Séance du 6 décembre 1999
PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE
vice-président
M. le président.
La séance est reprise.
Nous poursuivons l'examen des dispositions du projet de loi de finances
concernant l'enseignement supérieur.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Lagauche.
M. Serge Lagauche.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis
plusieurs années, nous sommes dans un contexte de baisse des effectifs
étudiants et, parallèlement, de hausse du budget consacré à l'enseignement
supérieur, ce qui permet d'oeuvrer pour une transformation qualitative du
système, notamment par la progression du taux d'encadrement des étudiants.
En augmentation de 2,6 %, le budget de l'enseignement supérieur pour 2000
confirme les orientations, définies en 1998, de modernisation et de poursuite
de la démocratisation de notre système d'enseignement supérieur.
Il s'articule autour de trois priorités : la montée en charge du plan social
étudiant, la mise en oeuvre du programme Université pour le troisième
millénaire et l'amélioration des moyens des établissements, en particulier dans
le domaine des emplois.
Outre les mesures de revalorisation des carrières, près de 1 300 emplois
nouveaux sont prévus : 796 postes d'enseignants-chercheurs, dont 35 % de
professeurs et 65 % de maîtres de conférence, et 400 attachés temporaires
d'enseignement et de recherche ; 514 postesd'IATOS sont créés, répartis pour
l'essentiel en personnel de recherche et de formation - 257 postes - et en
personnels administratifs - 115 postes.
En ce qui concerne le plan social étudiant amorcé dans la loi de finances de
1999, les crédits de l'aide sociale augmentent de 8 % et ceux qui sont destinés
aux bourses de 9,5 %, ces derniers atteignant un montant de 7,8 milliards de
francs.
Cette hausse permettra d'élargir le nombre des étudiants aidés, grâce à un
relèvement des plafonds de ressources pour les bénéficiaires, à l'instauration
d'une bourse « à taux zéro » sous forme d'exonérations de droits d'inscriptions
et de sécurité sociale et d'une bourse de premier cycle. Au total, 36 000
étudiants supplémentaires seront soutenus en 2000, l'objectif étant d'atteindre
30 % de boursiers sur quatre ans.
Par ailleurs, le plan social étudiant s'attache à améliorer le cadre de vie
des étudiants, ce qui n'avait pas été possible jusqu'alors, les universités
devant relever le défi de la massification.
Cette amélioration passe évidemment par le logement, les transports, mais
aussi et surtout par la santé.
Les difficultés au quotidien de certains étudiants, spécialement des plus
démunis, qui peuvent être liées à une mauvaise hygiène de vie, au stress, ou à
la solitude, doivent être prises en compte à travers une véritable politique de
prévention et de surveillance médicale. Or, depuis 1995, les crédits alloués à
la médecine universitaire n'ont pas connu de réelle augmentation, hormis la
création de postes d'infirmiers, au nombre de 20 cette année, comme pour
l'année passée. Un texte refondant les missions des services de médecine
préventive et de promotion de la santé était pourtant prévu pour la fin de
l'année 1998.
Aussi, monsieur le ministre, pouvez-vous indiquer à la représentation
nationale l'état d'avancement de ce texte ? Cette redéfinition des missions de
la médecine universitaire s'accompagnera-t-elle d'un réel effort budgétaire
dans les prochains projets de lois de finances ?
Deuxième priorité de ce budget : la poursuite du programme Université pour le
3e millénaire lancé l'an dernier.
Pour l'année 2000, près de 4 milliards de francs en autorisations de
programmes permettront des opérations de mise en sécurité et de réhabilitation
des locaux universitaires, de construction et de restructuration.
Ils serviront également à financer des opérations spécifiques comme la
continuation du désamiantage de Jussieu, la rénovation du Muséum d'histoire
naturelle ou la construction du musée des arts et civilisations.
Certaines régions rechignent à participer au financement du volet de
restructurations et de mise en sécurité des établissements du plan U3M.
Pourtant, la présence d'un pôle universitaire constitue une richesse pour une
région, que ce soit en termes de maintien des populations, de développement
économique ou de la vie intellectuelle et culturelle. L'entretien des
universités est tout aussi important et bénéfique pour les collectivités
locales que leur création. Il me semble donc tout à fait logique qu'elles
participent financièrement au plan U3M. Un éventuel manque de motivation en ce
domaine serait tout à fait regrettable pour le développement régional.
Sans négliger les mesures très positives de ce plan, j'aimerais vous faire
part, monsieur le ministre, de mon inquiétude concernant la situation des
bibliothèques universitaires.
Si l'effort budgétaire en leur faveur s'est accru au cours des trois dernières
années, et en dépit de 15 millions de francs de mesures nouvelles et de la
création de quatre-vingts emplois de personnels de bibliothèque cette année, la
modernisation des bibliothèques, priorité forte du plan U3M, exigera un
renforcement important des moyens en raison des carences du plan U 2000 en ce
domaine.
Entre 1991 et la fin 2000, moins de 300 000 mètres carrés de bibliothèques
auront été construits, alors que la construction de 500 000 mètres carrés
supplémentaires est nécessaire pour atteindre le ratio de 1 mètre carré par
étudiant, sans parler des besoins en matière de mise en sécurité et de
modernisation.
Dans le même temps, le développement des ressources documentaires doit être
intensifié.
Le taux d'acquisition de 0,6 volume par étudiant et par an est très
insuffisant, d'autant plus que les ressources électroniques vont constituer un
poste de dépenses supplémentaire appelé à progresser dans les années à venir.
L'ensemble des crédits de fonctionnement affectés aux bibliothèques équivaut à
500 francs par étudiant et par an : ce chiffre devrait être doublé pour
atteindre un équipement satisfaisant.
M. Jean-Philippe Lachenaud,
rapporteur spécial.
Très juste !
M. Serge Lagauche.
Nous sommes là en présence d'un enjeu essentiel pour notre enseignement et
notre recherche. L'accès à l'information ne doit pas être, en effet, une source
d'inégalités supplémentaires.
Notre attention doit aussi se porter sur la mise en réseau des établissements
et des bibliothèques, car nombre de délocalisations souffrent de la limitation
de leurs fonds documentaires. A ce propos, monsieur le ministre, pouvez-vous
nous indiquer l'état d'avancement de la réflexion sur la bibliothèque numérique
?
Plus largement, le développement des nouvelles technologies de l'information
et de la communication induit forcément un décloisonnement et une meilleure
cohérence de notre système d'enseignement supérieur. Le mode de fonctionnement
pour l'avenir, c'est le réseau : il est indispensable pour développer des
cursus d'enseignement communs, des synergies entre universités, grandes écoles,
centres de recherche et entreprises. Il s'agit, parallèlement, de faire émerger
de plus amples coopérations régionales ou interrégionales pour valoriser la
complémentarité des sites.
Le réseau nous permettra également d'avancer vers la formation permanente,
autre défi que notre système d'enseignement devra relever.
D'ailleurs, le mouvement est déjà engagé depuis le premier appel à projet de
votre ministère, en 1997, pour le développement de la formation continue à
l'université.
