Séance du 24 novembre 1998
M. le président. « Art. 29. _ A. _ Le code général des impôts est ainsi modifié :
« I. _ 1. a) Le b du 1° de l'article 1467 est abrogé à compter des impositions établies au titre de 2003 ;
« b) Il est inséré un article 1467 bis ainsi rédigé :
« Art. 1467 bis . _ Pour les impositions établies au titre de 1999 à 2002, la fraction imposable des salaires et rémunérations visés au b du 1° de l'article 1467 est réduite, par redevable et par commune, de :
« 100 000 F au titre de 1999 ;
« 300 000 F au titre de 2000 ;
« 1 000 000 F au titre de 2001 ;
« et 6 000 000 F au titre de 2002. »
« 2. Au premier alinéa de l'article 1473, les mots : "et des salaires versés au personnel" sont supprimés.
« 3. A l'article 1474 A, les mots : "et le montant des salaires versés au personnel affecté à ces véhicules sont répartis" sont remplacés par les mots : "est répartie" ».
« 4. L'article 1478 est ainsi modifié :
« a) Au deuxième alinéa du II, les mots : "les salaires dus au titre de cette même année ou" sont supprimés ;
« b) Au troisième alinéa du II, les mots : "aux salariés et" sont supprimés ;
« c) Au III, les mots : "les salaires et"sont supprimés.
« 5. Les dispositions du 2, du 3 et du 4 s'appliquent à compter des impositions établies au titre de 2003.
« II. _ L'article 1466 A est ainsi modifié :
« 1. Au I, il est inséré un quatrième alinéa ainsi rédigé :
« La limite de base nette imposable visée au premier alinéa est fixée à 1 050 000 F au titre de 1999 et, sous réserve de l'actualisation annuelle en fonction de la variation des prix, à 990 000 F au titre de 2000, 910 000 F au titre de 2001, 815 000 F au titre de 2002 et 745 000 F à compter de 2003. »
« 2. Au I quater :
« 1° Il est inséré un troisième alinéa ainsi rédigé :
« La limite de base nette imposable visée au deuxième alinéa est fixée à 2 835 000 F au titre de 1999 et, sous réserve de l'actualisation annuelle en fonction de la variation des prix, à 2 675 000 F au titre de 2000, 2 455 000 F au titre de 2001, 2 205 000 F au titre de 2002 et 2 010 000 F à compter de 2003. » ;
« 2° Les troisième, quatrième et cinquième alinéas deviennent les quatrième, cinquième et sixième alinéas ; au cinquième alinéa, les mots : "troisième alinéa" sont remplacés par les mots : "quatrième alinéa".
« III. _ Au premier alinéa de l'article 1383 B, les mots : "aux premier et troisième alinéas du I quater de l'article 1466 A" sont remplacés par les mots : "aux premier et quatrième alinéas du I quater de l'article 1466 A".
« IV. _ Le I de l'article 1466 B est ainsi modifié :
« 1. Au premier alinéa, les mots : "des dispositions du troisième alinéa" sont remplacés par les mots : "des dispositions du quatrième alinéa".
« 2. Il est inséré un deuxième alinéa ainsi rédigé :
« La limite de base nette imposable visée au premier alinéa est fixée à 2 835 000 F au titre de 1999 et, sous réserve de l'actualisation annuelle en fonction de la variation des prix, à 2 675 000 F au titre de 2000, 2 455 000 F au titre de 2001, 2 205 000 F au titre de 2002 et 2 010 000 F à compter de 2003. »
« 3. Les deuxième, troisième, quatrième, cinquième et sixième alinéas deviennent les troisième, quatrième, cinquième, sixième et septième alinéas.
« V. _ 1. L'article 1469 A bis est ainsi modifié :
« a) Au premier alinéa, les mots : "au titre de 1988 et des années suivantes" sont remplacés par les mots : "au titre de 1999" et les mots : "de la moitié du montant" par les mots : "de 25 % du montant" ;
« b) Il est ajouté un troisième alinéa ainsi rédigé :
« Cette réduction est supprimée à compter des impositions établies au titre de 2000. »
« 2. Le a du 2° du II de l'article 1635 sexies est ainsi modifié :
« a) Au début du deuxième alinéa, les mots : "A compter de 1995" sont remplacés par les mots : "Au titre de 1999" et les mots : "de la moitié du montant" sont remplacés par les mots : "de 25 % du montant".
« b) Après le deuxième alinéa, il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Cette réduction est supprimée à compter des impositions établies au titre de 2000. »
« 3. Le 3° du II de l'article 1635 sexies du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« A compter de 1999, la valeur ajoutée retenue pour l'application de l'article 1647 E fait l'objet d'un abattement de 70 % de son montant ; ».
« VI. _ L'article 1636 B octies est ainsi modifié :
« 1. Le III est ainsi rédigé :
« III. _ Pour l'application du II, les recettes s'entendent de celles figurant dans les rôles généraux ainsi que de la compensation prévue au C de l'article de la loi de finances pour 1999 (n°... du...) versée au titre de l'année précédente en contrepartie de la suppression de la part des salaires et rémunérations visés au b du 1° de l'article 1467 dans la base d'imposition à la taxe professionnelle. »
« 2. Il est inséré un IV bis ainsi rédigé :
« IV bis. _ Pour l'application du IV, les recettes afférentes à la taxe professionnelle sont majorées du montant de la compensation prévue pour l'année d'imposition au C de l'article de la loi de finances pour 1999 précitée en contrepartie de la suppression de la part des salaires et rémunérations visés au b du 1° de l'article 1467 dans la base d'imposition à la taxe professionnelle. »
« VII. _ L'article 1647 B sexies est ainsi modifié :
« 1. Au premier alinéa du I, les mots : "plafonnée à 3,5 %" sont remplacés par les mots : "plafonnée en fonction".
« 2. Le deuxième alinéa du I est ainsi rédigé :
« Pour les impositions établies au titre de 1999 et des années suivantes, le taux de plafonnement est fixé à 3,5 % pour les entreprises dont le chiffre d'affaires de l'année au titre de laquelle le plafonnement est demandé est inférieur à 140 millions de francs, à 3,8 % pour celles dont le chiffre d'affaires est compris entre 140 millions de francs et 500 millions de francs et à 4 % pour celles dont le chiffre d'affaires excède cette dernière limite. »
« 3. Le 2 du II est ainsi modifié :
« a) Au deuxième alinéa, après les mots : "à l'exception des loyers afférents aux biens pris en crédit-bail", sont insérés les mots : "ou des loyers afférents à des biens, visés au a du 1° de l'article 1467, pris en location par un assujetti à la taxe professionnelle pour une durée de plus de six mois ou des redevances résultant d'une convention de location-gérance," ;
« b) Le troisième alinéa est supprimé ;
« c) Le quatrième alinéa est ainsi rédigé :
« Lorsqu'en application du deuxième alinéa, sont exclus des consommations de biens et services en provenance de tiers les loyers ou redevances que verse le preneur, les amortissements visés au 2° du 1 de l'article 39, autres que ceux comptabilisés en amortissements dérogatoires et se rapportant aux biens loués, sont déduits de la valeur ajoutée du bailleur. »
« VIII. _ Le I de l'article 1647 E est ainsi modifié :
« 1. Au premier alinéa, les mots : "Au titre de 1996 et des années suivantes" sont remplacés par les mots : "Au titre des années 1996 à 1998,".
« 2. Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« Le taux visé au premier alinéa est porté à 1,5 %. Par exception, il est fixé à 1 % au titre de 1999 et à 1,2 % au titre de 2000. »
« IX. _ Le II bis de l'article 1648 D est ainsi rédigé :
« II bis. _ Les taux de 1 %, de 0,75 % et de 0,5 % visés au II sont majorés et respectivement portés à :
« _ 2,35 %, 1,75 % et 1,15 % pour les impositions établies au titre de 1999 et 2000 ;
« _ 2,7 %, 2 % et 1,3 % pour les impositions établies au titre de 2001 ;
« _ 3,05 %, 2,25 % et 1,45 % pour les impositions établies au titre de 2002 ;
« _ 3,4 %, 2,5 % et 1,6 % pour les impositions établies au titre de 2003 et des années suivantes. »
« B. _ I. _ La diminution des bases de taxe professionnelle résultant du I du A n'est pas prise en compte :
« 1. Pour l'application de l'article 1647 bis du code général des impôts ;
« 2. Pour l'application des 2° et 3° du II de l'article 1648 B du même code.
« II. _ Le produit de la majoration mentionnée au IX du A est reversé au budget général de l'Etat par le Fonds national de péréquation de la taxe professionnelle.
« C. _ I. _ Il est institué un prélèvement sur les recettes de l'Etat destiné à compenser, à chaque collectivité locale, groupement de communes doté d'une fiscalité propre ou fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle, la perte de recettes résultant de la suppression progressive, prévue aux a et b du 1 du I du A, de la part des salaires et rémunérations visés au b du 1° de l'article 1467 du code général des impôts comprise dans la base d'imposition à la taxe professionnelle.
« II. _ Au titre des années 1999 à 2003, la compensation prévue au I est égale, chaque année, au produit obtenu en multipliant la perte de base des établissements existant au 1er janvier 1999 résultant, pour chaque collectivité, groupement ou fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle, de l'abattement annuel visé à l'article 1467 bis du code général des impôts par le taux de taxe professionnelle applicable pour 1998 à la collectivité, au groupement ou au fonds.
« La perte de base visée au premier alinéa est égale, pour chaque collectivité, groupement ou fonds départemental, à la différence entre, d'une part, les bases nettes imposables au titre de 1999, telles qu'elles auraient été fixées en tenant compte de la part des salaires et rémunérations visés au b du 1° de l'article 1467 du code général des impôts et, d'autre part, les bases nettes imposables au titre de 1999 après, soit l'application de l'abattement annuel visé à l'article 1467 bis dudit code, soit la suppression totale de ladite part des salaires et rémunérations, prévue au a du 1 du I du A.
« Pour l'application du deuxième alinéa, les bases nettes imposables s'entendent après application de l'abattement prévu à l'article 1472 A bis du code général des impôts.
« Pour les communes qui, en 1998, appartenaient à un groupement sans fiscalité propre, le taux voté par la commune est majoré du taux appliqué au profit du groupement pour 1998.
« Pour les groupements qui perçoivent pour la première fois à compter de 1999 la taxe professionnelle au lieu et place des communes, en application des dispositions de l'article 1609 nonies C ou du II de l'article 1609 quinquies C du code général des impôts, la compensation est calculée en retenant le taux moyen pondéré des communes membres du groupement constaté pour 1998 éventuellement majoré dans les conditions prévues au quatrième alinéa.
« Au titre des années 2000 à 2003, la compensation est actualisée, chaque année, compte tenu du taux d'évolution de la dotation globale de fonctionnement entre 1999 et l'année de versement.
« A compter de 2004, cette compensation est intégrée à la dotation globale de fonctionnement et évolue comme cette dernière.
« III. _ La compensation prévue au I fait l'objet de versements mensuels.
« D. _ Avant le 1er octobre 1999, le Gouvernement remettra au Parlement un rapport évaluant les premiers résultats pour l'emploi de la réforme de la taxe professionnelle prévue par le présent article et fournissant des simulations sur les conséquences de celle-ci pour les entreprises, les collectivités locales et l'Etat au titre de chacune des années 2000 à 2003. »
Sur l'article, la parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le Gouvernement avait annoncé, au moment de la discussion du projet de loi de finances pour 1998, l'ouverture de quatre grands chantiers parmi lesquels celui qui concerne la fiscalité locale.
Aujourd'hui, à travers cet article, le Gouvernement nous propose de réformer la taxe professionnelle.
J'en profite pour vous faire part, monsieur le secrétaire d'Etat, de la satisfaction du groupe communiste républicain et citoyen de voir repousser au printemps la réforme des bases cadastrales. Cette sage décision permettra à tous les acteurs locaux d'apprécier, grâce à la simulation, les effets de la réforme proposée. Nous y reviendrons.
La réforme de la taxe professionnelle, quant à elle, constitue une modification majeure car, à l'évidence, elle va structurer le paysage de la fiscalité des collectivités territoriales au cours des prochaines années.
Dès que le Gouvernement a proposé la réforme de la taxe professionnelle, nous avons travaillé avec lui. Nous avons eu plusieurs rencontres pour discuter de cette réforme importante.
Lors du débat d'orientation budgétaire, en juin, les parlementaires communistes ont indiqué qu'ils étaient d'accord pour que la part salariale incluse dans la base d'imposition de la taxe professionnelle disparaisse progressivement. Pourquoi ? Tout simplement parce que l'ensemble de la sphère de production et des services dans notre pays a changé, que la forme de la concurrence en France, en Europe et dans le monde s'est transformée et que la fraction « salaires » de la taxe professionnelle pouvait être pénalisante pour l'embauche et nuire à la nécessaire augmentation des salaires dans notre pays.
La suppression de la fraction « salaires » peut-elle effectivement favoriser l'emploi ? On peut, dans ce domaine, s'en remettre au civisme des chefs d'entreprise, comme à l'action des salariés dans les entreprises.
En travaillant avec le Gouvernement sur cette réforme, nous avons ouvert une piste de réflexion en nous demandant s'il n'était pas possible de recomposer l'assiette de la taxe professionnelle en y incluant les actifs financiers, car nous pensons que l'on ne peut appréhender la réforme de la taxe professionnelle sans essayer de dégager des ressources supplémentaires pour les collectivités locales.
En effet, c'est bien cela qui pose problème. La réforme proposée ne permet ni de dégager des ressources nouvelles, ni d'agir sur la péréquation.
Alors que l'on assiste à un étouffement des finances locales, certaines communes - c'est le cas de Stains en Seine-Saint-Denis et de Saint-Martin-d'Hères dans l'Isère - vivent des situations financières que je qualifierai de dramatiques.
Certaines collectivités se trouvent devant un choix fatidique : augmenter les impôts locaux ou réduire les services qu'elles rendent à la population.
Quels que soient leurs choix, ils auront des répercussions directes sur les habitants de ces collectivités.
A-t-on le droit - je pose volontairement la question de manière très solennelle - de laisser les collectivités seules face à ces difficultés quand on sait que les collectivités territoriales, en particulier les communes, ont un rôle, de plus en plus important dans toute politique, à jouer pour remédier aux graves problèmes auxquels sont confrontées les populations : le chômage, la précarité, la misère, les difficultés à se loger, à se soigner, l'insécurité ? Selon nous, il est hors de question de laisser les collectivités face aux difficultés.
C'est la raison pour laquelle nous avons travaillé très sérieusement la question de l'intégration des actifs financiers dans les bases de la taxe professionnelle.
Inclure les actifs financiers dans la base d'imposition de la taxe professionnelle contribuerait, nous semble-t-il, à réguler les comportements spéculatifs et les marchés financiers, à dégager des ressources nouvelles à l'échelon national permettant de développer des mécanismes de solidarité entre les collectivités locales au moyen de péréquations audacieuses.
Nous reviendrons plus précisément sur cette question lors de la discussion des amendements.
Nous souhaitons, monsieur le secrétaire d'Etat, que la discussion puisse se poursuivre afin que, ensemble, nous trouvions des solutions permettant aux collectivités territoriales d'assumer pleinement toutes leurs prérogatives.
M. le président. La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Monsieur le secrétaire d'Etat, envisagez-vous de réactiver la commission consultative des charges transférées ? Je rappelle que cette commission veille à ce que les transferts de charges soient possibles, c'est-à-dire qu'ils soient accompagnés de transferts financiers. Les lois Defferre de décentralisation, simples et correspondant à la culture française, répartissaient les responsabilités entre les communes, les départements et les régions.
Cette répartition était assez judicieuse ; mais ce qui a fait défaut à cette conception nouvelle des responsabilités, c'est la rigueur financière, et donc les transferts financiers qui n'ont pas suivi. Il est vrai que la pratique n'a pas rejoint la théorie.
Non seulement le début d'application fut laborieux, mais, depuis quinze ans, de nouvelles aggravations se sont produites avec le concours actif de tous les gouvernements qui se sont succédé, avec - faut-il que je le répète ? - une pugnacité particulière s'agissant des gouvernements Balladur et Juppé. (Exclamations sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
Est-il normal que 72 % des investissements civils aient été réalisés par les collectivités territoriales alors qu'elles n'ont bénéficié que de 10 % de l'impôt global ?
Monsieur le secrétaire d'Etat, cessons ce schéma : décisions de l'Etat, application brutale de ces décisions par les collectivités et paiement par les citoyens qui voient leurs impôts locaux croître de façon inquiétante.
Vous amorcez, monsieur le secrétaire d'Etat, une position nouvelle, qui peut marquer une rupture avec un processus injuste et inefficace, voire malsain.
Le projet de loi prévoit que les collectivités bénéficieront d'une enveloppe progressant en fonction du taux de l'inflation, majorée d'une partie du taux de croissance du produit intérieur brut. On a envie de crier : « Bravo ! » En effet, l'expérience du pacte de stabilité est là : pour ne pas avoir fait fructifier 7 milliards de francs de fruits de la croissance, les collectivités locales ont perdu 19 milliards de francs.
Monsieur le secrétaire d'Etat, malgré tout, le changement que vous nous proposez manque, selon nous, d'ambition et de détermination. Vous proposez une indexation progressive sur la croissance : 15 % en 1999 - taux porté à 20 % par l'Assemblée nationale - 25 % en l'an 2000 et 33 % en 2001. Votre objectif se trouve affaibli par un taux insuffisant.
Vous justifiez cette attitude par une bonne santé des communes. Je vous crois un peu trop optimiste, monsieur le secrétaire d'Etat. Leur bonne santé est apparente, mais le mal est profond. Cette bonne santé est le fruit des sacrifices qui résultent d'un taux de fiscalité devenu insupportable, d'une réduction du niveau des investissements, d'un gel de salaires - complétés en 1999 en application des accords Zuccarelli - et d'une renégociation des taux d'intérêt qui, bien entendu, ne pourra pas jouer indéfiniment.
Monsieur le secrétaire d'Etat, les marges de manoeuvre ont disparu, et les expédients n'existent plus. Par ailleurs, comme les habitants de nos communes souhaitent une pause fiscale, les collectivités locales ne peuvent pas se contenter des taux d'intégration que vous proposez. Ne faudrait-il pas atteindre dès 1999 une intégration à hauteur de 50 % du taux de croissance du PIB ? Cette mesure se révélerait financièrement et politiquement profitable, et serait vraiment efficace. Elle serait accueillie de façon positive par les élus, quelle que soit leur appartenance politique, et ce serait donc une bonne mesure de consensus, à laquelle, vous pouvez m'en croire, nous nous associerions dans l'allégresse.
M. le président. La parole est à M. Arthuis.
M. Jean Arthuis. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je n'interviendrai pas sur le fond de la réforme, car Yves Fréville le fera mieux que moi.
Je voudrais dire, à titre personnel, les doutes que j'éprouve quant à l'efficacité du dispositif. Il faut se réjouir qu'une réforme soit entreprise mais, là encore, méfions-nous : les meilleures intentions peuvent être trahies, nous l'avons vu à propos de la TVA sur les terrains à bâtir. S'il existe des fruits de la croissance, pourquoi ne pas les affecter à l'allégement des charges sociales, notamment de celles qui pèsent sur les salaires les plus modestes ?
Cela étant dit, monsieur le secrétaire d'Etat, j'avais attiré votre attention, au printemps dernier, lors de l'examen du projet de loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier, sur certains risques de délocalisation d'assiette de taxe professionnelle.
Je vous avais présenté le constat établi dans mon département, où certains acteurs du secteur du travail intérimaire avaient déplacé leur assiette de taxe professionnelle, choisissant la commune du département où le taux était le plus faible. Cette discussion venait au moment où vous tentiez d'endiguer les phénomènes de délocalisation d'immatriculations automobiles.
Vous aviez répondu ici même de la manière suivante : « L'inquiétude des collectivités locales que vous avez exprimée est parfaitement légitime et l'appel que vous adressez au Gouvernement en la matière est pleinement entendu. Il est clair en effet qu'existe un risque de délocalisation de l'élément salarial en matière de taxe professionnelle. »
Vous ajoutiez : « Je puis également, le cas échéant, m'engager à publier une instruction d'application, qui interviendrait dans des délais très brefs, afin de lever les ambiguïtés ou les inconnues qui pourraient subsister. Dans ces conditions, une disposition législative que je vous proposais ne me semble pas s'imposer à cet égard et je vous demande donc, monsieur Arthuis, de bien vouloir retirer votre amendement afin de ne pas compliquer à l'excès le code général des impôts qui, déjà, est suffisamment complexe » - et c'est bien vrai ! Alors, j'avais retiré mon amendement.
