Séance du 24 novembre 1999
RATIFICATION D'ORDONNANCES RELATIVES
AU DROIT APPLICABLE OUTRE-MER
Suite de la discussion
et adoption de quatre projets de loi
M. le président.
Nous reprenons la discussion des projets de loi n°s 420, 421, 422 et 423
portant ratification des ordonnances relatives aux mesures législatives
nécessaires à l'actualisation et à l'adaptation du droit applicable
outre-mer.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Trucy, rapporteur
de la commission des finances.
M. François Trucy,
en remplacement de M. Henry Torre, rapporteur de la commission des finances,
du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.
Mon propos
va vous paraître bien fade après le rappel au règlement de notre collègue M.
Charasse !
L'examen par notre assemblée des différents projets de loi portait
ratification d'ordonnances relatives à l'actualisation du droit en vigueur
outre-mer est une bonne nouvelle, dont il convient de se féliciter.
Le Gouvernement n'était pas obligé d'inscrire ces projets de loi à l'ordre du
jour du Parlement. En effet, l'article 38 de la Constitution ne subordonne le
maintien en vigueur des ordonnances qu'au seul dépôt du projet de loi de
ratification.
C'est une bonne nouvelle également parce que l'étendue des domaines concernés
par ces projets de loi témoigne de la volonté du Gouvernement d'actualiser le
droit en vigueur outre-mer, qui accuse un retard certain par rapport à la
métropole.
Cette volonté de rattrapage avait conduit le Gouvernement à demander au
Parlement de l'autoriser, par la loi d'habilitation du 6 mars 1998, à prendre
des ordonnances dans dix-sept domaines. Elle l'a conduit plus récemment à
étendre le champ de la nouvelle loi d'habilitation à douze autres domaines.
D'une certaine manière, avec l'examen par le Parlement des projets de loi de
ratification, les choses rentrent enfin dans l'ordre et le Parlement peut
maintenant exercer son contrôle sur les dispositions que le Gouvernement
propose d'inscrire dans notre législation.
J'en viens aux quatre ordonnances qui relèvent de la compétence de la
commission des finances et dont le projet de loi n° 422 propose la
ratification.
La première ordonnance porte le numéro 98-524 et concerne le contrôle par
l'administration des douanes des échanges de marchandises entre la Guadeloupe
et la Martinique. Les importateurs et les exportateurs de biens entre ces deux
îles doivent remplir une déclaration auprès de l'administration des douanes.
Les sanctions du non-respect de cette obligation sont alignées sur celles qui
sont applicables en matière de TVA.
La deuxième ordonnance porte le numéro 98-525 et est d'une tout autre portée
puisqu'elle a pour objet de « mettre à jour » les dispositions des codes des
douanes applicables dans les territoires d'outre-mer, en Nouvelle-Calédonie et
dans les collectivités territoriales de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon
en matière de pouvoirs des agents des douanes et de procédures contentieuses
douanières. C'est un vaste chantier, monsieur le secrétaire d'Etat, car les
dispositions actualisées ici ne l'ont pas été, au pire, depuis 1963 et, au
mieux, depuis 1977.
En outre, cette ordonnance - et c'est une bonne chose - renforce la lutte
contre le blanchiment de capitaux, en prévoyant que les personnes qui entrent
et qui sortent d'un des territoires concernés par cette ordonnance avec des
sommes de plus de 50 000 francs doivent en faire la déclaration à
l'administration des douanes. N'oublions pas de rappeler que cette obligation
déclarative existe en métropole. Elle existera dorénavant outre-mer.
J'en viens maintenant à la troisième ordonnance, qui porte le numéro 98-581.
Elle résulte d'une demande du territoire de la Polynésie française qui, à la
suite de l'introduction de la TVA, en 1998, a exprimé le besoin de moderniser
les règles qui lui sont applicables en matière de recouvrement et de
contentieux de l'impôt. Le texte de l'ordonnance est un décalque des
dispositions en vigueur en métropole, en tenant cependant compte des
spécificités de l'organisation administrative et juridictionnelle de la
Polynésie.
La dernière ordonnance, qui porte le numéro 98-775, est d'un tout autre «
calibre », si je puis employer ce terme. Elle a pour objet de mettre à jour le
droit des activités financières applicable outre-mer et elle transpose
notamment la loi de modernisation des activités financières du 2 juillet
1996.
Je voudrais, monsieur le secrétaire d'Etat, m'arrêter un instant sur cette
dernière ordonnance, car, ainsi que vous le verrez, la commission des finances
a adopté six amendements tendant à la modifier. Ces amendements ont tous le
même objet : étendre à l'outre-mer la rédaction en vigueur des textes visés par
l'ordonnance.
En effet, - faut-il le rappeler ? - une ordonnance ne peut étendre que des
textes dans leur rédaction en vigueur à la date de la loi d'habilitation. Or,
les textes visés par l'ordonnance n° 775 ont été profondément modifiés, d'une
part, par le DDOEF de juillet 1998 et, d'autre part, par la loi relative à
l'épargne et la sécurité financière que nous avons examinée avant l'été
1999.
Il nous est donc apparu nécessaire de ne pas étendre à l'outre-mer des
dispositions déjà obsolètes en métropole.
Le cas particulier de cette ordonnance me conduit à formuler une remarque de
portée plus générale : le recours à la procédure des ordonnances, par laquelle
le Parlement renonce à ses prérogatives législatives, doit rester exceptionnel,
comme cela a déjà été évoqué par les précédents rapporteurs.
Pour cela, il convient tout d'abord de profiter des projets de loi de
ratification d'ordonnances pour aller plus loin et, si c'est nécessaire, pour
étendre à l'outre-mer les textes en vigueur en métropole.
