Séance du 21 janvier 1999







M. le président. Par amendement n° 192, MM. César, Althapé, Bernard, Besse, Bizet, Braun, Cazalet, Cornu, Courtois, Debavelaere, Doublet, Dufaut, Esneu, Flandre, Fournier, François, Gaillard, Gérard, Gerbaud, Goulet, Gruillot, Hamel, Hugot, Jourdain, Larcher, Lassourd, Lauret, Leclerc, Le Grand, Martin, Murat, Ostermann, de Richemont, Rispat, de Rohan, Taugourdeau, Vasselle, Vinçon, Vissac et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent d'insérer, après l'article 4, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le deuxième alinéa, il est inséré dans l'article L. 411-35 du code rural trois alinéas ainsi rédigés :
« Le preneur peut procéder à la cession du bail au bénéfice d'un jeune agriculteur.
« La possibilité pour le preneur de céder son bail à un jeune agriculteur peut être enregistrée lors de la signature du bail ou lors de son renouvellement. Dans ce cas, le prix du fermage du bail initial ou renouvelé est fixé librement entre les parties. Le preneur fait connaître au bailleur son intention de céder le bail par lettre recommandée avec avis de réception.
« Lorsque le bail initial ou renouvelé n'a pas prévu la possibilité de cession au profit d'un jeune agriculteur, le preneur ne peut procéder à la cession du bail qu'avec l'agrément écrit du bailleur. »
« II. - Après le 3° du 2, il est inséré dans l'article 793 du code général des impôts un alinéa ainsi rédigé :
« 3° bis . Les biens donnés à bail dans les conditions prévues au quatrième alinéa de l'article L. 411-35 du code rural, à concurrence de 50 % de leur valeur, sous réserve des dispositions de l'article 793 bis . »
« III. - Dans le premier alinéa de l'article 793 bis du code général des impôts, les mots : "et au 3°" sont remplacés par les mots : "ainsi qu'aux 3° et 3° bis ".
« IV. - La perte de recettes pour l'Etat résultant des I, II et III ci-dessus est compensée par une majoration des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus à l'article 403 du même code. »
La parole est à M. César.
M. Gérard César. Cet amendement, qui est important, introduit un nouveau cas de cessibilité du bail au profit d'un jeune agriculteur afin de faciliter la politique d'installation.
Cette cessibilité en faveur des jeunes agriculteurs est encouragée par un avantage fiscal au profit du bailleur qui accepte la demande de cession de son preneur.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Souplet, rapporteur. La commission comprend d'autant mieux l'argumentation de M. César que ce dernier l'avait déjà développée devant elle.
Cet amendement reprend les articles 18 et 19 du projet Vasseur, qui ouvraient un nouveau cas de cessibilité du bail. Néanmoins, cette disposition soulève plusieurs difficultés : outre qu'elle figure sous un titre relatif au CTE dans lequel elle n'a pas sa place, elle a trait à un sujet très délicat puisqu'il s'agit de créer un nouveau cas de cessibilité du bail. Le Sénat peut-il créer aujourd'hui un nouveau dispositif sans qu'un nombre minimum de partenaires différents aient été consultés ?
De plus, il s'agirait de créer un cas spécifique nouveau pour l'agriculture, comme je l'ai expliqué devant la commission.
Enfin, il m'appartient de vous informer que cette disposition a fait l'objet d'un refus catégorique de la part de la très grande majorité des propriétaires agricoles et de la Fédération nationale de la propriété lors de son inscription dans le projet de loi précédemment mentionné.
Je m'étonne, au demeurant, de trouver parmi les signataires de cet amendement des sénateurs qui sont par ailleurs très sensibles à la cessibilité du bail !
Au nom de la commission, je demande donc soit le retrait de cet amendement, soit son rejet.
M. le président. Monsieur César, maintenez-vous votre amendement ?
M. Gérard César. Je souhaiterais entendre M. le ministre !
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le sénateur, peut-être pensez-vous que j'ai plus de chances de vous convaincre que M. le rapporteur ?
M. Gérard César. Tout à fait !
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. J'en doute ! En tout cas, je me range à l'avis de M. le rapporteur.