Vos services m'avaient laissé entendre que vous disposiez d'une jurisprudence suffisamment stabilisée pour engager des redressements, ce qui, à ma connaissance, n'a pas été fait. Je n'ai pas vu votre circulaire et je m'étonne que, aujourd'hui, votre collègue ministre du travail et de l'emploi stigmatise le travail intérimaire alors que vous lui laissez des ballons d'oxygène tout à fait appréciables.
Je souhaiterais, monsieur le secrétaire d'Etat, que, au nom de la cohérence, vous nous indiquiez les mesures que vous entendez prendre pour ne pas laisser le travail intérimaire occuper, avec une présomption de complicité, des espaces d'abus de droit.
J'avais compris que le Gouvernement n'avait pas besoin de textes pour réprimer de telles attitudes et qu'il engagerait, en conséquence, des redressements, ce qui, sauf erreur de ma part, est resté à l'état d'intention.
Tel est le rappel que je souhaitais faire devant vous au moment où s'engage une discussion portant réforme de la taxe professionnelle.
M. le président. La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, voilà une réforme très sympathique : on baisse l'impôt, on accroît l'emploi, on compense les ressources perdues par les collectivités locales, et on avantage même les PME. Rien de mieux !
Je crois cependant qu'il faut aller un peu plus loin et essayer de décrypter cette réforme, qui est extrêmement complexe.
Complexe, elle l'est d'abord sur le plan financier ; je ne m'y attarderai pas, sinon pour dire que cette réforme génère certes 13 milliards de francs d'économies brutes d'impôts, mais seulement 7 milliards de francs nets. Encore me permettrai-je, monsieur le secrétaire d'Etat, d'ajouter que les entreprises devront payer l'année suivante plus d'impôt sur les sociétés ou plus d'impôt sur le revenu, ce qui réduira encore ces 7 milliards de francs.
Complexe, elle l'est surtout sur le plan fiscal, car la taxe professionnelle aujourd'hui a une double assiette : une assiette locale qui repose sur le travail - bien entendu ! - les salaires et les outillages, et une assiette nationale qui est la valeur ajoutée. Or c'est précisément de cette contradiction entre ces deux assiettes que viendra tout le mal.
Dans ces conditions, je poserai trois questions en relevant trois failles dans votre dispositif.
La première faille est la suivante : allez-vous supprimer réellement l'imposition de tous les salaires ? Les professions libérales, qui sont imposées sur 10 % de leurs recettes lorsqu'elles ont moins de cinq salariés, ne bénéficient d'aucune suppression, alors qu'elles s'apparentent à de petites entreprises ! Mais là n'est pas l'essentiel.
L'essentiel, c'est que, pour les entreprises qui réalisent plus de 50 millions de francs de chiffre d'affaires, vous allez reprendre d'une main ce que vous donnez de l'autre : vous allez naturellement supprimer en quelques années la part sur les salaires, mais vous allez reprendre, en instituant un plancher de la cotisation minimale sur la valeur ajoutée au taux de 1,5 %, ce que vous leur avez donné pour partie. En effet, la valeur ajoutée comprend comme élément essentiel - 60 % en moyenne - les salaires ; de ce fait, vous allez créer, de surcroît, un effet de seuil et vous n'inciterez naturellement pas une entreprise à croître car, dès lors qu'elle dépassera le seuil de 50 millions de francs de chiffre d'affaires, elle sera surimposée au titre de la valeur ajoutée.
Par ailleurs, les collectivités locales les plus raisonnables en matière de pression fiscale verront leurs entreprises pénalisées, car celles des entreprises qui auront à supporter ce plancher de valeur ajoutée seront celles qui auraient eu moins à payer si l'on n'avait pas institué ce plancher.
Est-il donc certain que vous supprimerez toute imposition sur les salaires ? Je ne le pense pas.
Deuxième faille, allez-vous, avec une assiette réduite, agir sur l'emploi ? A ce sujet, M. Fourcade a tenu des propos très justes lors de la discussion générale. L'assiette de la taxe professionnelle comprend en effet, naturellement, à côté des salaires, le capital technique, et il faut essayer de trouver une certaine neutralité entre les deux.
Tout le monde s'accorde pour dire que les bases qui ont augmenté le plus et qui représentent actuellement 70 % du total, c'est le capital. Effectivement, lorsqu'on veut mettre des personnes au travail, on ne les met pas devant des brouettes, mais dans des bulldozers - je pense au secteur du bâtiment - et, si vous réduisez l'assiette sur les salaires mais que, dans le même temps, vous imposez plus les machines, vous allez freiner l'emploi des ouvriers qui pourraient utiliser ces machines.
C'est là le danger de votre réforme : vous réduisez l'assiette de la taxe professionnelle en la restreignant aux seules machines et, ce faisant, vous la rendez beaucoup plus sensible à tous les mouvements d'évolution de l'économie locale et vous augmentez les risques.
La troisième question que l'on doit se poser face à votre réforme - c'est la plus grave - est la suivante : allez-vous maintenir le lien absolument indispensable entre les collectivités locales et les entreprises implantées sur leur territoire ?
Pourquoi une collectivité locale perçoit-elle actuellement la taxe professionnelle ? C'est d'abord pour donner à ces entreprises les moyens d'accueillir leurs personnels et de bénéficier des infrastructures qui leur permettront de se développer. Mais, si c'est uniquement pour accueillir des entreprises n'employant pas de main-d'oeuvre, je suis bien certain que nombre de collectivités locales hésiteront à sauter le pas.
Ce fait essentiel a une conséquence que la commission des finances a bien perçue : votre dispositif, parce qu'il repose non pas sur la technique du dégrèvement mais sur celle de la compensation, crée un nouveau principal fictif. La compensation que recevra la collectivité locale est en effet figée lors du changement de base et une collectivité locale qui verra se développer l'emploi dans ses entreprises n'en tirera aucun profit.
Il ne s'agit donc pas simplement, mes chers collègues, d'un problème d'indexation ; si tel était le cas, on pourrait toujours le résoudre ou le modifier ; mais, lorsqu'un principal fictif figera la situation, quel avantage une collectivité locale aura-t-elle à attirer une entreprise ? Quel bénéfice retirera-t-elle, sur le plan fiscal, de l'accueil de nouveaux salariés ?
C'est ce lien essentiel que vous supprimez, et le plus grave, monsieur le secrétaire d'Etat, c'est que vous pénalisez d'abord les villes où la part salariale dans les bases est la plus importante.
M. le président. Veuillez conclure, monsieur Fréville !
M. Yves Fréville. Vous créez donc une nationalisation rampante de la taxe professionnelle, et c'est ce contre quoi la majorité sénatoriale doit s'élever. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. Monsieur le secrétaire d'Etat, votre intention est louable. Vous voulez réduire le coût du travail, et donc favoriser l'embauche, ce qui ne peut que recueillir les applaudissements de toute l'assemblée. Vous favorisez sans doute objectivement les petites et moyennes entreprises, qui sont créatrices d'emplois. C'est une innovation intéressante dans une politique gouvernementale.
Bref, et même si l'on peut s'interroger sur l'efficacité du dispositif, l'annonce de cette réforme ne pouvait qu'intéresser la Haute Assemblée. Je dis bien : « même si l'on peut s'interroger sur l'efficacité du dispositif », parce que j'ai pris connaissance des simulations et j'ai fait les comptes : 25 milliards à 30 milliards de francs seraient dégagés sur cinq ans et, à côté - mais les instituts se trompent souvent - 20 000, 50 000, voire 100 000 emplois seraient induits. Toutefois, même s'il s'agissait de 100 000 emplois, la note serait lourde !
Néanmoins, je le répète, je ne peux qu'approuver le principe de votre réforme. Là où les difficultés commencent et où les objections se multiplient, c'est cependant dans sa mise en oeuvre.
La première question, toute simple, pour la Haute Assemblée, est de savoir qui, à terme, supportera le coût financier de la réforme. S'agira-t-il du budget général ou de l'ensemble des collectivités territoriales ?
J'en viens tout de suite au noeud de notre débat, qui va sans doute retenir notre attention de longs moments.
Il existe deux façons de répondre à cette question fondamentale : soit vous choisissez le dégrèvement, et les collectivités locales ont l'assurance qu'elles ne seront pas, à terme, victimes d'un marché de dupes, soit vous proposez la compensation.
Or c'est bien la compensation que le Gouvernement a retenue. Il sait sans doute mieux que personne à quel point les systèmes de compensation ont enrichi l'histoire des nombreux marchés de dupes passés entre le Parlement et les divers gouvernements ! Au demeurant, les gouvernements se succédant par la grâce du suffrage universel - c'est légitime, et je n'ai pas, de ce point de vue, la même opinion que M. Sarkozy - ils peuvent alors revenir sur des assurances précédemment données.
Cela étant, sur la méthode même, je suis personnellement perplexe et, pour tout dire, plutôt hostile. Si l'on poursuit un instant encore la réflexion, on peut en effet se demander ce qui, à terme, est en jeu. N'est-ce pas le devenir de cette part de la taxe professionnelle, voire la taxe professionnelle elle-même, quand, au-delà de la période transitoire, elle sera englobée dans la DGF ?
Se pose alors une question de principe : vous nous demanderiez ainsi de passer, si j'ai bien compris votre cheminement, d'une recette, c'est-à-dire de ce qui est synonyme d'autonomie pour les collectivités locales, à une dotation, c'est-à-dire à une ressource locale soumise aux aléas et au bon vouloir de l'Etat. Et là, monsieur le secrétaire d'Etat, ce qui était chez moi perplexité deviendrait vraiment contrariété.
Quoi qu'il en soit, nous allons maintenant entamer le débat et, parmi les nombreux amendements qui ont été déposés, il en est qui m'intéressent. Je ne me sens en tout cas pas disposé, monsieur le secrétaire d'Etat, à voter telle quelle votre proposition, même si je reconnais que, sur son principe, elle emporte mon adhésion.
M. le président. La parole est à M. Angels.
M. Bernard Angels. La réforme de la taxe professionnelle est un vieux sujet. Depuis qu'elle a remplacé la patente, on veut la réformer. En effet, elle est, de loin, la principale responsable des écarts de ressources entre collectivités locales, et ses fondements sont unanimement jugés compliqués, injustes et inadaptés.
Pourtant, aucun gouvernement, jusqu'à présent, n'avait osé s'attaquer à une réforme globale : la remise à plat de la taxe professionnelle avait fait partie des objectifs de la loi sur l'aménagement du territoire de 1995 ; M. Juppé avait également souligné, le 23 mai 1995, dans sa déclaration de politique générale, la nécessité d'une réforme de la taxe professionnelle ; enfin, M. Lamassourre avait encore déclaré, en février 1996, à Europe 1, que le gouvernement auquel il appartenait proposerait « cette année même une réforme de la taxe professionnelle, en regardant comment on peut changer l'assiette ». Mais rien n'avait été fait.
Le Gouvernement vient enfin de mettre en place une profonde réforme.
Le choix opéré est le bon. C'était d'ailleurs celui de notre groupe. Il s'agit de supprimer la base salariale et, même si cela viendra dans un autre texte, d'encourager la perception de la taxe dans le cadre intercommunal.
La suppression de la base salariale en cinq ans, qui fait l'objet de cet article 29 du projet de loi, permettra de lever un handicap important qui pèse sur l'emploi et provoquera une réduction de charges substantielle pour les entreprises, essentiellement pour les PME et les secteurs à forte main-d'oeuvre. L'objectif est donc clairement l'emploi, et le Gouvernement prévoit que l'impact de cette mesure est un allégement du coût du travail de 4 % à 5 %, ainsi que 25 000 créations d'emplois l'an prochain et de 100 000 emplois à terme.
Je le répète, ce choix est le bon et nous soutenons le Gouvernement dans cette réforme.
Cette réforme entraînant des pertes importantes de recettes fiscales pour les collectivités locales, le Gouvernement a prévu une compensation, sur les modalités de laquelle je ne reviendrai pas en détail.
Monsieur le secrétaire d'Etat, nous comprenons les justifications de ce dispositif de compensation. Il apparaît équitable : en effet, une comparaison entre les évolutions de la base salaires et de l'indexation depuis 1992 le montre. Il apparaît également de nature à renforcer la péréquation des ressources de taxe professionnelle, qui est un des objectifs de notre groupe.
Néanmoins, il apparaît indispensable que les modalités de compensation soient indiscutables et de nature à compenser totalement les pertes de recettes pour les collectivités locales.
Or, il existe des interrogations.
D'abord, du fait des transferts de ressources a priori locales vers l'Etat : je pense à la hausse, au profit de l'Etat, des cotisations de péréquation et de cotisation minimale de taxe professionnelle.
Interrogation, ensuite, du fait de l'indexation sur la dotation globale de fonctionnement, qui pourrait être moindre que l'évolution de la masse salariale si celle-ci évolue positivement, comme nous l'espérons. Ainsi, une projection pour 1998 montre que la progression serait de 2,5 %, alors même que la masse salariale évoluerait de 4,2 %.
Interrogation encore du fait des interactions avec la loi sur l'intercommunalité.
Inquiétudes aussi sur l'instauration d'une nouvelle base fictive de remboursement, le précédent de la compensation de la suppression de 16 % des bases en 1987 ayant montré les inconvénients de ce procédé.
Interrogation, enfin, sur l'intégration, en 2004, de la compensation dans la DGF.
Voilà pourquoi, monsieur le secrétaire d'Etat, la compensation devrait, selon nous, être réexaminée pour les prochaines années, et ce sera l'objet de l'amendement de notre groupe.
M. le président. La parole est à M. Calmejane.
M. Robert Calmejane. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je veux marquer ici toute l'importance qu'a cet article du projet de loi de finances au regard de la vie des collectivités locales.
En effet, la taxe professionnelle abonde pour une part importante le budget des communes, et toute modification éventuelle de son produit a donc une incidence majeure.
Bien sûr, attaché, comme nombre de mes collègues, à donner à l'activité industrielle un signe fort de notre volonté de voir alléger ses charges, je ne peux que souscrire à la suppression de la part d'imposition calculée sur les salaires.
A notre époque, où tout doit favoriser l'emploi, cette taxation apparaissait évidemment obsolète. Mais, qu'un gouvernement socialiste, dont le réalisme économique est trop souvent absent, en vienne à proposer cette suppression, cela mérite notre attention !
Force est de craindre qu'il n'y ait anguille sous roche et que la mesure ne soit moins innocente et généreuse qu'il n'y paraît.
Nous devons bien être conscients qu'il s'agit de remplacer un pouvoir fiscal autonome, exercé par chacune des collectivités locales, par une subvention d'Etat. Et c'est là le piège :...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Exactement !
M. Robert Calmejane. ... une recentralisation rampante par le nerf de la guerre, l'argent.
Les collectivités locales ne sont pas correctement traitées et leurs intérêts ne sont pas préservés par la réforme proposée.
Qu'en sera-t-il, demain, si, sous la pression légitime des entreprises, on remet aussi en cause l'investissement dans le calcul de la taxe professionnelle ? Cela ne serait pas économiquement idiot, mais aboutirait à retirer aux maires la totalité de leur marge de décision en matière de fiscalité locale, tandis que le Gouvernement envisage de bouleverser arbitrairement les bases de la taxe d'habitation.
Qu'en sera-t-il, demain, des ressources des communes ? Comme ce projet de loi de finances en amorce la démarche, il est à craindre qu'une subvention d'Etat ne soit attribuée en compensation, subvention dont le montant sera décidé par l'Etat. La décentralisation est de nouveau bousculée par ceux qui, dans leurs discours, en chantent les louanges.
Il y a donc lieu, comme l'a fait la commission des finances du Sénat, de préférer au système de la compensation forfaitaire proposé par le projet de loi un dispositif de dégrèvement permettant le calcul de la compensation sur des bases réelles, restituant ainsi le fruit de leurs efforts aux collectivités les plus dynamiques.
Les communes ne peuvent être indéfiniment spoliées par l'Etat, champion des transferts de charges, et supporter en plus une érosion régulière de leurs recettes,
A ce mécanisme pernicieux s'ajoute d'ailleurs la mesure, incluse dans un amendement voté par l'Assemblée nationale, visant à amputer d'un quart le montant de la dotation de compensation pour les communes qui ne bénéficient pas de la dotation de solidarité urbaine. C'est là une double peine qui frappe certaines communes, et je connais, dans mon département de Seine-Saint-Denis, plusieurs villes qui, exclues déjà des dispositifs d'aide malgré une situation sociale préoccupante, se verraient maintenant pénalisées au niveau de leurs recettes de taxe professionnelle.
Non, l'arbitraire technocratique ne doit pas continuer à envahir notre vie publique ! Soyons donc, nous les élus, hommes de terrain, vigilants à la réalité économique et sociale et à l'autonomie politique de nos collectivités.
C'est pourquoi je vous demande, mes chers collègues, d'apporter votre soutien au dispositif de dégrèvement substitué par la commission des finances à cette dotation de compensation forfaitaire de la taxe professionnelle sur laquelle nous avons à nous prononcer. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod. Monsieur le secrétaire d'Etat, intervenant dans la discussion générale, je vous avais posé sur la compensation de la taxe professionnelle un certain nombre de questions extrêmement précises qui, toutes, bien entendu, appelaient en conclusion une préférence, que nous voyons poindre à présent, pour le système du dégrèvement par rapport au système de la compensation.
M. Christian Demuynck. Ils ne répondent jamais !
M. Paul Girod. A ma grande surprise - je n'ai pas pu être présent au moment de votre réponse - j'ai constaté que vous n'aviez répondu qu'à une seule de mes questions, et encore, permettez-moi de vous le dire, assez mal.
Vous avez répondu à la question que je vous avais posée sur la comparaison de l'indexation par rapport à l'évolution pour l'avenir, faisant valoir que, si l'on avait appliqué ce système dans les années 1993-1998, le résultat aurait été meilleur.
Je vous avais fait remarquer dans ma question que, comme par hasard, on prenait pour référence les années où la taxe professionnelle avait le moins évolué par rapport aux indexations de la dotation globale de fonctionnement, la DGF et que c'était totalement contradictoire avec la politique du Gouvernement, qui affiche sa volonté de voir monter la masse salariale de manière rapide dans les prochaines années.
Par conséquent, vous me permettrez de penser que votre réponse avait un aspect relativement insuffisant.
M. Christian Demuynck. Très insuffisant !
M. Paul Girod. Mais - je l'ai dit - je vous avais posé d'autres questions, et d'abord celle de l'analyse des cas extrêmes.
Il me semble connaître une commune - peut-être est-ce une théorie personnelle ! - dont les ressources sont à 70 % procurées par la taxe professionnelle, mais une taxe professionnelle composée à 60 % par des bases de référence main-d'oeuvre. Que vont devenir les finances de cette commune dans l'année qui vient, d'autant que je vois un certain nombre de contradictions dans la suite ?
Je tiens à rappeler que la loi sur le financement de la sécurité sociale prévoyait une évolution de la masse salariale totalement différente de l'indexation qui nous est proposée.
Je vous avais fait remarquer également qu'à partir de l'instant où l'évolution d'une partie - globalement 30 % - de la taxe professionnelle et d'une partie - 15 % globalement - des ressources des collectivités locales allaient être figées, il y aurait évidemment report des nécessités financières des collectivités locales sur les autres impôts et que vous n'échapperiez pas, monsieur le secrétaire d'Etat, en conséquence, à la demande pressante du déblocage du taux de taxe professionnelle, de façon que ce ne soient pas les ménages qui, en définitive, soient les victimes de l'évolution nécessaire des finances des collectivités locales.
A ce moment-là, trouverez-vous en face de vous des entreprises qui accepteront facilement de voir la taxe professionnelle déliée de ses liens avec les autres impôts et, par conséquent, de voir, en définitive, le « cadeau » dont vous vous vantez aujourd'hui en leur direction se réduire rapidement comme une peau de chagrin ?
M. Christian Demuynck. Très bien !
M. Paul Girod. Je vous avais également posé la question de la compatibilité de votre système avec la priorité donnée à l'intercommunalité.
Croyez-vous vraiment que la taxe professionnelle d'agglomération sera aussi attractive que vous le dites, ou que le Gouvernement le dit, ou que d'autres ministres du Gouvernement le disent, à partir du moment où elle sera amputée d'une bonne partie de son caractère évolutif ?
Croyez-vous vraiment que tout cela soit compatible avec l'aboutissement de la loi de 1992 sur les communautés de communes, en particulier en milieu rural où l'on est en train de créer les zones sur lesquelles vont s'implanter des entreprises, communautés de communes qui ne seront pas comprises dans les références du 1er janvier 1999 et qui, par conséquent, se trouveront privées - elles, sans compensation - de 30 % de leurs recettes potentielles au titre de la taxe professionnelle ?