Actuellement, vingt-trois universités sont ouvertes toute l'année et proposent
leurs diplômes aussi bien en formation initiale qu'en formation continue. C'est
un bon début, mais c'est vers la formation tout au long de la vie que nous
devons aller.
Ce thème m'est cher car son développement constitue une étape supplémentaire
dans la démocratisation de l'accès au savoir. C'est la possibilité d'apprendre
en continu, d'évoluer dans sa formation et sa carrière professionnelle. C'est
bénéficier, au minimum, d'une deuxième chance, alors qu'aujourd'hui, bien
souvent, tout est joué avec la formation initiale. Mais cela implique une vraie
reconnaissance des acquis professionnels et un fort développement de
l'enseignement à distance par le biais des nouvelles technologies de
l'information et de la communication. Le centre national d'enseignement à
distance s'est engagé dans cette voie en réalisant des outilstélématiques pour
l'information et l'orientation de ses usagers.
Enfin, j'aborderai la nécessaire ouverture sur l'international de notre
système d'enseignement supérieur.
La conférence de Bologne, en juin dernier, a abouti à l'adoption d'une
déclaration commune pour la construction d'un espace européen de l'enseignement
supérieur fondé sur une harmonisation des diplômes, une mobilité et une
coopération accrues des étudiants, des enseignants et des chercheurs en Europe.
Là encore, nous sommes sur la bonne voie.
Toutefois, j'exprimerai une réserve, monsieur le ministre. Elle concerne la
faiblesse de l'enseignement des langues étrangères à l'université. C'est un
réel handicap, non seulement par rapport à nos homologues européens, mais aussi
par rapport aux étudiants des grandes écoles françaises. L'enseignement des
langues à la faculté doit être pleinement intégré à toutes les formations et à
tous les diplômes, d'autant qu'elles sont une véritable richesse culturelle de
connaissance et d'ouverture sur les autres.
Quant on pratique la langue de son interlocuteur, n'est-ce pas déjà mieux le
connaître, mieux le comprendre ? Et cela ne signifie pas pour autant renoncer à
la promotion de la langue française.
Monsieur le ministre, votre budget obtiendra le plein soutien du groupe
socialiste, car il permet la poursuite et la consolidation des projets et des
réformes déjà engagés. C'est un bon budget pour une bonne politique de
l'enseignement supérieur. Aussi, son rejet par nos collègues de la majorité
sénatoriale me paraît difficilement soutenable dans la mesure où ils jugent
positivement ses grandes orientations, tout particulièrement le plan social
étudiant et l'adaptation de notre système d'enseignement supérieur au contexte
européen.
Bien sûr, les nouveaux enjeux sont colossaux, en cette période d'évolution
rapide des techniques et des savoirs ; c'est pourquoi l'effort budgétaire en
faveur de l'enseignement supérieur est tout à fait justifié. Il doit être
continu et même amplifié pour répondre, le mieux possible aux exigences de
modernisation et de compétitivité de notre système d'enseignement supérieur.
M. le président.
La parole est à M. Maman.
M. André Maman.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce budget,
qui s'inscrit dans un contexte de stabilisation des effectifs étudiants, avec
une faible diminution d'environ 20 000 sur 2 millions d'étudiants, s'élève à
52,46 milliards de francs en crédits de paiement et dépenses ordinaires, ce qui
correspond à une augmentation de 2,6 % par rapport à la loi de finances
initiale de 1999.
Cette progression, si elle reste supérieure à celle de l'ensemble des budgets
civils de l'Etat, estimée à 0,9 %, demeure largement inférieure à celle de 5,5
% qui était enregistrée l'année dernière.
Il s'agit donc là d'un budget de gestion des actions déjà entreprises, qui
innove peu et qui ne contient aucune des réformes d'envergure dont notre
système d'enseignement supérieur a tellement besoin, depuis de nombreuses
années.
Ce budget n'offre aucune vision prospective à moyen et long termes et il est
dénué de perspectives stratégiques. Il ne traduit aucune volonté d'engager la
grande réforme globale dont notre université a tant besoin.
J'ajoute, monsieur le ministre, que les quelques modestes réformes que vous
avez engagées accusent au mieux un retard, au pire un abandon. Quoi qu'il en
soit, elles sont toujours sources de dysfonctionnements. En somme, vous ne
faites que gérer les affaires courantes.
En premier lieu, le document budgétaire qui nous est proposé comporte une
nouveauté : pour la première fois, en effet, la représentation nationale
bénéficie d'un nouvel instrument d'appréciation de la politique en matière
d'enseignement supérieur, grâce au budget coordonné de l'enseignement
supérieur, le BCES. Celui-ci est censé récapituler toutes les formations
post-baccalauréat qui ne dépendent pas directement du ministère de l'éducation
nationale. On peut citer, parmi les établissements les plus renommés, l'Ecole
polytechnique ou l'ENA.
Or, si ce document offre une meilleure visibilité du système d'enseignement
supérieur français, il est regrettable que certains ministères, comme celui de
la fonction publique, ne jouent pas le jeu : en effet, ce ministère n'intègre
dans le BCES ni les instituts régionaux d'administration ni l'ENA.
Toutefois, globalement, il s'agit d'un budget aussi triste que le rapport
émanant de l'inspection générale qui vient d'être remis à Mme Ségolène Royal et
selon lequel notre système éducatif forme aujourd'hui des enfants sans parole,
des enfants qui ne savent plus lire ni écrire. Ils ne savent plus parler, ils
ne savent même plus communiquer, constate ce rapport.
Si les crédits consacrés à l'action sociale sont en hausse, ils ne permettent
pas de donner un réel essor au plan social étudiant, qui demeure limité. En
effet, contrairement aux ambitions de départ, il n'a que peu de rapports avec
le statut social de l'étudiant. Il ne réforme pas le système existant et
consiste uniquement dans une augmentation des aides aux étudiants.
Je ne suis pas le seul à dénoncer cet état de fait. Récemment, le conseil
d'administration du Centre national des oeuvres universitaires et scolaires a
rejeté le budget de l'enseignement supérieur, dénonçant un saupoudrage des
aides. Depuis deux ans, monsieur le ministre, vous n'avez cessé de différer les
quelques mesures novatrices du plan. Aujourd'hui, vous en payez les
conséquences.
Seule l'amélioration de notre système de bourses me paraît devoir être portée
à votre crédit. Du point de vue social, ce budget présente une augmentation
notable de 9,5 %, qui devrait permettre de revaloriser le montant des bourses,
notamment grâce au relèvement des plafonds de ressources ouvrant droit à une
aide et à la mise en place des bourses de premier cycle, ainsi qu'à la
possibilité, par le biais d'aides d'urgence, de venir en aide en cours d'année
à des étudiants confrontés à des difficultés imprévues.
Il s'agit incontestablement d'un point positif, et j'espère que vos collègues
du Gouvernement sauront s'en inspirer lorsque nous évoquerons le système des
bourses allouées aux jeunes Français étudiant dans les 440 écoles françaises
accréditées à l'étranger, où les frais d'écolage sont bien plus importants que
dans l'Hexagone. Le sénateur représentant les Français établis hors de France
que je suis y veillera attentivement.
