Séance du 1er juin 1999
DÉPÔT D'UNE QUESTION ORALE
AVEC DÉBAT
M. le président.
J'informe le Sénat que j'ai été saisi de la question orale avec débat suivante
:
M. Jean-Claude Carle appelle l'attention de Mme le ministre délégué chargé de
l'enseignement scolaire sur le rapport Dubet sur le « collège de l'an 2000 »,
qui vient de dresser un bilan sans complaisance du collège sans filières.
Confirmant les résultats d'autres enquêtes, ce rapport établit que, loin
d'assurer l'égalité entre élèves, le collège unique a conduit à accroître les
disparités. Qu'il s'agisse du nombre d'élèves en difficulté, de jeunes issus de
milieux défavorisés, de l'immigration ou des résultats scolaires, les écarts
n'ont cessé de se creuser.
Créée pour éviter la concurrence entre les collèges et le regroupement des
élèves favorisés dans les établissements réputés les meilleurs, la carte
scolaire est allègrement contournée. Plus préoccupant, il ressort du rapport
Dubet que, selon les enseignants, un quart des élèves ne maîtrise pas les
connaissances de base.
Alors que le collège unique est depuis longtemps battu en brèche, notamment
dans le cadre des zones d'éducation prioritaire, le Gouvernement vient pourtant
d'en réaffirmer le principe pour justifier son programme de rénovation des
collèges. Prendre en compte la diversité des élèves est d'une évidente
nécessité. Mais il est à craindre que la méthode et les moyens annoncés par Mme
le ministre délégué chargé de l'enseignement scolaire ne répondent pas à
l'enjeu ni à l'urgence.
Il y a la vision égalitariste du Gouvernement et il y a la réalité. A feindre
de croire que tous les enfants sont à l'identique, l'hétérogénéité des classes
pénalise autant les élèves les plus forts que les plus faibles.
A raisonner essentiellement dans l'optique de l'enseignement général, au
détriment de l'enseignement technique et professionnel, l'éducation nationale
ne donne pas aux élèves et à leur famille la possibilité de choisir. A toujours
réfléchir en termes quantitatifs et non qualitatifs, et à réinventer sans cesse
les mêmes recettes, on oublie que la réforme est d'abord un problème de
mobilisation et de coordination des personnes plutôt que celui d'une
insuffisance de moyens. A découper le sytème éducatif en tranches et à
enchaîner les réformes sans les évaluer, ni même leur laisser le temps de
s'appliquer, l'Etat ne sait dire où va l'enseignement dans son ensemble ni à
quoi il sert. Enfin, à multiplier les consultations sans jamais poser les
vraies questions ni tirer profit des réponses pour changer les choses, on ne
gagne qu'à décourager les personnels, les parents et les jeunes.
Après avoir affirmé sa volonté de réussir la mutation du collège des années
2000 grâce à un collège pour tous et pour chacun, que compte proposer le
Gouvernement pour favoriser l'égalité des chances ? Considère-t-il que la
mission de notre système éducatif est de permettre à chaque élève de s'épanouir
en fonction de sa personnalité et de ses propres capacités, et admet-il que le
collège peut être aussi un lieu d'excellence ? Est-il prêt à reconnaître qu'un
élève qui ne sait ni lire, ni écrire, ni compter, ne peut entrer en 6e, et à
engager au plus tôt l'évaluation pour prévenir l'échec scolaire ? Comment
entend-il agir pour renforcer l'orientation et faire de l'enseignement
technique et professionnel autre chose qu'un pis aller pour les élèves en
situation d'échec ? Est-il disposé à tirer parti des conséquences positives de
la décentralisation pour permettre à chaque établissement de développer son
projet pédagogique en partenariat avec la communauté éducative et les acteurs
économiques ? Est-il d'accord pour revoir en conséquence la gestion de la carte
scolaire qui cesse de nier la réalité de la sélection ? Enfin, répondant aux
conclusions de la commission d'enquête du Sénat, quelles mesures le
Gouvernement envisage-t-il de prendre pour optimiser la gestion des personnels
de l'éducation nationale et redéployer les moyens humains là où les besoins
sont les plus importants ? (N° 16.)
Conformément aux articles 79 et 80 du règlement, cette question orale avec
débat a été communiquée au Gouvernement et la fixation de la date de la
discussion aura lieu ultérieurement.
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