Croyez-vous vraiment que ce soit là le moyen d'aboutir au développement de l'intercommunalité, et ce au plus grand bénéfice des collectivités territoriales ?
Je sais bien que le système qui consiste à refuser le dégrèvement, dégrèvement qui permettait de résoudre tous ces problèmes d'un trait de plume, résulte de la théorie constante du ministère de l'économie et des finances qui consiste à dire qu'il est hors de question de mettre les finances de l'Etat aux ordres des décisions des collectivités territoriales.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Coupable théorie !
M. Paul Girod. Quand on connaît le rapport des masses, l'argument est un peu faible, c'est le moins que l'on puisse dire.
De plus, monsieur le secrétaire d'Etat, on ne peut à la fois soutenir cet argument et dire, comme vous l'avez fait me semble-t-il dans votre réponse, qu'en définitive la situation des finances locales est bien meilleure qu'on ne le dit.
Si elle était si bonne que cela, et si bonne que veulent le croire les décideurs parisiens, il n'y aurait pas cet affolement général qui est actuellement en train de saisir les collectivités territoriales devant cette réforme.
Par ailleurs, vous ne pourriez pas non plus exprimer la crainte de voir les décisions des collectivités locales devenir dangereuses pour les finances de l'Etat. En effet, si la situation des finances locales était si bonne, il n'y aurait aucune difficulté, dans la mesure où aucune décision délicate ne serait imposée à l'Etat par des décisions des collectivités territoriales en matière d'imposition locale. Autrement dit, nous nageons en pleine contradiction et en pleine confusion.
C'est la raison pour laquelle, avec un certain nombre de mes amis, nous voterons sans état d'âme et sans difficulté en faveur du système de dégrèvement qui est proposé par la commission des finances et que, je l'espère, le bon sens imposera à tous, Gouvernement compris. (Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Philippe Marini, rapporteur général. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Fourcade.
M. Jean-Pierre Fourcade. Monsieur le secrétaire d'Etat, nous avons déjà débattu de ce sujet à plusieurs reprises devant des auditoires différents : ici, au cours de la discussion générale, devant le congrès de l'Association des maires de France et devant le comité des finances locales. Je ne reprendrai donc pas l'ensemble des arguments, d'autant que M. le rapporteur général, auquel je rends un hommage tout particulier, les a parfaitement résumés dans son rapport.
A mon sens, deux questions de fond se posent qui vont dominer les débats non seulement aujourd'hui mais également dans les années à venir.
La première question est la suivante : qui va y gagner ou y perdre dans cette réforme ? Aujourd'hui, on émet 180 milliards de francs de rôle de taxe professionnelle. Les collectivités locales en perçoivent une partie, les entreprises en paient une partie, plus petite, et l'Etat, qui, chacun le sait, est le premier contribuable, verse une partie de cette imposition aux collectivités locales, aux chambres de commerce, etc.
Le comité des finances locales a été intrigué par les cinq mesures compensatoires que vous avez ajoutées à la réforme, notamment la création du plancher par rapport à la valeur ajoutée, l'augmentation de la cotisation de péréquation, la suppression de la réduction de taxe professionnelle pour embauche et investissement, la REI, et la pérennisation du plafond en matière de valeur ajoutée.
Ces mesures vont avoir un effet important sur les entreprises et sur les collectivités locales. C'est pourquoi le comité des finances locales vous a demandé de nous fournir un tableau simple faisant apparaître la situation de départ, en 1998 - qui perd ? qui gagne ? - avec la déformation de cette situation au cours des années suivantes.
Ce tableau fera sans doute apparaître que la situation des collectivités locales sera à peu près stabilisée, que les entreprises paieront davantage et que l'Etat réduira sa contribution à cet impôt. C'est essentiel, car il faut, sur les cinq années, savoir comment évolueront les rapports entre l'Etat, les collectivités locales et les entreprises en ce domaine.
Jusqu'à présent, nous n'avons pas eu de réponse, mais je compte bien en avoir une dans quelque temps. En tout cas, il ne serait pas mauvais que nous l'ayons avant le vote final de la loi de finances.
J'en viens à ma seconde question de fond : cette réforme aura-t-elle un effet sur l'emploi ?
Monsieur le secrétaire d'Etat, je rends hommage à la fois à l'habileté de la présentation du Gouvernement et au choix des modalités pour l'exonération. Il est en effet tout à fait ingénieux de commencer par les petites entreprises, car ce sont elles qui souffrent le plus.
La méthode que vous avez choisie va dans le bon sens. Elle contribuera à rassurer tous ces entrepreneurs qui s'inquiètent, à l'heure actuelle, de la montée des charges sociales et fiscales, car, pour eux, hélas ! il y a imbrication, tout au moins psychologique et financière, entre charges sociales et charges fiscales.
La taxe professionnelle, dit-on, serait un handicap à l'emploi. L'économie française vient d'apporter la démonstration contraire, et Dieu sait si M. Strauss-Kahn s'en est glorifié à la tribune à l'ouverture de ce débat !
L'économie française a en effet créé depuis dix-huit mois beaucoup plus d'emplois nets que pendant toutes les périodes correspondantes, même au moment de la reprise des années 1988 à 1990. Trois cent mille emplois nets ont été créés sur une période de quatorze à quinze mois.
Ce chiffre est certainement le plus élevé que nous ayons jamais enregistré puisque le total des emplois marchands retrouve aujourd'hui le niveau qu'il avait atteint dans les années 1983 et 1984, ce qui ne s'était jamais produit. Si vraiment la taxe professionnelle était un handicap absolu à la création d'emplois, personne ne pourrait aujourd'hui se glorifier de ces chiffres.
Il faut être cohérent : on ne peut pas dire que la taxe professionnelle est un obstacle à la création d'emplois face à la réalité des chiffres.
Par ailleurs, comment peut-on affirmer que cette réforme va créer 50 000 emplois ? Mes chers collègues, personne ne sait combien d'emplois résulteront de cette mesure. En effet, la création d'emplois dépend non pas d'une logique mathématique ou comptable, mais de la conjoncture, de la vision qu'ont les entrepreneurs de l'évolution du marché, et des entraves ou des difficultés que la législation met à la création d'emplois.
Associer la réforme de la taxe professionnelle à la résurgence d'une nouvelle réglementation des licenciements et d'une nouvelle limitation de toutes les formes de travail temporaire me paraît beaucoup plus néfaste pour l'emploi que la taxe professionnelle elle-même.
La commission des finances nous propose de procéder par la voie du dégrèvement qui permettra de mesurer exactement les impacts et les conséquences de la réforme ; je me rallie volontiers à sa position.
Le Gouvernement doit s'engager à discuter chaque année, dans le cadre de ce processus, de l'évolution de cette réforme. Je crains, pour ma part, que les mesures accessoires qui ont été introduites dans le texte ne viennent contrarier pour nombre d'entreprises dans nombre de communes les effets bénéfiques de la réforme. Si, dans quelques mois, l'année prochaine ou dans deux ans, un certain nombre d'entreprises constatent qu'elles ont une réduction sur la part « salaires » mais une majoration de leur imposition compte tenu des mesures accessoires, l'effet psychologique favorable que vous avez obtenu lors de l'annonce de la réforme disparaîtra. Une fois de plus, on dira que l'on n'est pas capable de réformer sérieusement notre fiscalité ! (Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, nous sommes au coeur d'un débat très important. Je remercie tous ceux qui sont intervenus sur l'article pour exprimer l'espoir de voir la mesure proposée par le Gouvernement aller dans le sens de l'emploi, notamment M. Angels. Mais certains ont dit leurs inquiétudes.
Je vais donc essayer d'expliciter la proposition du Gouvernement et d'apporter une réponse à certaines interrogations.
Je ne ferai pas l'historique des nombreuses déclarations tendant à dire que la taxe professionnelle est un impôt qui joue contre l'emploi. Cette thèse a été déjà longuement développée sur toutes les travées de toutes les assemblées, et l'on a entendu suffisamment d'artisans, de commerçants, de dirigeants d'entreprises petites, moyennes ou grandes et d'élus locaux affirmer cela.
Le fait que nous cherchions à prendre une mesure en faveur de l'emploi me semble tout à fait raisonnable.
M. Calmejane, que j'ai écouté avec grande attention, a estimé que l'idée est bonne mais que, venant d'un gouvernement de gauche, elle recouvre quelque chose de suspect.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il n'a pas dit cela ! C'est un procès d'intention ! Il est trop objectif pour dire cela !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je n'ai pas du tout considéré que cette remarque était désobligeante. Elle me donne simplement l'occasion de rappeler que la décentralisation, dont heureusement chacun se réclame maintenant, a été mise en place en 1982, et je crois très profondément, au nom du Gouvernement, que l'Etat et les collectivités locales sont non pas face à face, mais plutôt côte à côte, dans une même bataille pour l'intérêt général.
En effet, les collectivités locales investissent et apportent leur soutien à la croissance. On a ainsi évoqué une progression de 3,8 %, en 1998, des investissements des collectivités locales, et il s'agit de quelque chose de très important pour notre économie.
L'Etat et les collectivités locales sont également côte à côte pour développer les emplois-jeunes. Ainsi, 17 000 contrats de ce type ont été signés par des maires.
L'Etat et les collectivités locales sont enfin côte à côte dans la mise en oeuvre de la politique de la ville, en vue de panser un certain nombre de plaies urbaines.
Peut-être l'inquiétude exprimée par certains à l'égard des intentions de l'Etat vient-elle du souvenir du pacte de stabilité, lequel, je le rappelle, a couvert la période 1996-1998. C'était un pacte unilatéral - ce qui est étrange pour un pacte - alors que le Gouvernement s'est efforcé à la concertation en matière de réforme des relations entre l'Etat et les collectivités locales et de refonte de la fiscalité. Un certain nombre d'entre vous, mesdames, messieurs les sénateurs, ont participé à cette démarche.
Il est clair que le Gouvernement est entièrement maître de ses propositions, mais il également clair qu'il a écouté avant de les formuler. Certains, comme Mme Beaudeau, ont estimé qu'un taux de 15 % d'intéressement, si je puis dire, des collectivités locales à l'expansion est insuffisant.
Je rappellerai deux choses.
La première, c'est que ce taux était de zéro entre 1996 et 1998.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il n'y avait pas de croissance !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Si, il y en avait tout de même un peu !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Pas beaucoup !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. En première lecture, l'Assemblée nationale a donc porté ce taux de 15 % à 20 %. Vous pouvez, mesdames, messieurs les sénateurs, en remercier la majorité plurielle qui a poussé en ce sens.
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est encore insuffisant ! Peut mieux faire !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Second rappel - et là je me fais l'écho de l'observation fort pertinente de M. Foucaud - s'agissant du système de compensation, défini en 1987, de l'allégement de 16 % des bases, système démoli - il n'y a pas d'autre expression - par le pacte de stabilité, le Gouvernement s'est efforcé, dans les relations entre l'Etat et les collectivités locales, de faire en sorte que les communes les plus fragiles, les communes éligibles à la dotation de solidarité urbaine, la DSU, ou les communes bourgs-centres qui supportent des charges particulières en milieu rural n'aient pas à subir de baisse de DCTP, la dotation de compensation de la taxe professionnelle.
Le Gouvernement, avec cette proposition, souhaite donc sincèrement favoriser l'emploi - je répondrai à M. Fourcade dans un instant - sans que les collectivités locales n'enregistrent le moindre préjudice financier.
A ce propos, un orateur a fait état d'une vision parisienne de la situation des collectivités locales. Paris, l'Etat, Bercy, dit-on parfois, aurait une certaine vision de la situation.
Je me référerai à une source d'informations « SGDG », si je puis dire, sans garantie du Gouvernement, à savoir une enquête récente de l'association des maires de France réalisée en relation avec les caisses d'épargne d'où il ressort que 80 % des communes estiment qu'elles sont dans une situation financière très satisfaisante ou satisfaisante.
Je n'en tire aucun argument. Je veux simplement rendre par là hommage à la bonne gestion des communes de France. Il ne faut pas faire l'amalgame de la situation moyenne des communes françaises avec la situation d'un certain nombre d'entre elles - M. Foucaud a parlé de Stains - qui ont des charges particulières avec un potentiel financier particulièrement faible.
La question du choix entre compensation ou dégrèvement est, à l'évidence, la question fondamentale.
Le Gouvernement propose un système - on peut le critiquer - très simple.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Simple ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Oui, puisqu'il consiste à prendre les dernières données connues, c'est-à-dire les taux de 1998 et les bases de 1999, et, à partir de cette référence, à apporter une compensation aux collectivités locales.
Monsieur Girod, une collectivité locale qui perçoit une taxe professionnelle importante composée de beaucoup de parts de main-d'oeuvre bénéficiera d'une base importante à partir de laquelle sera calculée la compensation. La situation initiale n'a pas d'effet particulier sur l'évolution de la compensation.
M. Paul Girod. Mais c'est ensuite qu'elles seront pénalisées !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. A partir de cette base, le Gouvernement - je dois rendre justice au principal auteur qu'est le ministre de l'intérieur Jean-Pierre Chevènement - a retenu la modalité d'indexation la plus favorable, c'est-à-dire celle de la dotation générale de fonctionnement, à savoir la croissance plus les fameux 50 % que Mme Beaudeau souhaitait tout à l'heure pour l'ensemble de l'enveloppe normée, et cela pendant les cinq années de la période transitoire.
Au terme de la période transitoire - 2004 - la compensation vient s'ajouter, se fondre dans la dotation globale de fonctionnement.
On ne peut pas avoir, me semble-t-il, de dispositif plus simple, plus prévisible que celui qui est proposé par le Gouvernement.
Ce dispositif, il est vrai, introduit un mécanisme implicite de péréquation. Cela veut dire qu'une commune qui, par malheur, perdrait de la taxe professionnelle, parce qu'une grande entreprise fermerait ses portes ou parce qu'elle réduirait le nombre de ses salariés, verrait sa compensation stabilisée.
Au détriment de qui, me demanderez-vous ? D'autres communes qui connaissent une progression très rapide de leurs investissements et de la main-d'oeuvre percevront, effectivement, avec le dispositif proposé par le Gouvernement, un peu moins. Mais - c'est un point important, messieurs Girod et Fréville - dans la mesure où il reste les deux tiers de l'assiette les plus dynamiques, c'est-à-dire la base investissements - le gouvernement auquel j'appartiens ne cédera pas aux sirènes des entreprises qui souhaitent la suppression de la taxe professionnelle ; je peux vous donner toutes garanties en la matière - les communes en situation d'emploi dynamique bénéficieront du dynamisme de cette base qui est la plus importante.
Je peux vous apporter une dernière preuve pour ce qui concerne la compensation et que M. Girod a rappelée avec une grande honnêteté intellectuelle : si l'on avait appliqué ce dispositif au cours des cinq années passées, de 1992 à 1997 - pourquoi les cinq années passées ? Parce que le dispositif proposé va monter en régime sur les cinq années à venir - qu'aurions-nous constaté ? La base salaires progresse de 10,5 % sur cinq ans, la DGF de 12 % - elle est donc plus avantageuse - et la base investissements de 30 %. Cette base est maintenue pour les collectivités locales parce qu'elle est la plus importante et la plus dynamique. En outre, le Gouvernement tient à respecter l'autonomie fiscale des collectivités locales, autonomie qui existe en France mais pas à l'étranger. Mais le Gouvernement n'a pas pour ambition d'aligner, dans tous les domaines, la France sur ses voisins.
M. Paul Girod. Me permettez-vous de vous interrompre, monsieur le secrétaire d'Etat ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je vous en prie, monsieur le sénateur.
M. le président. La parole est à M. Paul Girod, avec l'autorisation de M. le secrétaire d'Etat.
M. Paul Girod. Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez salué l'honnêteté avec laquelle j'ai rappelé les propos que vous avez tenus sur l'indexation. Honnêteté pour honnêteté, il faut aussi souligner que c'est la plus mauvaise période qui puisse être prise comme référence.
M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Monsieur le sénateur, je me suis référé aux cinq années passées.
M. Paul Girod. C'est la période où la masse salariale a le moins bien évolué et où la DGF a relativement mieux évoluée, mais la loi de financement de la sécurité sociale prévoit le contraire pour l'avenir.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. L'année 1999, en tout cas, ne pose pas de problème, puisqu'il y aura compensation au franc le franc.
Sans vouloir trop prolonger mon propos, monsieur le président, je voudrais répondre à un certain nombre de questions précises qui m'ont été posées.
Mme Beaudeau m'a demandé ce que devenait la commission consultative des charges transférées. Cette commission, qui a été créée en 1983, se réunit en principe tous les ans. Elle ne s'est toutefois pas réunie depuis 1996. J'en ignore d'ailleurs la raison. Je vais m'en entretenir avec mon collègue de l'intérieur. Il y a matière à débat.
Vous savez cependant que M. Chevènement, lors d'une réunion de concertation à laquelle un certain nombre d'entre vous ont participé, a déclaré que, pour répondre au souci des collectivités locales, serait mis en place un groupe de travail sur les normes qui viennent s'ajouter et qui imposent de nouvelles contraintes dans le domaine de l'assainissement, mais aussi dans d'autres domaines, telle la sécurité des installations sportives, par exemple.
Le ministre de l'intérieur a promis que ce groupe se réunirait et il en sera évidemment ainsi.
Monsieur Arthuis, vous m'avez interrogé sur l'instruction annoncée lors du débat que nous avions eu, et je vous remercie d'en conserver la mémoire, lors de l'examen du projet de loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier. J'ai eu l'occasion de faire la même réponse que celle que je vous avais déjà apportée en répondant à une question écrite de M. Revol publiée au Journal officiel du 1er juin : l'instruction annoncée sera publiée avant la fin de l'année.
Monsieur Fréville, vous soutenez que les professions libérales qui n'ont pas de salariés ne seront pas concernées. C'est un fait, c'est une mesure pour l'emploi...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il n'y a pas d'emploi chez les professionnels libéraux ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. ... salarié.
Monsieur le rapporteur général, si les professions libérales ont des salariés, elles bénéficieront, je pense, de la disposition...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Non ! C'est d'ailleurs le sujet de notre discussion.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. C'est un point sur lequel nous aurons donc certainement l'occasion de revenir.
Monsieur Fréville, en ce qui concerne le lien entre les collectivités locales et les entreprises, je crois avoir déjà répondu : les collectivités locales garderont la majeure partie, la part la plus dynamique, celle qui est assise sur l'investissement.
M. Angels a, je crois, tout à fait justifié la réforme proposée. Il s'est inquiété de la compensation et je pense lui avoir déjà répondu.
Quant à l'intercommunalité, question soulevée non seulement par M. Angels mais aussi par d'autres orateurs, lorsque des communes vont décider de se regrouper pour constituer un ensemble à taxe professionnelle unique, elles apporteront chacune leur compensation. A partir du moment où reste la part la plus dynamique de la taxe professionnelle, c'est-à-dire la part assise sur l'investissement, aucun frein n'empêche, au contraire, de développer l'intercommunalité.
J'en reviens au dégrèvement, car je n'ai pas abordé la question des formalités paperassières.
Si l'on adoptait la procédure du dégrèvement, et je sens que certains d'entre vous y sont favorables, il faudrait que les entreprises déclarent chaque année leurs effectifs salariés sans que cela ait la moindre utilité pour elles.
Le Gouvernement, qui a supprimé quinze millions de formulaires, monsieur Paul Girod, ne voudrait pas imposer aux entreprises de remplir des papiers qui ne leur seraient d'aucun bénéfice puisqu'ils serviraient uniquement à calculer ce qu'aurait été la taxe professionnelle si la réforme n'avait pas eu lieu.
M. Paul Girod. Votre argument n'est pas à la hauteur du débat !
M. Michel Mercier. C'est un peu faible !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Cet argument est un peu faible, mais il a le mérite d'être tout à fait concret. Or, nous cherchons tous à simplifier les formalités.
Je terminerai en répondant à M. Fourcade.
Qui gagne ? qui perd ? Il est clair qu'à partir du moment où l'Etat enregistre, en 1999, un coût brut de près de 12 milliards de francs et une récupération de « seulement » 5 milliards de francs, le coût net est de 7 milliards de francs, qui représente un investissement collectif au service de l'emploi. Qui va y gagner ? C'est l'emploi.
Monsieur Fourcade, vous avez déjà constaté, je pense, que le Gouvernement y est en partie impliqué, mais je n'aurai pas l'outrecuidance de dire que les 300 000 emplois créés par les entreprises depuis un an résultent uniquement de la politique économique. Mais peut-être le fait d'avoir mis l'accent sur la demande intérieure et sur le bâtiment n'y est-il pas étranger ! Et ce sont deux fois plus de créations d'emplois par les entreprises que dans les années soixante, trois fois plus que durant les années soixante-dix et six fois plus que durant les années quatre-vingt.