Pour le reste, le bilan est extrêmement peu encourageant.
Je ne vois aucune initiative destinée à ouvrir l'enseignement supérieur sur le
monde, je ne distingue aucun écho des suggestions formulées par M. Jacques
Attali dans son rapport de mai 1998 sur « le modèle européen de l'enseignement
supérieur ». Dans ce rapport, ce dernier affirmait clairement qu'il ne pourrait
y avoir d'Europe de l'emploi sans Europe de l'éducation, ce qui me paraît
évident.
En juin dernier, s'est tenue à Bologne, en Italie, une conférence réunissant
vingt-neuf Etats. A cette occasion, les représentants de ces Etats ont plaidé
pour la définition d'un système de diplômes lisibles et comparables, pour
l'organisation des études autour de deux cycles principaux, pour
l'établissement d'un système de crédits, afin de faciliter la mobilité des
étudiants et des chercheurs et, enfin, pour le développement de la dimension
européenne dans les programmes.
Dans votre projet de budget, monsieur le ministre, on ne retrouve rien de tout
cela. On ne perçoit que la gestion prudente d'un système sclérosé et largement
déficient.
En matière d'emploi, les créations de postes paraissent insuffisantes pour
compenser la disparition de 1 600 emplois. Or il aurait été judicieux de
profiter de la marge de manoeuvre induite par la stabilisation des effectifs
universitaires.
J'ajoute que la création de ces postes est, en partie, financée par la
suppression de 40 % des heures complémentaires. C'est une bien curieuse méthode
lorsqu'on sait que ces heures se révèlent très utiles dans les formations à
caractère professionnel. Elles permettent, en effet, de recruter des chargés
d'enseignement vacataires parmi les cadres supérieurs et elles contribuent à
assurer des stages aux étudiants. En vérité, elles sont un élément important
pour nouer des contacts avec l'entreprise et faciliter l'embauche des
étudiants. Ainsi, en supprimant ces heures, vous hypothéquez les possibilités
d'insertion professionnelle des étudiants.
Vous négligez les classes préparatoires, qui attendent une réforme. Vous avez
simplement concentré votre action sur les rémunérations des enseignants, en
diminuant de 17 % le paiement des heures supplémentaires, et cela pour une
seule raison : financer les emplois-jeunes !
Dans cette opération, ce sont les enseignants des classes préparatoires qui
ont payé le plus lourd tribut, car ils ont un horaire de base plus réduit que
les professeurs des collèges et lycées.
De plus, vous n'avez pas tenu parole : rien n'est prévu dans ce projet de
budget pour la nouvelle indemnité destinée à tenir compte de l'investissement
personnel des enseignants des classes préparatoires, indemnité dont vous aviez
pourtant annoncé l'instauration.
L'université d'aujourd'hui n'est plus simplement un lieu de culture, monsieur
le ministre. Elle est aussi un lieu d'emploi, de recherche, de rencontres et
d'ouverture sur le monde. L'université, plus que jamais, a besoin de liberté,
d'autonomie et d'exigence. Or rien dans votre projet de budget ne la destine à
détenir tout cela.
Les moyens mis en oeuvre pour encourager et favoriser les échanges entre le
monde universitaire et celui des entreprises sont bien minces. Certes, le
Conseil national de l'enseignement supérieur vient de donner son feu vert à la
licence professionnelle. Il s'agit là d'une bonne, je dirai même d'une
excellente initiative, mais il est regrettable qu'elle ne concerne qu'un nombre
limité d'univer-sités.
Nous avons, en ce domaine, un grand retard à rattraper par rapport à nos
voisins européens. En Grande-Bretagne, de même qu'aux Etats-Unis, pays que vous
connaissez si bien, il n'est pas rare de voir des entreprises privées se
présenter comme des « sponsors », des parrains des universités.
La France est encore loin de ce système, prisonnière de ses vieux réflexes et
d'une mentalité jugeant incompatibles le monde de l'université et celui de
l'entreprise, considérant les liaisons entre l'un et l'autre comme dangereuses,
voire sulfureuses.
Le manque d'ambition de ce budget, et de la politique dont il n'est que la
traduction chiffrée, est choquant parce que jamais le système éducatif français
n'a eu autant besoin de réformes de fond, dans le secondaire comme dans le
supérieur.
Or, que faites-vous, monsieur le ministre ? Vous refusez d'apporter des
changements à un système en difficulté, vous n'admettez même pas d'entendre le
mot « sélection ». Si ce mot fait vraiment peur, accepterez-vous plus aisément
qu'on parle d'orientation à l'entrée des universités, une orientation bien
faite, bien organisée, démocratique, permettant aux étudiants de prendre la
voie qui leur convient, selon leurs capacités et leurs motivations ?
On a évoqué tout à l'heure une filière où il y avait 36 000 étudiants mais qui
n'offre que mille emplois au terme du cursus. Il est scandaleux de laisser
faire cela.
Combien de nos étudiants se dirigent, par manque de conseils préalables et
d'orientation, laquelle devrait commencer dès la classe de seconde, vers des
filières où ils sont voués à l'échec ?
Vous laissez s'installer - je devrais même dire que vous gérez - un système
fondé sur la sélection par l'échec. Je rappelle ce chiffre terrifiant : un
étudiant sur deux sort de l'université sans aucun diplôme. Quel effroyable
gâchis ! Que de carrières brisées ! Que de destins écrasés !
Le premier cycle universitaire est le cimetière des illusions d'une jeunesse
que l'on croit flatter en la laissant livrée à elle-même et en refusant de
l'orienter dans un monde de plus en plus complexe.
J'ajoute que, si les frais de scolarité exigés des étudiants n'augmentent pas
sensiblement, comme c'est le cas dans la quasi-totalité des pays du monde, que
vous visitez souvent, notre système universitaire connaîtra un déclin
inéluctable.
En effet, si les frais de scolarité dépendaient du niveau de ressources des
étudiants, cela permettrait d'accorder des bourses plus importantes à ceux qui
en ont besoin. Aucun étudiant ne serait exclu de l'enseignement supérieur pour
des raisons financières. On verrait vraiment jouer là l'égalité des chances et
la solidarité.
Avec EduFrance, dont on a beaucoup parlé, vous avez voulu voir grand,
accueillir des centaines de milliers d'étudiants étrangers en France. Nous vous
avons approuvé parce que l'existence d'une telle structure est effectivement
très importante pour notre pays. C'est pourquoi nous voulons vraiment jouer le
jeu avec vous. Hélas ! si l'initiative est bonne, les moyens matériels et
financiers font cruellement défaut. On peut noter le manque de cohérence du
dispositif actuel d'accueil, en raison de la dispersion des acteurs, de
l'absence d'évaluation et du manque de lisibilité des cursus universitaires.
Il faudrait clarifier les missions d'EduFrance et accroître ses moyens, tout
en poursuivant l'harmonisation des cursus universitaires.
Allez-vous, monsieur le ministre, mettre en oeuvre certaines de ces
propositions ? Si oui, lesquelles et avec quels moyens ?
