Séance du 12 mai 1999
M. le président. Par amendement n° 83, M. Marini, au nom de la commission, propose d'insérer, après le deuxième alinéa du texte présenté par l'article 50 pour l'article 62-2 de la loi n° 96-597 du 2 juillet 1996 de modernisation des activités financières, un alinéa ainsi rédigé :
« - les conditions dans lesquelles, par dérogation aux dispositions de l'article 62, les porteurs personnes physiques d'instruments financiers émis par un organisme de placement collectif en valeurs mobilières sont couverts dans la limite du plafond d'indemnisation prévu à l'alinéa précédent contre l'indisponibilité de tout ou partie des instruments financiers figurant à l'actif de l'organisme ; ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. Cet amendement, qui porte sur un sujet significatif, tend à prévoir que les porteurs de titres d'un OPCVM sont indemnisés de la même manière que s'ils détenaient leurs titres en direct.
Je prendrai, pour concrétiser mon propos, l'exemple suivant : soit un épargnant qui détient, d'un côté, des parts de SICAV ou de fonds communs de placement et, d'un autre côté, des titres de créance sur un établissement bancaire ; cet établissement bancaire est le teneur des comptes, et la société de gestion des OPCVM est sa filiale.
Le projet de loi qui nous est soumis prévoit que le mécanisme de garantie des titres s'applique aux créances détenues par l'épargnant sur la banque. Les mêmes créances peuvent se trouver à l'actif des OPCVM dont l'épargant est porteur de parts. En cas de défaillance de la banque, les créances détenues directement seront indemnisées dans le plafond prévu par la loi, alors qu'il n'y aura pas d'indemnisation en fonction de la perte de valeur liquidative des parts des OPCVM.
Nous souhaitons que cette distorsion soit corrigée et que les porteurs de titres d'un OPCVM soient indemnisés de la même manière que s'ils détenaient les titres en direct. Tel est l'objet de l'amendement n° 83.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Le Gouvernement comprend bien la philosophie qui anime M. le rapporteur et la rédaction de cet amendement. Toutefois, quelques problèmes de principe et quelques difficultés techniques existent.
Les problèmes de principe viennent du fait que, dans tous les pays de l'Union européenne, les OPCVM sont considérés comme des investisseurs professionnels et, de ce point de vue, ne relèvent pas de la même procédure que les investisseurs physiques. Cela a d'ailleurs conduit les pays de l'Union européenne, lors de la transposition de la directive sur la garantie des titres, à n'inclure en aucune manière les OPCVM parmi les détenteurs de titres susceptibles de bénéficier d'indemnisation.
Autrement dit, ni nos partenaires ni même la directive ne prennent en compte les OPCVM dans les procédures d'indemnisation.
Au-delà de cette raison de principe ou de cohérence avec nos partenaires, reste une difficulté technique qui est sans doute à l'origine de la réserve qu'ont manifestée les Etats membres : on ne voit pas très bien comment calculer les cotisations puisque, pour cela, il faudrait connaître exactement le nombre de porteurs de parts d'OPCVM, qui n'est pas connu. Le calcul des opérations serait donc extrêmement compliqué. Par ailleurs, il faudrait pouvoir déterminer qui paie ces cotisations : le dépositaire, le teneur de compte ou la société de gestion ?
Nous entrons là dans un maquis assez complexe qui a dissuadé tous nos partenaires de s'engager dans cette voie.
Au-delà de ces arguments, si nous étions les seuls à assujettir les titres détenus sous forme d'OPCVM à une procédure de garantie, nous générerions un surcoût pour les primes qui les rendrait peu compétitives par rapport à celles de nos voisins. Au moment où nous cherchons à développer la place de Paris, ce serait délicat !
En nous exonérant de cette procédure, courons-nous un risque particulier ? Non, parce que la caractéristique des OPCVM est de répartir les risques entre les détenteurs de parts. L'indemnisation n'a donc pas la même nature que pour un porteur individuel dont une part importante de portefeuille serait investie dans tel ou tel titre subissant une dépréciation liée à une situation financière délicate.
Ce dispositif est moins nécessaire qu'il ne l'est pour les détenteurs de titres physiques. Il est plus complexe, car on ne sait pas très bien comment il serait assis. Il est aussi sans doute nuisible sur le plan de la concurrence avec nos voisins.