Vous me dites que 300 000 emplois, cela suffit. Je n'ai pas tout à fait le même sentiment que vous, monsieur Fourcade, et si, grâce à une mesure en faveur de l'emploi, on passe de 300 000 à 350 000 emplois, je pense que nous serons tout à fait d'accord pour dire que cela vaut la peine de prendre le risque d'une belle réforme de la taxe professionnelle. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. Sur l'article 29, je suis tout d'abord saisi de cinq amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° I-26, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose :
A. - De rédiger comme suit le paragraphe I du A de l'article 29 :
« I. - Il est inséré un article 1467 bis ainsi rédigé :
« Art. 1467 bis. - Pour les impositions établies au titre de 1999 à 2002, les redevables sont dégrevés d'office de la taxe professionnelle afférente à la fraction des salaires et rémunérations visés au b du 1° de l'article 1467 comprise dans les bases d'imposition à hauteur de :
« 100 000 francs de bases imposables, par redevable et par commune, au titre de 1999 ;
« 300 000 francs de bases imposables, par redevable et par commune, au titre de 2000 ;
« 1 000 000 francs de bases imposables, par redevable et par commune, au titre de 2001 ;
« et 6 000 000 francs de bases imposables, par redevable et par commune, au titre de 2002.
« Pour les impositions établies au titre de 2003 et des années suivantes, les redevables sont dégrevés d'office de la taxe professionnelle afférente à la fraction des salaires et rémunérations visés au b du 1° de l'article 1467 comprise dans les bases d'imposition. »
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant des dispositions du A ci-dessus, de compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
«... - Les pertes de recettes résultant pour l'Etat de la mise en place d'un dégrèvement des bases de la taxe professionnelle assises sur les salaires sont compensées, à due concurrence, par la majoration des droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° I-203, MM. Oudin, Besse, Braun, Cazalet, Chaumont, Delong, Gaillard, Haenel, Joyandet, Ostermann et Trégouët proposent :
A. - Après le a du 1 du I du A de l'article 29, d'insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« ...) Le 2° de l'article 1467 du code général des impôts est ainsi rédigé :
« 2° Dans le cas des titulaires de bénéfices non commerciaux, des agents d'affaires et intermédiaires de commerce, employant moins de cinq salariés, le neuvième des recettes en 1999, le huitième en 2000, le septième en 2001, le sixième en 2002 et le cinquième à partir de 2003, ainsi que la valeur locative des seules immobilisations passibles des taxes foncières sur les propriétés bâties et non bâties et dont le contribuable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle pendant la période de référence définie au a du 1°. »
B. - Pour compenser les pertes de recettes résultant du A ci-dessus, de compléter in fine l'article 29 par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... 1. Le prélèvement institué au C de l'article 29 de la loi de finances pour 1999 est majoré à due concurrence.
« 2. Les pertes de recettes résultant pour l'Etat de l'extension aux établissements relevant des BNC du bénéfice de la taxe professionnelle sont compensées par l'augmentation à due concurrence des droits de consommation prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° I-120 rectifié, Mme Beaudeau, MM. Loridant, Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent :
I. - Dans le premier alinéa du texte proposé par le b du 1 du I du A de l'article 29 pour l'article 1467 bis à insérer dans le code général des impôts, de remplacer les mots : "est réduité" par les mots : "est abattue" ;
II. - De compléter l'article 29 par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - La perte de recettes due au dégrèvement d'office résultant de la réduction progressive de la part salariale de la taxe professionnelle est compensée à due concurrence par le relèvement du taux prévu à l'article 219 du code général des impôts. »
Par amendement n° I-67, M. Fréville propose :
I. - De compléter le texte présenté par le b du 1 du I du A de l'article 29 pour l'article 1467 bis du code général des impôts par cinq alinéas ainsi rédigés :
« La fraction imposable des recettes visée au 2° de l'article 1467 est réduite de moitié par redevable et par commune, et au plus de :
« 50 000 francs au titre de 1999 ;
« 150 000 francs au titre de 2000 ;
« 500 000 francs au titre de 2001 ;
« 3 000 000 francs au titre de 2002. »
II. - Pour compenser les pertes de recettes résultant du I ci-dessus, de compléter le C par un paragraphe additionnel :
« ... La perte de recettes résultant pour chaque collectivité locale, groupement de communes doté d'une fiscalité propre ou fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle de la réduction progressive de la part des recettes comprise dans la base d'imposition à la taxe professionnelle est compensée par un prélèvement sur les recetes de l'Etat. »
III. - Les pertes de recettes pour l'Etat résultat du II ci-dessus sont compensées à due concurrence par une majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Par amendement n° I-121, Mme Beaudeau, MM. Loridant, Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de supprimer le 2, le 3, le 4 et le 5 du paragraphe I du A de l'article 29.
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l'amendement n° I-26.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous en arrivons à une question tout à fait essentielle de notre discussion : quelle est la formule choisie en ce qui concerne les conséquences financières sur les budgets locaux de la réforme de la taxe professionnelle ?
L'amendement que j'ai l'honneur de vous présenter est l'amendement « dégrèvement ». Plusieurs de nos collègues se sont déjà exprimés sur ce principe et le comité des finances locales a récemment pris très largement position en faveur du dégrèvement.
Avant d'en venir à l'exposé rapide des raisons pour lesquelles il nous semble nécessaire de choisir le dégrèvement, je souhaite rappeler, monsieur le secrétaire d'Etat, que la réforme que vous préconisez est d'une incroyable complexité. Nous avons donc tâché de fouiller ce domaine et de comprendre.
Tout d'abord, nous avons essayé de comprendre les évaluations financières que vous donnez.
Vous parlez d'un solde net de 7 milliards de francs à la charge du budget de l'Etat. Il y aurait beaucoup à dire à ce propos.
En effet, chacune des mesures d'accompagnement de l'exonération de la part salaires dans la base taxe professionnelle est une mesure à laquelle devrait correspondre un chiffrage précis, un chiffrage mesure par mesure.
Qu'il s'agisse de la suppression de la réduction de taxe professionnelle pour embauche et investissement, de l'intégration des loyers dans la valeur ajoutée, de la pérennisation des taux de plafonnement de la cotisation de taxe professionnelle en fonction de la valeur ajoutée, de la très forte augmentation du taux de la cotisation minimale de taxe professionnelle et de l'accroissement progressif des taux de la cotisation de péréquation - ce sont là, mes chers collègues, les cinq mesures d'accompagnement - chacune de ces mesures devrait être précisément chiffrée, notamment la deuxième.
Nous n'avons pas disposé des moyens contradictoires de discuter de ce chiffrage, mais je ne voudrais pas lancer un long débat sur ce thème.
Je veux simplement souligner que, vue du côté des entreprises, cette réforme, qui a suscité beaucoup d'espoirs, est une réforme dont l'impact apparaît bien aléatoire, comme en témoignent les simulations que nous avons pu faire les uns et les autres et dont certaines figurent dans le rapport établi au nom de la commission des finances, notamment à partir de la page 319.
Très concrètement, nous avons choisi des entreprises en activité, opérant dans des secteurs d'activité précis et nous avons calculé, en fonction des éléments de base, le résultat au terme des années 1, 2, 3 et 4. Nous nous sommes efforcés, en d'autres termes, d'estimer autant que possible l'impact sur l'économie et sur l'emploi de votre réforme.
Si cette réforme répond sans doute à une préoccupation qui est ancienne et très largement partagée dans le milieu des entreprises, il faut conclure, monsieur le secrétaire d'Etat, des examens qui ont été conduits par la commission des finances que les choses ne sont pas aussi simples et, j'allais dire, aussi manichéennes que vous les présentez.
Vous donnez à croire aux milieux économiques qu'il s'agirait, par l'exonération de la part salariale de la taxe professionnelle, de consentir des diminutions significatives de charges vraiment décisives pour l'emploi.
Compte tenu des travaux qui ont été effectués, permettez-moi, monsieur le secrétaire d'Etat, d'en douter. J'en doute très fortement car votre réforme contient un certain nombre d'aspects se contrariant les uns les autres. C'est bien compréhensible d'ailleurs, car la complexité de la matière ne permet guère de contenter tout le monde.
Il n'en demeure pas moins que je crains que, dans un an, ceux qui ont appelé la réforme de leurs voeux et qui l'ont vue venir avec un a priori favorable ne soient bien déçus lorsqu'ils examineront leurs comptes de résultats et les charges effectives qu'ils auront à financer au terme d'une année déterminée.
Vu du côté des bénéficiaires de la taxe professionnelle, des budgets locaux, pourquoi faut-il se diriger vers le dégrèvement ? Les arguments essentiels en ce sens sont au nombre de quatre.
En premier lieu, le dégrèvement, c'est la compensation au franc le franc qui évitera aux collectivités territoriales, à partir de 2004, de subir la menace que représente la fusion de la compensation dans la dotation globale de fonctionnement. En effet, à partir de là - notre collègue M. Calmejane avait totalement raison - c'est la perte de l'autonomie fiscale et de l'autonomie locale tout court.
A terme, pour 2004, la menace, c'est l'inclusion de la compensation, sa dilution, son absorption par la dotation globale de fonctionnement. Et c'est bien d'abord contre cela que nous nous battons, monsieur le secrétaire d'Etat. Nous sommes en effet très nombreux à nous opposer à cette issue.
En deuxième lieu, le dégrèvement maintient aux collectivités locales leur capacité à voter les taux sur l'ensemble de l'assiette de la taxe professionnelle, garantissant ainsi leur autonomie.
Si l'on n'accepte pas le dégrèvement, les taux que nous voterons ne s'appliqueront plus qu'aux éléments autres que les salaires. Il en résultera naturellement des distorsions, et les décisions que nous serons amenés à prendre décourageront peut-être les investissements et la prise de décisions qui pourraient être favorables au développement économique de nos collectivités.
En troisième lieu, mes chers collègues, le dégrèvement remédie aux effets pervers de la réforme sur le seuil d'écrêtement des communes. C'est un point technique qui est largement développé dans le rapport et que je n'approfondis pas.
En quatrième lieu, le dégrèvement ne modifie pas les potentiels fiscaux de nos collectivités. C'est également un point important quand on apprécie les conditions de répartition d'un certain nombre de dotations ou d'avantages ou de transferts financiers. (M. Michel Charasse s'exclame.) Le potentiel fiscal, pour une collectivité territoriale, c'est quelque chose qui lui appartient, cela fait partie de son patrimoine, j'allais dire de sa personnalité. Et il n'y a pas lieu d'être privé d'un élément du patrimoine ou de la personnalité dont on dispose en vertu de la confiance que nous ont accordée nos électeurs.
Monsieur le secrétaire d'Etat, la commission des finances propose donc cet amendement n° I-26, qui nous semble particulièrement essentiel.
C'est une question de principe d'une importance telle que nous souhaitons que cet amendement soit soumis à un scrutin public.
M. Jacques Oudin. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Oudin, pour présenter l'amendement n° I-203.
M. Jacques Oudin. Cet amendement tend à réparer un oubli commis à l'occasion de la réforme de la taxe professionnelle proposée par le Gouvernement.
Il concerne la situation des petits établissements qui appartiennent au secteur des services, qui emploient moins de cinq salariés et qui sont inscrits au régime des bénéfices non commerciaux. De ce fait, ces établissements n'incluent pas les salariés dans le calcul de la taxe professionnelle ; ils n'y font figurer que les recettes. Ils ne seront donc pas en mesure de créer des emplois, alors qu'ils se trouvent dans une situation équivalente à celle des autres établissements.
En adoptant cet amendement, vous permettrez d'étendre à l'ensemble des professions libérales qui sont assujetties au régime des bénéfices non commerciaux et qui emploient moins de cinq salariés les bénéfices de la taxe professionnelle.
M. le président. La parole est à M. Loridant, pour défendre l'amendement n° I-120 rectifié.
M. Paul Loridant. Monsieur le président, permettez-moi, en présentant cet amendement n° I-120 rectifié, de défendre en même temps les amendements n°s I-121 et I-122 qui en découlent, tous trois ayant, dans l'esprit de leurs auteurs, une cohérence globale. Je ne reprendrai donc pas la parole ultérieurement sur ces deux derniers amendements.
Il s'agit de prévoir que la suppression progressive de la part salariale de la taxe professionnelle sera réalisée par le mécanisme de dégrèvement aux entreprises, et non pas, comme cela est prévu dans le projet de loi, par compensation aux collectivités territoriales.
Monsieur le secrétaire d'Etat, cette proposition a été demandée avec insistance par les élus locaux.
Effectivement, la compensation prévue à l'article 29 pose quelques difficultés.
En premier lieu, la plus grande, à notre sens, est qu'à terme la réforme de l'Etat prendra en charge 60 % de la taxe professionnelle qui est normalement acquittée par les entreprises. C'est donc plus de la moitié de cette taxe, acquittée normalement par les entreprises, qui va être supportée par le budget général et donc, en partie, par les ménages.
Il y a lieu de constater un certain transfert. Les entreprises seront mal placées pour dire que la taxe professionnelle est un poids insupportable !
Cette importante prise en charge de la taxe professionnelle par l'Etat pose, monsieur le secrétaire d'Etat, le problème de l'autonomie des collectivités territoriales, que d'autres avant moi ont évoqué dans leur intervention sur l'article 29, que ce soit M. Fréville, M. Fourcade ou M. le rapporteur général.
A ce stade de la discussion, sans vouloir paraître trop pédant ou trop solennel, je veux vous rappeler, monsieur le secrétaire d'Etat, que l'article 34 de la Constitution prévoit que « La loi détermine les principes fondamentaux (...) de la libre administration des collectivités locales, de leurs compétences et de leurs ressources » ; il s'agit d'un point essentiel de la partie de la Constitution de la Ve République qui définit le champ d'application de la loi.
Soyons clairs : retirer aux communes, aux départements et aux régions les choix et les marges de manoeuvre d'une part de leur fiscalité et de leurs moyens revient, pour partie, à leur ôter le choix de leur action.
Si l'on s'interroge sur la pertinence de cette mesure pour la politique de l'emploi, nous pouvons nous inquiéter du renforcement de la dépendance budgétaire des collectivités territoriales à l'égard de l'Etat. Les entreprises vont bénéficier d'allégements, mais on peut s'inquiéter aussi de l'évolution des ressources des collectivités territoriales !
Une telle dépendance va de plus en plus enfermer - là est notre crainte, monsieur le secrétaire d'Etat, nous vous le disons en toute franchise - les communes dans un carcan.
Le fait de soumettre ainsi, à l'avenir, les budgets des collectivités locales à la discrétion des gouvernements - nous aimons celui-ci, monsieur le secrétaire d'Etat, mais que seront ceux de demain ? (Murmures.) - remet en cause les principes de décentralisation, d'autonomie et de démocratisation de ces collectivités.
Monsieur le secrétaire d'Etat, en présentant de telles propositions dans le projet de loi, le Gouvernement - nous en sommes tous convaincus - intervient sur un terrain qui est délicat, qui est même difficile et qui a un aspect constitutionnel incontestable. Je ne doute pas un seul instant que le Conseil constitutionnel sera attentif à ce que soient préservées en tout état de cause la libre administration, les compétences et les ressources des collectivités territoriales.
Le système proposé par l'article 29 ne permet pas avec certitude de garantir aux collectivités des ressources pérennes.
Certes, pour 1999, monsieur le secrétaire d'Etat - nous faisons confiance encore une fois à ce gouvernement - nous reconnaissons que la compensation sera intégrale. Mais le problème qui se pose est celui de la pérennité de la compensation à croissance constante.
En 2003, je vous le rappelle, la perte de ressources pour les collectivités territoriales résultant de la suppression de la part salariale de la taxe professionnelle sera compensée par l'Etat et indexée sur l'évolution de la dotation globale de fonctionnement.
Or, nous connaissons tous ici les règles d'évolution des dotations d'Etat. Celles de la DGF sont certes plus favorables. Toutefois, nous n'ignorons pas le rôle de la dotation de compensation de la taxe professionnelle et, surtout, son évolution. Cette dotation qui, à l'origine, permettait de compenser aux collectivités territoriales l'abattement de 16 % accordé aux entreprises sur leurs investissements sert aujourd'hui uniquement de variable d'ajustement.
Cette année, nous constatons que la DCTP est en régression de 11,2 %, soit 470 millions de francs de moins !
Si la compensation de la part salariale suit la même évolution, vous comprendrez que le groupe communiste républicain et citoyen soit lui-même attentif à la méfiance qu'elle peut susciter chez les élus territoriaux, qui, par expérience, savent que ces mécanismes ne tiennent pas suffisamment compte de l'évolution fiscale, qui connaissent l'aptitude de l'Etat à changer parfois les règles du jeu et qui sont conscients que de telles évolutions peuvent entraîner des distorsions graves entre la réalité sur le terrain et la réalité concrète de la compensation.
Nous savons d'ores et déjà que la compensation proposée par l'Etat, indexée, comme la DGF, sur les prix et la moitié de la croissance, évoluera moins vite que la croissance spontanée de ce qu'auraient été les bases de la taxe professionnelle du fait des nouvelles implantations d'entreprises. A terme, nous n'en doutons pas un seul instant, le manque à gagner potentiel des bases de taxe professionnelle sera important.
De 1995 à 1998, les bases ont augmenté de 57,5 %, alors que le PIB a crû de 31,7 % ! Nous connaissons les arguments avancés pour nous convaincre, monsieur le secrétaire d'Etat.
Ce système, il est vrai, reste plus favorable aux collectivités territoriales sur le territoire desquelles interviennent des fermetures ou des départs d'entreprises.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Absolument !
M. Paul Loridant. En revanche, la perte de la part salaire sera totale sur les nouvelles bases de la taxe professionnelle, car seules les bases existantes en 1999 feront l'objet d'une compensation.
Cette réforme cristallise donc - j'insiste sur ce terme - la part des bases relatives aux salaires dans l'assiette de la taxe professionnelle.
Dans quelques années - je rejoins M. Fréville sur ce point - ces bases finiront par être fictives, puisqu'elles n'évolueront pas comme elles l'auraient fait suivant le processus de la réalité économique locale, c'est-à-dire en prenant en compte les évolutions réelles des entreprises qui se créent, qui recrutent, qui disparaissent ou qui s'installent dans les communes.
Ce sont là autant de raisons qui amènent le groupe communiste républicain et citoyen à retenir le mécanisme de dégrèvement plutôt que celui de la compensation. Tel est donc l'objet de cet amendement n° I-120 rectifié, ainsi que celui des amendements n°s I-121 et I-122.
Mes chers collègues, je vous demande de garder en tête ces éléments que je viens de vous donner à la suite des interventions des uns et des autres, afin que le Sénat veille, à l'avenir, à préserver les ressources des collectivités locales et leur autonomie.
Monsieur le secrétaire d'Etat, nous préférons le système du dégrèvement. En effet, si nous vous faisons confiance, l'expérience nous a montré que ce qu'a fait un gouvernement un autre peut le défaire. En procédant à un dégrèvement plutôt qu'à une compensation, vous garantirez réellement l'autonomie des collectivités locales ! (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur certaines travées socialistes et sur certaines travées de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Fréville, pour défendre l'amendement n° I-67.
M. Yves Fréville. Cet amendement n° I-67 a le même objet que l'amendement n° I-203 de notre collègue Jacques Oudin.
Nous vous posons les questions suivantes, monsieur le secrétaire d'Etat : s'agissant de la part salaires dans les bases, pourquoi la réduisez-vous d'un côté et la supprimez-vous de l'autre, pour les petites entreprises, et pourquoi ne le faites-vous pas pour les salaires incorporés dans les recettes des professions libérales assujetties aux bénéfices non commerciaux quand le nombre des salariés est inférieur à cinq ?
Il se pose un problème de logique, voire d'égalité des citoyens devant l'impôt ! Cet amendement n° I-67 vise à corriger cette insuffisance de votre dispositif.
Je ne connais pas, évidemment, la part des salaires dans les recettes des professions libérales. Je l'ai forfaitairement évaluée à 50 %, mais ce chiffre n'a naturellement qu'une valeur d'appel. L'essentiel est qu'il y ait égalité de traitement pour les bases salaires, que les entreprises soient assujetties aux 10 % sur les recettes ou à l'autre système de fixation des bases de la taxe professionnelle.
Je terminerai en disant que, de toute façon, ces baisses de taxe professionnelle rapporteront l'année suivante à l'Etat. En effet, chaque fois que nous réduisons l'impôt, vous augmentez le bénéfice imposable. Par conséquent, l'impôt sur le revenu, d'une part, l'impôt sur les sociétés, d'autre part, augmentent, ce qui n'a toujours pas été évalué.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Mais si !