Toute la question est celle de l'aptitude de la France à « vendre » son
enseignement supérieur et à se placer en concurrente sérieuse vis-à-vis des
universités anglo-saxonnes.
La troisième priorité de votre projet de budget, monsieur le ministre, porte
sur l'amélioration des moyens de fonctionnement des universités et des
bibliothèques.J'estime, à cet égard, que les bibliothèques font l'objet d'un
effort tout à fait insuffisant au regard de l'état déplorable dans lequel elles
se trouvent aujourd'hui.
Vous savez très bien, monsieur le ministre, que dans les universités
anglo-saxonnes la bibliothèque est le centre du campus. Plus la bibliothèque
est importante, plus elle reste ouverte longtemps - et beaucoup, aux
Etats-Unis, le sont vingt-quatre heures sur vingt-quatre - plus le travail des
étudiants est productif.
Les crédits de fonctionnement des bibliothèques augmentent de 15 millions de
francs : 10 millions de francs correspondent à des mesures nouvelles ; les 5
millions de francs restant résultent, pour une part, de transferts de crédits
au sein du ministère et proviennent, pour une autre part, du ministère de la
culture.
La France accuse un retard considérable en matière de bibliothèques
universitaires. La durée moyenne d'ouverture hebdomadaire de ces bibliothèques
est de cinquante-quatre heures ! C'est inacceptable ! De tels horaires ne
permettent pas aux étudiants dont les moyens sont limités de travailler, de
préparer leurs examens, de se documenter.
Qu'allez-vous faire, monsieur le ministre, pour donner aux bibliothèques
universitaires la place majeure qu'elles doivent occuper dans notre
enseignement supérieur ?
Quand on se déplace dans le monde, on perçoit de mieux en mieux combien
l'avenir d'un pays dépend de ses universités. N'est-il pas évident qu'un pays
qui réussit a de grandes universités ? Je pense évidemment aux Etats-Unis, mais
il y en a d'autres qui ont compris que les universités sont importantes :
l'Australie, par exemple, un pays que vous connaissez aussi, monsieur le
ministre.
Vous entendez poursuivre le plan U3M et le désamiantage du campus de Jussieu.
Comme l'ont indiqué éloquemment les rapporteurs, il serait intéressant de
connaître les prévisions du coût total de ce plan, ainsi que la contribution
qui sera demandée aux régions.
Si j'ajoute à cela un budget de la recherche en trompe-l'oeil et des choix
très contestables en matière d'équipement - je pense ici à l'abandon du projet
SOLEIL, décision prise pendant l'été, sans aucune concertation et contre l'avis
des experts - vous comprendrez, monsieur le ministre, que l'incroyable décalage
entre les ambitions affichées et les moyens mis en oeuvre pour y parvenir
m'interdise de voter ce projet de budget qui, soyez-en sûr, provoquera une
grande déception chez tous les acteurs du monde de l'enseignement supérieur
français.
Le groupe de l'Union centriste ne peut voter un budget aussi peu tourné vers
l'avenir, qui néglige les grandes priorités de l'université de demain.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et
Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Claude Allègre,
ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, tout ce qui est
excessif est insignifiant.
Je voudrais faire revenir le débat sur un objectif qui est important et qui
devrait nous unir : le développement de notre enseignement supérieur. Pour
cela, je rappellerai d'abord quelques faits avant de m'efforcer de dessiner une
ligne qui, je l'espère, ne sera pas une ligne brisée.
C'est vrai, monsieur Maman, je voyage beaucoup. Je suis donc très attentif à
ce qui se passe à l'étranger. Eh bien, je vous recommande, mesdames, messieurs
les sénateurs, la lecture de ce document qui émane de l'OCDE.
(M. le
ministre brandit un document.)
Il y est notamment indiqué que, en matière
d'investissement pour le savoir, par tête d'habitant, la France se situe au
deuxième rang dans le monde. Et figurez-vous que ce ne sont pas les Etats-Unis
qui occupent le premier rang : c'est la Suède, juste au-dessus de nous. Les
Etats-Unis sont très loin ! Je vous donne d'ailleurs le classement : Suède,
France, Danemark, Finlande, Norvège, Canada, Grande-Bretagne, Etats-Unis, la
moyenne des pays de l'Union européenne, etc.
Bien sûr, vous avez le droit de juger la qualité de notre enseignement
supérieur et celle de notre recherche mais, globalement, ce n'est pas un
problème budgétaire, monsieur Maman. Ce n'est pas là que se fait la
différence.
D'ailleurs, je pourrai dire tout à l'heure la même chose à propos du nombre de
chercheurs rapporté au nombre d'habitants. Ce rapport est, aux Etats-Unis, d'un
tiers inférieur à ce qu'il est en France.
Le problème se situe donc non au niveau du budget mais à celui de
l'organisation.
Cette organisation, quelle est-elle ? Monsieur Maman, je sais que vous
connaissez l'enseignement supérieur américain, mais je ne sais pas si vous
connaissez l'enseignement supérieur français.
Or l'enseignement supérieur français a fait des progrès considérables en
quinze ans ; il est même l'un des meilleurs du monde. Il a réussi ce à quoi
aucun autre système éducatif n'était parvenu jusqu'ici : il a su accueillir en
trente ans sept fois plus d'étudiants et, dans le même temps, améliorer sa
qualité. La Grande-Bretagne connaît de grandes difficultés, à cet égard ; quant
à la Chine, n'en parlons pas.
Quand j'étais encore sur les bancs de l'école, je peux vous dire que mes
professeurs de sciences étaient totalement inconnus sur la scène
internationale. Ce n'est plus le cas aujourd'hui. L'enseignement scientifique
qui est prodigué dans toutes les universités françaises est de renommée
mondiale.
Cet enseignement supérieur français doit donc être respecté et défendu. Je
reconnais volontiers que notre système éducatif souffre de certaines
faiblesses, mais l'enseignement supérieur n'est pas du nombre. Nos grandes
écoles ont évolué, les passerelles se sont développées. La ligne générale que
suit notre enseignement résulte d'un consensus. J'ai eu l'occasion de critiquer
la politique de M. Bayrou sur l'enseignement scolaire, mais pas sur
l'enseignement supérieur car, depuis un certain nombre d'années, ce dernier
fait l'objet d'une réelle continuité. Souvenez-vous : « Un million d'étudiants,
n'est-ce pas trop ? ». Voilà ce qui faisait débat. Nous avons aujourd'hui deux
millions d'étudiants. Cela me rappelle d'autre débats, d'autres empoignades qui
ont dû animer des hémicycles tels que celui-ci, quand, pendant la Révolution
française, on se battait pour savoir s'il y aurait 15 % ou 20 % de Français
sachant lire.
Encore une fois, la France doit être fière de son enseignement supérieur et
doit l'aider à se transformer encore. Il mérite de faire l'objet d'un consensus
entre la droite et la gauche. Il ne s'agit pas de l'affaiblir par des critiques
non justifiées.
D'ailleurs, confrontée à la politique du Gouvernement en matière
d'enseignement supérieur, l'opposition, qui n'est pas dite « plurielle », car
elle est multiple, se contredit.