Comme cela nous est déjà arrivé ce matin, nous abordons là des problèmes très sensibles. En l'occurrence, c'est le statut du fermage qui est en cause et je pense que moins on y touche, mieux cela vaut. S'engager dans cette modification, lourde de sens, au détour d'un amendement me paraîtrait imprudent et peu sage.
Je souhaite donc le retrait de cet amendement.
M. le président. Etes-vous convaincu, monsieur César ?
M. Gérard César. Oui, monsieur le président, et je retire l'amendement.
M. Emmanuel Hamel. Quelle force de conviction, monsieur le ministre ! (Sourires.)
M. le président. L'amendement n° 192 est retiré.

Articles additionnels après l'article 4
ou après l'article 7 bis

M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 193, MM. César, Althapé, Bernard, Besse, Bizet, Braun, Cazalet, Cornu, Courtois, Debavelaere, Doublet, Dufaut, Esneu, Flandre, Fournier, François, Gaillard, Gérard, Gerbaud, Goulet, Gruillot, Hamel, Hugot, Jourdain, Larcher, Lassourd, Lauret, Leclerc, Le Grand, Martin, Murat, Ostermann, de Richemont, Rispat, de Rohan, Taugourdeau, Vasselle, Vinçon, Vissac et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent d'insérer, après l'article 4, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article L. 341-3, il est inséré dans le code rural un article L. ... ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Le fonds exploité, dans l'exercice d'une activité agricole au sens des dispositions de l'article L. 311-1 du code rural, par une personne physique ou morale qui n'a pas la qualité de commerçant est dénommé fonds agricole. Sont seuls susceptibles d'être compris dans le fonds agricole l'enseigne et le nom professionnel, la clientèle et l'achalandage, les marques, le mobilier professionnel, le matériel ou l'outillage servant à l'exploitation du fonds ainsi que les autres droits de propriété industrielle, droits de commercialisation ou de production qui y sont attachés. Le bail rural, lorsqu'il est fait application du quatrième alinéa de l'article L. 411-35, peut faire partie du fonds agricole.
« Ce fonds agricole peut faire l'objet d'une vente ou d'un nantissement dans les conditions et sous les formalités prévues par la loi du 17 mars 1909 relative à la vente et au nantissement du fonds de commerce et sous réserve des dispositions du présent chapitre et des textes pris pour son application.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe en tant que de besoin les modalités d'application du présent article ».
« II. - L'article 732 du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Art. 732. - Les actes constatant la cession de gré à gré de cheptel et autres objets mobiliers dépendant d'une exploitation agricole et ceux constatant la mutation de propriété à titre onéreux d'un fonds agricole tel que défini à l'article L. ... du code rural (I ci-dessus) sont enregistrés au droit fixe de 500 francs. »
« III. - La perte de recettes pour l'Etat résultant des I et II ci-dessus est compensée par une majoration des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus à l'article 403 du même code. »
Par amendement n° 430 rectifié, M. Revet propose d'insérer, après l'article 7 bis, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article L. 341-3, il est inséré dans le code rural un article L. ... ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Le fonds exploité, dans l'exercice d'une activité agricole au sens des dispositions de l'article L. 311-1, par une personne physique ou morale qui n'a pas la qualité de commerçant est dénommé fonds agricole.
« Sont seuls susceptibles d'être compris dans le fonds agricole l'enseigne et le nom professionnel, la clientèle et l'achalandage, les marques, le mobilier professionnel, le cheptel, le matériel ou l'outillage servant à l'exploitation du fonds ainsi que les autres droits de propriété industrielle qui y sont attachés.
« Ce fonds agricole peut faire l'objet d'une vente ou d'un nantissement dans les conditions et sous les formalités prévues par la loi du 17 mars 1909 relative à la vente et au nantissement des fonds de commerce et sous réserve des dispositions du présent chapitre et des textes pris pour son application.
« Lorsque ce fonds est cédé pour permettre l'installation d'un candidat encouragé par la politique d'installation définie à l'article L. 330-1, les références de production ou droits à aides sont transmis gratuitement en même temps que le fonds. Le cessionnaire doit impérativement en informer le représentant de l'Etat dans le département dans un délai d'un mois.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe en tant que de besoin les modalités d'application du présent article. »
« II. - Les pertes de recettes pour l'Etat résultant du I ci-dessus sont compensées par un relèvement à due concurrence des droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. César, pour présenter l'amendement n° 193.