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s I-203, I-120 rectifié, I-67 et I-121 ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission est évidemment tout à fait favorable à l'objectif poursuivi par l'amendement n° I-203 de M. Oudin et de ses collègues et par l'amendement n° I-67 de M. Fréville. Il s'agit en effet d'étendre le bénéfice de la réforme de la taxe professionnelle aux titulaires de bénéfices non commerciaux employant moins de cinq salariés, pour des raisons d'équité qui ont été fort justement exposées.
Toutefois, mes chers collègues, la commission des finances préférerait que son amendement n° I-27 rectifié, qui viendra en discussion dans un instant, fût adopté, pour une raison technique particulière : il prévoit en effet le mécanisme du dégrèvement, et non pas celui de la compensation. Ne serait-ce que pour cette seule raison, je souhaite que les auteurs des amendements n°s I-203 et I-67 se rallient à notre texte.
Quant aux amendements n°s I-120 rectifié et I-121 du groupe communiste républicain et citoyen, qui visent à instaurer un mécanisme de dégrèvement, ils seront bien entendu satisfaits par l'amendement n° I-26 de la commission des finances, que nous souhaitons voir adopté et pour lequel je demande au Sénat de s'exprimer par scrutin public.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s I-26, I-203, I-120 rectifié, I-67 et I-121 ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Avant de me prononcer sur les amendements en discussion, je ferai une remarque préliminaire.
Il est parfaitement louable que nous nous penchions ensemble sur la meilleure façon de compenser ou de dégrever. Dans ce débat, vous vous préoccupez, monsieur le rapporteur général, et avec vous d'autres membres de la Haute Assemblée, du sort des collectivités locales, mais ayons une pensée pour les 820 000 établissements productifs qui, dès l'année 1999, bénéficieront d'une diminution de la taxe professionnelle ! Celle-ci sera en moyenne de 35 %, atteignant 50 % pour les entreprises artisanales, du bâtiment ou des services, se limitant à 20 % pour l'industrie manufacturière.
Après avoir fait cette remarque, je répondrai à M. le rapporteur général à propos de son amendement n° I-26, qui prévoit de substituer le dégrèvement à la compensation.
Je voudrais d'abord vous rassurer, monsieur le rapporteur général : certes, il n'est pas possible d'établir un chiffrage s'agissant de la question de l'intégration des loyers, mais, pour le reste, nous avons fourni au rapporteur général de l'Assemblée nationale - et j'imagine qu'il en va de même pour le rapporteur général de la commission des finances du Sénat - un chiffrage détaillé, au titre de l'année 1999, pour chacune des mesures. Je ne comprends donc pas quelle peut être la source de votre inquiétude.
Vous avez évoqué le cas - et M. Fréville y est revenu - de certaines entreprises qui pourraient être perdantes avec le dispositif proposé par le Gouvernement. Il est en effet possible que certaines entreprises, qui sont actuellement imposables au taux minimal, qui est pour le moment de 0,35 % mais qui va être porté à 1 %, puis à 1,5 %, aient à supporter une certaine majoration dans la mesure où le relèvement du taux minimal pourrait alourdir leur cotisation d'un montant supérieur à l'allégement dont elles bénéficieraient au titre de la suppression de la part scolaire.
Je rappellerai que le comité des finances locales a longuement milité en faveur de l'instauration de cette taxe professionnelle minimale, qui a été mise en oeuvre en 1995. Il me semble donc normal que chacun, dans cette assemblée, accepte que les entreprises payent un minimum de taxe professionnelle. Je dirai à l'adresse de Mme Beaudeau, MM. Loridant et Foucaud qu'il s'agit essentiellement d'entreprises du secteur financier. Il n'y a donc pas là de véritable motif d'inquiétude.
Sur le dégrèvement, je ne reprendrai pas les arguments que j'ai déjà développés. Toutefois, il en est un dont vous avez fait état, monsieur le rapporteur général, sur lequel je voudrais revenir.
Vous dites, en effet : « Si l'on est dans un dispositif de dégrèvement, les collectivités locales garderont la maîtrise des taux. » Concrètement, qu'est-ce que cela signifie ?
Cela signifie que l'on pourrait se trouver dans une situation où l'Etat se verrait en quelque sorte obligé de rembourser l'équivalent de la part salariale correspondant à des variations de taux sur lesquels il n'aurait absolument aucune maîtrise. Il y a là une véritable difficulté.
Cela étant, le Gouvernement est hostile au principe du dégrèvement dans la mesure où il propose une compensation qui est juste, prévisible et qui - M. Loridant l'a reconnu - va apporter des garanties à certaines collectivités locales en difficulté sans peser trop considérablement sur celles où l'investissement se développe de façon dynamique.
J'en arrive à l'amendement n° I-203 de M. Oudin et à l'amendement n° I-67 de M. Fréville, portant sur les professions libérales.
Jusqu'à cinq salariés, les entreprises de ce secteur sont taxées en fonction de leurs recettes et non pas de leur masse salariale, et il est donc normal qu'elles ne bénéficient pas de la suppression d'une taxe sur les salaires qu'elles n'acquittent pas. Il est donc vrai que, jusqu'à cinq salariés, les entreprises qui sont assujetties aux bénéfices non commerciaux ne bénéficieront pas de la réforme. Toutefois, au-delà de cinq salariés, la réforme proposée par le Gouvernement sera entièrement applicable.
Les amendements n°s I-203 et I-67 doivent donc être repoussés pour ces raisons et parce que leur coût serait sensiblement élevé.
J'en viens aux amendements n°s I-120 rectifié et I-121, déposés par le groupe communiste républicain et citoyen et défendus par M. Loridant.
Vous avez invoqué la Constitution, monsieur le sénateur - chacun d'entre nous entend bien la respecter - et plus particulièrement, non pas l'article 34, mais l'article 72, relatif aux collectivités locales.
Dès lors que la part de l'Etat dans les ressources totales des communes va passer de 30 % à 36 %, je crois très sincèrement que le principe fondamental de l'autonomie fiscale des collectivités locales n'est pas remise en cause.
En second lieu, vous avez dit, et j'en terminerai là, que la proposition du Gouvernement « cristalliserait » la base salaires ; le terme est juste. Or nous avons observé que la part de la base salaires de la taxe professionnelle avait diminué par rapport à l'ensemble des bases de cet impôt d'année en année et pas seulement de 1993 à 1997. Cristalliser la base salaires reviendrait donc à arrêter la dégradation étalée sur une longue période, de la base salaires dans la valeur ajoutée.
De ce point de vue, la proposition du Gouvernement va dans le bon sens ; c'est pourquoi je pense que les amendements n°s I-120 rectifié et I-121 pourraient être retirés.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-26.
M. Michel Charasse. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse. C'est évidemment un amendement important puisqu'il touche au coeur non pas de la philosophie de la réforme mais de ses effets sur les finances locales.
Au fond, M. le rapporteur général nous propose d'adopter la situation idéale, qui est celle de la compensation au franc le franc, sans qu'on sache d'ailleurs si l'on sera gagnant ou perdant puisque tout dépend de la manière dont les bases évolueront. Or si la situation continue de se détériorer en ce qui concerne la part de la masse salariale dans le total de la taxe professionnelle, le dégrèvement serait une meilleure solution pour l'Etat. C'est une règle...
M. Michel Mercier. De responsabilité !
M. Michel Charasse. ... de bonne honnêteté. De toute façon, on a toujours, dans le passé, procédé par dégrèvement. La solution proposée par M. le rapporteur serait donc une bonne solution dans l'idéal.
Le problème, mes chers collègues, c'est qu'elle a été refusée par le Gouvernement dès qu'elle a été proposée, c'est-à-dire dès la réunion que nous avons eue à Bercy au mois de juillet, puis au comité des finances locales, enfin à l'Assemblée nationale, laquelle s'est ralliée à la position du Gouvernement.
L'amendement n° I-26 de la commission des finances affirme une position de principe claire, naturelle venant de la part de l'assemblée qui est chargé par la Constitution de représenter les collectivités locales, mais l'ennui est qu'il ne laisse aucune marge de manoeuvre politique pour la suite de la navette. En effet, si nous en faisons une question de principe, le Gouvernement fait quant à lui une question de principe de la compensation, c'est-à-dire de son refus du dégrèvement, et sa majorité qui l'a déjà soutenu une fois le soutiendra à l'Assemblée nationale une autre fois.
L'Assemblée nationale a tout de même manifesté son inquiétude d'une certaine manière en prévoyant, pour la fin de l'année 1999, le système étant voté, le dépôt d'un rapport d'étape destiné à dresser le bilan de la réforme, rapport d'étape qui apportera certainement des informations utiles, mais dont on ne tirera les conséquences que si le Gouvernement le veut bien puisque les parlementaires seront alors privés de toute possibilité de manoeuvre, ne serait-ce que parce que l'article 40 de la Constitution s'appliquera à un système verrouillé dès cette année.
C'est pourquoi j'aurais préféré, non par vanité d'auteur, le dispositif envisagé par le groupe socialiste, qui me paraît beaucoup plus utile pour engager une véritable discussion avec l'Assemblée nationale et le Gouvernement.
Nous proposons, d'abord, d'accepter la suppression en cinq ans de la part salariale. Après tout, cette taxe professionnelle a été tellement critiquée, la mesure proposée par le Gouvernement soulève tellement d'espérances dans le milieu des entreprises, mais aussi pour l'emploi sans doute, qu'il est difficile de s'y opposer. Il y a donc accord sur le principe.
Mais nous proposons, par nos amendements, de limiter le système à 1999, année de quasi-dégrèvement - donc on ne perd rien - en admettant toutes les mesures d'accompagnement concernant le REI, la cotisation minimale de valeur ajoutée, le fonds de péréquation. Parallèlement, pendant cette année 1999, nous chargeons une commission paritaire élus-Gouvernement de réfléchir sur les modalités de calcul non pas de la compensation ni du dégrèvement mais de l'indemnisation des collectivités locales à partir de l'an 2000.
Dans ce cas, mes chers collègues, vous le constatez, le Parlement ne se lie pas les mains au-delà de 1999 ; il se donne toute cette année pour réfléchir et se retrouver, au moment du vote du projet de loi de finances pour 2000, avec un dispositif résultant éventuellement des propositions de la commission dont nous suggérons la création, propositions dont le Gouvernement voudra ou non - on ne va pas se substituer à l'exécutif - mais qui nous permettront de savoir où nous allons.
C'est pourquoi, monsieur le président, mes amis et moi-même aurions souhaité, non par vanité d'auteurs mais par logique, que les amendements n° I-245 rectifié, I-247, I-248, I-249 et I-250, qui modifient l'article 29 en ne visant que l'année 1999, soient discutés par priorité.
Je n'ai pas voulu faire de rappel au règlement lorsque j'ai pris connaissance du classement des amendements. Mais la question est simple : ou l'on accepte de s'en tenir à 1999 en renvoyant l'examen à une commission, et on avisera en loi de finances pour 2000 - c'est notamment la position de l'association des maires de grandes villes de France ; ou l'on entre dans le système proposé par M. Marini, c'est-à-dire le dégrèvement total, en sachant bien que l'on sera désavoué par l'Assemblée nationale et que l'on n'aboutira à rien de plus pour les collectivités locales.
Telles sont les raisons pour lesquelles, quelle que soit la qualité de la réflexion de M. le rapporteur général, nous ne pouvons pas voter l'amendement n° I-26.
C'est aussi pourquoi, monsieur le président, je me permets de demander l'examen par priorité de nos amendements non pour « griller » le rapporteur général ni pour faire un effet de séance. (Exclamations sur diverses travées.)
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. C'est pour lui rendre service !
M. Michel Charasse. Attendez, messieurs ! Ou vous vous faites plaisir et vous adoptez le dégrèvement, et moi je vous dis que vous ne l'aurez pas ; ou vous adoptez un système qui nous va pour 1999, en repoussant la discussion en 1999 pour ce qui concerne les années suivantes. Cette dernière solution me paraît plus astucieuse, mais vous faites comme vous voulez !
Pour notre part, nous ne participerons pas à l'opération qui consiste à se faire plaisir pour rien. Par conséquent, nous ne voterons pas l'amendement n° I-26.
Si, en revanche, vous souhaitez discuter de notre système, et s'il paraît à la commission des finances techniquement mal bâti, la commission peut se réunir pendant cinq minutes pour le modifier.
Tels sont les motifs pour lesquels, en tout état de cause, le groupe socialiste ne votera pas l'amendement n° I-26 et pour lesquels il préférerait que l'on examine en priorité sa propre solution, qui serait, à son avis, une solution très astucieuse pour le Sénat.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur cette demande de priorité ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission n'y est pas favorable, monsieur le président.
Dans ce débat, sur le plan des principes, les positions sont désormais très claires : des arguments ont été échangés et des options décisives ont déjà été exprimées dans d'autres enceintes, notamment au sein du comité des finances locales et de l'association des maires de France.
Nous avons eu cette nuit, monsieur Charasse, un débat en quelque sorte prémonitoire à propos de particularités fiscales rencontrées dans une île de la Méditerranée : je proposais un délai et une commission, et vous m'avez expliqué que ce n'était pas la bonne méthode.
M. Michel Charasse. Parce que, là, on a déjà donné !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous avons donc trouvé une autre solution, d'ailleurs beaucoup plus claire, je le reconnais, quant à l'affirmation des principes de la République.
En ce qui concerne le dégrèvement, c'est, mutatis mutandis, un peu le même problème. A nos yeux, il est impératif d'adresser un message clair à toutes les collectivités territoriales.
Le Gouvernement nous explique qu'à partir d'une certaine date il va en quelque sorte geler la vie économique avec la prise en considération d'un principal fictif et qu'il va garantir le maintien de leurs ressources aux collectivités qui verront l'activité décliner sur leur territoire, tandis que celles qui la verront au contraire progresser ne percevront pas les bénéfices de cette croissance.
Voilà à peu près la signification du système de compensation tel qu'il nous est présenté par le Gouvernement.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. C'est une caricature !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Par rapport à cela, il nous faut adopter une position claire.
Tout à l'heure, concernant la TVA applicable aux terrains à bâtir, nous avons effectivement aidé le Gouvernement à rendre opérationnelle une mesure qui avait été annoncée à la hâte et qui n'était pas opérationnelle.
Mme Marie-Claude Beaudeau. C'était tout de même, dès le départ, une bonne mesure !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Mais nous avons trouvé une solution unanime, madame Beaudeau, et je m'en réjouis.
En tout cas, nous ne pouvons pas toujours tendre une main secourable au Gouvernement. Or c'est ce que vous nous incitez à faire, cher collègue Charasse, à travers les différents amendements, très astucieux, que vous avez mis au point avec le groupe socialiste.
Dans le cas qui nous occupe maintenant, l'approche du Gouvernement nous semble mauvaise dans son principe - contrairement à celle qu'il a suivie à propos de la TVA sur les terrains à bâtir, je veux bien le reconnaître - et je vous invite donc, mes chers collègues, à voter clairement d'emblée l'amendement n° I-26 de la commission des finances.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur la demande de priorité formulée par M. Charasse ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Monsieur le président, je n'ai pas à intervenir sur l'ordre dans lequel les amendements doivent être discutés.
J'ai dit que j'étais défavorable à l'amendement n° I-26 et je n'ai rien à ajouter, sinon pour faire remarquer très cordialement à M. le rapporteur général qu'il a caricaturé la position du Gouvernement en affirmant que les collectivités locales qui perdraient de l'emploi garderaient une compensation salariale stable, alors que celles dont le dynamisme économique serait confirmé n'en tireraient pas tout le bénéfice. Chacun sait, en effet, que ces collectivités bénéficient de l'accroissement de la base investissements, qui est très dynamique.
M. le président. Je consulte le Sénat sur la demande de priorité formulée par M. Charasse, repoussée par la commission.
La priorité n'est pas ordonnée.
En conséquence, nous poursuivons la discussion sur l'amendement n° I-26.
M. Michel Mercier. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Michel Mercier.
M. Michel Mercier. M. le secrétaire d'Etat, avant de se déclarer défavorable à l'amendement présenté par M. le rapporteur général, nous a dit avoir une pensée pour les 820 000 entreprises qui allaient payer moins de taxe professionnelle.
Je voudrais appeler l'ensemble de notre assemblée et le Gouvernement à plus de modestie, car il me paraît clair que la réforme sera largement financée par les entreprises elles-mêmes. M. Fourcade et d'autres, notamment M. Fréville, ont bien montré sur qui, dans le dispositif du Gouvernement, allait reposer le financement. Peut-être devrions-nous donc penser aussi aux entreprises, plus nombreuses qu'on ne le dit, que la mise en oeuvre de la réforme condamnera à payer un peu plus l'an prochain.
Tel qu'il nous est présenté, le texte révèle en fait son manque de confiance du Gouvernement vis-à-vis des collectivités locales. Le carcan dans lequel vous allez enfermer les collectivités locales, monsieur le secrétaire d'Etat, risque d'aboutir à un résultat qui ne répondra pas à vos attentes.
Sur la diminution des charges, tout le monde ne peut qu'être d'accord. Comment ne pas se rallier à la démarche qui consiste à diminuer les charges pour relancer l'emploi ?
Cependant, en optant pour la compensation plutôt que pour le dégrèvement, vous allez enfermer l'évolution des ressources des collectivités locales dans le taux d'évolution de la DGF. Comme les dépenses des collectivités locales - notamment celles que le Gouvernement leur impose, en particulier dans le domaine social - croissent bien plus vite que la dotation globale de fonctionnement, il leur faut trouver d'autres ressources. Elles pourraient les trouver dans une augmentation de la part investissements de la taxe professionnelle.
Cependant, vous refusez, dans le même temps, toute déconnexion entre les taux des différentes taxes locales.
Ainsi, d'un côté, on enferme l'évolution de la compensation de la base salaires dans le taux d'évolution de la DGF mais, de l'autre côté, on n'enferme pas l'accroissement des dépenses obligatoires dans ce même taux d'évolution : cela se traduira obligatoirement pour les collectivités locales par une augmentation de la taxe d'habitation. Nous aboutissons donc à un système qui verra la charge des entreprises diminuer tandis qu'augmentera la charge des particuliers à travers la taxe d'habitation. Or je ne crois pas que ce soit ce que recherche le Gouvernement.
Seule la technique du dégrèvement permet d'éviter ce transfert de l'impôt pesant sur l'entreprise à l'impôt pesant sur les ménages.
C'est là une raison supplémentaire de voter l'amendement n° I-26, aussi bien, d'ailleurs, que l'amendement n° I-120 rectifié qu'a brillamment présenté M. Loridant.
M. Yves Fréville. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville. J'ai entendu M. Charasse et j'ai bien compris que le dégrèvement était la bonne solution.
Je me permettrai simplement de dire à M. le secrétaire d'Etat qu'il n'a pas de crainte à avoir puisqu'il a lui-même montré tout à l'heure que les salaires croissaient moins vite que la DGF. Dès lors, il serait gagnant à l'adoption du système du dégrèvement !
S'il nourrit néanmoins une crainte, celle de devoir financer une augmentation des dégrèvements due à une hausse des taux votés de taxe professionnelle, je lui rappelle qu'ont été mis en place dans le passé des mécanismes tels que les dégrèvements restent bloqués au niveau des taux lors de leur création.
Je me permets de lui faire observer qu'il y aurait là une marge manoeuvre dans notre dialogue avec l'Assemblée nationale. En retenant ce type de dégrèvement, nous nous assurons de pouvoir poursuivre la discussion.
M. Thierry Foucaud. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Cet amendement n° I-26 tend en effet à transformer la compensation prévue par le projet de loi de finances en dégrèvement d'office.
Nous sommes, nous aussi, partisans du dégrèvement, qui permet une évolution tenant compte des modifications de l'économie locale. Il garantit aux collectivités locales qu'elles ne seront pas prises en otages par des gouvernements qui pourraient être tentés d'utiliser la compensation comme une variable d'ajustement.
C'est ce qui a conduit le groupe communiste républicain et citoyen à déposer un amendement visant à instaurer le dégrèvement d'office de la suppression progressive de la part salariale dans la taxe professionnelle.
Je répondrai d'abord à notre collègue M. Charasse que nous sommes d'accord pour participer à des discussions. Nous les appelons d'ailleurs de nos voeux afin que soient réglées un certain nombre de questions, notamment celle des actifs financiers.
Je répondrai ensuite à M. le rapporteur général que nous ne sommes pas dupes : les objectifs du groupe communiste républicain et citoyen et ceux de la majorité de la commission des finances sont très opposés.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous pouvons faire un bout de chemin ensemble !