J'ai d'abord entendu M. Lachenaud faire un excellent exposé dans lequel il a
soutenu que nous ne faisions pas assez d'économies. J'ai ensuite entendu M.
Valade faire un moins excellent exposé selon lequel nous ne dépensions pas
assez. Messieurs de l'opposition, organisez donc des réunions intergroupes pour
vous mettre d'accord sur les critiques !
(Sourires.)
M. Philippe Marini.
Lecture sélective !
M. Claude Allègre,
ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
Ma stratégie budgétaire est claire. Je pense être l'un des ministres qui a fait
le plus pour supprimer les dépenses inutiles dans l'éducation nationale ; nous
aurons l'occasion de le constater vendredi. Quand il faut de l'argent, il faut
de l'argent. Quand on peut faire mieux pour moins, on fait mieux avec moins
!
Attention aux chiffres. Un tassement des crédits de paiement, d'un côté - dû
au fait que nous sommes dans la première année des contrats de plan - les
actualisations de crédits de personnels et de pensions, de l'autre, font
diverger les taux de progression et masquent les évolutions réelles. En
réalité, les taux d'encadrement - c'est ce qui importe - continuent
d'augmenter, les crédits de fonctionnement croissent et la capacité
d'investissement également. Autrement dit, la différence entre le budget pour
2000 et le budget de l'année dernière est un trompe-l'oeil si on l'examine dans
la continuité des crédits d'investissement.
Mais je ne vais pas détailler mon budget, et me contenterai de tracer les
grandes lignes de la politique qui est menée, pour répondre ensuite à toutes
les questions que vous avez posées. D'un mot, cependant, je constate d'emblée
que nous sommes tous aussi fautifs, vous comme nous, et que le manque
d'informations est évident sur un certain nombre de points.
Je commencerai pas les emplois. Nous avons créé 4 500 emplois qui sont
effectivement pourvus, ce qui constitue un changement radical par rapport à la
période antérieure à 1997. En effet, le système de recrutement dans
l'enseignement supérieur faisait qu'on ne pourvoyait pas les emplois. A ce
sujet, monsieur Maman, je n'ai pas noté que vous votiez contre ces budgets. Et
pourtant, année après année, on votait des créations d'emplois que l'on
recyclait en quelque sorte parce qu'ils n'étaient pas pourvus. Depuis que je
suis au ministère, 4 000 à 4 500 personnes sont recrutées, chaque année, dans
l'enseignement supérieur, ce qui représente exactement la moitié des 9 000
thèses produites également chaque année. Je ne pense pas que nous puissions
aller très au-delà, sinon n'importe qui deviendrait professeur d'université
!
Actuellement donc, la politique de recrutement du Gouvernement est massive.
Elle offre une opportunité considérable aux jeunes. Cela ne veut pas dire pour
autant que, qualitativement, discipline par discipline, nous ayons exactement
le recrutement que nous voulons, car certaines disciplines connnaissent des
manques et d'autres des surnombres.
Nous créons également cette année 1 200 postes d'enseignants chercheurs et 500
IATOS.
J'ai entendu tout à l'heure des remarques sur la santé. Certes, l'effort pour
la santé est insuffisant ; il est, d'ailleurs, toujours insuffisant. Mais si
nous ne créeons pas beaucoup de postes d'infirmières, songez qu'il n'y avait
pas eu de création de ce type dans l'enseignement supérieur depuis plusieurs
décennies ! Alors, peut-être que l'on n'en crée pas assez aujourd'hui, mais on
n'en a vraiment pas créé assez par le passé !
Donc, soyons un petit peu équitables.
En ce qui concerne le plan social étudiant, je suis obligé de vous faire
remarquer, mesdames, messieurs les sénateurs, qu'il bénéficie de 600 millions
de francs supplémentaires - ce n'est pas une paille, tout de même ! - sans
compter les mesures en faveur du logement étudiant inscrites dans le plan
U3M.
Le logement étudiant en France n'est pas ce que vous avez décrit, sauf dans
les grandes villes où la situation n'est pas bonne. Ailleurs en France, la
situation est sans commune mesure avec celle que nous avons trouvée, quand nous
sommes arrivés au ministère de l'éducation nationale, Lionel Jospin et moi, en
1990. Le nombre de logements étudiants dans le plan Université 2000 a été
multiplié par quatre. Peut-être n'est-ce pas encore suffisant, et nous allons
faire davantage, mais les chiffres sont là !
Quant au problème de la répartition des bourses, je voudrais rappeler qu'il a
quand même fallu attendre ce gouvernement pour voir la création de bourses au
mérite. C'est-à-dire que les élèves venant de familles modestes mais ayant
obtenu une mention « bien » ou « très bien » au baccalauréat sont intégralement
pris en charge par la République, soit 200 cette année plus 200
supplémentaires, ce qui fait 400 étudiants boursiers au mérite. D'ailleurs, la
presse s'en est fait l'écho. Nous rétablissons le concours des bourses
d'autrefois, qui a permis à un fils d'instituteur d'être Président de la
République, et qui avait été supprimé. Il est normal de le rétablir, car ces
enfants de familles modestes, on ne les retrouvait ni dans les grandes écoles
ni dans l'élite du pays, faute de moyens financiers, mais pas faute de moyens
intellectuels. Il s'agit là d'une aide sociale modernisée.
Une partie importante des bourses sera destinée aux études à l'étranger, car
je me suis donné pour objectif que, d'ici à cinq ans, tout diplômé français ait
passé au moins six mois dans une université européenne. Pour ce faire, il nous
faut rénover le système des bourses. Voilà pour le plan étudiant.
Voyons maintenant la politique contractuelle : elle est rénovée.
Certaines des critiques que j'ai entendues aujoud'hui ne s'adressent pas à
moi, car les universités sont désormais autonomes, notamment dans leur gestion,
et je suis un ardent partisan de cette autonomie. C'est dans ce cadre que nous
avons développé et rénové la politique contractuelle, qui se conjugue avec le
développement de la formation continue diplômante. Cette dernière, certes,
n'est pas suffisante mais le nombre des diplômes en formation continue a été
multiplié cette seule année par deux. A défaut d'être suffisant, c'est déjà un
progrès !
Nous avons intégré les nouvelles technologies dans l'enseignement et, comme il
a été dit, nous avons commencé, dans le premier cycle, un travail en petits
groupes, d'abord, dans six universités, puis, depuis cette année, dans douze.
Là encore, nous progressons.
Permettez-moi quelques réflexions sur l'harmonisation européenne. Monsieur
Maman, en vous écoutant tout à l'heure, je me pinçais presque pour y croire.
Mais l'harmonisation européenne, c'est moi qui l'ai faite ! C'est moi qui ai
organisé le colloque de la Sorbonne, c'est moi qui ai inspiré celui de Bologne.
Alors, si je n'applique pas ce que je promeus, c'est à croire que je suis tombé
sur la tête !
(Sourires.)
Le 3, 5, 8, c'est nous qui l'avons fait, et les Français ont été
leaders
dans cette affaire.
Alors, non, monsieur Maman, je ne peux pas vous suivre.
