Séance du 4 novembre 1999
M. le président. La parole est à M. Murat.
M. Bernard Murat. Ma question est celle d'un élu du peuple, libre, responsable, qui n'a fait l'objet ni d'accord ni de censure, et elle s'adressait à Mme le ministre de la justice, garde des sceaux.
Depuis l'affaire de la Mutuelle nationale des étudiants de France, la MNEF, ce gouvernement ressemble à un bateau ivre (Protestations sur les travées socialistes,...)
M. Roland Courteau. Vous l'avez perdu, le bateau !
M. Bernard Murat. ... et le capitaine déboussolé a perdu le cap.
Les Français ont découvert, hier, la véritable nature du Premier ministre ; elle est indigne d'un homme d'Etat. Sa réponse est choquante sur la forme et totalement irresponsable sur le fond. (Très bien ! sur les travées du RPR. - Protestations sur les travées socialistes.)
Nous avons appris, durant le week-end, la décision du procureur Dintilhac, ancien directeur de cabinet d'Henri Nallet, de muter subitement et contre son gré Mme Fulgéras, chef de la section des affaires financières du parquet de Paris.
M. Claude Estier. Vous êtes mal informé !
M. André Rouvière. C'est mesquin !
M. Bernard Murat. Ce magistrat supervisait notamment l'enquête sur la MNEF.
M. René-Pierre Signé. Et l'Himalaya ?
M. Bernard Murat. Même si l'application de cette décision a été repoussée au mois de décembre, doit-on considérer, madame le ministre, que le gouvernement auquel vous appartenez tente de dissimuler aux Français l'existence d'un lien financier trop étroit entre de hauts responsables du parti socialiste et la MNEF ? Doit-on lier le « vrai-faux » départ de Mme Fulgéras à son jugement sur les conclusions de la commission d'enquête parlementaire sur la MNEF, dont le rapporteur socialiste, également député de la Corrèze, avait vainement tenté de masquer les réels dysfonctionnements ?
Votre conception de l'indépendance de la justice est une supercherie. (Exclamations sur les travées socialistes.)
M. Jacques Mahéas. C'est choquant !
M. Bernard Murat. Votre discours vertueux se heurte aujourd'hui au mur de la réalité.
Plusieurs sénateurs socialistes. La question !
M. Jacques Mahéas. Heureusement qu'il ne parle pas souvent !
M. Bernard Murat. Madame le ministre, est-il bien sérieux de prôner, comme vous le faites, l'indépendance de la justice alors que, d'une part, vous facilitez les changements d'affectation de magistrats compétents, chargés d'enquêter sur l'affaire de la MNEF, qui visiblement encombre et dérange le gouvernement auquel vous appartenez...
M. le président. Veuillez poser votre question, monsieur le sénateur.
M. Bernard Murat. J'y viens, monsieur le président.
... et que, d'autre part, vous décidez de supprimer d'un trait de plume la sous-direction des affaires économiques et financières de votre ministère, dirigée par Michel Dobkine, qui, justement, chapeautait l'enquête sur la MNEF ?
Madame le ministre, expliquez-vous !
M. Jacques Mahéas. Vous avez raison de ne pas applaudir, mes chers collègues !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Daniel Vaillant, ministre des relations avec le Parlement. Mesdames, messieurs les sénateurs, je ne reviendrai pas sur les premiers propos de M. Murat, le Premier ministre ayant répondu hier avec sang-froid à une question de M. Ollier, député des Hautes-Alpes. (Exclamations sur les travées du RPR, ainsi que sur certaines travées des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. Alain Lambert. Nous sommes au Sénat !
M. Daniel Vaillant, ministre des relations avec le Parlement. En ce qui concerne le véritable objet de la question, comme Mme le garde des sceaux l'a déjà expliqué à plusieurs reprises à l'Assemblée nationale, l'organisation interne des juridictions et l'affectation des magistrats, qu'ils soient du siège ou du parquet, dans les différents services du tribunal sont de la compétence exclusive des chefs de juridiction et ne relèvent ni du garde des sceaux ni du Conseil supérieur de la magistrature.
Pour en venir à la situation de Mme Fulgéras, celle-ci est l'un des quarante premiers substituts en poste au parquet de Paris. Depuis plus de cinq ans, elle est l'un des chefs de section du parquet financier. Elle est placée, à ce titre, sous l'autorité hiérarchique du premier procureur adjoint chargé de la division économique et financière et du procureur de Paris.
En outre, je rappelle que le parquet est un et indivisible, que c'est non pas Mme Fulgéras qui est chargée de l'affaire de la MNEF, mais deux juges d'instruction, M. Riberrolles et Mme Neher, et que, par ailleurs, c'est l'ensemble du parquet de Paris qui suit l'ensemble des affaires de délinquance économique et financière, comme l'ensemble des affaires de délinquance.
Depuis plus d'un an, le procureur de Paris a entrepris la réorganisation des services du parquet pour permettre une plus grande territorialisation de ceux-ci et une meilleure harmonisation avec les services de police judiciaire. Le garde des sceaux a approuvé ces orientations permettant de faire coïncider une justice de proximité et une police de proximité.
Cette nouvelle organisation, qui a fait l'objet d'une concertation interne, a donné lieu à une présentation à la presse en mai dernier. Elle s'est traduite, pour l'ensemble du parquet, par des mutations et des changements d'affectation. Ainsi, outre le cas de Mme Fulgéras, quatre chefs de section ont changé de service.
Un sénateur socialiste. Eh oui !
M. Daniel Vaillant, ministre des relations avec le Parlement. Dès l'été, le procureur de la République a avisé Mme Fulgéras de sa décision. Comme vous avez pu le lire dans la presse, le procureur de la République a différé l'application de cette mesure à la fin de l'année. Cette décision lui appartient.
Voilà donc, monsieur Murat, vous qui êtes un sénateur de Corrèze manifestement toujours intéressé par ce qui se passe à Paris, des éléments de réponse à votre question. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen. - Exclamations sur les travées du RPR.)
M. Bernard Murat. Vous ne m'avez pas répondu !
UNIFICATION DES RÉSEAUX D'ÉTABLISSEMENT
DE L'ASSIETTE ET DE LA PERCEPTION
DES RECETTES FISCALES