M. Gérard César. La création d'un fonds agricole, à l'image du fonds de commerce, permet de reconnaître l'entreprise agricole en tant qu'entreprise tout en reconnaissant dans le même temps sa valeur économique.
En cas de transmission, les droits d'enregistrement sont ceux qui étaient antérieurement applicables à la cession de gré à gré de cheptels et autres objets mobiliers agricoles.
M. le président. L'amendement n° 430 rectifié est-il soutenu ?...
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 193 ?
M. Michel Souplet, rapporteur. Je suis désolé vis-à-vis de mon ami M. César,...
M. Philippe François. Brutus ! (Sourires).
M. Michel Souplet, rapporteur. ... mais, si la commission approuve la création d'un fonds agricole dès lors que cela a fait l'objet d'une véritable réflexion d'ensemble, tel n'est pas le cas dans la mesure qui nous est proposée.
Cet amendement se heurte à des difficultés majeures : l'agriculture est une activité civile, or les clientèles civiles ne peuvent pas, en principe, faire l'objet d'une cession ; le bail rural étant par essence attaché à la personne même du preneur, mettre le bail incessible dans le fonds agricole est donc impossible ; toutefois, ne pas l'inclure rend le fonds agricole totalement inopérant ; en outre, l'instauration du fonds agricole risque de provoquer la généralisation des pas-de-porte, ce qui serait une contrainte supplémentaire pour les agriculteurs et représenterait un nouvel obstacle à l'installation.
Par ailleurs, la commission s'interroge sur l'opportunité d'une transposition au droit rural de solutions propres au droit commercial, alors même que ces solutions ne sont pas exemptes de critiques en matière commerciale.
La propriété commerciale est, certes, une notion juridique séduisante, mais ne conduit-elle pas à freiner les investissements productifs et à créer des professions fermées qui s'abritent derrière leur droit d'entrée pour se protéger de la concurrence ? Nous avons malheureusement vu nombre de commerces disparaître pour ces raisons.
De plus, si la notion de fonds de commerce est bien ancrée dans notre droit, il faut reconnaître que c'est une spécialité française qu'on ne retrouve pas à l'identique dans les autres pays de l'Union européenne.
Avant de juger les inconvénients de notre droit rural à l'aune du droit commercial, il sera probablement nécessaire d'examiner dans quelles conditions le problème du statut de l'entreprise, qu'elle soit commerciale ou agricole, a été résolu dans les autres pays de l'Union !
Outre la question du bail rural et de sa cessibilité éventuelle, la création de ce fonds agricole soulève inévitablement le problème de l'hypothétique valeur patrimoniale des références de production.
L'amendement qui nous est proposé pourrait donner lieu à de multiples interprétations : rien n'est dit sur la transmission des références de production en même temps que du fonds. Est-ce à dire qu'il existe une possibilité d'une transmission à titre onéreux de ces références ?
On voit donc bien, sous le bénéfice de ces explications, que le dispositif qui nous est proposé est intéressant mais qu'il pose beaucoup plus de questions qu'il n'en résout.
C'est pourquoi la commission est défavorable à cet amendement, dont elle souhaite le retrait. A défaut, je demanderais qu'il soit mis aux voix par scrutin public.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Mon avis est, comme pour le précédent amendement, conforme à celui de M. le rapporteur.
Là encore, vous posez, monsieur César, une vraie question, que je ne rejette pas d'un revers de la main en disant que le dispositif proposé est complètement fou. Ce sont de vrais problèmes, qui méritent que l'on y réfléchisse sérieusement. Loin derrière ce que vous esquissez - peut-être pas si loin, d'ailleurs - se profile la commercialisation du droit à produire.
M. Gérard César. Bien vu !
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Vous constatez que, malgré ma grippe, je vois à plus de dix mètres ! (Sourires.)
Quand je discute avec mes collègues européens des quotas laitiers, je constate que, s'il s'en trouve qui, actuellement, voudraient la fin de ces quotas, c'est justement parce qu'ils ne sont pas soumis à une gestion administrative et gratuite, mais à une logique commerciale. Ils s'en mordent les doigts, parce qu'ils n'ont pas de véritable contrôle sur ces quotas laitiers.