Mais vous n'êtes peut-être pas au courant : il n'y a plus que trois grades
dans l'enseignement français : la licence, le mastaire et la thèse. Pour la
première fois cette année, les grandes écoles décernent le grade de mastaire et
pour la première fois aussi un concours d'entrée à l'Ecole polytechnique sera
ouvert aux élèves des universités, sur titre et sur dossier et après un
entretien. La passerelle entre les grandes écoles et les universités existe,
chacun restant par ailleurs lui-même, le tout dans une harmonisation européenne
qui peut être lue dans toutes les parties du globe : que vous soyez en
pré-licence, en mastaire ou bien dans la préparation d'une thèse, vous pouvez
venir en France.
D'ailleurs, les résultats ne se sont pas fait attendre. Aussi, cette année, le
nombre d'étudiants en provenance d'Asie du Sud-Est a augmenté de 45 %. Quand je
suis arrivé au ministère, il y avait cinquante étudiants indiens ; cette année,
ils seront deux cent cinquante. Ce n'est pas le Pérou, mais c'est un facteur 5
et, l'an prochain, ils seront six cents.
M. Jacques Valade,
rapporteur pour avis.
Et les Péruviens ?
(Rires.)
M. Claude Allègre,
ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
Interrogez-moi plutôt sur les Brésiliens, car, là, nous sommes en
augmentation.
(Nouveaux rires.)
Ce 3, 5, 8 a permis, pour la première fois, j'y insiste, que nos grandes
écoles décernent un grade et ne soient pas « en l'air » dans le système
international comme par le passé. Mais elles sont entrées dans ce système en
restant elles-mêmes, car il n'est pas question de les intégrer dans quoi que ce
soit.
Cette réforme permet également de mettre en place la licence
professionnalisée. Je peux vous dire que le succès est tel que nous allons être
submergés par les demandes, et ce dès la première année.
M. Jean-Philippe Lachenaud,
rapporteur spécial,
et M. Jacques Valade,
rapporteur pour avis.
Très bien !
M. Claude Allègre,
ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
Aussi, cette année, aurons-nous une grande réunion pour harmoniser l'ensemble
des formations professionnalisantes - BTS, IUT, licence professionnalisée, IUP
et grandes écoles - afin d'avoir un schéma d'ensemble qui soit cohérent.
Nous sommes donc à la tête de l'harmonisation européenne. Je le disais, nous
avons organisé le colloque de la Sorbonne ; nous avons inspiré celui de Bologne
; nous avons demandé que l'harmonisation soit élargie aux pays de l'Est et non
pas restreinte aux seuls pays de l'Union. C'est pourquoi le prochain colloque
se tiendra à Prague. Nous travaillons maintenant sur la mobilité des
professeurs, afin de leur permettre d'être mobiles de manière permanente, sans
être hors des règles de sécurité sociale ou de retraite.
Quant à Edufrance, nous faisons plus que doubler ses moyens. Cette agence ne
demande pas davantage, sinon, ce que nous ferons dans l'année, la mise en place
d'un fonds de placement pour permettre aux étudiants étrangers d'emprunter
lorsqu'ils viennent faire leurs études en France. Ce n'est pas simple à mettre
en oeuvre car ces étudiants repartent dans leur pays à la fin de leurs études.
La question du remboursement se pose. Aussi, je ne peux pas vous dire que c'est
fait. Le principe est adopté mais, sur le plan technique, la mise en oeuvre
n'est pas aisée, même avec Internet.
En ce qui concerne Edufrance, je voudrais vous donner des chiffres car,
excusez-moi de vous le dire, ceux que vous avez cités, monsieur Renar, ne sont
pas exacts.
M. Jacques Valade,
rapporteur pour avis.
C'est normal, il n'a pas l'information !
M. Ivan Renar.
Je n'ai pas un cabinet de haute valeur, monsieur le ministre !
(Sourires.)
M. Claude Allègre,
ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
Les chiffres que vous avez cités étant faux, je suis donc obligé de les
rectifier.
Mme Hélène Luc.
Donnez-nous les bons chiffres, monsieur le ministre.
M. Claude Allègre,
ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
D'abord, Jussieu fait partie de U3M, mais est hors contrat de plan.
M. Jacques Valade,
rapporteur pour avis.
Heureusement !
M. Jean-Philippe Lachenaud,
rapporteur spécial.
On attendait que vous le disiez !
M. Claude Allègre,
ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
Ensuite, les travaux de mise en sécurité - 3 milliards de francs - sont hors
contrats de plan. Les régions ne seront donc pas concernées par les problèmes
en la matière.
En outre, le musée des Arts premiers est également hors contrats de plan.
M. Jacques Valade,
rapporteur pour avis.
Tout de même !
M. Claude Allègre,
ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
Enfin, la rénovation du Muséum national d'histoire naturelle est, elle aussi,
hors contrats de plan.
M. Jacques Valade,
rapporteur pour avis.
Que reste-t-il donc dans les contrats de plan ?
M. Claude Allègre,
ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
La part de l'Etat pour U3M, dans les contrats de plan, s'élèvera à 18,3
milliards de francs et nous savons, parce que les négociations ont eu lieu, que
la part des régions sera équivalente, voire légèrement supérieure.
M. Jacques Valade,
rapporteur pour avis.
Eh oui !
M. Claude Allègre,
ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
Par conséquent, cela signifie que l'ensemble du plan U3M s'élèvera à deux fois
quelque 18 milliards de francs plus 7 milliards de francs, soit environ 43
milliards de francs.
Voilà huit ans, lorsque j'étais conseiller spécial de Lionel Jospin et que
j'ai annoncé que l'on allait faire un plan pour les universités, j'ai provoqué
l'hilarité générale des présidents d'université ; l'un d'eux m'avait même
répondu que l'on n'avait pas vu un sac de ciment sur un campus depuis quinze
ans !
M. André Maman.
Il ne faut pas exagérer !
M. Claude Allègre,
ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
Néanmoins, le plan Université 2000 a remis les choses en place. Son application
s'est d'ailleurs poursuivie après le changement de majorité.
Nous poursuivons l'effort à l'heure actuelle. Nos universités disposeront de
locaux dignes de leur mission au terme du plan U3M. J'indiquerai lundi prochain
les grandes lignes de ce plan afin de vous montrer que la situation a beaucoup
progressé.
M. Jacques Valade,
rapporteur spécial.
Trop tard !
M. Claude Allègre,
ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
Je ne vais pas vous parler de U3M pendant une heure car vous seriez fatigués et
l'examen du projet de budget de la recherche et de la technologie
interviendrait très tard.
M. Jacques Valade,
rapporteur pour avis.
Nous sommes infatigables !
M. Claude Allègre,
ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
Certes, mais vous seriez peut-être lassés par mon discours.
M. Jean-Philippe Lachenaud,
rapporteur spécial.
Pas du tout !
M. Jacques Valade,
rapporteur pour avis.
Vous le savez, monsieur le ministre, nous vous
écoutons avec plaisir !
M. Claude Allègre,
ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
C'est gentil ! Alors, vous devriez voter mon budget.
(Sourires.)
M. Jean-Philippe Lachenaud,
rapporteur spécial.
Ah non !
