Séance du 7 décembre 1999
M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons l'examen des dispositions du projet de loi de finances concernant l'économie, les finances et l'industrie : III. - Petites et moyennes entreprises, commerce et artisanat.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Marylise Lebranchu, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce et à l'artisanat. Monsieur le rapporteur spécial, le diagnostic que nous portons sur les PME est très largement convergent. Je vous remercie de l'intérêt que vous portez, cette année encore, à ce projet de budget.
Je remercie également M. le rapporteur pour avis avec lequel j'ai toujours plaisir à échanger des propos, même si ce n'est pas toujours simple parce que nous ne sommes pas forcément d'accord. J'apprécie la pertinence et la grande liberté de ses analyses, qui sont pour moi, comme tous les arguments que j'ai entendus en commission, une invitation à mieux faire au sens premier du terme.
Je tiens enfin à vous remercier tous et toutes de l'intérêt qu'illustrent vos questions et vos propositions à l'égard de ce projet de budget que j'ai l'honneur de présenter et de défendre devant vous.
Ce projet de budget pour 2000 a été construit autour de deux priorités qui reposent sur deux convictions.
Première priorité : accompagner, en la renforçant, la politique économique générale du Gouvernement en faveur des entreprises. Il faut témoigner de la volonté de croissance.
Les PME doivent être des acteurs de premier plan de la croissance économique et de l'emploi, comme l'ont dit MM. Dussaut et Ballayer.
Seconde priorité : créer les conditions d'une réelle solidarité des entreprises les unes envers les autres. Une croissance économique durable est possible pour notre pays à condition de la bâtir sur des fondations solides, c'est-à-dire à partir d'un échange économique équitable.
Je vais maintenant vous parler de nouveau de ma première conviction : le développement des PME, du commerce, de l'artisanat ou des services se construit à partir de territoires identifiés et structurés.
J'ai une autre conviction : l'économie de marché n'est un ordre des choses acceptable que s'il obéit à des règles et à une éthique. C'est indispensable, cela fonde le rôle de la puissance publique et lui indique le chemin.
Le projet de loi de finances pour l'an 2000 poursuit l'orientation prise dans les budgets de 1998 et de 1999 pour les PME.
En 1999, les PME ont bénéficié les premières de la suppression de la part salariale de la taxe professionnelle, ce qui représentait un allégement de 7 milliards de francs.
La mesure la plus importante, rappelée par M. Jean-Jacques Robert et par Mme Odette Terrade notamment, est certainement, cette année, la baisse de la TVA sur les travaux dans les logements. Le taux de la TVA baisse de 15 points, ce qui représente 19,7 milliards de francs d'allégement d'impôt.
Depuis le 1er décembre - je vais répondre ainsi à des inquiétudes qui ont été exprimées par beaucoup d'entre vous - les entreprises qui achètent leurs fournitures au taux de 20,6 % pour des travaux facturés à 5,5 % peuvent anticiper le crédit d'impôt qui leur est dû. C'est une mesure très favorable pour la trésorerie des PME du secteur du bâtiment.
Si nous avons pris cette décision et si nous l'avons annoncée dès le lendemain ou presque, monsieur de Montesquiou, c'est à la demande des entreprises.
En effet, si nous avions inscrit ce dispositif dans le projet de loi de finances, les particuliers prêts à faire les travaux chez eux auraient attendu que la loi soit promulguée. Il en serait résulté un trou de consommation de deux mois. C'était un peu beaucoup !
C'était délicat et nous étions dans l'obligation de décider vite. Nous aurions pourtant préféré en débattre avec vous.
M. Aymeri de Montesquiou. Nous en sommes d'accord !
Mme Marylise Lebranchu, secrétaire d'Etat. La baisse de la TVA est une mesure importante pour augmenter la croissance économique. En même temps, je suis persuadée que l'augmentation de l'activité peut aider des entreprises à organiser un passage aux 35 heures qui en a inquiété plus d'un sur ces travées.
Le passage aux 35 heures n'est pas toujours facile ! Nous en sommes tous convaincus, et je n'ai jamais dit le contraire. Des mesures d'accompagnement sont donc nécessaires.
La baisse de la TVA engendredra à peu près 30 000 emplois, selon les professionnels du bâtiment eux-mêmes. A cela s'ajoutent 10 000 emplois au minimum chez les fournisseurs de matériaux.
J'attire votre attention sur le fait que, si la très grande majorité des professionnels du bâtiment n'a pas augmenté ses prix depuis la baisse de la TVA, en revanche, nous avons déjà constaté une certaine dérive des prix des matériaux. Il serait dommage que ce que nous avons voulu faire en baissant la TVA sur les travaux d'entretien soit repris en amont par des augmentations trop fortes du coût des fournitures.
Il est vrai que le renforcement de la demande crée des tensions dans certains secteurs plus particuliers des métiers de l'artisanat. Les deux rapporteurs d'abord, puis MM. Fatous, Ostermann et Dussaut l'on dit et redit.
C'est pourquoi, une campagne nationale, relayée localement en fonction des besoins constatés des spécialités, sera lancée au début de l'année prochaine.
Cette campagne, élaborée grâce à une contribution du ministère de l'emploi et de la solidarité, sera accompagnée d'une révision du contenu et des modalités de l'apprentissage.
Il faut effectivement adapter l'apprentissage. Sa durée doit être à géométrie variable et s'étendre sur un an, deux ans ou trois ans, selon les besoins réels des jeunes et des entreprises.