Vous le voyez, ce n'est pas si simple, cela doit être manié avec beaucoup de pincettes. Je pense, comme M. le rapporteur, qu'un peu de sagesse et le retrait de cet amendement nous feraient beaucoup de bien.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 193.
M. Philippe François. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. François.
M. Philippe François. Nous avons eu, ce matin, un long et très intéressant débat quant à la potentielle - sinon future - forme juridique de l'exploitation agricole.
Je crois qu'il faut lier les deux éléments : cette notion de fonds de commerce, qui n'existe effectivement pas dans des pays comme l'Allemagne ou l'Italie, est inscrite de longue date dans notre droit national pour ce qui est du commerce et de l'industrie. Par conséquent, lorsque nous accepterons - et nous l'accepterons certainement un jour peu ou prou - l'idée que l'exploitation agricole est une entreprise, on ne pourra pas dissocier de cette réflexion le fait qu'il faut y associer tout ce qui constitue l'entreprise telle qu'elle existe aujourd'hui.
Il nous faudra donc naturellement apporter des modifications dans les termes pour nous mettre à parité avec les autres pays européens, à moins que les autres pays nous rejoignent, ce qui est possible aussi.
Cela étant, compte tenu des arguments que nous avons entendus, nous retirons l'amendement.
M. le président. L'amendement n° 193 est retiré.

Article additionnel après l'article 4

M. le président. Par amendement n° 194, MM. Larcher, Althapé, Bernard, Besse, Bizet, Braun, Cazalet, César, Cornu, Courtois, Debavelaere, Doublet, Dufaut, Esneu, Flandre, Fournier, François, Gaillard, Gérard, Gerbaud, Goulet, Gruillot, Hamel, Hugot, Jourdain, Lassourd, Lauret, Leclerc, Le Grand, Martin, Murat, Ostermann, de Richemont, Rispat, de Rohan, Taugourdeau, Vasselle, Vinçon, Vissac et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent d'insérer, après l'article 4, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Les entreprises agricoles qui sont en difficulté économique et qui sont situées en zone périurbaine peuvent faire l'objet d'un classement en zone franche agricole.
« Lorsqu'elles sont classées en zone franche agricole, ces entreprises agricoles bénéficient d'exonérations fiscales, d'aides à la création d'emplois et d'allégements des charges sociales.
« Les cultures arboricoles et maraîchères situées à proximité des grandes agglomérations urbaines bénéficient de ce dispositif.
« II. - Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du I.
« III. - La perte de recettes pour l'Etat résultant du I est compensée par une majoration des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus à l'article 403 du même code. »
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. Je présente cet amendement n° 194 au nom de l'ensemble de nos collègues du groupe du RPR, en particulier de M. Gérard Larcher, qui en a été l'inspirateur.
L'agriculture couvre actuellement plus de la moitié des espaces périurbains situés aux abords de nos villes. Elle est menacée par l'extension progressive de l'urbanisation, qui « grignote » peu à peu le territoire agricole et déstabilise les exploitations.
Les relations entre les agriculteurs et les « néoruraux » ne sont également pas toujours faciles. Certains citadins, venus à la campagne pour trouver une nature qui n'existe que dans leur imagination, se déclarent incommodés par les activités agricoles ordinaires telles que l'élevage ou les traitements phytosanitaires.
Que dire, en outre, des déprédations dont sont l'objet les récoltes de certains arboriculteurs à proximité des quartiers « sensibles » ? Dans certaines zones de l'Ile-de-France, le manque à gagner qui résulte des vols atteint parfois 25 % !
La situation des arboriculteurs est spécialement préoccupante : ils sont tout particulièrement à la merci des incidents climatiques, des variations des cours. Il semble d'ailleurs, nous le notons au passage, que les services du ministère de l'agriculture soient extrêmement réticents pour leur venir en aide dès lors qu'ils commercialisent leur production sur un marché forain.
Cette situation est inacceptable. C'est pourquoi nous croyons nécessaire de créer des zones franches agricoles analogues aux zones franches urbaines, les ZFU, qui ont été instituées, voilà deux ans, à l'occasion du pacte de relance pour la ville. Quoi qu'en dise le Gouvernement - inspiré sur ce point par le Quai de Bercy, qui les trouve trop coûteuses -, les ZFU sont un succès.
Nous avons plus que jamais besoin de ceintures vertes autour de nos agglomérations : 75 % de nos concitoyens sont désormais des citadins.