M. Thierry Foucaud. Vous, monsieur le rapporteur général, vous cherchez par tous les moyens à alléger la fiscalité qui pèse sur les entreprises. Dois-je vous rappeler que la taxe professionnelle ne représente que 2 % à 3 % du chiffre d'affaires des entreprises ? Ce n'est donc pas à la taxe professionnelle qu'il faut imputer tous les maux, qu'il s'agisse des difficultés que rencontrent certaines entreprises ou de celles que vivent les centaines de milliers de personnes sans emploi.
Pour notre part, nous ne cessons de dire depuis des années que les collectivités locales doivent bénéficier de moyens supplémentaires pour faire face à leurs compétences nouvelles. C'est pourquoi nous proposons, par exemple, dans un souci d'efficacité économique, de lier la taxation des actifs financiers des grands groupes financiers et bancaires, actuellement sous-imposés, à la suppression de la part salariale de la taxe professionnelle. Or, cela, vous le refusez, monsieur le rapporteur général.
L'objectif premier de la commission des finances est bien d'alléger les charges des entreprises. Maintes et maintes fois, la droite a accordé aux entreprises des allégements, exonérations, abattements qui ont, chaque fois, mis les collectivités territoriales et leurs finances en péril.
Et vous voudriez aujourd'hui vous afficher en défenseurs des communes, départements et régions alors que, il y a trois ans, le gouvernement Juppé instaurait un pacte de stabilité dans un mépris total des élus locaux ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est un dessin animé !
M. Thierry Foucaud. Le dessin animé, il est plutôt dans le gage que vous proposez !
La réforme va coûter, à terme, 54 milliards de francs à l'Etat. Vous augmentez à due concurrence les droits sur les tabacs alors que, en 1998, ils auront rapporté à l'Etat 46 milliards de francs. Sans inciter au tabagisme, monsieur le rapporteur général, je crois pouvoir dire que le paquet de cigarettes à 50 francs relève peut-être aussi du dessin animé !
Pour toutes ces raisons, le groupe communiste républicain et citoyen s'abstiendra. (Rires et exclamations sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. Philippe Marini, rapporteur général. Voilà une position claire !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-26, repoussé par le Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des finances.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 11:
Nombre de votants | 319 |
Nombre de suffrages exprimés | 301 |
Majorité absolue des suffrages | 152 |
Pour l'adoption | 219 |
Contre | 82 |
Le Sénat a adopté.
M. Michel Charasse. Le Sénat s'est fait plaisir !
M. le président. En conséquence, les amendements n°s I-203, I-120 rectifié, I-67 et I-121 n'ont plus d'objet.
Par amendement n° I-27 rectifié, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose :
A. - Après le I du A de l'article 29, d'insérer un paragraphe ainsi rédigé :
« I bis. - Il est inséré un article 1467 ter ainsi rédigé :
« Art. 1467 ter. - Pour les impositions établies au titre de 1999 à 2002, les redevables sont dégrevés d'office de la taxe professionnelle afférente à :
« 8 % de la fraction des recettes visée au 2° de l'article 1467 au titre de 1999 ;
« 16 % de la fraction des recettes visée au 2° de l'article 1467 au titre de 2000 ;
« 24 % de la fraction des recettes visée au 2° de l'article 1467 au titre de 2001 ;
« et 32 % de la fraction des recettes visée au 2° de l'article 1467 au titre de 2002.
« Pour les impositions établies au titre de 2003 et des années suivantes, les redevables sont dégrevés de la taxe professionnelle afférente à 40 % de la fraction des recettes visée au 2° de l'article 1467 comprise dans les bases d'imposition. »
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, de compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - La perte de recettes résultant pour l'Etat du dégrèvement de la taxe professionnelle des titulaires de revenus non commerciaux est compensée par la majoration, à due concurrence, des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement concerne les titulaires de bénéfices non commerciaux qui emploient moins de cinq salariés. Il leur permet de bénéficier de l'allégement de base de taxe professionnelle accordé par l'article 29.
Pour les différentes raisons qui ont déjà été exposées, il semble inéquitable de les écarter du dispositif. Au demeurant, une telle exclusion nous semble pouvoir être invoquée à l'appui de la constitutionnalité, peut-être contestable, d'une mesure qui créerait une rupture d'égalité des contribuables devant l'impôt.
L'amendement de la commission tend à porter la fraction des recettes prises en compte dans les bases de taxe professionnelle des titulaires de bénéfices non commerciaux de 10 % à 6 % en cinq ans. En prenant pour hypothèse que la base recettes constitue 90 % de l'assiette de taxe professionnelle des professionnels libéraux, un tel amendement reviendrait à réduire de 35 %, en moyenne, la cotisation de taxe professionnelle acquittée par cette catégorie de contribuables.
Cela nous semble en phase avec ce qui est promis aux autres catégories de redevables de la taxe professionnelle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement pour deux raisons.
En premier lieu, la fraction des salaires n'entre pas dans le calcul de la taxe professionnelle pour les professions libérales de moins de cinq salariés. Je ne vois donc pas comment on pourrait diminuer un impôt sur une base salariale qui n'existe pas en tant que telle.
En second lieu, le coût de la mesure proposée par M. le rapporteur général atteint 2,4 milliards de francs.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il faut prendre en compte le coût de la mise en oeuvre de cette mesure pour la première année, car nous définissons le solde budgétaire de 1999. Or il est de l'ordre de 400 millions de francs. Par ailleurs, nous avons supprimé, hier, l'article 5 relatif à la micro-entreprise, engendrant ainsi une économie de l'ordre de 500 millions de francs. Nous sommes donc bénéficiaires de 100 millions de francs. (Sourires.)
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je donne volontiers acte à M. le rapporteur général du fait que les 2,4 milliards de francs que j'ai évoqués représentent le coût de l'application de cette mesure au terme des cinq années de la réforme. Mais nous avons tous le souci d'envisager les conséquences de celle-ci jusqu'à son échéance.
Le coût pour la première année est bien de 400 millions de francs. Je comprends que vous ne vous souciez que du coût de la mesure pour la première année, monsieur le rapporteur général, mais je suis obligé, pour ma part, de voir un peu plus loin.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il faudrait appliquer le même principe aux dépenses de l'Etat !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-27 rectifié, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° I-28, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose de supprimer le II du A de l'article 29.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il s'agit d'un amendement de conséquence de l'amendement n° I-26.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-28, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° I-29, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose de supprimer le III du A de l'article 29.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il s'agit, là aussi, d'un amendement de conséquence.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-29, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° I-30, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose de supprimer le IV du A de l'article 29.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il s'agit toujours d'un amendement de conséquence.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-30, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
(M. Jean-Claude Gaudin remplace M. Jean Faure au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-CLAUDE GAUDIN
vice-président
M. le président.
Je suis maintenant saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° I-31 est présenté par M. Marini, au nom de la commission des
finances.
L'amendement n° I-86 est déposé par M. Fréville et les membres de l'Union
centriste.
L'amendement n° I-245 rectifié est présenté par M. Angels, Mme Bergé-Lavigne,
MM. Charasse, Demerliat, Haut, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les
membres du groupe socialiste et apparentés.
Tous trois tendent à supprimer le
b
du 1 et le
b
du 2 du
paragraphe V du A de l'article 29.
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l'amendement n°
I-31.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Cet amendement concerne l'un des éléments de la
réforme, à savoir la réduction pour embauche et investissement. Il est proposé
de ramener celle-ci à 25 % au lieu de 50 % en 1999 et de la supprimer
totalement en 2000.
S'il est vrai que le « e » de « embauche » dans « réduction pour embauche et
investissement » ne se justifiera plus en 2003, lorsque les salaires auront été
totalement exclus de l'assiette de la taxe professionnelle, il est, en
revanche, inadmissible, monsieur le secrétaire d'Etat, selon la commission, de
supprimer la réduction pour investissement.
En outre, il est juste de maintenir la REI dans son intégralité tant que les
salaires demeurent compris dans les bases de la taxe professionnelle,
c'est-à-dire jusqu'en 2003. D'ailleurs, le fait de supprimer la REI dès l'an
2000 n'est-il pas un symptôme de ce que voulez faire, à savoir la dilution de
la base salaires de la taxe professionnelle dans une espèce d'ensemble global
et indifférencié de transferts financiers de l'Etat ?
En outre, la mesure que vous nous proposez en matière de REI est rétroactive,
compte tenu du décalage de deux ans pour l'imposition à la taxe professionnelle
: ainsi, une entreprise qui aurait investi en 1998 dans l'espoir de bénéficier
de la REI à 50 % ne disposerait plus d'aucune réduction en l'an 2000
lorsqu'elle acquitterait la taxe professionnelle sur les bases
correspondantes.
Notre amendement est mesuré, puisqu'il prévoit de pérenniser la réduction pour
embauche et investissement à la moitié de son montant actuel. Mais il paraît
nécessaire de bien prévoir ce maintien à 25 % et d'éviter la suppression de la
REI à partir de l'an 2000.
M. le président.
La parole est à M. Fréville, pour défendre l'amendement n° I-86.
M. Yves Fréville.
Je m'associe, naturellement, à l'argumentation de M. le rapporteur général. Je
citerai simplement un exemple pour illustrer la situation.
Prenons le cas d'une entreprise qui achète une machine de 1 million de francs.
Compte tenu de la réduction de ses bases de 16 % et de l'intégration de cette
machine pour 16 % de sa valeur, sa base augmentera de 135 000 francs. Si elle
est située dans une commune où le taux moyen, toutes collectivités confondues,
s'élève à 25 %, elle aura à payer 33 000 francs de plus. C'est la raison pour
laquelle la REI avait été organisée de façon à assurer un lissage du
dispositif.
Dans la mesure où le rapporteur général et moi-même acceptons la moitié de la
réduction, vous pourriez au moins faire en sorte que l'entreprise qui investit
et qui n'a pas immédiatement le rendement de son investissement - il faut
compter deux ou trois ans pour parvenir à tourner à plein régime - puisse
bénéficier de cette réduction, monsieur le secrétaire d'Etat.
Si tel n'était pas le cas, j'en arriverais à croire que c'est simplement pour
récupérer 1,5 milliard de francs - chiffre qui figure dans les voies et moyens
- que cette mesure a été adoptée.
M. le président.
La parole est à Mme Bergé-Lavigne, pour défendre l'amendement n° I-245
rectifié.
Mme Maryse Bergé-Lavigne.
Compte tenu de l'adoption de l'amendement n° I-26, je retire cet amendement n°
I-245 rectifié, ainsi que les amendements n°s I-247, I-248, I-249 et, surtout,
I-250, qui proposaient des modalités de calcul de la compensation. Ces
modalités, tout à fait raisonnables, ont été présentées fort brillamment par
Michel Charasse.
M. le président.
L'amendement n° I-245 rectifié est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s I-31 et
I-86 ?
M. Christian Sautter,
secrétaire d'Etat.
Il s'agit de la réduction pour embauche et
investissement.
Le Gouvernement, qui propose un dispositif durable de suppression de la base
salariale de la taxe professionnelle, ne voit pas l'intérêt de conserver des
dispositions transitoires. C'est pourquoi, en bonne logique, il a supprimé
cette réduction pour embauche et investissement. Par conséquent, il est
défavorable aux amendements identiques n°s I-31 et I-86.
Je souligne, pour les très grands spécialistes que vous êtes, que, dans le
système actuel, cette réduction pour embauche et investissement est mal
compensée par l'Etat. Par conséquent, à partir du moment où les entreprises
perdront complètement le bénéfice de la réduction pour embauche et
investissement, il me semble que les collectivités locales pourront y gagner un
peu. Mais l'essentiel n'est pas là ! L'essentiel est que la suppression de la
réduction de taxe professionnelle pour embauche et investissement fait partie
de l'équilibre même de la réforme que propose le Gouvernement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s I-31 et I-86, repoussés par le
Gouvernement.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
Je suis maintenant saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° I-32 est présenté par M. Marini, au nom de la commission des
finances.
L'amendement n° I-122 est déposé par Mme Beaudeau, MM. Loridant, Foucaud et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Tous deux tendent à supprimer le paragraphe VI du A de l'article 29.
La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n°
I-32.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Il s'agit, là encore, d'un amendement de conséquence
de l'amendement n° I-26.
M. le président.
La parole est à Mme Beaudeau, pour défendre l'amendement n° I-122.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements identiques ?
M. Christian Sautter,
secrétaire d'Etat.
Défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n° I-32 et I-122, repoussés par le
Gouvernement.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
Par amendement n° I-264, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose, dans le a) du 3 du VII de l'article 29, après les mots : « ou des
redevances », d'insérer les mots : « afférentes à ces biens ».
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
L'article 29 tend, notamment je le rappelle, à
modifier le mode de calcul de la valeur ajoutée servant, d'une part, au
plafonnement de la taxe professionnelle et, d'autre part, à la cotisation
minimale de taxe professionnelle. C'est l'une des mesures d'accompagnement de
la réforme. Il est ainsi proposé d'interdire la déduction des loyers et des
redevances qui résultent d'une convention d'une location-gérance de la valeur
ajoutée du locataire.
Or, jusqu'à présent, les redevances versées au propriétaire par le gérant
libre d'un fond de commerce étaient déductibles, dès lors qu'elles ne
dissimulaient pas une cession du fonds.
Notre amendement, qui est de nature rédactionnelle, tend à préciser que les
redevances afférentes à des biens soumis à la taxe professionnelle seront
désormais incluses dans le calcul de la valeur ajoutée, et ce afin d'éviter la
réintégration de la fraction des redevances relative aux éléments incorporels,
ces éléments n'étant pas soumis à la taxe professionnelle. Ces dispositions de
nature technique nous semblent susceptibles d'améliorer le texte du
Gouvernement.
(M. le secrétaire d'Etat opine.)
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter,
secrétaire d'Etat.
Il arrive que le Gouvernement soit convaincu par les
arguments de M. le rapporteur général.
(Exclamations amusées sur les travées
du RPR et de l'Union centriste.)
Je crois effectivement que les redevances de location-gérance sont peut-être
un peu sévèrement traitées dans la rédaction actuelle. Nous essaierons d'y
remédier d'ici à la deuxième lecture. Je m'en remets donc à la sagesse du
Sénat.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-264, pour lequel le Gouvernement s'en remet
à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° I-204, M. Gournac propose d'insérer, après le 3 du VII du A
de l'article 29, deux alinéas ainsi rédigés :
« Après le 3 du II, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« ... la production des établissements donnant en location de longue durée des
biens mobiliers est égal à la différence entre, d'une part, les recettes liées
à cette activité de services et, d'autre part, les charges d'exploitation
afférentes à cette activité, y compris les amortissements et frais financiers
se rapportant aux biens loués. »
La parole est à M. Gournac.
M. Alain Gournac.
La loi de finances pour 1996 a institué une contribution minimale de taxe
professionnelle calculée à partir de la valeur ajoutée produite par les
entreprises. Chacun sait que cette cotisation minimale a été fixée à 0,35 % de
la valeur ajoutée.
La méthode de calcul utilisée crée une distorsion de concurrence pour les
entreprises de location de longue durée de biens meubles.
La valeur ajoutée de référence, pour les entreprises de location n'ayant pas
de statut bancaire, exclut des charges les dotations aux amortissements et les
frais financiers. Afin de limiter une telle distorsion de concurrence entre
sociétés de crédit-bail et sociétés de location de longue durée, il est proposé
de calculer la valeur ajoutée sur une base commune à tous les intervenants du
secteur, en les autorisant à déduire les dotations aux amortissements et les
frais financiers afférents aux biens donnés en location.
Cette solution se justifie d'autant plus qu'elle a été retenue dans la loi de
finances pour 1997 pour les locations de biens entre entreprises d'un même
groupe. En effet, dans ce cas, conformément à l'article 1647 B
sexies,
paragraphe II, 2, du code général des impôts, les amortissements des biens
donnés en location viennent en déduction de la valeur ajoutée du loueur.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Mes chers collègues, cet amendement est fort
intéressant, car il a le mérite de poser une question pertinente et de révéler
les incohérences de la réforme de la taxe professionnelle ici projetée.
M. Christian Sautter,
secrétaire d'Etat.
Des incohérences ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Certaines incohérences, monsieur le secrétaire
d'Etat, pour adopter un ton plus modéré !
En effet, c'est non pas par logique comptable que l'article 29 du projet de
loi de finances tend à permettre aux bailleurs de déduire de leur valeur
ajoutée des amortissements se rapportant aux biens de location, mais pour
aligner le régime fiscal au regard de la taxe professionnelle sur celui des
crédits-bailleurs, donc pour harmoniser les locations simples et les activités
de crédit-bail.
Toutefois, et suivant cette fois-ci une logique comptable, le Gouvernement ne
permet pas aux bailleurs de déduire les frais financiers, alors qu'ils sont
déductibles de la valeur ajoutée des crédits-bailleurs.
Nous pensons, comme notre collègue M. Gournac, dont c'est le sens de
l'amendement, que l'égalité n'est pas totale. Il y a là une discrimination qui
résulte du fait que les sociétés de crédit-bail sont des institutions
financières dont la valeur ajoutée n'est pas déterminée de la même manière que
pour les autres entreprises industrielles, commerciales ou artisanales. Or il
s'agit bien d'activités de même nature, d'activités de location, tantôt de
location simple, tantôt de crédit-bail.
Il faudrait donc que M. le secrétaire d'Etat nous confirme qu'il a bien pris
la mesure de ce problème et qu'il nous fasse part de son opinion.
M. le président.
Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter,
secrétaire d'Etat.
L'amendement défendu par M. Gournac comprend, en fait,
deux éléments.
Pour ce qui est, d'abord, des investissements, je tiens à le rassurer : aux
termes de l'article 29, ils sont déjà déductibles par les bailleurs pour le
calcul de leur valeur ajoutée.
En ce qui concerne, par ailleurs, les frais financiers, la question est plus
délicate. Il existe une définition particulière de la valeur ajoutée pour les
établissements de crédit et pour les entreprises d'assurance, parce que ces
activités ont une nature spécifique, les produits financiers y prenant
évidemment beaucoup de place.
Vous voulez, monsieur Gournac, assimiler les entreprises de location de longue
durée de biens mobiliers aux crédits-bailleurs qui sont regardés comme des
établissements de crédit. Sans entrer dans une controverse qui serait longue,
le Gouvernement estime qu'il y a une différence de nature entre les
crédits-bailleurs et les entreprises de location de longue durée de biens
mobiliers. C'est la raison pour laquelle votre amendement m'apparaît comme
satisfait en ce qui concerne les amortissements et, à mon avis, il n'a pas lieu
d'être en ce qui concerne les frais financiers. C'est pourquoi, à défaut de son
retrait, je me verrais contraint d'en demander le rejet.
M. le président.
Monsieur Gournac, l'amendement n° I-204 est-il maintenu ?
M. Alain Gournac.
M. le secrétaire d'Etat ne m'a absolument pas fourni les éléments de réponse
susceptibles de me convaincre de retirer mon amendement.
S'agissant des amortissements, je suis d'accord et j'ai bien entendu ses
explications.
S'agissant des frais financiers, en revanche, je ne comprends pas pourquoi,
dans le même domaine, selon que l'on est d'un côté ou de l'autre, on n'est pas
traité de la même manière, alors que l'on fait la même chose !
Donc, j'en suis désolé, mais, comme je n'ai pas satisfaction et que le sujet
est d'importance en termes d'égalité de traitement, je maintiens mon
amendement.
M. Christian Sautter,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter,
secrétaire d'Etat.
Si les entreprises de location de longue durée de
biens mobiliers étaient assimilables aux sociétés de crédit-bail, elles
devraient alors acquitter la contribution des institutions financières, qui
s'élève à 1 % d'un certain nombre de postes de charges. Ce n'est pas le cas.
Donc, vous voyez bien, monsieur le sénateur, qu'il y a une différence entre les
deux catégories d'entreprises, qui joue parfois à l'avantage de l'une, parfois
au détriment de l'autre. C'est là un argument complémentaire que je tenais à
vous communiquer.
M. le président.
Quel est, en définitive, l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je souhaite m'adresser à notre collègue M. Gournac,
compte tenu de la complexité technique de ce sujet. M. le secrétaire d'Etat lui
a répondu que près d'une moitié de son amendement était satisfaite par le texte
du projet de loi de finances.
Sur l'autre moitié, concernant le sort respectif des loueurs classiques et des
crédit-bailleurs, il y aurait lieu d'approfondir davantage le sujet. C'est ce
que nous pourrons faire ultérieurement dans la discussion budgétaire, si M.
Gournac le veut bien. Il serait donc souhaitable, pour des raisons techniques,
que M. Gournac retire provisoirement son amendement, qui conserve toute son
opportunité, le problème étant tout à fait réel.