La baisse de la TVA sur les services n'a été citée qu'une fois, par M. Bécot. Il est vrai qu'on en parle moins. Ce sont pourtant les personnes handicapées et les personnes âgées qui en bénéficieront en premier, ainsi que les gardes d'enfants, les soutiens scolaires et les aides ménagères.
Nous donnons un contenu concret à l'économie solidaire que nous voulons mettre en place. Ce n'est pas une mesure de portée symoblique, puisque son coût est de 100 millions de francs.
Un premier bilan de la baisse de TVA depuis le mois de juin 1997 fait apparaître un total de 28,8 milliards de francs, dont 19,8 milliards de francs pour le budget pour 2000. Il s'agit là d'un effort sans précédent en faveur des petites entreprises.
Dans une démarche cohérente d'amélioration de la fiscalité, le Gouvernement prend un certain nombre de mesures ciblées.
La première série de mesures fiscales concerne cette TVA. Je ferais à ce propos une incidente sur la restauration servie à table et la restauration à emporter, la baisse de la TVA ayant été adoptée pour la seule restauration à emporter.
Je rappelle quand même à l'ensemble du Sénat que des traiteurs ainsi qu'un certain nombre de tenants des métiers de bouche ne souhaitent pas que la TVA soit ramenée à 5 % pour l'ensemble de la restauration. Les traiteurs sont eux aussi concernés par la TVA sur les repas à emporter, et ils ne voient pas forcément bien cette mesure proposée en faveur de l'ensemble de la restauration française.
Il faut savoir aussi que la restauration, contrairement à ce qui a pu être dit tout à l'heure, n'est pas forcément un secteur de haute concurrence, dans la mesure où l'on ne passe pas nécessairement la frontière pour un déjeuner.
Il faut que nous étudiions précisément ce que serait le coût d'une mesure de ce type, son impact exact sur les prix et l'accès à la restauration. Or nous n'avons pas suffisamment d'expertises de ce type.
Il n'est cependant pas exact que nous nous soyons opposés à la baisse de la TVA sur la restauration prise par la commission européenne. Dominique Strauss-Kahn était présent à la négociation, et il a fait partie de ceux qui ont défendu la baisse de la TVA sur la restauration.
D'autres métiers auraient également besoin de cette baisse de la TVA, en particulier ceux qui assurent les services, aussi bien dans les centres-villes que dans les bourgs et les galeries marchandes. Ils sont trop souvent oubliés alors que c'est peut-être par eux qu'il faudrait commencer. En disant cela, je pense aux cordonniers, par exemple, et à tous ces métiers qui disparaissent alors même qu'ils sont nécessaires et qu'ils témoignent d'un vrai savoir-faire qui doit être protégé.
Voilà pourquoi je reste persuadée qu'il faut envisager la baisse de TVA dans son ensemble et ne pas simplement s'arrêter à la restauration, même si je comprends les restaurateurs et même si le mouvement général relatif à une certaine forme de restauration américaine conduit à défendre des positions encore plus dures à l'égard de ce taux de TVA.
Ces mesures fiscales n'auraient pas atteint leur objet si nous ne parlions pas aussi de celles qui visent à la création des entreprises. MM. Demuynck et Dussaut, notamment, ont cité le droit fixe de 1 500 francs pour constitution de société qui est désormais supprimé.
Au moment où l'on avait fait passer le délai de création d'une entreprise à vingt-quatre heures, le coût de cette inscription avait été multiplié par trois. Désormais, c'est gratuit, et c'est une économie de 200 millions de francs qui bénéficiera à 140 000 créateurs, ce qui n'est pas anodin.
Le taux des droits de mutation sur les fonds de commerce et les cessions de clientèle passera de 11,40 % à 4,80 % par alignement sur les taux des droits de cession des parts sociales. C'est la mise à égalité des fonds de commerce et des entreprises. La mesure pourrait concerner 60 000 mutations et faire réaliser une économie globale de 700 millions de francs. C'est aussi une mesure forte, qui était attendue depuis longtemps.
La suppression de l'imposition forfaitaire annuelle, dont vous avez presque tous parlé, pour les entreprises dont le chiffre d'affaires est inférieur à 500 000 francs, est non seulement une mesure d'allégement, puisque l'économie pour les PME s'élève à 300 millions de francs, mais aussi une mesure de simplication importante.
Parmi les autres dispositifs pérennisés figure le report d'imposition des plus-values de cession de titres dont le produit est investi dans les fonds propres des entreprises créées depuis moins de quinze ans. Ainsi, les entrepreneurs débutants trouveront plus facilement conseil et soutien financier.
Ces mesures seront complétées à l'occasion des assises de la création d'entreprise, que nous organiserons, sous l'égide du Premier ministre, en mars prochain. Nous avons déjà organisé des réunions préparatoires sur le territoire. Après ces assises et la remise du rapport Besson, un certain nombre de mesures seront proposées.
M. Raffarin a dit tout à l'heure qu'il s'agissait d'un axe fort. Je partage son analyse.
L'économie évolue aujourd'hui, et il faut parler et agir globalement. Je rappelle cependant que le peu de création d'entreprises résulte des difficultés auxquelles était confrontée notre économie. La période de croissance que nous traversons est relativement récente. En outre, nous n'avons pas assez dit et redit que les emplois seraient créés dans les nouvelles technologies de l'information et de la communication mais aussi dans les services.
Un certain nombre de secteurs n'ont pas été pris en compte, ni par le système social ni par le système fiscal français. Or il s'agissait bien de rebâtir une société - je partage également cette analyse - même si l'on a parlé, pendant de trop longues années, de crise économique, ce qui en a découragé plus d'un.
