Séance du 1er avril 1999
M. le président. La parole est à M. Vissac.
M. Guy Vissac. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et porte sur l'annonce des nouvelles prévisions économiques du Gouvernement.
Voilà seulement quatre mois, le Sénat, notamment par la voix du président de notre groupe, M. Josselin de Rohan, et de mon collègue, M. Philippe Marini, mettait en garde le Gouvernement sur les conséquences de son excès d'optimisme.
M. Jacques Mahéas. C'était la même chose l'année dernière !
M. Guy Vissac. La prévision - ou plutôt le pari - sur lequel reposait votre budget pour 1999 était de 2,7 % de croissance. Aujourd'hui, vous nous annoncez une fourchette de 2,2 % à 2,5 %, donnant ainsi acte au Sénat de la justesse de son analyse, et ce malgré la fin de non-recevoir que vous opposiez à nos avertissements. (Très bien ! sur les travées du RPR.)
Ces nouvelles prévisions reposent sur l'hypothèse d'école selon laquelle l'environnement international et celui de la zone euro vont cesser de se dégrader. Le Gouvernement nous dit à présent que tout devrait aller mieux au deuxième semestre. Or, les plus récentes prévisions de l'INSEE indiquent que l'amélioration annoncée est, hélas ! contredite par une dégradation observable.
« Les faits sont têtus », monsieur le secrétaire d'Etat, et ces prévisions modifient vos marges de manoeuvre, les recettes de la croissance n'étant pas au rendez-vous. Face à cette situation, quelle option allez-vous privilégier ?
Allez-vous encore resserrer un étau fiscal qui étouffe les énergies individuelles et fait figurer notre pays au triste palmarès des plus imposés d'Europe ? L'augmentation constante de la dépense publique est une tentation et le meilleur moyen de la faire cesser est de ne pas y succomber !
Allez-vous revenir sur certaines de vos promesses coûteuses, comme la réduction autoritaire et uniforme du temps de travail ? Allez-vous vous engager fermement sur la voie de la réduction des déficits afin que nos enfants ne soient pas astreints à régler une dette qu'ils n'ont pas eux-mêmes contractée ? Sans quoi, pour reprendre la phrase de Clemenceau, notre pays continuera à planter plus d'impôts pour récolter davantage de fonctionnaires.
Monsieur le secrétaire d'Etat, en finances publiques, les paris sont hasardeux. Il ne s'agit pas de théologie ; nous, en Auvergne, les compatriotes de Blaise Pascal, nous sommes bien placés pour le savoir !
Pourriez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, dire clairement aux Français qui nous écoutent quelle voie le Gouvernement entend emprunter ? (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget. Monsieur le sénateur, comme il est rituel en cette saison, la direction de la prévision du ministère des finances a publié des perspectives de croissance pour les années 1999 et 2000.
Pour l'année 1999, la prévision que nous faisons se situe effectivement entre 2,2 % et 2,5 %, alors que nous avons établi le budget, chacun s'en souvient, sur une perspective de croissance de 2,7 %.
M. Alain Lambert. Malgré ce qu'on vous a dit au Sénat !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Monsieur le président de la commission des finances, nous avons beaucoup débattu de ce sujet.
Je voudrais mentionner brièvement deux éléments de confiance.
M. Alain Vasselle. Vous êtes toujours confiants !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Depuis l'été 1997, ce n'est plus la demande extérieure qui tire l'économie française ; c'est, pour l'essentiel, la demande intérieure, en particulier la consommation des ménages, elle-même bénéficiaire de gains de pouvoir d'achat exceptionnels parce que l'emploi se développe. (Vives exclamations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Dominique Braye. Le pouvoir d'achat des emplois-jeunes !
M. Jean-Claude Carle. On n'a pas les mêmes chiffres !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. L'année 1998 est une année reccord puisque 400 000 emplois ont été créés. D'un mois sur l'autre, il peut y avoir des variations, mais il est clair que le pouvoir d'achat des Français a crû de façon exceptionnelle (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)...
M. le président. Je vous en prie, mes chers collègues, un peu de silence ! Seul M. le secrétaire d'Etat a la parole.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. ... et que la hausse des prix, chacun l'a reconnu, est plus faible que prévu. Donc, la consommation des ménages est forte.
Le logement connaît une des meilleures années de la décennie (Rires sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.), ...
M. Dominique Braye. Tout va très bien, madame la marquise !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. ... en particulier grâce aux mesures fiscales qui ont été adoptées à l'occasion du budget pour 1999, et l'investissement des entreprises, qui a connu un moment d'hésitation durant le trou d'air de l'automne, est reparti d'après les dernières enquêtes sérieuses dont on dispose.
M. Dominique Braye. Bref, tout a repris !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Voilà pour le premier élément de confiance qui nous permet d'espérer une croissance entre 2,2 et 2,5 %.
M. Alain Gournac. Poisson d'avril !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Le second élément de confiance réside dans la comparaison de notre taux de croissance - et vous y avez très justement fait allusion - avec les taux de croissance allemand ou italien - 1,5 %.
M. le président. Concluez, monsieur le secrétaire d'Etat !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je conclus, monsieur le président !
En 1999, puis en 2000, nous aurons un des plus beaux taux de croissance de l'Union européenne (Protestations sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants, et de l'Union centriste.), ... et je m'arrêterai sur cette note de satisfaction ! (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Jacques Mahéas. Taisez-vous les sauvageons !
Mme Hélène Luc. Ils ne sont pas sérieux !
M. Henri de Richemont. Mieux vaut être « sauvageons » que « godillots » !
M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d'actualité au Gouvernement.
Mes chers collègues, avant d'aborder la suite de l'ordre du jour, nous allons interrompre nos travaux pendant quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures quinze.)