Mais il convient surtout de veiller à mieux prévoir les modalités
d'application outre-mer de chacun des textes dont nous débattons et que nous
votons.
Au nom de la commission des finances, et en espérant que vous partagerez notre
volonté de ne pas accroître le retard du droit en vigueur outre-mer par rapport
à la législation applicable en métropole, je recommanderai au Sénat d'adopter
ce projet de loi.
Encore une fois, monsieur le secrétaire d'Etat, nous saluons vos efforts
d'actualisation du droit de l'outre-mer, et nous remercions vos collaborateurs
pour tout le travail enrepris. Mais, pour éviter que les textes aient trop
souvent besoin d'être actualisés, nous comptons sur vous pour inciter vos
collègues à mieux prendre en compte les spécificités de l'outre-mer dans les
projets de loi qu'ils soumettent à l'examen du Parlement. Dans la mesure du
possible, et dans le respect du partage des compétences, la loi doit rester la
même sur l'ensemble du territoire.
M. le président.
La parole est à M. Huchon, rapporteur de la commission des affaires
économiques et du Plan.
M. Jean Huchon,
rapporteur de la commission des affaires économiques et du Plan.
Monsieur
le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, intervenant
en dernier lieu, au nom de la commission des affaires économiques, je ferai
simplement deux remarques d'ordre général avant d'exposer brièvement le contenu
des ordonnances, en m'associant à tout ce qui a été dit par mes prédécesseurs
sur l'heureux dénouement de la ratification de ces textes.
Premièrement, je regrette que les ordonnances soumises à la ratification du
Parlement ne soient pas annexées au projet de loi de ratification, alors même
qu'elles peuvent être amendées.
Deuxièmement, et toujours dans le souci d'améliorer l'accès à la connaissance
du droit applicable, je pense que beaucoup de progrès restent à faire - mes
prédécesseurs en ont parlé - s'agissant de l'outre-mer. Hormis leur publication
au
Journal officiel
au moment de leur adoption, ces textes, qu'il
s'agisse de lois ou d'ordonnances, ne sont regroupés nulle part et il est très
difficile d'obtenir, sur un point précis, l'état du droit applicable. Il serait
heureux qu'on édite un code qui soit propre à l'outre-mer, sur le modèle de
celui qui était en vigueur jusqu'en 1953.
S'agissant du projet de loi de ratification examiné par la commission des
affaires économiques, il faut souligner que les collectivités territoriales
d'outre-mer consultées ont toutes émis un avis favorable sur le contenu des
ordonnances qui les concernaient.
L'ordonnance n° 98-520 du 24 juin 1998 s'applique exclusivement à la
collectivité territoriale de Mayotte et ouvre au Centre national pour
l'aménagement des structures des exploitations agricoles, intervenant dans les
structures agricoles, l'exercice du droit de préemption pour une durée de cinq
ans maximum.
Elle donne également une base législative à la mise en oeuvre d'une nouvelle
politique de l'Etat en matière d'aide au logement social.
L'ordonnance n° 98-521 du 24 juin 1998 adapte pour les départements
d'outre-mer ainsi qu'à Saint-Pierre-et-Miquelon les normes de construction
métropolitaines en matière acoustique, thermique et de sécurité pour tenir
compte des conditions climatiques locales.
Elle étend à la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française le régime
métropolitain de l'épargne logement, sachant que la participation des
territoires au financement de la prime d'épargne, prévue pour être égale à
celle de l'Etat, doit faire l'objet d'une convention.
L'ordonnance n° 98-523 du 24 juin 1998 modifie certaines des dispositions de
la loi du 18 juin 1966 sur l'exercice de la pêche maritime et l'exploitation
des produits de la mer dans le territoire des terres Australes et Antarctiques
françaises. Elle est très attendue, car elle donne une base légale aux
dispositifs de lutte contre l'exploitation massive et illégale des ressources
halieutiques des terres Australes et Antarctiques françaises.
L'ordonnance n° 98-526 du 24 juin 1998 vise à introduire à Mayotte de
nouvelles dispositions relatives aux activités commerciales et artisanales qui
s'inspirent très largement de la loi du 27 décembre 1973 modifiée sur
l'organisation du commerce.
Enfin, l'ordonnance n° 98-777 du 2 septembre 1998 modifie et élargie les
modalités de cession à titre gratuit du domaine privé de l'Etat en Guyane, qui
couvre presque 90 % de la surface du département, sachant que des lois
successives ont aménagé les dispositifs permettant de régler les problèmes
fonciers résultant notamment des occupations sans titre.
L'article 1er de l'ordonnance ouvre ce dispositif aux personnes morales dont
l'objet est essentiellement agricole et dont plus de 50 % du capital social
appartient à des agriculteurs.
L'ordonnance étend également ce mécanisme de cessions à titre gratuit à des
terrains autres qu'agricoles, dans le respect des dispositions prévues par les
collectivités locales en matière d'urbanisme. Il pourra s'agir notamment des
terrains occupés par des constructions à usage d'habitation, étant précisé que
le bénéficiaire de la cession s'engage à conserver ce terrain pendant une durée
de quinze ans au minimum.
Sur ce projet de loi de ratification, l'Assemblée nationale a procédé à
quelques rectifications formelles et à une suppression pour tenir compte du
vote de lois intervenu après l'adoption de ces ordonnances.
N'ayant de remarques à faire ni sur le fond ni sur la forme, la commission des
affaires économiques vous propose, mes chers collègues, d'adopter ce projet de
loi de ratification sans modification.
(MM. les rapporteurs applaudissent.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale commune ?...
La discussion générale commune est close.
PROJET DE LOI N° 420