Il fallait surtout dire qu'il s'agissait non pas d'une crise économique, mais d'une mutation technologique forte, qui fait que les productions de masse sont désormais derrière nous ; j'en veux pour preuve le fait que nous assistons à plus de restructurations que de créations.
Les productions de masse ont, petit à petit, laissé du champ à un certain nombre d'entreprises qui bénéficient de l'externalisation des fonctions des grandes entreprises. Par ailleurs, la majorité des entreprises ont désormais besoin d'entreprises de services à leurs côtés.
C'est ainsi qu'il faut penser globalement l'évolution de notre société. Ce n'est pas d'une crise dont nous sortons, c'est à une mutation technologique que nous assistons, et il faut savoir l'affronter.
Un intervenant a regretté que les jeunes sortant de telle ou telle école n'entrent pas immédiatement dans le cycle de la création.
Mais nous sommes dans une « société trombinoscope » - comme je le dis si souvent -, dans une société où le premier espoir des parents est que les enfants obtiennent d'abord le baccalauréat puis, si possible, un diplôme de niveau supérieur et soient enfin embauchés par une grande entreprise ou dans la haute fonction publique. C'est le rêve, le désir de tout un chacun dans ce pays.
Lors de réunions concernant l'apprentissage, je n'ai jamais rencontré un seul défenseur de l'orientation des jeunes vers l'apprentissage qui ait fait cette démarche pour son fils ou pour sa fille. C'est donc bien d'un phénomène global dont il s'agit.
Mais il faut savoir également que, pour créer une entreprise, il faut aujourd'hui allier une formation générale et un savoir-faire : bac + 2 et un CAP, bac + n et un apprentissage ou une alternance.
Des ouvertures de ce type sont nécessaires, car il est vrai que si les savoir-faire sont une clé d'entrée dans la création d'entreprises, ils ne sont peut-être plus suffisants pour adapter l'entreprise à l'évolution rapide du monde dans lequel nous vivons. Il est vrai aussi que le créateur d'une entreprise artisanale sera confronté à un marché totalement ouvert, puisque, faisant lui-même du commerce électronique, il aura globalisé la plus grande part de son accès à ses clients.
Ces évolutions impliquent une réforme de fond qui doit être discutée avec M. Claude Allègre, pour l'éducation nationale, et avec Mme Péry, pour la formation professionnelle.
Même si cela n'a rien de comparable avec les trois jours du service national, la créativité doit être intégrée dans les enseignements très tôt, et elle doit faire partie du cursus. Ce n'est pas toujours le cas aujourd'hui et nous savons tous bien que, si les élèves ont le choix, ils manquent généralement plutôt le cours consacré au savoir-faire technologique que le cours portant sur une matière fondamentale.
Il y a vraiment un apprentissage de la créativité à faire. Des expériences sont en cours qui sont porteuses d'espoirs de créations, en particulier le fait que des universités travaillent aujourd'hui avec des chambres de métiers afin que des étudiants en université puissent faire des stages dans des entreprises artisanales. A nous de transformer ces expériences et d'apporter aux créateurs d'entreprise les quelques mesures qui leur manquent et qui sont, effectivement, de deux types.
La première consiste à faciliter l'accès au crédit. Nous avons presque tous les outils pour cela. Il nous suffit simplement de les réécrire à partir de ce que nous avons fait avec la SOFARIS, la SIAGI et la SOCAMA.
La seconde mesure revient à apporter aux créateurs le filet de protection dont ils ont besoin, car un cadre licencié dispose de plus de moyens financiers pour attendre le prochain poste que quelqu'un qui a pris le risque de créer une entreprise et qui échoue. On ne peut pas aborder la question de la création d'entreprise sans aborder celle de l'échec. Ce dernier fait partie du risque d'entreprendre ; il faut donc que nous le gérions ensemble, a minima bien évidemment, car il est hors de question de porter tout le monde !
De la même manière, je reste persuadée que les réseaux d'accompagnement doivent être aidés au-delà du bénévolat, lequel ne suffira pas. M. Raffarin a cité tout à l'heure le réseau « Entreprendre en France », mais il en existe d'autres. Aujourd'hui, quatre réseaux fonctionnent grâce à la prime à la création d'entreprises, et il faut faire en sorte que tous les territoires soient maillés par des réseaux de ce type, ce qui n'est pas le cas.
Pour citer votre collègue député Eric Besson, auteur du rapport sur la création d'entreprises « il n'y a pas aujourd'hui d'égalité de droit devant le droit d'entreprendre ». C'est cela qu'il faut créer sur le territoire, car les créateurs potentiels n'ont pas toujours la chance d'appartenir à une famille dont les biens peuvent servir de caution à la banque.
Voilà, s'agissant de la création, ce que nous voulons faire au mois de mars. J'espère qu'avec ces quelques mesures nous finirons par déclencher un réflexe de création, à condition bien sûr qu'en amont, sur les formations, nous ayons gagné le réflexe de la créativité.
Les créateurs ont besoin aussi d'avoir en face d'eux des entrepreneurs qui changent de langage et qui ne qualifient pas leur situation de très difficile. Ils devraient par exemple applaudir lorsque la taxe professionnelle baisse et faire savoir aux créateurs potentiels que 1 057 000 entreprises seront exonérées en l'an 2000 de la part salariale de la taxe professionnelle et que, fiscalement, les choses vont mieux, et même de mieux en mieux !
Un mot, pour terminer, de « l'impôt papier », car vous avez pratiquement tous cité cette demande de simplification.
