Séance du 25 novembre 1999
M. le président. La parole est à M. Courteau.
M. Roland Courteau. Monsieur le président, le département de l'Aude est en deuil, comme les départements des Pyrénées-Orientales, du Tarn et de l'Hérault, à la suite des inondations d'une gravité exceptionnelle.
Ce fut l'apocalypse, l'horreur, l'inimaginable !
C'est un lourd tribut humain, avec trente-quatre victimes, devant lesquelles nous nous inclinons.
C'est aussi un immense désastre économique, puisque le département de l'Aude, que je représente ici avec Raymond Courrière, est quasiment broyé en certains endroits.
Ce sont des populations en état de choc, marquées à vie, des pans de vie anéantis pour ceux qui ont tout perdu à la suite de conditions climatiques apocalyptiques.
Le hors norme est dépassé, mes chers collègues ; nous sommes dans le phénoménal, dans le monstrueux. Et puis l'insupportable, ces cris d'enfants, dans la tempête et dans la nuit, que la mort finira par emporter.
Et au bout de ce cauchemar, il y a ce sentiment terrible d'impuissance. Nous touchons là au démentiel, tant le bilan humain et économique est d'une dimension épouvantable : la dynamique d'un département est brisée, des familles sont ruinées, des acteurs économiques durement frappés ; des routes et des ponts sont anéantis, des vignerons, des agriculteurs sont dans le désarroi ; le concours de l'armée doit être accordé pour déblayer et remettre en culture des parcelles ravagées.
A jamais, mes chers collègues, nous porterons les stigmates de ce cataclysme, même si, dans l'horreur de la tragédie, le formidable élan de solidarité a bien réchauffé des coeurs qui pleurent encore.
Je salue la rapidité exceptionnelle du Gouvernement dans le déblocage d'aides importantes et la mise en oeuvre de la procédure « catastrophe naturelle ».
Je salue l'action des sapeurs-pompiers, des élus locaux, des associations caritatives, sans oublier ces milliers d'anonymes, hommes et femmes de coeur, qui sont l'honneur de l'espèce humaine.
Je remercie le Sénat, monsieur le président, pour l'aide d'extrême urgence, particulièrement importante, qu'il nous a récemment accordée. Comme nous l'avons fait hier, monsieur le président, nous devons nous retrouver prochainement, sur votre initiative, pour imaginer d'autres suites à donner. Encore merci !
Mesdames, messieurs, notre histoire est marquée de coups du sort impitoyables, mais nous avons toujours su résister face à l'adversité. Le pourrons-nous cette fois encore ? Saurons-nous retrouver, une fois de plus, au plus profond de nous-mêmes, cette volonté acharnée, forgée dans de trop nombreuses épreuves ?
Nous voulons encore le croire si nous sentons qu'on ne nous laissera pas seuls, ni dans six mois ni dans trois ans, pour tout refaire et tout reconstruire. Alors oui, pour peu que nous sentions là, à nos côtés, cette solidarité nationale dans la durée, monsieur le ministre, mais aussi européenne, avec l'élargissement du zonage, « objectif 2 », aux territoires sinistrés, alors oui, mes chers collègues, nous relèverons la tête, alors oui, nous relèverons ce nouveau défi ! (Applaudissements prolongés.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur, des inondations et des coulées de boue d'une intensité exceptionnelle ont affecté, les 12 et 13 novembre derniers, les départements de l'Aude, du Tarn, des Pyrénées-Orientales et de l'Hérault, touchant cruellement les populations et endommageant fortement les infrastructures des communes concernées.
Le bilan humain, pour ces quarante-huit heures, est particulièrement lourd : malgré tous les efforts déployés par les sauveteurs, 34 personnes sont décédées et une reste portée disparue dans le département de l'Aude.
Devant l'ampleur des dépâts subis par ces départements, les préfets ont immédiatement déclenché le plan ORSEC. Je me suis rendu sur les lieux le dimanche 14 novembre ; M. le Premier ministre est allé sur le terrain le 17 novembre. Il a annoncé des mesures exceptionnelles d'un montant de plus d'un milliard de francs, témoignant ainsi aux populations et aux collectivités locales touchées par cette catastrophe la solidarité de la nation qu'avait évoquée M. le Président de la République.
En matière d'indemnisation des dommages subis par les particuliers, je vous rappelle qu'un arrêté reconnaissant l'état de catastrophe naturelle a été pris dans les trois jours pour 329 communes : 228 dans l'Aude, 39 dans l'Hérault, 29 dans les Pyrénées-Orientales et 33 dans le Tarn. Il a été publié au Journal officiel le 18 novembre.
Le 26 novembre, une nouvelle commission interministérielle se réunira, qui statuera sur les dossiers présentés par 99 communes - 5 dans l'Hérault, 75 dans les Pyrénées-Orientales, 19 dans le Tarn - dossiers qui avaient été ajournés ou présentés postérieurement.
En matière de reconstruction, la solidarité nationale s'inscrira dans la durée en direction des acteurs économiques, des collectivités locales, du monde agricole, que vous avez évoqués. La solidarité nationale ne manquera pas, je puis vous l'assurer, monsieur le sénateur : les aides nécessaires à la remise en état des voiries et des ouvrages hydrauliques seront dégagées sur le chapitre 67-54 de mon ministère.
En matière de solidarité européenne, l'objectif 2 de la nouvelle génération de programmes communautaires prévoit de réduire un certain nombre d'inégalités entre les régions. Dans le contexte d'une réduction moyenne de population éligible de 24 % par rapport à l'actuel programme, c'est-à-dire moins que la moyenne nationale, le préfet de région a formulé ses propositions de zonage. Celles-ci sont actuellement en cours de négociation à Bruxelles. Elles n'ont pas pris pour fondement les récents sinistres, mais rien n'empêchera, dans le cadre des futurs documents de programmation, les comités régionaux de programmation de tenir le plus grand compte des besoins locaux, notamment à la lumière des événements survenus. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
RAPPORTS DES COMMISSIONS D'ENQUÊTE
PARLEMENTAIRES SUR LA CORSE