour continer le débat. Je pense que cette manière de dialoguer avec le Gouvernement et l'Assemblée nationale est la bonnne.
Aussi le groupe de l'Union centriste votera-t-il ce texte tel qu'il est issu de nos travaux.
M. le président. La parole est à M. Gélard.
M. Patrice Gélard. Je ne répéterai pas ce que j'ai dit hier à propos de la loi organique, car ce serait inutile et cela nous ferait perdre du temps. Je voudrais simplement aborder deux points.
Le premier, c'est que le Sénat a fait, à mon avis, un travail tout à fait remarquable sur le texte qui nous est parvenu de l'Assemblée nationale. Je tiens à féliciter notre rapporteur pour la qualité de son rapport et pour la pertinence des amendements déposés. Il a su débarrasser le texte des nombreuses scories qui le défiguraient, et nous en sommes revenus à l'essentiel.
Le second point que je voudrais souligner, c'est que l'on ne peut pas passer brutalement d'une situation à une autre et qu'il faut recourir à des phases successives. La loi de 1985 était une première étape, la loi de 1998 en sera une seconde, mais on ne peut pas brutalement changer le système si l'ensemble de l'édifice n'est pas revu. Je reprendrai sur ce point ce qu'a dit mon collègue Jean-Jacques Hyest à propos des deux préalables qui ne sont pas respectés pour l'instant.
Enfin, j'attirerai l'attention de M. le ministre sur le fait que des ouvertures ont été consenties au cours de ce débat et qu'il sera donc sans doute possible de trouver sereinement un terrain d'entente entre les deux assemblées à l'issue de la navette. (Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. le président. La parole est à M. Duffour.
M. Michel Duffour. Nous voterons contre le texte tel qu'il est issu des travaux du Sénat. Cette position reflète la discussion que nous avons eue hier.
Nous avons bien entendu nos collègues qui soulignent que le débat va maintenant se poursuivre, et je loue leur esprit d'ouverture, car nous éprouvions des craintes. Mais je crois qu'il reste beaucoup d'efforts à faire pour rapprocher les points de vue, car nous pensons qu'il faut évidemment sauvegarder l'esprit de ce projet de loi sur la limitation du cumul des mandats, qui nous paraît être tout à fait primordiale.
Je voudrais simplement ajouter que nous avons évoqué à plusieurs reprises aujourd'hui le statut de l'élu. C'est une question tout à fait essentielle, et liée à ce projet de loi. Je pense que la situation peut être largement améliorée, et que nous devons tenter d'harmoniser les choses par le haut.
A ma grande satisfaction, un amendement qui avait été adopté en commission, l'amendement n° 39, a été retiré, bien qu'il ait été signé par les présidents des trois groupes de la majorité sénatoriale. Nous avions vu, dans cet amendement, une volonté de certains de nos collègues d'aller vers un rétrécissement du statut de l'élu lui-même, en proposant une interdiction professionnelle, au terme du deuxième mandat, pour les élus fonctionnaires, alors qu'il faut évidemment pointer tous les problèmes et aller de l'avant afin que, dans le cadre d'un non-cumul, les hommes politiques aient la possibilité d'accomplir au mieux leur tâche.
M. le président. La parole est à Mme Derycke. Mme Dinah Derycke. Bien évidemment, notre vote sera cohérent avec celui que nous avons émis hier.
Deux logiques se sont affrontées dans cet hémicycle : d'une part, il y a ceux qui veulent voir perdurer la possibilité de cumuler des mandats et, d'autre part, il y a ceux qui veulent mettre fin à ce que nos concitoyens considèrent comme des excès, des abus, et comme entraînant des dysfonctionnements non seulement de la vie parlementaire, mais également de la vie locale dans les communes, les conseils généraux et les conseils régionaux, c'est-à-dire un dysfonctionnement de la vie politique française.
Aujourd'hui, nos concitoyens ont une exigence, et celle-ci rejoint les intérêts de notre démocratie. C'est pourquoi, nous voterons contre ce projet de loi.
Bien entendu, le statut de l'élu est à revoir ; chacun en est convenu. Toutefois, ce statut ne peut être revu qu'autant que la règle du non-cumul est acceptée. En effet, nos concitoyens ne comprendraient pas que les élus puissent continuer à cumuler des mandats tout en bénéficiant d'une amélioration de leur statut. En aucun cas nous ne pourrions faire passer l'idée qu'à la fois on peut continuer à cumuler des mandats et qu'il faut améliorer le statut de l'élu : l'amélioration du statut de l'élu est le corollaire de l'abandon du cumul des mandats.
Nous voterons donc contre ce projet de loi. C'est une exigence, non seulement de nos concitoyens, mais également de notre démocratie telle que nous voulons la faire vivre dans notre pays. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
M. Guy Allouche. Le groupe socialiste vote contre.
M. Michel Duffour. Le groupe communiste républicain et citoyen également.

(Le projet de loi est adopté.) M. le président. Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix heures trente-cinq, est reprise à quinze heures cinq, sous la présidence de M. Christian Poncelet.)