Madame Terrade, il ne faut pas confondre simplification administrative et suppression de la fiscalité ou des cotisations sociales. Malheureusement, un mouvement s'est développé en France et appelle généralement à une simplification extrême qui consiste dans le non-paiement des cotisations sociales. Nous sommes tous, je crois, trop attachés au système de mutualisation des risques essentiels liés à la santé et à la retraite pour accepter une telle suppression.
J'étais ce matin aux 50 ans de ORGANIC et de la CANCAVA. Les caisses et les mandants de ces caisses veulent effectivement avoir suffisamment de rentrées d'argent pour assurer, aux uns et aux autres, les prestations dont ils ont besoin. Mais aucune demande de suppression de la cotisation n'a été émise.
En revanche, apparaissent des demandes d'adaptation de la cotisation. C'est pourquoi, par le biais d'un amendement qui a été déposé par le Gouvernement au Sénat, lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale, Martine Aubry a déjà proposé que la première année de cotisations soit allégée et qu'avant le quatrième mois ne soit plus appelée qu'une cotisation minime, qui n'atteindra, la deuxième année, que 55 000 francs.
En effet, comme les avances remboursables fonctionnent, comme les prêts garantis fonctionnent, il ne faut pas, selon nous, que la totalité de l'avance remboursable soit récupérée trois mois après par les cotisations sociales. Par conséquent, oui pour simplifier, aménager, reporter en cas de création, mais non pour supprimer. Ou alors il faut parler d'un autre régime que le nôtre, mais je ne pense pas que ce soit ce que souhaitent les entreprises.
Les autres simplifications engagées depuis l'automne 1997 sont désormais entrées dans les faits. Mais il faut maintenant que la commission pour les simplifications administratives pilote la mise en oeuvre de nouvelles actions. Nous ciblons notre démarche sur les petites entreprises, c'est-à-dire que nous agissons en fonction de ce qu'elles nous demandent. Les chambres de métiers et les chambres de commerce devraient nous aider à collecter et à faire remonter leurs souhaits, car ce qui nous paraît compliqué n'est pas toujours vécu comme tel par ces petites entreprises.
S'agissant de l'informatique, je rejoins ce qui a été dit par plusieurs d'entre vous : la mise en réseau va vraiment nous aider.
En l'an 2000, ce sont quarante-neuf impôts et taxes qui seront supprimés, dont vingt-huit concernent directement les PME. Au 30 mars 2000, les PME auront toutes un accès unique à Internet pour leurs déclarations sociales, grâce à la mise en place d'un portail unique et sécurisé, comme vous l'avez dit madame Terrade. Il est vrai que cette proposition nous avait été faite en particulier par les conjointes des chefs d'entreprises, dont le statut a si souvent été évoqué tout à l'heure. Nous avons pu la concrétiser grâce à la collaboration de l'ensemble des services sociaux, partenaires de cette ouverture du portail unique.
Un guichet unique expérimental sera mis en place cet hiver pour les déclarations des travailleurs saisonniers des métiers du tourisme en Savoie. Nous voulons vraiment avancer sur ce dossier, d'abord parce que le travail saisonnier n'est pas bien géré aujourd'hui et qu'il n'existe pas, dans ce domaine, de bourse d'échanges, à l'image de ce qui se pratique en Limousin pour la transmission. Nous devons donc faire un effort particulier.
Il ne faut pas confondre le travail précaire et le travail saisonnier. Si certaines entreprises recourent au travail précaire de façon parfois un peu abusive - on a cité à cette tribune la grande distribution, mais il en existe d'autres - il est des entreprises qui sont fortement marquées par la saisonnalité et pour lesquelles nous devons trouver une solution, car ces entreprises offrent des emplois qu'il nous est actuellement difficile de pourvoir. C'est ainsi qu'il nous a fallu procéder à des échanges à l'échelon européen, pour satisfaire la demande des stations de sports d'hiver français !
Nous devons donc, c'est important, faciliter les démarches pour les travailleurs saisonniers et prendre en compte la saisonnalité, afin qu'elle ne soit pas considérée comme une précarité. Nous maîtriserons mieux ce problème après l'expérience qui a été acceptée par les acteurs économiques de la Savoie.
Le budget du secrétariat d'Etat a été construit avec la volonté de donner aux mesures fiscales leur pleine signification économique.
Je n'oublie pas, comme le rappelaient MM. Bécot et Dussaut, l'action en faveur du soutien à l'exportation et à l'investissement à l'étranger des PME grâce à de nouvelles procédures ; je pense au FASEP, le fonds d'études et d'aide au secteur privé, pour les petits projets, fonds qui n'est pas suffisamment connu. Mon collègue François Huwart reviendra sans doute tout à l'heure sur cette grande réforme du secrétariat d'Etat au commerce extérieur.
Cette idée selon laquelle les petites entreprises doivent avoir leur guichet spécial, leur fonds spécial et leur assurance de prospection spéciale est en effet fondamentale, car c'est ce qui, effectivement, leur posait le plus de problèmes. Je rassure MM. Bécot et Dussaut sur ce point ! Il existe maintenant un dispositif spécifique. Notre problème, aujourd'hui, est de faire en sorte que les chambres de métiers et les chambres de commerce et d'industrie s'en saisissent pour en faire un outil connu et utilisé par les petites entreprises qui sont fortement capables d'exporter - je pense en particulier, comme cela a été dit tout à l'heure, aux métiers d'art. Un des grands prix d'exportation, on s'en souvient, a été attribué aux luthiers français, qui ont des marchés importants aux Etats-Unis.