M. Alain Gournac.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Gournac.
M. Alain Gournac.
Je souhaitais que la question soit prise au sérieux, qu'elle fasse l'objet
d'une étude approfondie et qu'on apporte une réponse au problème. Les propos de
M. le rapporteur général me rassurent tout à fait. Nous devons travailler dans
ce sens-là. Je retire donc maintenant mon amendement.
M. le président.
L'amendement n° I-204 est retiré.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° I-33, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose de rédiger ainsi le texte présenté par le 2 du paragraphe VIII du A de
l'article 29 pour modifier le deuxième alinéa du I de l'article 1647 E du code
général des impôts :
« Le taux visé au premier alinéa est porté à 1,5 %. Par exception, il est fixé
à 0,60 % au titre de 1999, à 0,80 % au titre de 2000, à 1 % au titre de 2001 et
à 1,25 % au titre de 2002. »
Par amendement n° I-247, M. Angels, Mme Bergé-Lavigne, MM. Charasse,
Demerliat, Haut, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du
groupe socialiste et apparentés proposent de rédiger comme suit le texte
présenté par le 2 du paragraphe VIII du A de l'article 29 pour le deuxième
alinéa du I de l'article 1647 E du code général des impôts :
« Le taux visé au premier alinéa est porté à 1 % au titre de 1999. »
Je rappelle que cet amendement a été précédemment retiré.
La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n°
I-33.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Il s'agit de la cotisation minimale de taxe
professionnelle qui est acquittée par les entreprises réalisant plus de 50
millions de francs de chiffre d'affaires et dont le montant de taxe
professionnelle est inférieur à 0,35 % de leur valeur ajoutée. Cette cotisation
minimale - nous le savons, nous en parlons chaque année - n'a pas, pour
l'instant, atteint son plein rendement en raison de la clause de sauvegarde
instituée lors de sa création en 1995.
En effet, pour atténuer le poids de cette taxe, nous avions alors prévu que la
cotisation minimale effectivement payée par les entreprises ne pouvait excéder,
en 1997, le triple et, en 1998, le quadruple du montant de taxe professionnelle
initialement acquitté. Cette clause de sauvegarde prend fin en 1999, ce qui
devrait provoquer une augmentation très significative de cette imposition pour
les entreprises concernées. Or c'est précisément en 1999 que les mêmes
entreprises subiraient le triplement de taux de la cotisation minimale figurant
dans le projet de loi initial.
Donc, d'un côté, on perd le bénéfice des mesures de sauvegarde et, de l'autre,
on subit le triplement du taux, qui passerait de 0,35 % à 1 %, puis à 1,5 % en
2001.
Le Gouvernement lui-même, dans un rapport qui a été remis au Parlement en
février dernier à la demande du Sénat, admet qu'une telle mesure risque
d'engendrer des transferts de charges et des franchissements importants de
seuils d'imposition. Cela ne l'a pourtant pas dissuadé de nous proposer cette
mesure, en contradiction avec certains éléments du rapport remis au
Parlement.
De surcroît, l'inclusion des loyers dans la valeur ajoutée des entreprises
aura pour conséquence d'élargir l'assiette de la cotisation minimale et
d'alourdir encore le poids de l'impôt pour ces contribuables.
La commission des finances considère, pour sa part, qu'il est imprudent,
monsieur le secrétaire d'Etat, de jouer les apprentis sorciers avec une taxe
sur laquelle la visibilité n'est que très faible : les simulations ne sont pas
claires ; on ne sait pas de manière exhaustive qui sera touché ; sans doute une
concentration sur certaines branches d'activités de services, est-elle à
redouter. Bref, ces impositions supplémentaires peuvent avoir des effets
pervers significatifs.
La commission des finances suggère donc un mécanisme plus prudent en proposant
l'extension sur cinq ans, au lieu de trois, de la progression de la cotisation
minimale de taxe professionnelle, ce qui nous permettra de mieux observer les
effets économiques de la mesure. Aux termes de notre amendement, le taux de
cotisation minimale serait ainsi porté à 0,6 % en 1999, au lieu de 1 % dans le
dispositif gouvernemental.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement a émis un avis défavorable.
Le taux minimal de taxe professionnelle est une bonne idée ; elle figurait
d'ailleurs déjà dans la loi de finances pour 1996, ce qui prouve à ceux qui en
douteraient que je ne suis pas sectaire ! Le principe en est simple : chaque
entreprise doit apporter un minimum de financement aux collectivités
locales.
En outre, le relèvement de cette taxe minimale est instamment demandé par le
comité des finances locales. Le Gouvernement va au-devant de ce souhait, et
propose une majoration que M. le rapporteur général entend, lui, modérer.
Je rappelle à la Haute Assemblée que, en régime de croisière, on arriverait,
dans l'hypothèse gouvernementale, à 1,5 % à partir de l'année 2001. Or, 1,5 %,
c'est la moitié de la cotisation moyenne de taxe professionnelle, qui est
d'environ 3 %, donc très sensiblement en dessous des taux plafonds, dont je
vous rappelle qu'ils sont, selon le chiffre d'affaires de l'entreprise, de 3,5
%, de 3,8 % et de 4 %.
La prudence de M. le rapporteur général en la matière me paraît donc
excessive, et j'invite le Sénat à retenir la franche augmentation de la taxe
minimale que propose le Gouvernement, mesure qui répond à un souci d'équité
fiscale.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-33.
M. Jean-Pierre Fourcade.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Fourcade.
M. Jean-Pierre Fourcade.
Monsieur le secrétaire d'Etat, lorsque vous citez le comité des finances
locales, il serait opportun que vous indiquiez le contexte.
Ce comité a effectivement toujours souhaité une cotisation minimale de taxe
professionnelle pour abonder le fonds de péréquation. En effet, nous constatons
tous que, pour une taxe professionnelle qui rapporte 150 milliards de francs
aux collectivités locales, la péréquation ne porte que sur 4 milliards de
francs, ce qui est trop faible. Elle ne permet pas de compenser les inégalités
dont Mme Beaudeau parlait tout à l'heure.
Le comité des finances locales a toujours considéré qu'il était logique que
corresponde au plafonnement par rapport à la valeur ajoutée une cotisation
minimale, mais, dans son esprit, celle-ci devait être affectée au fonds de
péréquation pour augmenter les moyens dont il dispose et favoriser le transfert
de la richesse tirée de la matière fiscale d'un certain nombre de communes qui
ont des bases importantes à des communes ayant des bases plus faibles.
Le Gouvernement a repris cette idée. Il majore cette cotisation de manière
considérable. Cependant, il affecte le produit de ladite cotisation au budget
de l'Etat, et c'est là l'un des cinq moyens qu'il a trouvés pour compenser,
au-delà de ce qui eût été raisonnable, la somme prévue pour financer la
réduction de la part salaires.
Lors de la dernière séance du comité des finances locales, les représentants
de Bercy ont indiqué, monsieur le secrétaire d'Etat, alors que la première
année, pour des raisons inconnues et incompréhensibles, la cotisation au taux
de 0,35 % n'a rapporté qu'un produit ridicule, soit moins de 100 millions de
francs, que, selon les évaluations faites par vos services sur l'ensemble de la
période, cette cotisation minimale au taux de 1,5 % rapporterait en fin de
période, en 2003, un peu plus de 5 milliards de francs. C'est la raison pour
laquelle j'ai souhaité, tout à l'heure, obtenir un tableau d'évaluation des
grandeurs concernant l'Etat, les collectivités territoriales et les
entreprises.
En effet, ces 5 milliards de francs sont bien payés par les entreprises, vous
l'avez dit, du secteur des prestations de services et du secteur des activités
financières. Cet élément vient donc en déduction du gain que représentera pour
les entreprises la réduction de la part salaires.
Pour ma part, j'estime - et c'est l'avis du comité des finances locales - que
l'augmentation que vous envisagez est trop forte. La proposition de la
commission des finances est plus raisonnable.
Cela étant dit, la question que je me pose et que je vous pose est la suivante
: comment peut-on passer d'un rendement « epsilonesque » en 1998 avec un taux
de 0,35 % à un rendement de plusieurs milliards de francs en fin de période ?
Est-ce à dire que, lorsque le Parlement vote une taxe minimale, il ne se passe
rien et que, quand le Gouvernement crée cette taxe minimale et la majore, tout
à coup le rendement arrive ? Je l'avoue, sur ce point, je n'ai pas encore une
idée précise.
M. Christian Sautter,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter,
secrétaire d'Etat.
Je répondrai volontiers à M. Fourcade. Dès son
origine, cette cotisation minimale a été affectée au budget de l'Etat. Cela est
tout à fait clair.
Si nous pouvons attendre une progression du rendement de cette cotisation,
c'est pour deux raisons.
La première, c'est que le dispositif de sauvegarde évoqué par M. le rapporteur
général cesse en 1999. A partir du moment où l'on supprime des liens qui
brident cette cotisation minimale, on peut s'attendre, logiquement, à ce que
son rendement croisse.
La seconde raison, c'est que prélever une taxe de 0,35 %, c'est-à-dire à un
taux très faible, sur une assiette très large est une opération difficile.
Lorsque la taxe sera de 1 % ou de 1,5 %, elle sera plus facile à recouvrer.
Nous aurons donc l'occasion d'ici à cinq ans d'en reparler, monsieur le
sénateur.
M. Yves Fréville.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville.
Il faut être clair : si nous avons une cotisation plancher de 1,5 % sur la
valeur ajoutée, cela signifie que nous avons une taxe sur les salaires et
charges sociales de 1,5 % et, si on la réduit aux seuls salaires, une taxe de
2,2 % ou 2,3 %.
Je m'explique, monsieur le secrétaire d'Etat. Vous êtes bien d'accord que
lorsque l'on verse un salaire de 100, on paie 60 ou 65 % de charges sociales en
plus, ce qui fait bien 160 % ou 165 %. Votre taux de 1,5 % va porter sur les
charges sociales plus les salaires. Si vous calculez la taxe uniquement sur les
salaires, pour la comparer aux bases de la taxe professionnelle, vous obtenez,
bien sûr, un taux qui doit être de l'ordre de 2,2 % des salaires. Cela signifie
que si vous supprimez d'un côté, vous rétablissez de l'autre une taxe sur les
salaires au taux de 2,2 %. Les propositions de M. le rapporteur général sont
donc beaucoup plus modérées et c'est pourquoi je m'y rallie.
M. Michel Charasse.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse.
Je voudrais simplement dire que, actuellement, on est en train de pleurer sur
tous ceux qui ne paient rien ou pas grand-chose, et qui sont principalement
concernés par la mesure, c'est-à-dire ces pauvres grandes surfaces, ces
misérables banques, ces pauvres compagnies d'assurance et ces pauvres sociétés
de crédit-bail !
(Sourires.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-33, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une
discussion commune.
Par amendement n° I-34, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose de rédiger ainsi le IX du A de l'article 29 :
« IX.- Le II
bis
de l'article 1648 D est ainsi rédigé :
« II
bis
. - Les taux de 1 %, de 0,75 % et de 0,5 % visés au II sont
majorés et respectivement portés à :
« - 2,1 %, 1,55 % et 1 % pour les impositions établies au titre de 1999 et
2000 ;
« - 2,4 %, 1,8 % et 1 % pour les impositions établies au titre de 2001 ;
« - 2,7 %, 2 % et 1,3 % pour les impositions établies au titre de 2002 ;
« - 3 %, 2,2 % et 1,4 % pour les impositions établies au titre de 2003 et des
années suivantes. »
Par amendement n° I-248, M. Angels, Mme Bergé-Lavigne, MM. Charasse,
Demerliat, Haut, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du
groupe socialiste et apparentés proposent de rédiger comme suit le texte
présenté par le paragraphe IX du A de l'article 29 pour le II
bis
de
l'article 1648 D du code général des impôts :
« II
bis
. - Les taux de 1 %, de 0,75 % et de 0,5 % visés au II sont
majorés et respectivement portés à 2,35 %, 1,75 % et 1,15 % pour les
impositions établies au titre de 1999 et 2000. »
Je rappelle que cet amendement a été précédemment retiré.
La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n°
I-34.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Il s'agit des taux de la cotisation de péréquation,
encore un des éléments du dispositif d'accompagnement.
La cotisation de péréquation est due par les établissements situés dans les
communes dont les taux de taxe professionnelle sont inférieurs à la moyenne
nationale. La commission des finances considère que l'augmentation, prévue à
l'article 29 de la cotisation de péréquation est pénalisante et décourageante
pour les entreprises et pour les collectivités locales qui font des efforts de
bonne gestion.
Notre amendement consiste, comme pour la cotisation minimale, à revenir à des
proportions plus raisonnables, et donc à limiter la progression de la
cotisation de péréquation à 75 %, contre 100 % dans le texte proposé par le
Gouvernement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement est défavorable à cet amendement. Il a
en effet le sentiment qu'une cotisation de péréquation ne peut qu'apporter un
peu plus de justice fiscale dans notre pays. Cet accroissement de la cotisation
de péréquation financera, pour une partie mineure, l'allégement de la part
salariale de la taxe professionnelle. A titre personnel, il me paraît tout à
fait normal que des entreprises qui sont situées dans des communes où le taux
de la taxe professionnelle est très inférieur à la moyenne nationale apportent
leur écot à la diminution de la part salariale de la taxe professionnelle.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Cette mesure rapporte 900 millions de francs !
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-34, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je suis maintenant saisi par Mme Beaudeau, MM. Loridant, Foucaud et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen de deux amendements pouvant
faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-125 tend à compléter
in fine
le A de l'article 29 par
un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Les dispositions de l'article 1472 A
bis
du code général des
impôts sont abrogées. »
L'amendement n° I-126 vise à compléter
in fine
le A de l'article 29 par
un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - L'article 1472 A
bis
du code général des impôts est complété
par un alinéa ainsi rédigé :
« Ce taux est ramené à 8 % pour les entreprises dont le rapport taxe
professionnelle sur valeur ajoutée est compris entre 2 % et 1,5 % et à 0 % pour
les entreprises dont le rapport taxe professionnelle sur valeur ajoutée est
inférieur à 1,5 %. »
La parole est à M. Foucaud, pour présenter ces deux amendements.
M. Thierry Foucaud.
Lors de la discussion du projet de budget pour 1987 - et vous me pardonnerez
de faire un peu d'histoire - le gouvernement de l'époque et son ministre
délégué au budget, M. Alain Juppé, arguaient du fait que l'abattement général
de 16 % allait sensiblement influer sur le taux de chômage.
Voilà douze ans déjà, nous dénoncions, d'une part, l'inefficacité de cette
mesure pour l'emploi et, d'autre part, le risque pour les collectivités de ne
pas bénéficier d'un remboursement intégral de cette disposition.
M. Galland, ministre délégué auprès du ministre de l'intérieur, chargé des
collectivités locales, avait répondu lors d'une réunion du comité des finances
locales à une question de Dominique Frelaut qu'il n'y aurait pas de
remboursement intégral, alors qu'Alain Juppé avait éludé la question.
Douze ans plus tard, qu'en est-il de la compensation ?
En 1987, elle s'élevait à 5 milliards de francs. Alors que l'on estime à 36
milliards de francs le coût de cet allégement fiscal pour l'Etat, la DCTP
chargée de compenser cet abattement sera, pour 1999, de 13 milliards de
francs.
Force est de constater que, aujourd'hui, la compensation est loin d'être
intégrale. Depuis 1987, ce sont des dizaines de milliards de francs qui ont été
détournés des budgets locaux.
Nous estimons que cet allégement fiscal est honteux. Il est effectivement
surprenant que toutes les entreprises quelles qu'elles soient, quelle que soit
la politique qu'elles mènent en faveur de l'emploi, quels que soient leur
taille, leur lieu d'implantation et la richesse qu'elles produisent,
bénéficient de cet abattement général.
Telles sont les raisons qui conduisent le groupe communiste républicain et
citoyen à présenter les amendements n°s I-125 et I-126.
Le premier vise à supprimer l'article 1472 A
bis
du code général des
impôts, qui concerne l'abattement de 16 %.
Le second tend à moduler cet abattement en fonction du rapport taxe
professionnelle-valeur ajoutée. Cette modification permet de rectifier les
inégalités d'imposition, d'instaurer une solidarité fiscale entre entreprises,
quelle que soit leur lieu d'implantation ou leur nature.
Actuellement, les entreprises de biens intermédiaires cotisent à concurrence
de 3,71 % de leur valeur ajoutée, les entreprises de production ou de
distribution d'énergie de 4,15 %, les entreprises de biens d'équipement de 3,67
%, alors que les assurances ne contribuent qu'à hauteur de 1,39 %.
Moduler l'abattement de 16 %, comme nous le proposons, permettra de diminuer
ces inégalités.
Vous avez sans doute remarqué que ces amendements ne sont pas gagés. Ce n'est
pas un oubli de notre part. Ces mesures s'autofinancent, car elles entraîneront
une hausse du produit de l'impôt sur les sociétés équivalent à la perte
provoquée par la suppression ou la modulation de l'abattement.
M. Michel Charasse.
Subtil !
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s I-125 et I-126 ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Ces deux amendements tendent à créer des charges
supplémentaires pour les entreprises.
A ce titre, ils vont à l'encontre de la philosophie de la réforme qui vise -
je ne dis pas qu'elle y parviendra
(Sourires)
à alléger en partie la
taxe professionnelle supportée par ces mêmes entreprises.
En outre, ces amendements sont bien entendu en contradiction avec la logique
suivie par la commission des finances, dont l'avis ne peut qu'être
défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter,
secrétaire d'Etat.
On ne peut appuyer à la fois sur le frein et sur
l'accélérateur. Vis-à-vis des petites et moyennes entreprises qui bénéficieront
de la réduction de la taxe professionnelle sur la part salaires en 1999,
relever en même temps de 16 % les bases constituerait un signal contradictoire,
qu'il s'agisse d'un relèvement uniforme ou, comme il est prévu par l'amendement
n° I-126, d'un relèvement modulé, qui ne serait d'ailleurs pas facile à gérer,
monsieur Foucaud, car de nombreux critères entrent en ligne de compte. Telle
est la première raison pour laquelle je suis réticent.
La seconde raison, c'est que la mise en oeuvre de cette mesure entraînerait
tout de même un coût pour l'Etat, dans la mesure où le montant de la taxe
professionnelle acquittée par l'entreprise est limité par un plafond calculé en
pourcentage de la valeur ajoutée. Il est clair que, si l'on remet en cause tout
ou partie des 16 % d'abattement des bases de la taxe professionnelle, certaines
entreprises passeront, si je puis dire, la tête à travers le plafond, et cela
imposera à l'Etat d'intervenir, ce qui engendrera un coût supplémentaire.
J'espère donc, monsieur Foucaud, que, après avoir entendu ces explications,
vous voudrez bien retirer ces deux amendements ; sinon je serais obligé de
demander leur rejet.
M. le président.
Monsieur Foucaud, les amendements n°s I-125 et I-126 sont-ils maintenus ?
M. Thierry Foucaud.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous parlez de frein. Je parlerai, pour ma
part, de retenue.
Je maintiens donc les deux amendements.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-125, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-126, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Par amendement n° I-35, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose de supprimer le I du B de l'article 29.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Il s'agit d'un amendement de conséquence après
l'adoption de l'amendement n° I-26.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter,
secrétaire d'Etat.
Défavorable, par conséquence !
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-35, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° I-123, Mme Beaudeau, MM. Loridant, Foucaud et les membres du
groupe communiste républicain et citoyen proposent :
I. De supprimer le paragraphe II du B de l'article 29.
II. En conséquence, après le B de cet article, d'insérer un paragraphe
additionnel ainsi rédigé :
« ... - L'absence de versement au budget général de l'Etat de la majoration de
la cotisation minimale de taxe professionnelle mentionnée par l'article 1648 D
du code général des impôts est compensée par le relèvement à due concurrence
des taux applicables aux deux dernières tranches de l'impôt sur le revenu des
personnes physiques. »
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Enfin, monsieur le secrétaire d'Etat, le taux de la cotisation minimale de
taxe professionnelle est relevé, grâce à une disposition du projet de loi de
finances.
Le relèvement de ce plancher est une demande de longue date de la part des
élus, notamment de ceux du groupe communiste républicain et citoyen, qui
déposaient inlassablement depuis plusieurs années des amendements allant dans
ce sens lors de l'examen des projets de loi de finances.
Nous nous félicitons donc de l'intégration de cette disposition dans le projet
de loi dont nous débattons. En revanche, l'objectif recherché par notre groupe
en demandant le relèvement du plancher de la cotisation minimale de taxe
professionnelle est loin d'être réalisé. Il nous semble même, monsieur le
secrétaire d'Etat, que cet objectif est détourné.
Permettez-moi de revenir quelques instants sur la « tunnelisation » de la
valeur ajoutée.
