Séance du 26 octobre 1999
M. le président. La parole est à Mme Derycke, auteur de la question n° 600, adressée à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité.
Mme Dinah Derycke. Madame la secrétaire d'Etat, je souhaite appeler votre attention sur l'application de la loi relative à la lutte contre les exclusions et, en particulier, sur les dispositions de ce texte destinées à éviter les coupures d'eau des usagers défaillants.
Interpellée à plusieurs reprises par des associations de lutte contre la précarité, plusieurs cas de coupures d'eau m'ont été signalés dans le département du Nord.
Dans ce département, les diverses institutions qui négocient actuellement le plan départemental d'action pour le logement des plus démunis souhaitent légitimement y intégrer un dispositif juridique global. Celui-ci permettrait à la fois de régler les dettes des usagers en matière de fourniture d'énergie, d'eau et de téléphone et d'assurer un minimum de ces services pour ceux qui ne peuvent y accéder dans des conditions normales.
Toutefois, les dispositions relatives à l'élaboration de ce plan ne s'achèveront qu'au printemps 2000 ; une année nous sépare donc de sa mise en application.
S'il est vrai que la multiplicité des intervenants et la diversité de leurs statuts ne facilitent pas une négociation rapide, il existe déjà, en matière de fourniture téléphoniques et d'énergie, des conventions consacrant un service minimum au bénéfice des populations en difficulté.
Dans certains départements même, il semble que des chartes de solidarité liant fournisseurs et organismes sociaux autorisent une fourniture d'eau minimum pour chacun.
Depuis le dépôt de cette question, j'ai appris, madame la secrétaire d'Etat, que, grâce à la célérité de vos services et à la diligence de la préfecture du Nord, les cas précis que j'avais signalés et qui ont motivé cette intervention ont été réglés. Je m'en félicite.
Je souhaiterais toutefois savoir s'il n'est pas possible, dans l'attente de l'achèvement des négociations des plans départementaux d'action pour le logement, de prendre des mesures s'appliquant à l'ensemble des cas similaires qui se présentent dans notre pays, afin d'assurer la distribution d'un minimum d'eau aux ménages en difficulté et de répondre ainsi à des situations d'urgence sociale inacceptables.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. Madame la sénatrice, vous soulevez dans votre question un problème essentiel de solidarité auquel le Gouvernement porte la plus grande attention.
La loi de lutte contre les exclusions a réaffirmé le principe du droit au logement et des droits qui lui sont liés. En effet, le droit au logement n'est pas simplement le droit aux murs ; c'est aussi le droit à un certain nombre d'éléments de confort et de services liés, et nous souhaitons développer l'accès à l'ensemble de ces droits.
Pour assurer le bon fonctionnement de ces nouvelles procédures, l'Etat a considérablement accru sa dotation au fonds de solidarité logement, le FSL. Elle est ainsi passée de 275 millions de francs, en 1997, à 340 millions de francs en 1998 et à 490 millions de francs en 1999.
Chacun d'entre nous sait, pour avoir parfois été privé d'eau ou d'électricité quelques heures, à l'occasion de travaux ou d'événements fortuits, combien la perte de ces services constitue une gêne insupportable et, lorsqu'elle se prolonge, une véritable atteinte à la dignité.
Comme vous l'avez signalé, cela n'est plus acceptable aujourd'hui. C'est pourquoi il était indispensable d'agir pour éviter les coupures.
Le Gouvernement a donné, depuis le vote de la loi de lutte contre les exclusions, des instructions sur ce point pour faire respecter un principe simple : aucune coupure d'électricité ou d'eau ne doit plus intervenir sans qu'un service social compétent ait été préalablement saisi pour trouver une solution.
Pour l'électricité, vous l'avez rappelé, un fonds spécifique est en place. Il est abondé par l'Etat, par EDF et par les autres partenaires locaux. Ce dispositif fonctionne aujourd'hui efficacement et EDF a d'ailleurs pris l'engagement, en 1998, de ne plus procéder à aucune coupure avant que ce fonds ait pu être mobilisé. Mis à part quelques incidents que vous nous avez signalés et qui nous ont permis de réagir rapidement, les choses évoluent très positivement dans ce domaine.
Pour l'eau, la question est plus difficile puisque, dans de très nombreux immeubles, notamment en HLM, la facture est non pas individualisée mais intégrée au sein des charges collectives. Elle relève à ce titre du dispositif FSL qui, je le rappelle, a fait l'objet d'un fort abondement par l'Etat.
Pour les situations dans lesquelles un compteur d'eau individuel existe, un dispositif spécifique a été créé. Il repose sur la possibilité pour les créanciers des factures d'eau de consentir des annulations de créance.
Cependant, en matière d'eau, il existe une multitude de fournisseurs - les grandes compagnies de distribution d'eau, bien sûr, mais aussi les plus petites, sans oublier toutes les régies municipales - et il est donc difficile de déployer une intervention coordonnée et cohérente.
Le système actuel, qui repose sur un accord de tous les créanciers, est très lourd à mettre en place et à faire fonctionner. Cela explique les difficultés que vous nous avez signalées dans certains départements.
D'ores et déjà, toutefois, je le souligne, nous avons demandé qu'aucune coupure d'eau ne puisse intervenir sans saisine préalable des services sociaux. Cela permet de dégager des solutions dans le cadre des dispositifs généraux qui existent déjà, notamment avec les différentes aides d'urgence coordonnées au sein des commissions d'action sociale d'urgence. Celles-ci sont normalement mises en place dans tous les départements, même si nous constatons quelquefois des difficultés.
Si l'on considère les principaux fonds utilisables pour le logement dans le cadre des crédits destinés à la lutte contre la pauvreté et la précarité et du fonds de solidarié logement, la participation de l'Etat est passée de 415 millions de francs en 1997, à 510 millions de francs en 1998, et 720 millions de francs en 1999, auxquels s'ajoutent 100 millions de francs mis en place à la fin de 1998 au profit des départements qui connaissent des difficultés particulières et identifiées.
Par ailleurs, nous avons décidé de modifier le système actuel en mettant en place un nouveau dispositif fondé non plus sur l'abandon de créance mais sur la création d'un fonds pour les impayés d'eau, à l'image de ce qui existe pour l'énergie. Nous en négocions actuellement les modalités avec les distributeurs d'eau. Sa mise en place effective devrait être proche - dans les mois qui viennent, nous l'espérons.
Avec la création de tarifs sociaux et d'un fonds d'impayés pour le téléphone, qui sont maintenant en place, c'est donc le droit à vivre décemment chez soi qui a été réaffirmé par la loi relative à la lutte contre les exclusions.
Mme Dinah Derycke. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke. Je vous remercie, madame la secrétaire d'Etat, de m'avoir apporté des compléments d'information et d'avoir souligné la volonté du Gouvernement de mettre effectivement en oeuvre la loi relative à la lutte contre les exclusions.
Je vois bien les avancées qui ont été réalisées, et je comprends bien que la difficulté provient, concernant l'eau, de la multiplicité des intervenants.
Cependant, une information plus largement répandue auprès du grand public permettrait peut-être que ce genre de situation ne se reproduise plus, car les personnes les plus démunies sont souvent celles qui méconnaisent le plus leurs droits. Cela permettrait aussi une réaction plus rapide.
INSTALLATION D'UN IRM À MONTÉLIMAR