M. André Maman.
On n'ira pas jusque-là !
M. Claude Allègre,
ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
Enfin, j'évoquerai l'enseignement continu et l'enseignement à distance.
S'agissant de l'enseignement continu, nous avons fait, l'année dernière, un
premier appel d'offres. Treize universités sont restées ouvertes douze mois sur
douze et ont délivré tous leurs diplômes en formation continue. Cette année,
nous avons lancé un nouvel appel d'offres et vingt-trois universités seront
concernées.
Quant à l'enseignement à distance, j'aurai l'occasion d'en parler car nous
sommes en train de faire un consortium qui regroupera le Conservatoire national
des arts et métiers, le Centre national d'enseignement à distance, le Centre
national de documentation pédagogique et la Fédération d'enseignement
universitaire à distance. Il constituera le troisième opérateur d'enseignement
à distance du monde.
Vous pourrez le constater, nous ferons un effort particulier dans ce secteur
au cours des mois à venir. L'enseignement à distance, c'est en effet l'avenir
et il faut donc faire davantage. Nous nous sommes lancés dans ce système.
Maintenant, je vais m'efforcer de répondre aux différentes questions. Je les
ai reclassées mais je vous prie de m'excuser si, en répondant successivement,
cela donne l'impression d'un catalogue un peu désordonné.
S'agissant des premiers cycles, je voudrais d'abord tuer une légende qui court
partout.
M. Jacques Valade,
rapporteur pour avis.
La légende des cycles !
(Sourires.)
M. Claude Allègre,
ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
Les classes préparatoires, après une scolarité de trois ans, permettent à 80 %
de leurs élèves d'intégrer une grande école. Le taux de réussite est donc de 80
%. Les universités, qui n'ont pas de sélection à leur entrée, obtiennent sur
trois ans un taux de réussite de 65 %. Un système qui n'a pas de sélection à
son entrée et qui permet à 65 % des étudiants de réussir n'est pas mauvais.
Nous ne sommes plus dans la situation que nous avons connue à une certaine
époque.
M. André Maman.
Et 35 % sont abandonnés !
M. Claude Allègre,
ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
Non, monsieur Maman, ils ne sont pas abandonnés. Il n'y a pas de sélection. Si
vous étiez en Grande-Bretagne, vous vous promèneriez pendant un an avant
d'entrer à l'université. C'est comme cela que le Premier ministre britannique,
en étant barman au Sofitel, a appris le français.
M. Jacques Valade,
rapporteur pour avis.
Ça lui sert maintenant !
M. Jean-Philippe Lachenaud,
rapporteur spécial.
C'est l'internationale socialiste !
(Sourires.)
M. Claude Allègre,
ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
Excusez-moi, mais à partir du moment où il n'y a pas de sélection à l'entrée de
l'université, ce taux d'échec n'est plus ce qu'il était autrefois. Dans les
expériences qui ont été faites avec un encadrement en petits groupes, le taux
d'échec diminue encore. A l'heure actuelle, vous ne pouvez pas critiquer le
premier cycle sur ce point. Vous pouvez le critiquer - je vais vous donner des
armes - mais cela concerne aussi mes prédécesseurs. Le problème numéro un,
c'est le non-contrôle des filières.
M. Jean-Philippe Lachenaud,
rapporteur spécial.
Voilà !
M. André Maman.
Effectivement !
M. Claude Allègre,
ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
En effet, là se pose un problème.
Je vous donne une information : cette année, la filière des sciences et
techniques des activités physiques et sportives, STAPS, est certes encore trop
importante, mais elle décroît, contrairement à ce qui a été dit.
(M. le rapporteur pour avis est dubitatif.)
M. Jean-Philippe Lachenaud,
rapporteur spécial.
Enfin, la sagesse !
M. Claude Allègre,
ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
Vous n'avez pas les chiffres, je vous les donne !
M. Jacques Valade,
rapporteur pour avis.
Heureusement qu'il y a la présente discussion.
Enfin, nous les avons !
M. Claude Allègre,
ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
Vous pensez, monsieur Valade, que je vous cache des chiffres ? Mais ils sont
publiés !
M. Jacques Valade,
rapporteur pour avis.
Nous avons un peu de difficulté à les obtenir,
monsieur le ministre !
M. Claude Allègre,
ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
Ce n'est pas vrai ! Vous n'avez qu'à m'écrire. La preuve, je vous les donne
!
M. Jacques Valade,
rapporteur pour avis.
Je vous laisse à vos certitudes !
M. Claude Allègre,
ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
Je reconnais que, sur le plan de l'information, il y a problème par rapport au
débat.
M. Jacques Valade,
rapporteur pour avis.
Un vrai problème !
M. Claude Allègre,
ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
Mais je ne veux pas que l'on croie qu'on cache les chiffres.
M. Jacques Valade,
rapporteur pour avis.
Je pourrais vous citer quelques réponses que
vous-même et vos collaborateurs avez bien voulu formuler au questionnaire sur
le présent projet de budget de l'enseignement supérieur !
M. Claude Allègre,
ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
Je n'avais pas alors les données relatives aux inscriptions de cette année.
M. Jacques Valade,
rapporteur pour avis.
Comment pouvons-nous faire du bon travail dans ces
conditions ?
M. Claude Allègre,
ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
Je ne vous reproche rien !
M. Jacques Valade,
rapporteur pour avis.
Je cite les chiffres de vos services, monsieur le
ministre !
M. Claude Allègre,
ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
Je vous donne aujourd'hui les chiffres exacts. Au moment du débat à l'Assemblée
nationale, qui se situait quinze jours après la rentrée, je n'avais pas les
statistiques. Je les ai maintenant et cela me permet de vous dire qu'il y a un
tassement s'agissant des STAPS. Je n'ai pas dit que nous avions résolu le
problème !
En revanche, des filières intitulées « communication et culture » continuent
de croître. Puis il y a la filière psychologie. Là, un problème de répartition
se pose et c'est un domaine dans lequel il faut progresser.
Je prendrai un autre exemple : les filières de lettres et sciences humaines.
Il s'agit de « tuyaux ». Vous entrez en premier cycle et vous continuez en
ayant uniquement des cours de la spécialité dans laquelle vous êtes entré. Vous
pouvez mettre un semestre d'orientation ; celui de M. Bayrou, je vous le dis
franchement, ne sert à peu près à rien, parce qu'on ne peut pas se réorienter
brutalement de psychologie en lettres, ou vice versa.
Le véritable problème, c'est que ces études de lettres devraient avoir un
socle beaucoup plus large, permettant l'orientation. On va essayer d'y
remédier. Ce n'est pas simple. En effet, les personnes qui ont créé
quarante-deux filières séparées en lettres et sciences humaines ont quelque
intérêt dans ce domaine. Donc, il faut faire bouger les choses.
S'agissant des relations entre les universités et les grandes écoles, je pense
vous avoir répondu, monsieur Lachenaud.
S'agissant des heures complémentaires, c'est encore un secteur à propos duquel
l'opposition devrait se mettre au fait. En effet, M. Lachenaud a considéré que
j'étais un peu laxiste, alors que MM. Valade et Maman ont estimé que j'avais
supprimé ces heures dans les IUT, ce qui, à leurs yeux, est une catastrophe.