Le plafond a été créé en 1979. Puis, par souci d'équité fiscale entre les
entreprises et en réponse aux besoins budgétaires des collectivités
territoriales, les gouvernements successifs, avec le Parlement, d'ailleurs, ont
mis en place toute une série de mesures visant à plafonner la taxe
professionnelle.
C'est ainsi, notamment, qu'a été institué un plafond tel que les assujettis ne
peuvent pas payer en taxe professionnelle plus de 3,5 % à 4 % de la valeur
ajoutée créée, ce qui a conduit à une augmentation exponentielle de ce
dégrèvement, qui est passé en six ans de 8 à 29,4 milliards de francs.
C'est cette situation absurde qui a conduit à instaurer en 1996 un plancher à
0,35 % de la valeur ajoutée. Cette mesure était à prévoir, ce taux étant
automatiquement voué à l'augmentation.
Cet encadrement de la part valeur ajoutée dans la taxe professionnelle devait
répondre à deux préoccupations : limiter les délocalisations dues à la
recherche du moindre coût en matière de taxe professionnelle pour les
entreprises, et instaurer une péréquation entre les collectivités, le produit
du plancher de la cotisation minimale alimentant le fonds national de
péréquation de la taxe professionnelle.
J'en reviens à ce qui nous est proposé aujourd'hui dans les dispositions du
paragraphe II du B de l'article 29. Je cite : « Le produit de la majoration
mentionnée au IX du A est reversé au budget général de l'Etat par le FNPTP. »
C'est précisément, monsieur le secrétaire d'Etat, ce qui nous dérange.
Alors que le plancher devait servir la péréquation, et donc à répartir plus
justement entre les collectivités le produit de la taxe professionnelle, nous
aboutissons pratiquement à l'effet inverse : aujourd'hui, avec les dispositions
qui affectent la majoration du produit généré par le relèvement du plancher de
la cotisation minimale au budget général de l'Etat, l'objectif du plancher et
du fonds national de péréquation de la taxe professionnelle, le FNPTP, nous
semble détourné.
C'est la raison pour laquelle nous proposons, par cet amendement, de
distribuer aux collectivités le produit de la péréquation. Nous prévoyons donc
que les recettes induites par l'augmentation des taux alimentent non pas le
budget de l'Etat mais le fonds national de péréquation de la taxe
professionnelle.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Cet amendement intéressant soulève une question de
fond : pourquoi la majoration de la cotisation de péréquation alimenterait-elle
le budget général au lieu d'être maintenue dans sa destination habituelle
qu'est le fonds national de péréquation de la taxe professionnelle ?
La préoccupation de Mme Beaudeau est donc légitime. Toutefois, plusieurs
points sont contestables dans l'initiative du groupe communiste républicain et
citoyen.
En premier lieu - mais ce point pourrait être rectifié - vous faites référence
à la cotisation minimale ; or, c'est la cotisation de péréquation qui est visée
à l'article 1648 D du code général des impôts cité dans l'amendement.
En deuxième lieu, plutôt que de prôner, ce qui semblerait logique, le maintien
du produit de la majoration au sein du FNPTP, vous suggérez de reverser à ce
dernier fonds des crédits provenant d'un relèvement des deux dernières tranches
du barème de l'impôt sur le revenu. Naturellement, sur cette orientation, vous
ne pouvez pas être en harmonie avec la majorité de la commission des finances,
qui est favorable à une baisse dudit barème.
En troisième lieu, du fait des mécanismes de l'enveloppe normée,
l'augmentation des crédits du FNPTP amplifierait mécaniquement la baisse de la
dotation de compensation de la taxe professionnelle.
Vous partez d'une constatation vraie, mais votre cheminement est un peu
contestable et la commission ne peut, madame Beaudeau, que vous inciter à
revoir votre dispositif.
Dans l'immédiat, la commission des finances est défavorable à cet
amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter,
secrétaire d'Etat.
Mme Beaudeau propose d'affecter l'augmentation de la
cotisation nationale de péréquation - même si l'exposé des motifs de son
amendement aborde un tout autre sujet, mais peu importe - au fonds national de
péréquation de la taxe professionnelle.
Le Gouvernement n'est pas favorable à cette disposition, pour deux raisons :
premièrement, comme je l'ai déjà expliqué, cette majoration de la cotisation de
péréquation fait partie d'un dispositif d'ensemble et apporte sa modeste
contribution à la réduction de la part salariale ; deuxièmement - et c'est une
information que je vous livre, madame Beaudeau, mais vous la connaissez sans
doute - le fonds national de péréquation de la taxe professionnelle verra ses
ressources augmenter de 12,7 % entre 1998 et 1999 grâce, notamment, au
reversement de l'excédent des produits de la fiscalité de La Poste et de France
Télécom.
Le Gouvernement a le souci de bien doter le fonds national de péréquation de
la taxe professionnelle sans avoir à recourir au dispositif que vous suggérez,
madame Beaudeau. Je vous demande donc de retirer votre amendement, faute de
quoi je serais contraint d'émettre un avis défavorable.
M. le président.
L'amendement n° I-123 est-il maintenu, madame Beaudeau ?
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Tout le monde avait très bien compris que je souhaitais tout simplement rendre
aux collectivités locales ce qui leur avait été pris.
En conséquence, monsieur le secrétaire d'Etat, je maintiens mon amendement.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-123.
M. Jean-Pierre Fourcade.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Fourcade.
M. Jean-Pierre Fourcade.
Je crois que Mme Beaudeau a posé une vraie question, que tout le monde se pose
: l'un des effets pervers - pardonnez-moi, monsieur le secrétaire d'Etat - du
texte qui nous est proposé est de réduire la péréquation de la taxe
professionnelle. Cette réduction n'était pas initialement visée, mais elle
résulte de la combinaison de la diminution de la part salariale étalée sur cinq
ans et de la montée en puissance des cinq dispositifs annexes que l'ingéniosité
des collaborateurs de M. le secrétaire d'Etat a mis en oeuvre pour essayer de
réduire pour l'Etat le coût de la réforme.
La taxe professionnelle comporte, à l'heure actuelle, chacun le sait, un
certain nombre de défauts. L'un des plus importants tient à l'insuffisance de
la péréquation, et surtout à sa mauvaise distribution. En effet, les deux
fonds, à savoir le fonds national de péréquation et le fonds national de
péréquation de la taxe professionnelle - grâce à la création d'un second fonds
par M. Pasqua, nous pouvons désormais les distinguer de manière très claire
(Sourires.)
- représentent 4 milliards de francs et concernent 18 000
communes. Il est évident que les chèques reçus par les communes au titre de la
péréquation sont, dans ces conditions, très faibles !
La position constante de ceux qui souhaitaient réformer la taxe
professionnelle a été de proposer d'augmenter la péréquation. Mais, à partir du
moment où l'Etat confisque la cotisation de péréquation et l'affecte au budget
général pour réduire les dépenses provenant de la suppression de la part
salaires, il est clair que, au terme de la période, la péréquation sera plus
faible et que nous irons vers une sorte d'impôt national, avec des taux de plus
en plus proches compte tenu de la montée en puissance de tous les
mécanismes.
Nous allons alors dans la direction de ce que le Conseil des impôts avait
proposé l'année dernière : nous nous écartons complètement de la logique de la
taxe professionnelle, qui était liée au développement de l'activité économique,
en en supprimant un tiers qui va devenir un principal fictif.
Je ne peux pas voter l'amendement de Mme Beaudeau, parce que la contrepartie
proposée ne me paraît pas satisfaisante : sur ce point, je partage les
arguments techniques de M. Marini.
Elle a cependant posé un vrai problème et l'on s'apercevra - mais, à mon avis,
un peu tard - que, dans la réforme proposée, la péréquation est négligée et
remplacée par des mécanismes budgétaires nationaux au travers desquels on va
essayer d'aligner toutes les entreprises. Nous allons vers un taux unique
national, ce qui est dommage tant pour la décentralisation que pour la
péréquation.
C'est l'un des graves effets pervers du texte, et je remercie Mme Beaudeau de
m'avoir donné l'occasion de le souligner devant le Sénat.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union
centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Michel Charasse.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse.
Moi, je n'aime pas beaucoup les choses qui ne sont pas claires.
En la matière, je m'attacherai à la forme et non au fond. En l'état, je ne
voterai pas, ni mes amis non plus, l'amendement n° I-123 présenté par Mme
Beaudeau. La démarche qu'elle nous propose aurait cependant été reçue
différemment par le Sénat si elle n'avait pas été soumise à la mécanique de
l'amendement.
Si j'ai bien compris, madame Beaudeau, ce qui déplaît, dans votre amendement,
c'est en effet le paragraphe II et non le paragraphe I. Votons donc par
division : repoussons le paragraphe I, il n'y aura plus besoin du paragraphe II
! A malin, malin et demi !
(M. Jean-Pierre Fourcade sourit.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-123, repoussé par la commission et le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme Marie-Claude Beaudeau.
On finira par y arriver !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Il faudra modifier votre dispositif !
M. le président.
Mme Beaudeau a reçu beaucoup de
satisfecit
durant toute cette
discussion, ceci compensant cela en partie.
(Sourires.)
M. Michel Charasse.
Ah, si on avait voté par division !
(Nouveaux sourires.)
M. le président.
Je suis maintenant saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une
discussion commune.
Par amendement n° I-36, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose de supprimer le C de l'article 29.
Par amendement n° I-124, Mme Beaudeau, MM. Loridant, Foucaud et les membres du
groupe communiste républicain et citoyen proposent de rédiger comme suit le C
de l'article 29 :
« C. - I. - Il est créé une taxe additionnelle à la taxe professionnelle sur
les actifs financiers assise sur l'ensemble des titres de placement et de
participation et les titres de marché monétaire figurant à l'actif du bilan
consolidé annuel à l'exception des titres de propriété concernant les filiales
à 51 % et plus et tout autre titre de société intégrée dans les comptes
consolidés, et les prêts à court, moyen et long terme. Pour les établissements
de crédit et tous établissements relevant de la loi bancaire, seuls les
portefeuilles de titres de placement en titres relevant des marchés de bourse
(actions, obligations et bons à plus de deux ans) dont le taux de rotation
serait supérieur à l'unité seront pris en compte pour 50 % de leur valeur. Pour
les sociétés d'assurance relevant du code des assurances, seront frappés, à
hauteur de 100 %, les actifs ne participant pas à la formation des réserves
techniques affectées aux risques assumés. En tout état de cause, et dans le
cadre de ces principes, il sera précisé, par décret, les modalités précises
applicables aux différents types d'établissements financiers d'assurance,
d'investissement et de crédit.
« II. - Le taux de la taxe perçue sur les actifs financiers visés au I
ci-dessus est fixé à 1 %. Il a vocation à augmenter progressivement sur une
période de cinq ans pour atteindre 1,5 %.
« III. - La taxe additionnelle à la taxe professionnelle est établie au lieu
du siège social.
« IV. - A. - Le I de l'article 1648 B
bis
du code général des impôts
est complété
in fine
par un 3° ainsi rédigé :
« 3° du produit résultant de la taxe perçue en application du C de l'article
29 de la loi n° du de finances pour 1999. »
« B. - Le même article est complété
in fine
par un VII ainsi rédigé
:
« VII. - Le supplément de taxe professionnelle perçue en application du C de
l'article 29 de la loi n° du de finances pour 1999 est versé au fonds
national de péréquation de la taxe professionnelle. Il est reversé aux communes
sur la base de l'indice synthétique des ressources et des charges défini à
l'article L. 2334-17 du code général des collectivités locales pour la dotation
de solidarité urbaine. »
Par amendement n° I-249, M. Angels, Mme Bergé-Lavigne, MM. Charasse,
Demerliat, Haut, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du
groupe socialiste et apparentés proposent de rédiger comme suit le début du
premier alinéa du paragraphe II du C de l'article 29 :
« Pour l'année 1999, la compensation prévue au I est égale au produit
obtenu... »
Par amendement n° I-250, M. Angels, Mme Bergé-Lavigne, MM. Charasse,
Demerliat, Haut, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du
groupe socialiste et apparentés proposent de rédiger ainsi les deux derniers
alinéas du paragraphe II du C de l'article 29 :
« Au titre des années ultérieures, les modalités de la compensation prévue au
I seront définies par une commission, composée de représentants de l'Etat et
des collectivités locales, et fixées par la loi de finances pour 2000, après
avis du Comité des finances locales.
« La composition de la commission est définie par décret en Conseil d'Etat.
»
Je rappelle que les amendements n°s I-249 et I-250 ont été précédemment
retirés.
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l'amendement n°
I-36.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Il s'agit d'un amendement de conséquence après le
vote intervenu sur l'amendement n° I-26.
M. le président.
La parole est à Mme Beaudeau, pour présenter l'amendement n° I-124.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous vous êtes assigné, avec la réforme de la
taxe professionnelle, un objectif : inciter les entreprises à la création
d'emplois. A cela, il y a deux conditions : prendre la mesure adéquate pour
inverser la courbe du chômage et consolider les ressources financières des
collectivités.
Que prévoit le projet de loi de finances au titre de cette préoccupation pour
l'emploi dans le cadre de la réforme de la taxe professionnelle ?
Il vise à supprimer la part salariale de la base de cet impôt afin d'alléger
le coût du travail global pour les entreprises. Cette politique d'allégement, à
l'oeuvre depuis quelques années, engendre d'énormes dépenses : l'équivalent du
tiers des déficits publics. Je pense qu'avec l'expérience son inefficacité au
regard de son coût a été largement démontrée.
Le groupe communiste républicain et citoyen se félicite de la suppression
progressive de l'élément salaires dans ce calcul. Néanmoins, une simple
suppression produirait des effets contraires à ceux qui sont prétendument
recherchés, le surplus de profits induit par cette suppression pouvant être
affecté par des entreprises à des placements financiers au détriment des actifs
physiques et matériels. Dans ce cas d'espèce, la suppression de la composante
salaires de la base de la taxe professionnelle servirait vraisemblablement à
vider de sa substance l'autre composante de la base, à savoir les actifs non
financiers.
C'est pour cette raison que nous proposons comme contrepartie l'inclusion des
actifs financiers sous forme de taxe additionnelle versée au fonds national de
péréquation.
Ces actifs financiers représentaient presque 70 % des actifs totaux des
entreprises en 1997, contre 30 % en 1981.
Nous considérons - je sais, mes chers collègues, que vous ne partagez pas
notre point de vue - que cette accumulation financière est sinon la seule
cause, du moins la cause fondamentale du taux de chômage constaté aujourd'hui
dans notre pays.
Nous proposons un prélèvement de 1 % sur les actifs financiers. Pour la grande
majorité des entreprises, ce prélèvement s'appliquerait à l'ensemble des titres
de placement et de participation, à l'exclusion des titres de propriété
concernant les filiales à 51 % ou plus, et ce, bien entendu, pour ne pas
pénaliser la détention d'actifs réputés liés à l'activité productrice.
Pour les établissements de crédit et tous les établissements relevant de la
loi bancaire, le prélèvement ne porterait pas sur les activités interbancaires.
Il ne concernerait qu'un seul segment des opérations pour compte propre, les
portefeuilles de titres de placement - actions, obligations et bons de plus de
deux ans - ces derniers n'étant pris en compte qu'à hauteur de 50 % de leur
valeur.
Ni les titres de participation, c'est-à-dire les opérations bancaires, ni les
titres de placement, à savoir les autres segments des opérations pour compte
propre, ne seraient inclus dans la base taxable.
Pour les sociétés d'assurance relevant du code des assurances, seuls les
actifs ne participant pas à la formation des réserves techniques affectées aux
risques, contrepartie des prestations, seraient intégrés dans la matière
imposable.
Au-delà de la simple compensation de la suppression de la part salaires,
l'intégration des actifs financiers dissuaderait les entreprises de pratiquer
l'accumulation financière, dont les effets en termes de destruction des
activités productives sont incontestables, et pourrait les réorienter vers leur
véritable vocation, à savoir la création de richesses réelles ainsi que le
développement de l'emploi, des formations et des qualifications.
Tels sont, mes chers collègues, les tenants et les aboutissants de cet
amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s I-36 et I-124 ?
M. Christian Sautter,
secrétaire d'Etat.
Personnellement, je ne vois guère de rapports entre
l'amendement n° I-36 et l'amendement n° I-124.
L'amendement n° I-36 étant, comme l'a dit M. le rapporteur général, un
amendement de conséquence, je ne peux, en toute cohérence, qu'y être
défavorable.
S'agissant de l'amendement n° I-124, je n'ai pas encore entendu l'avis de la
commission.
M. le président.
Quel est, effectivement, l'avis de la commission sur l'amendement n° I-124
?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je suis prêt à parier, monsieur le secrétaire d'Etat,
que c'est le même que le vôtre, c'est-à-dire défavorable !
M. le président.
Quel est maintenant l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° I-124 ?
M. Christian Sautter,
secrétaire d'Etat.
Soucieux que je suis de respecter les formes, je ne
voulais pas m'exprimer avant le rapporteur général, monsieur le président.
Madame Beaudeau, votre proposition de taxe professionnelle sur les actifs
financiers n'est pas très facile à mettre en oeuvre.
D'abord, la taxe professionnelle est un impôt local sur les établissements,
alors qu'il s'agit là d'un impôt sur les actifs financiers qui sont au siège de
l'entreprise et qui, de surcroît, sont facilement délocalisables.
Par ailleurs, lorsque vous taxez les titres financiers, vous taxez une taxe
professionnelle qui a déjà été prélevée sur les entreprises dont les titres
sont détenus par la société mère.
De plus, pour tenir des propos plus constructifs que M. le rapporteur général,
qui a été particulièrement laconique, je vous rappelle que la cotisation
minimale assise sur la valeur ajoutée pèse sur les activités financières, comme
l'avait remarqué M. Charasse avec l'acuité de la vision qui le caractérise.
Par ailleurs, l'avoir fiscal entre entreprises a été réduit, vous le savez.
Enfin, nous avons accepté en première lecture, à l'Assemblée nationale, de
rendre un peu moins favorables les relations financières entre sociétés mères
et filiales.
Donc, votre préoccupation a été prise en considération ailleurs qu'en matière
de taxe professionnelle, madame Beaudeau, et c'est pourquoi je vous demande de
bien vouloir retirer vorte amendement.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-36.
M. Michel Charasse.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse.
Comme il faut bien se distraire un peu, si je comprends bien, c'est là une
taxe qui serait perçue par l'Etat, donc une ressource de l'Etat, et qui serait
affectée aux collectivités locales par l'intermédiaire du fonds de compensation
!
Eh bien, c'est une affectation de recettes qui est interdite par la loi
organique !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-36, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'amendement n° I-124 n'a plus d'objet.
Par amendement n° I-37, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose de rédiger ainsi le D de l'article 29 :
« D. - Le Gouvernement remet chaque année au Parlement, avant le 1er octobre,
un rapport évaluant les résultats pour l'emploi de la réforme de la taxe
professionnelle prévue par le présent article et fournissant des simulations
sur les conséquences de celle-ci pour les entreprises, les collectivités
locales et l'Etat. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Dans sa rédaction actuelle, l'article 29 prévoit la
remise au Parlement, avant le 1er octobre 1999, d'un rapport évaluant les
résultats de la réforme en matière d'emploi et fournissant des simulations sur
les conséquences de ladite réforme sur les entreprises, les collectivités
locales et l'Etat.
Cette initiative est opportune, mais il est à prévoir qu'en octobre 1999 la
réforme, qui sera en cours d'application, n'aura pas encore engendré beaucoup
d'effets.
Le rapport d'étape n'est sans doute pas inutile, mais il serait, à nos yeux,
encore plus utile de suivre la réforme dans la durée, c'est-à-dire d'avoir
chaque année, avant le 1er octobre, un rapport nous indiquant comment les
choses ont évolué, tant il est vrai que cette réforme implique une évolution
des finances locales sur le moyen et le long terme.
Nous allons voir fonctionner un certain nombre de dispositifs complexes, et,
d'ailleurs, selon que l'on sera dans un système de compensation ou dans un
système de dégrèvement, les choses seront différentes.
En tout cas, il est indispensable que nous puissions suivre, en fonction de
l'évolution, les conséquences de la réforme sur l'emploi, les entreprises, les
collectivités locales et l'Etat.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement a promis de remettre un rapport avant
le 1er octobre 1999, et M. le rapporteur général en a pris acte. Le débat
budgétaire étant annuel, je ne doute pas que nous reparlerons de cette question
dans un an.
Je demande donc le retrait de l'amendement ; à défaut, j'en demanderai le
rejet.
M. le président.
L'amendement n° I-37 est-il maintenu, monsieur le rapporteur général ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Oui, monsieur le président.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-37, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 29, modifié.
(L'article 29 est adopté.)
Article 40 (priorité)