Voilà pourquoi le Gouvernement n'a pas souhaité étendre cette procédure aux OPCVM, même si l'auteur de cet amendement la souhaite la plus large possible, ce qui n'est pas en contradiction avec la philosophie de ce projet de loi.
Compte tenu de ces différents inconvénients, le Gouvernement ne peut pas accepter cet amendement, mais je proposerai volontiers à M. le rapporteur un travail en commun sur les modalités à mettre en oeuvre pour que, dans un prochain texte, un DDOEF ou un collectif, on puisse étudier la possibilité de faire quelques chose pour les OPCVM. Mais il ne faut pas agir de façon trop rapide et directe, car les inconvénients que j'évoque sont réels et nombreux.
M. Philippe Marini, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. J'ai écouté avec une grande attention les explications et l'analyse de M. le ministre.
Il demeure qu'un problème d'équité se pose : un épargnant peut avoir simultanément deux positions d'investisseur, avec une certaine garantie d'un côté et une autre garantie de l'autre. En cas de défaillance de l'entreprise, dans un cas comme dans l'autre, l'actif sera dévalorisé et, à partir d'un même événement économique, deux séries de conséquences en découleront en fonction de la garantie apportée. Il y aura donc bien inéquité au niveau de l'épargnant.
Mais il existe aussi, vous avez raison de le souligner, monsieur le ministre, des problèmes juridiques liés à la nature même des OPCVM et des problèmes de compétitivité entre opérateurs à l'intérieur du grand marché européen des services financiers.
Il est clair que toutes les questions techniques n'ont pas été résolues. A l'évidence, on ne peut pas se satisfaire - l'idée avait été avancée - d'un plafonnement global à 400 000 francs pour l'ensemble de l'OPCVM considéré comme un seul investisseur, car cela ne résout pas le problème au niveau des porteurs de parts de l'OPCVM.
Cela étant, monsieur le ministre, vous faites une ouverture en nous disant que vous n'êtes pas opposé à ce que cette question soit approfondie. Vous reconnaissez qu'elle existe, même si nous n'avons pas nécessairement apporté tous les éléments techniques de réponse. Au demeurant, nous ne le pouvions pas !
Par conséquent, en fonction de l'ouverture que vous esquissez et en vous demandant, monsieur le ministre, de bien vouloir accepter d'associer notre commission des finances à l'étude qui permettra d'aboutir à un éventuel dispositif dans le cadre d'un prochain texte, si vous nous confirmez que votre intention est bien de mettre fin à l'inéquité de traitement entre les deux positions que j'évoquais, j'accepte pour le moment, en raison de la bonne volonté qui nous anime l'un comme l'autre dans cette discussion, de retirer cet amendement.
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je confirme que l'intention du Gouvernement est bien celle-ci, monsieur le rapporteur.
M. le président. L'amendement n° 83 est retiré.
Par amendement n° 84, M. Marini, au nom de la commission, propose de rédiger ainsi le quatrième alinéa du texte présenté par l'article 50 pour l'article 62-2 de la loi n° 96-597 du 2 juillet 1996 de modernisation des activités financières :
« - le montant global et la formule de répartition des cotisations annuelles dues par les établissements mentionnés à l'article 62, dont l'assiette est constitutée de la valeur des dépôts et des instruments financiers qui sont couverts par la garantie en vertu de l'article 62, pondérée par les cotisations déjà versées ainsi que par des indicateurs de la situation financière de chacun des établissements concernés, reflétant les risques objectifs que l'adhérent fait courir au fonds ; ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de portée essentiellement rédactionnelle, précisant que les cotisations ont pour assiette principale le montant des dépôts et des titres indemnisables.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 84, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 85, M. Marini, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit le cinquième alinéa du texte présenté par l'article 50 pour l'article 62-2 de la loi n° 96-597 du 2 juillet 1996 de modernisation des activités financières :
« - les conditions dans lesquelles la moitié de ces contributions n'est pas versée au fonds de garantie moyennant la constitution de garanties appropriées ; ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. Cet amendement est retiré, par symétrie avec le sort réservé à l'amendement identique présenté sur le fonds de garantie des dépôts. Car je suppose, monsieur le ministre, que vous nous apporteriez les mêmes explications !
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. C'est exact, monsieur le rapporteur !
M. le président. L'amendement n° 85 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article 62-2 de la loi n° 96-597 du 2 juillet 1996.
(Ce texte est adopté.)
ARTICLE 62-3 DE LA LOI N° 96-597 DU 2 JUILLET 1996