Le budget de mon secrétariat d'Etat a été élaboré en fonction de deux autres exigences : rechercher le plus grand effet de levier et favoriser les actions créatrices d'emplois.
Dans cette tâche, notre travail est facilité par la situation budgétaire globale du ministère, qui, après avoir connu trois années consécutives de baisse, poursuit depuis l'an dernier une orientation plus positive.
Le budget que je présente devant vous, vous l'avez rappelé, totalise 386,9 millions de francs, le même montant que l'an dernier. La différence qui a été notée tient à la réserve parlementaire.
A ce budget, il convient d'ajouter les fonds du FISAC qui atteindront 410 millions de francs en l'an 2000, soit une augmentation de 10 millions de francs par rapport à 1999. Je signale à M. Mathieu, qui semble l'avoir oublié, qu'une telle augmentation est rare dans les différents budgets de l'Etat, en tout cas suffisamment rare pour être soulignée !
Vingt millions de francs vont, chaque année, au commerce multiservices - MM. Mathieu et de Montesquiou s'en inquiétaient - ce qui fait que l'épure est toujours de 43 millions de francs pour le commerce multiservices.
Parmi les mesures nouvelles du budget, trois sont particulièrement significatives : la création d'un fonds de garantie pour les petites entreprises, les contrats de plan et la réforme du FISAC.
Les prêts bonifiés - vous en avez presque tous parlé - ont eu, par le passé, leur utilité. Aujourd'hui, leur avantage est moins net, parce que les taux d'intérêt ont baissé, en même temps que l'offre de crédits devenait plus abondante.
Nous les avons réservés essentiellement à ce qui est l'adaptation aux normes - c'est un dossier difficile dans lequel il y a généralement un investissement sans retour sur investissement puisqu'il s'agit d'adapter une entreprise - notamment aux équipements concernant l'an 2000. A cet égard, je pense au bogue et, si vous avez encore un peu de temps, aidez-nous à dire aux commerçants que la majorité des terminaux de paiement pourront passer l'an 2000 à condition qu'ils aient été vérifiés !
Ces prêts bonifiés sont également réservés aux équipements concernant l'euro. En effet, si l'euro a été très bien pris en compte par les citoyens de ce pays au moment de sa mise en place, petit à petit, il s'est éloigné des préoccupations, et trop peu de comptabilités de petites entreprises sont réalisées en euros. A partir du 15 janvier, lorsque nous aurons surmonté les éventuelles difficultés liées au bogue de l'an 2000 - il ne faut pas mélanger les messages - nous devrons nous remettre rapidement au travail sur l'adaptation à l'euro des petites entreprises, des commerçants et des artisans, ce qui sera sûrement notre axe fort pour l'année à venir.
Bien entendu, la suppression complète et immédiate des prêts bonifiés n'aurait pas de sens, sauf à dire qu'un petit montant va nous servir à expérimenter lesdits fonds de garantie pour les petites entreprises. On ne peut pas prétendre que les petites entreprises n'ont pas accès aux crédits et ne pas faire un effort pour créer un fonds de garantie. Pour répondre au souci que vous aviez exprimé l'an dernier sur la difficulté d'accès aux crédits bancaires, nous avons trouvé la garantie des petits projets, ceux qui nous concernent ce soir.
Parmi les dossiers, les difficultés sont dues davantage à l'absence de crédits de ce type qu'à la mise aux normes pour d'autres équipements traditionnels.
Les 22 millions de francs consacrés au titre des mesures nouvelles nécessiteront un examen de notre et de votre part. Il s'agit de voir comment cela a fonctionné pour, éventuellement, aller au-delà l'an prochain. Ils permettront de garantir des prêts pour un montant jusqu'à 25 fois supérieur. C'est donc un moyen de faire évoluer le comportement de certaines banques en matière de garanties réelles et de sûretés personnelles.
Avec le fonds de garantie, le banquier doit renoncer à la garantie hypothécaire, qui plus est sur la résidence principale. Je compte bien faire bouger les lignes sur la caution trop souvent exigée du conjoint - MM. Dussaut, Mathieu et de Montesquiou ainsi que d'autres en ont parlé tout à l'heure - sans pour autant obliger les banques à prêter leur garantie au petit bonheur des projets. Il n'est pas dans notre intention de rendre les choses trop faciles et de faire prendre des risques aux banques, à la BDPME à la SOFARIS, à la SIAGI et à la SOCAMA. Mais si les garanties sont suffisantes, on ne doit pas dépasser la demande normale de l'entreprise privée qu'est la banque.
Les conjointes d'artisans, de commerçants et de chefs d'entreprise se plaignent de devoir systématiquement apporter leur caution solidaire alors que, pour des sommes bien supérieures à celles qu'empruntent leurs conjoints, les entrepreneurs soumis au régime des SARL ne sont pas astreints aux mêmes obligations. Il faut revoir la situation de façon calme et efficace. Nous sommes actuellement en période de croissance, et les fonds disponibles ne sont pas rares. Nous n'avons pas à gérer la rareté. Gérons donc les fonds disponibles avec, certes, le maximum de sérieux, mais sans exiger des garanties excessives. Nous reviendrons sur ce sujet lors de la discussion sur le projet de loi de régulation économique, et j'espère être alors en mesure de vous proposer des dispositions de nature à régler ce qui est une réelle tension.