Voilà pourquoi cet amendement a été présenté. Aussi allons-nous écouter avec intérêt l'avis de M. le rapporteur de la commission des affaires économiques et du Plan et celui de M. le ministre.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Souplet, rapporteur. J'espère que ce que je vais rappeler à nos amis, au nom de la commission, suscitera l'intérêt. M. Larcher était d'ailleurs présent en commission lorsque ce problème a été évoqué, et nous en avons longuement débattu. Par conséquent, je me bornerai à redire ce qui me paraît le plus important, sans entrer dans un long développement.
Il est vrai que ce problème existe, et s'étend même aujourd'hui à des départements situés au-delà de la ceinture parisienne, autour des grandes villes.
La proposition de création de zones franches agricoles est intéressante, mais elle soulève tout de même une interrogation. En effet, la commission a souhaité remettre à plat l'ensemble du dispositif fiscal et social des différents acteurs du monde rural avant de légiférer en la matière. Créer de nouvelles zones d'exonération, fussent-elles périurbaines, atténuerait la portée de ce travail en entraînant à nouveau des disparités non seulement entre différentes professions mais également au sein même du secteur agricole.
En outre, l'article 47 du projet de loi crée des zones agricoles protégées. Ainsi, ces zones franches agricoles se superposeraient à ces zones agricoles protégées. Le zonage n'est-il pas déjà suffisamment complexe ?
Enfin, je signale que M. Larcher avait tenu à m'entretenir de ces problèmes spécifiques aux départements proches de la région parisienne, il y a déjà quelque temps, et qu'il m'a demandé de participer à un colloque qui aura lieu ici même, au Sénat, sur ce thème, dans quelques semaines.
En conclusion, la commission ayant rejeté ce texte, je souhaite que ses auteurs veuillent bien le retirer.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Là encore, le problème soulevé est réel, je ne le nie pas ; la situation de l'arboriculture, du maraîchage dans les zones périurbaines est, c'est vrai, préoccupante.
Ce problème, il y a trois manières de le régler, et vous avez quelque peu mélangé les trois, monsieur Vasselle. Si c'est un problème de sécurité, ce n'est pas la création d'une zone franche qui permettra de le régler ; si c'est un problème fiscal, je peux invoquer l'article 40 ; si c'est un problème de terres, je vous répondrai, comme M. le rapporteur, que nous en traiterons tranquillement au titre V, avec les zones agricoles protégées.
Pour toutes ces raisons, je souhaite, moi aussi, que l'amendement soit retiré. L'idée de créer une zone franche agricole en zone périurbaine est sûrement intéressante, mais elle n'est certainement pas appropriée.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 194.
M. André Lejeune. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Lejeune.
M. André Lejeune. Je ne nie pas la réalité des problèmes qu'a évoqués M. Vasselle.
Je dois dire toutefois que je l'ai devancé de beaucoup. En effet, voilà déjà plusieurs années, j'avais demandé la création d'une zone franche dans la Creuse. Pour attirer l'attention de la presse, nous avions même retourné les Marianne.
Si donc cet amendement devait être adopté, je demanderais, par sous-amendement, que l'on classe également la Creuse en zone franche.
M. le président. Une fois que l'amendement sera adopté, ce sera difficile, mon cher collègue !
M. Alain Vasselle. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. Je veux d'abord remercier M. le rapporteur d'avoir élargi le champ de nos considérations à l'ensemble des grandes agglomérations de notre pays.
Il est évident - c'est mon interprétation, dans la mesure où je ne suis pas mandaté par notre collègue Gérard Larcher pour le dire - que le problème qui se pose avec peut-être plus d'acuité en Ile-de-France se pose également dans d'autres régions où se trouvent de grandes agglomérations, comme la région lyonnaise, la région marseillaise ou la région bordelaise.
Pour ce qui est de la reconnaissance de la réalité du problème à la fois par M. le rapporteur et par M. le ministre, je souhaite simplement au nom de l'ensemble des cosignataires de cet amendement, avoir l'assurance - j'ai cru comprendre qu'il en serait ainsi - que à l'occasion de la discussion de l'article 47, on prendra en compte les situations du type de celles que nous avons exposées et que, ainsi, une réponse pourra être apportée à notre préoccupation commune, et notamment à celle de notre collègue Gérard Larcher.
