Séance du 9 février 1999
M. le président. La parole est à M. Robert, auteur de la question n° 421, adressée à M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.
M. Jean-Jacques Robert. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous constatons, en même temps que l'évolution du téléphone portable - 5 millions d'abonnés en 1997 et 11 millions au début de cette année - des difficultés de plus en plus nombreuses entre les acheteurs et les distributeurs.
J'ai été le rapporteur du projet de loi sur le code de la consommation dans sa partie législative et je suis amené depuis à suivre de près la protection des consommateurs.
Quelles sont les difficultés qui sont rencontrées ?
L'acheteur qui passe un contrat, en particulier avec un forfait de communications, se voit offrir, ou presque, l'appareil.
Inexpérimenté, il se retrouve souvent mal dans les obligations contractuelles qu'il doit signer chez le distributeur, rarement avec l'opérateur, et dont il subira plus tard les contraintes, au fil de l'utilisation.
La publicité d'appel subordonne la vente à des conditions très avantageuses pour un abonnement forfaitaire. Le débutant peut se tromper dans ce qu'il recherche.
J'ajouterai encore que l'information donnée par les opérateurs ou par les distributeurs lors de la signature du contrat est insuffisante.
Par ailleurs, l'obligation du paiement par prélèvement automatique mensuel conduit à une mauvaise gestion du compte de l'utilisateur et à des surprises désagréables. Celui-ci devrait avoir le choix du mode de paiement, sans subir de pression au moment de la signature.
En outre, notons des conditions tarifaires variables au gré de l'opérateur en cas de dépassement de ce fameux forfait, ainsi que l'utilisation de clauses abusives. Il s'agit en particulier de la modification unilatérale, au gré de l'opérateur, des conditions de facturation et de l'achat au prix fort d'un nouvel appareil en cas de perte, de casse ou de besoins plus modernes, et ce à des conditions totalement différentes de celles du contrat d'origine, entraînant, du reste, le changement de numérotation.
Par ailleurs, dans la publicité d'appel et dans le forfait d'abonnement, le coût réel de l'appareil portable est caché. Ainsi, très souvent, à la signature du contrat d'abonnement, le consommateur a une fausse appréciation de sa valeur.
Pour éviter ces pratiques condamnables, trois recommandations semblent nécessaires.
En premier lieu, l'acheteur devrait bénéficier d'un délai de rétractation de sept jours, comme dans d'autres situations de position dominante, après signature du contrat.
En deuxième lieu, les contrats d'abonnement devraient mentionner la faculté soit d'un dépôt de garantie, soit d'une avance de paiement dans le cas où le client refuserait le prélèvement automatique qui lui est imposé.
En troisième lieu, en cas de modification des tarifs, le consommateur devrait pouvoir résilier son contrat, sans pénalité, à son initiative.
Pensez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, que cette situation vous conduise à prendre des mesures allant dans le sens que je viens d'exprimer ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget. Monsieur le sénateur, vous avez interrogé le Gouvernement à propos de l'achat de téléphones mobiles, en soulignant l'état d'explosion de ce marché. Vous avez, par exemple, cité le chiffre de 11 millions d'abonnés à la fin de 1998 - les spécialistes prévoient que, d'ici à la fin de l'an 2000, donc d'ici à deux ans, ce seront vingt millions d'abonnés qui posséderont un téléphone mobile.
Il est donc clair que les questions que vous posez sur la commercialisation des téléphones mobiles sont importantes.
La première d'entre elles porte sur l'existence d'un délai de rétractation, c'est-à-dire d'une sorte de délai de réflexion permettant de réfléchir après coup à l'opportunité d'un achat.
Or le téléphone mobile est un bien de consommation courant et non un bien de consommation durable, comme une automobile ou une machine à laver, et c'est donc la règle de droit commun qui s'applique, c'est-à-dire celle qui prévaut lors d'un achat immédiat dans une boutique.
Cela étant - et vous le savez, monsieur le sénateur, puisque vous êtes orfèvre en la matière - le délai de rétractation de sept jours existe dans le cas où l'appareil a été acheté à la suite d'un démarchage, c'est-à-dire lorsque le vendeur est venu à votre domicile vous proposer un contrat, ou lorsqu'il s'agit d'opérations de vente à distance. Dans ces deux cas, le consommateur est protégé comme vous le souhaitez.
Vous avez aussi insisté sur le fait que, dans certains cas, il a été procédé à des modifications unilatérales des conditions de facturation. Ce que vous dites est tout à fait exact.
La commission des clauses abusives, qui est placée auprès de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, examine en ce moment les clauses qui comportent des modifications unilatérales de tarification. Le Gouvernement devrait disposer des recommandations de cette commission à la fin du premier semestre de 1999 ; il en tirera les conséquences.
Par ailleurs, à partir des plaintes qui ont été déposées par des consommateurs auprès des services de la répression des fraudes, nous sommes en train d'établir un inventaire des conditions d'information des consommateurs, qui, vous l'avez dit, dans un certain nombre de cas, ne sont pas tout à fait satisfaisantes.
Vous le voyez, monsieur le sénateur, sur ce marché en développement très rapide, le Gouvernement a le souci de protéger le consommateur contre des pratiques commerciales qui, certes, sont exceptionnelles, mais n'en sont pas moins condamnables.
M. Jean-Jacques Robert. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Robert.
M. Jean-Jacques Robert. Je vous remercie de ces précisions, monsieur le secrétaire d'Etat. Je croyais bien savoir, en effet, que la commission des clauses abusives travaillait sur ce sujet.
Je souhaitais surtout, étant donné le « boom » que vous avez évoqué et qui touche beaucoup de jeunes, très souvent inexpérimentés au regard de ce type de clauses, que cela ne dure pas trop et que des mesures soient prises rapidement.
Par ailleurs, il existe une autorité de régulation des télécommunications ; je me demande si cette autorité, qui, d'après les informations dont je dispose, ne le fait pas actuellement, ne devrait pas s'intéresser à ces questions et, pour la partie qui peut relever de sa compétence, tenter de préserver des difficultés actuelles non pas l'opérateur, ce qui pourrait être le cas, mais le consommateur.
M. le président. Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à seize heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à midi, est reprise à seize heures quinze, sous la présidence de M. Guy Allouche.)