Je reste par ailleurs persuadée que ni mon secrétariat d'Etat ni le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie ne résoudront entièrement le problème posé par les conjointes d'artisans. Il faudra soumettre le problème à la Chancellerie. En effet, il réside non pas dans l'entreprise elle-même, mais dans l'accident de la vie. A ce niveau, la protection des conjoints doit donc être assurée différemment dans notre droit. Il faudra travailler sur ce point indépendamment de ce que nous pourrons faire pour les garanties.
Cet accompagnement des nouvelles entreprises que nous mettons en place doit aussi être générateur de sécurité de la part des banques.
L'accompagnement, dont a parlé M. Raffarin, est sûrement l'un des axes les plus forts parmi ceux sur lesquels nous devons travailler avec nos partenaires consulaires, avec les conseils régionaux ; certains d'entre vous ont évoqué les collectivités territoriales. Le projet de loi de M. Zuccarelli permettra d'entrer dans ce type de système ressemblant aux actuelles plates-formes d'initiative locale.
L'accompagnement est effectivement nécessaire. Le taux de réussite est d'environ 80 % quand les entreprises sont accompagnées, de 50 % quand elles ne le sont pas.
Il faudra donc que, avec les chambres consulaires en particulier, nous passions des contrats d'objectif sur ce point, de façon que l'accompagnement soit assuré sur chaque territoire. Ce dispositif pourra s'appuyer sur une politique rénovée des contrats d'installation et de formation d'artisans, les CIFA.
J'ai noté que, sur toutes les travées, vous demandiez que la transmission soit facilitée. Outre ce que j'ai dit tout à l'heure sur les droits concernant les fonds de commerce, je reste persuadée que l'expérience limousine de la bourse des transmissions est une expérience à reproduire sur l'ensemble du territoire. Je ne pense pas que ce soit le métier de l'Etat de le faire tout seul. Il y a des établissements publics consulaires qui peuvent être un relais efficace dans cette mise en confrontation entre ceux qui ont une entreprise à transmettre et ceux qui pourraient la reprendre.
Nous serons, nous, prêts à discuter de ce sujet lors de la phase finale de la négociation des contrats de plan Etat-région. Si la région a des projets de ce type à nous proposer, nous les soutiendrons parce que nous pensons que l'échec de la transmission est effectivement souvent l'échec de la rencontre entre un entrepreneur qui part en retraite et un entrepreneur qui cherche à se lancer dans une activité.
Je n'ai pas retenu, ce matin, la proposition des commerçants et artisans qui demandent que soit mise en place une cessation progressive d'activité des artisans en vue d'une reprise. Je pense que, avec le CIFA et un certain nombre d'outils de ce type, nous avons suffisamment d'instruments pour éviter de créer des départs en retraite trop précoces.
Les organisations patronales ne peuvent pas à la fois affirmer que l'âge de la retraite est trop bas et demander la cessation progressive d'activité pour les entrepreneurs. Il importe de trouver une logique dans tout cela, et nous la trouverons.
Les contrats de plan, qui sont une autre priorité du budget, prennent appui sur des politiques menées à l'échelon national telles que la formation, qui sera dotée en l'an 2000 de 101,21 millions de francs, ou sur le Fonds d'aménagement des structures artisanales, le FASA, dont les crédits sont passés en deux ans de 2,5 millions de francs à 7 millions de francs et qui finance des actions en faveur de la sécurité alimentaire, de la qualité ou de l'innovation technologique. En effet, les petites entreprises sont capables d'innovations technologiques ; encore faut-il leur donner le coup de main nécessaire.
Puisque les demandes exprimées par les régions et retranscrites par les préfets portent, de façon nouvelle, sur le commerce et l'artisanat, qui sont reconnus comme des vecteurs de l'activité économique sur les territoires, il est indispensable de chercher à donner une cohérence forte aux contrats de plan 2000-2006.
J'ai retenu deux axes principaux pour les nouveaux contrats de plan, à savoir les investissements immatériels et les actions d'investissement groupés.
Les investissements immatériels répondent à un besoin exprimé par les PME sur l'ensemble des territoires. Il s'agit le plus souvent de conseil en matière technologique, en matière de ressources humaines, d'organisation du travail, de gestion des normes sanitaires ou de sécurité, de création de réseaux ou de recours à l'exportation. C'est sur ces sujets que la demande est la plus forte et que nous sommes prêts à contractualiser.
L'expérience du bogue de l'an 2000 ou le passage à l'euro ont démontré la nécessité de créer les conditions d'un accès plus simple, pour toutes les entreprises, à des expertises parfois très pointues. La nouvelle entreprise ou la PME exprime des besoins qui sont aujourd'hui, en termes de qualité et en volume, comparables, voire supérieurs à ceux des grandes entreprises ; on l'oublie malheureusement trop souvent.
Il faudra en même temps fournir un appui aux groupements d'employeurs, qu'ont évoqué Mme Terrade ainsi que M. Fatous, et aussi M. Dussaut, à propos des 35 heures.
Je crois que les groupements d'employeurs sont une des réponses possibles au problème que pose effectivement, dans certains métiers, la mise en application des 35 heures.
Nous pouvons contractualiser sur l'aide à la création des groupements d'employeurs partout où ceux-ci l'exigent. Je ne citerai que l'exemple de Vannes, précisément parce qu'il s'agit d'un groupement d'employeurs qui s'est constitué sans nous : nous l'avons simplement accompagné. En tout cas, là où se constituent des groupements d'employeurs, ils fonctionnent bien au regard de la réduction du temps de travail.
Les actions d'investissements groupés participent aussi à l'organisation des territoires innovants.
Les contrats de plan peuvent favoriser une meilleure diffusion des nouvelles technologies en matière de communication et de commerce électronique.