Si tel est le cas, je prendrai la responsabilité, au nom de mes collègues, de retirer l'amendement.
M. Bernard Piras. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Piras.
M. Bernard Piras. Les appréciations des uns et des autres sur les zones franches en zone urbaine sont sans doute nuancées. En effet, les résultats ne sont pas toujours à la hauteur de ce qu'on attendait. En plus, cela coûte très cher.
Traiter des zones franches agricoles au détour de la discussion d'un amendement me paraît précipité.
Par ailleurs, leur instauration créerait encore des difficultés entre les agriculteurs eux-mêmes et entre les diverses professions. De plus, elle accentuerait peut-être la disparité « 80 % - 20 % » qui gêne tant un certain nombre de nos collègues.
Pour toutes ces raisons, nous ne voterons pas l'amendement. Cela étant dit, le problème existe, et il faudra bien lui trouver une solution.
M. Jean François-Poncet, président de la commission des affaires économiques et du Plan. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean François-Poncet, président de la commission des affaires économiques et du Plan. Cette discussion sur les zones franches me rappelle les observations qui ont été faites lors du débat sur l'aménagement du territoire.
L'idée d'une zone franche agricole est bonne. Simplement, il n'y a aucune raison de ne l'appliquer qu'aux zones périurbaines. Personnellement, je l'appliquerais tout aussi volontiers, sinon plus volontiers, aux zones en voie de désertification.
On a créé des zones franches urbaines. A cette occasion, j'avais demandé au Gouvernement de l'époque, issu d'une autre majorité, s'il comptait également proposer la création de zones franches agricoles dans les départements en voie de déshérence. Cela aurait en effet permis de créer non pas une activité agricole mais des activités industrielles ou de services. On m'avait alors renvoyé à mes études.
Si donc cette notion devait revoir le jour, je souhaiterais qu'on ne la limite pas aux zones périurbaines, dont je ne nie d'ailleurs pas les problèmes. Elle ne serait en effet riche qu'à condition qu'on l'applique aussi à d'autres territoires.
M. Gérard César. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. César.
M. Gérard César. L'amendement vise les entreprises agricoles en difficulté économique. Il s'agit donc d'un secteur tout à fait ciblé ; toutes les entreprises de la zone ne sont pas concernées.
Par ailleurs, M. le rapporteur nous a précisé que cet amendement pourraît être pris en compte lors de la discussion de l'article 47. Si tel est le cas, compte tenu de cet engagement, nous retirerons l'amendement.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Je dirai d'abord que l'on a toujours tort de renvoyer M. François-Poncet à ses études, surtout quand il fait des propositions à ce point fondées sur le bons sens.
Au fond, il s'agit plus d'une question d'environnement social et de sécurité que d'une question de nature économique.
Voilà pourquoi ma première réaction a été de dire que, si l'on devait créer des zones franches agricoles, Mme Bardou serait sûrement l'une des premières intéressée,...
M. Jean François-Poncet, président de la commission des affaires économiques et du Plan. Exactement !
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. ... de même que M. Althapé, en Béarn, pour lutter contre la désertification de certaines zones de montagne.
C'est un dispositif lourd. Il convient donc de réfléchir avant de l'envisager uniquement dans les zones périurbaines.
M. César a dit à l'instant qu'étaient seulement visées les entreprises agricoles situées en zone périurbaine et connaissant des difficultés. Mais, par définition, le classement en zone franche fait que toutes les entreprises situées à l'intérieur de cette zone géographique, et pas seulement celles qui éprouvent des difficultés économiques, sont concernées.
Encore une fois, c'est un vrai problème, mais la réponse apportée est problématique.
L'engagement que je peux prendre, au nom du Gouvernement, c'est non pas qu'on reprenne cette disposition lors de l'examen du titre V, mais que l'on en reparle à ce moment-là.
Créer une zone franche en milieu périurbain me paraît beaucoup trop problématique. A travers les zones agricoles protégées, on s'attaque au problème sous un autre angle, celui des terres.
Je demande donc aux auteurs de l'amendement de bien vouloir le retirer pour que nous en reparlions plus tard.
M. le président. L'amendement est-il maintenu, monsieur Vasselle ?
M. Alain Vasselle. Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président. L'amendement n° 194 est retiré.

Article 5