M. Jacques Valade,
rapporteur pour avis.
Diminuées !
M. Claude Allègre,
ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
Nous essayons de faire au mieux dans ce domaine.
J'en viens aux bibliothèques. On a réalisé le plan Miquel, ce qui est déjà
bien. J'ai d'ores et déjà à peu près toutes les remontées du plan U3M. Cela
vous satisfera, messieurs, puisque les investissements en faveur des
bibliothèques représenteront probablement entre 10 % et 15 %. Donc, on avance
dans ce domaine.
Maintenant, je vous livre une information sur la bibliothèque numérique. De
telles bibliothèques sont
pro parte
une illusion. En effet, les supports
informatiques sont moins résistants que les microfilms ou le papier. Or, dans
une bibliothèque, plus de 90 % des ouvrages ne sont jamais lus. Si vous stockez
l'ensemble des livres sous forme informatique, il faut les recopier tous les
six ou sept ans et le prix de revient est considérable. C'est pourquoi la
Library of Congress
ou la
British Library
ne font pas de stockage
numérique actuellement. Le jour où l'on aura trouvé des supports irréprochables
pendant trente ans ou quarante ans ou que l'on peut recopier facilement, on
pourra créer une bibliothèque numérique.
En revanche, il est possible d'établir un catalogue numérique. Les
bibliothèques universitaires en ont fait un. A ce propos, nous allons signer
une série d'accords avec la
Library of Congress
et la
Bristish
Library
pour favoriser les échanges de livres.
M. Neuwirth m'avait interrogé sur le traitement de la douleur. Je lui
répondrai par écrit. Nous avons pris des mesures dans ce domaine.
Monsieur Othily, je suis très attentif au programme relatif à la Guyane et aux
DOM-TOM. Nous avons lancé un plan spécial de rattrapage scolaire pour les
DOM-TOM. Le problème est, en Guyane, particulièrement difficile à résoudre, le
nombre d'étudiants étant peu élevé : comment faire fonctionner un IUFM pour
former des enseignants dans le premier et le second cycle ? De toute manière,
un chargé de mission, M. Alain Nemoz, va être nommé et des moyens
supplémentaires lui seront octroyés dès le mois de janvier. La dotation de
l'université des Antilles-Guyane, bien qu'excédentaire, a été maintenue à 20
millions de francs et onze postes d'IATOS et treize postes d'enseignants leur
ont été affectés cette année.
Je suis donc tout à fait ouvert s'agissant de la Guyane. Le plan U3M prévoit
d'ailleurs la création d'un centre de recherche commun avec les Brésiliens.
Cela étant, on ne peut pas aller plus vite que la musique ! Je suis favorable à
l'installation, à terme, d'une université autonome en Guyane, comme à Papeete
et à Nouméa. Il n'y a aucune opposition de principe de la part du Gouvernement,
mais il faut attendre que les conditions soient réunies et que les étudiants
soient assez nombreux. Précipiter les choses ne rendrait pas service à la
Guyane.
Je crois avoir répondu, mesdames, messieurs les sénateurs, à toutes vos
questions.
M. André Maman.
Et les frais de scolarité ? Et la sélection ?
M. Claude Allègre,
ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
Vous êtes partisan du modèle américain, monsieur Maman, mais pas moi ! Je suis
fondamentalement opposé à ce que les frais d'inscription financent la plus
grande partie des coûts de fonctionnement de l'enseignement supérieur dans
notre pays.
Mme Hélène Luc et M. Yvan Renar.
Très bien !
M. Claude Allègre,
ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
En France - cela fait partie du
welfare state -
l'enseignement est
gratuit et public. Tant que je serai ministre, cela ne changera pas.
Mme Hélène Luc.
Il a raison !
M. Claude Allègre,
ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
Ce point est fondamental.
A l'heure actuelle, des universités américaines tentent de s'implanter chez
nous.
M. Jacques Valade,
rapporteur pour avis.
Oui !
M. Claude Allègre,
ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
Si nous les laissions faire, nous serions rapidement envahis. Par conséquent,
sur ce sujet, aucune discussion n'est possible.
M. Jacques Valade,
rapporteur pour avis,
et Mme Hélène Luc.
Absolument !
M. Claude Allègre,
ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
L'un des fondements de la République dans ce pays, c'est l'enseignement gratuit
donné à ceux qui sont capables d'en tirer profit, et revenir sur ce principe
signifierait à mon sens changer de régime. Je n'importerai pas le système
américain. C'est clair ! Je le connais aussi bien que vous, monsieur Maman,
mais dans l'ensemble de l'Europe, en Allemagne, en Italie, aux Pays-Bas,
l'enseignement est gratuit : c'est la philosophie européenne. Outre-Atlantique,
une autre philosophie prévaut, à laquelle je ne suis pas favorable. Je vous le
dis tout net, et c'est un point très important à mes yeux !
Vous avez en outre évoqué la sélection à l'entrée de l'université. Je croyais
que M. Bayrou avait réglé le problème, mais je veux bien en débattre.
C'est à l'université que la sélection est la plus forte,...
M. André Maman.
Par l'échec !
M. Claude Allègre,
ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
... et non pas dans les grandes écoles ! Une fois que l'on est parvenu à entrer
dans une grande école, on en sort diplômé. Mais à l'université, chaque année
est sélective, chaque année des étudiants échouent. Par conséquent, la
situation en France est la suivante : il existe le système des grandes écoles,
que, de vous à moi, je trouve extraordinairement scolaire, avec un examen
formel, etc., et, parallèlement, une autre voie, l'université, qui offre à ceux
qui n'ont pas été suffisamment travailleurs ou brillants dans l'enseignement
secondaire une deuxième chance. Mais encore faut-il qu'ils passent le cap du
premier cycle ! La sélection existe donc aussi à l'université, simplement elle
ne s'opère pas à l'entrée.
En tout état de cause, cette possibilité de choisir me semble très importante.
Le problème est ailleurs : il s'agit plutôt de savoir si l'on doit laisser une
université accueillir trois fois plus d'étudiants que ses moyens ne le lui
permettent. C'est donc une question d'adéquation aux capacités d'accueil. En
effet, un certain nombre d'universités - c'est leur faute, et non pas celle du
Gouvernement - essaient d'attirer plus d'étudiants qu'elles ne peuvent en
accueillir, afin d'obtenir des moyens supplémentaires. Je ne pense pas que ce
soit une bonne solution. Là est le vrai problème.
Cela étant dit, je le répète, les questions relatives à la sélection à
l'université et aux droits d'inscription sont fondamentales et mettent en cause
des valeurs essentielles du système éducatif européen, à propos desquelles ma
position n'est pas près d'évoluer, ni celle du Gouvernement, je vous le dis
tout de suite !
Mme Hélène Luc.
Vous avez raison ! Pas sur tout, mais là-dessus, oui !
M. le président.
Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits figurant aux états B et
C concernant l'éducation nationale, la recherche et la technologie : II. -
Enseignement supérieur.
*
* *
ÉTAT B
M. le président. « Titre III : 516 104 326 francs. »