Il m'importe que les petites entreprises et le commerce, qu'il soit traditionnel, franchisé ou en coopérative, aient accès au commerce électronique avant que celui-ci n'ait été capté par de grands donneurs d'ordres, qui sont capables de tisser totalement la toile et de laisser peu de place à nos petites et moyennes entreprises.
Pour cette raison, je suis particulièrement vigilante, y compris en ce qui concerne les opérations du FISAC pour des villes ou des pays, à ce que le commerce électronique soit un des axes de réflexion et de travail.
Une installation permettant d'accéder à une page de commerce électronique coûte entre 30 000 francs et 50 000 francs. Une fois que les pages sont réalisées, il faut accéder à la clientèle et diffuser ses produits. Or cela, beaucoup de petites entreprises, aujourd'hui, ne savent pas le faire. Il y a donc là un vrai sujet de réflexion collective à mener sur tous les territoires.
Je souhaite évoquer brièvement l'animation économique, dont plusieurs orateurs ont parlé à la suite de l'exposé de M. Ballayer.
Pour ce qui est de la politique d'aide à l'animation économique des organisations professionnelles et des chambres de métiers, je rappelle que, compte tenu des insuffisances constatées dans le suivi de l'affectation des crédits répartis de 1994 à 1997 au titre du FSE, le Fonds social européen, il n'y a pas eu de crédits européens pour 1999.
Malgré cette contrainte, j'ai décidé, cette année, de réaliser un effort exceptionnel pour maintenir la dotation à l'animation économique à un niveau compatible avec la poursuite d'une action de qualité en ce domaine.
Je rappelle que les crédits hors FSE consacrés à l'animation économique s'élevaient, en 1997, à 111,7 millions de francs, en 1998, à 114,8 millions de francs, et qu'ils seront, cette année, de près de 151 millions de francs.
Ma dernière priorité concerne le FISAC, dont nous redessinons ensemble le rôle chaque année.
J'ai fixé trois objectifs au FISAC pour l'an 2000.
Le premier est de mieux articuler la diffusion des projets innovants avec les opérations conduites dans les contrats de plan, le FASA et l'action des réseaux des chambres de commerce et d'industrie et des chambres de métiers. Un crédit FISAC, c'est aussi l'occasion d'organiser l'ensemble des acteurs autour d'un projet commun.
Le deuxième objectif est d'améliorer la gestion des dossiers de montant modeste. De ce point de vue, je ne suis pas hostile à une plus grande déconcentration de la procédure, que M. Ostermann appelle de ses voeux. Mais je veux aussi rappeler mon attachement au rôle de péréquation opéré par le FISAC. Je pense qu'il ne faut pas figer les enveloppes par région. Sinon, cela signifie qu'on fige l'enveloppe sur l'année n , et la région considérée ne pourra plus avoir plus de crédits qu'elle n'en a eu au titre de l'année n , alors même que les produits seront plus nombreux. Le fait de remonter au niveau national permet de « péréquer » tous les ans en fonction des besoins réels et des projets réellement portés sur les territoires.
Le troisième objectif est de rechercher une plus grande clarté dans le fonctionnement du FISAC, et notamment une meilleure information du Parlement. Cela ne devrait pas poser de problème. Vous pourrez disposer d'un compte rendu sur les activités du FISAC.
Les fonds de garantie, les contrats de plan et le FISAC sont trois moyens de soutenir les projets individuels et collectifs sur les territoires. Si nous conjuguons bien ces trois moyens, les entreprises auront les mêmes chances de développement sur tout le territoire.
Je traiterai maintenant brièvement des marchés publics, sur lesquels MM. Fatous, Demuynck, Hérisson et Robert m'ont interrogée. Notre projet de réforme est prêt, à la suite de la concertation qui a été menée en 1999. J'espère disposer bientôt d'un rapport législatif. Le seul problème qui reste à résoudre, concernant le dossier des marchés publics, est de lui trouver une place dans les travaux parlementaires. Comme je ne peux pas vous obliger à travailler entre le 24 décembre et le 1er janvier, je suis obligée d'attendre un support législatif.
Nous essaierons de trouver cette place dans le cadre du projet de loi sur les régulations économiques que M. le Premier ministre a annoncé.
En tout cas, des dispositions législatives sont nécessaires pour répondre aux attentes des PME concernant les conditions d'allotissement, les conditions du paiement direct et les problèmes de garantie de bonne fin. Ce sont les trois points essentiels que les petites entreprises soulèvent le plus souvent, outre, bien entendu, la simplification de l'accès aux marchés.
Pour les marchés publics comme pour les autres dossiers, il faudra songer non seulement au papier mais aussi aux réseaux et à la sécurisation de ceux-ci. En effet, il est possible de répondre à un marché public sur le Net à condition que les données et les coordonnées de l'entreprise soient sécurisées, ce qui n'est pas encore le cas actuellement sur tous les réseaux.
Je vous donne donc rendez-vous pour prendre ces dispositions aussitôt que le calendrier parlementaire nous en donnera la possibilité.
Je vous ai dit ma conviction de la nécessité d'une meilleure régulation et de la mise en oeuvre d'une éthique en économie. Je réponds en cela à tout ce qui a été dit tout à l'heure sur la grande distribution, sur les donneurs d'ordres ou sur les délais de paiement.
S'agissant des délais de paiement, la directive sera, je pense, adoptée par le Parlement européen en mars 2000. Nous espérions qu'elle le serait ce mois-ci, mais nous étions trop optimistes.
Si tout se passe bien, nous pourrons, lors de la présidence française, transposer en droit français cette directive européenne, qui maintient le contrat, qui rend les pénalités automatiques et cessibles. Ce serait l'aboutissement de deux ans de travail sur cette directive relative aux délais de paiement.
Nous avons d'ailleurs eu la chance de pouvoir avoir un axe d'accord avec les Britanniques pour que cette directive soit enfin rédigée comme nous le voulions, les uns et les autres.
Outre les délais de paiement, qui sont un sujet majeur, le Premier ministre nous a demandé, à la suite de tables rondes organisées sur l'initiative de Christian Pierret, pour le textile, de Jean Glavany, pour les fruits et légumes - d'autres sont en cours qui portent sur d'autres types de production - de promouvoir ce qu'on peut appeler le « contrat amiable » en ce qui concerne les relations avec la grande distribution et les donneurs d'ordres. Nous voulons en effet - et plusieurs d'entre vous se sont exprimés en ce sens - que ce soient les acteurs eux-mêmes qui règlent au maximum les problèmes intéressant leurs relations réciproques. Je crois, comme vous, qu'il faut faire plus de régulation que de réglementation.
La France est sûrement le pays qui a le plus de réglementation intéressant l'ensemble des formes de distribution et celui, en même temps, celui qui a le plus de mètres carrés. L'excès de réglementation peut donc ne pas aboutir à ce que l'on recherchait au départ. Sans doute aurait-on mieux fait, parfois, de parler de régulation.
Nous ferons donc en sorte de privilégier la régulation. Mais ce qui ne sera pas réglé par le contrat le sera par le code de bonne conduite des pratiques commerciales défini dans le cadre du texte sur les régulations économiques.
Nous avons donné une chance aux acteurs de réguler eux-mêmes, de proposer ces codes de bonne conduite dont ils parlaient ; nous constaterons ce qui aura été mis en oeuvre à cet égard lorsqu'il n'y aura rien à constater nous ferons notre travail gouvernemental en proposant au Parlement les quelques mesures de régulation qui manqueront à cet échafaudage qui paraît actuellement un peu difficile à faire tenir.
L'action de mon ministère ne se résume pas à l'énoncé de lignes de crédits budgétaires ; je viens de le montrer. Le secteur dont j'ai la responsabilité est très vaste : il couvre les PME, le commerce, l'artisanat, les services, les professions libérales et la consommation.
Chacun de ces secteurs a ses particularités, mais ils expriment tous un besoin commun, celui d'une régulation économique plus forte. Plus il y a d'économie de marché, plus la régulation est nécessaire. C'est cela qui a été dit par beaucoup au moment des premières négociations de l'OMC. C'est cela, peut-être, qui a été mal compris par beaucoup de citoyens.
Puisque François Huwart sera devant vous tout à l'heure, et qu'il évoquera certainement l'échec de Seattle, qui n'est qu'un échec temporaire, je voudrais dire que, en tant que responsable des secteurs que je viens d'énumérer, j'ai besoin de l'OMC parce que la majorité des petites entreprises, sur un marché qui est de toute façon mondial, ont besoin d'une régulation et que, en dehors de l'OMC, je ne vois pas d'où viendrait cette régulation. Notre langage commun devrait viser à expliquer ce que signifie la régulation internationale en termes d'obligations à l'égard des acteurs économiques les plus faibles comme à l'égard des pays les plus faibles.
Je crains qu'un discours un peu plus démagogique - si je puis me permettre un terme qui, sûrement, n'est jamais utilisé ici (Sourires) - ne fasse croire qu'il suffit de « fermer » l'OMC et que tout ira bien. Ce n'est évidemment pas concevable puisque le marché est déjà international. Ce que je disais tout à l'heure sur le commerce électronique, par exemple, nous oblige même à poser, au niveau de l'OMC, les problèmes de garantie de contrat, de signature, de paiement électronique, de sécurisation, etc., mais aussi de normes fiscales et sociales.
Tout cela nécessitera énormément de travail, à condition, bien sûr, que les citoyens comprennent pourquoi nous faisons ce travail et qui nous voulons protéger.
Je reste persuadée, enfin, que la régulation économique est le complément indispensable d'un développement économique durable. C'est aussi le moyen de créer des solidarités, qui font trop souvent défaut aux entreprises. Je tiens fréquemment aux chefs d'entreprise les propos suivants : vous êtes solidaires contre les 35 heures, mais êtes-vous certains d'être tous solidaires entre vous ? Pour ma part, je n'en suis pas convaincue !
Il faut donc recréer les conditions d'un dialogue équilibré, comme l'a demandé M. Hérisson. Cette tâche de médiation est l'une de mes priorités. Je le ferai aux côtés du Premier ministre, aussi bien aux assises du commerce et de la distribution qu'à celles de la création, parce que, là aussi, il faudra parler d'équilibre. Je donne rendez-vous à M. Jean-Jacques Robert, rapporteur pour avis, ainsi qu'aux orateurs qui ont évoqué cette question, notamment M. Bernard Dussaut, lors de ces assises, afin que nous examinions ensemble le moyen de faire mieux.
Quant au souci annexe d'assurer un équilibre entre les différentes sortes de commerce, le problème se pose entre les centres-villes et les périphéries, entre les centres-villes et les bourgs ruraux, et entre les bourgs ruraux eux-mêmes. Avec la loi Besson, d'un côté, la régulation, de l'autre, nous devrions non pas créer un nouveau déséquilibre, mais réussir à instaurer l'équilibre nécessaire. Je crains qu'un nouvel excès de textes ne soit pas forcément bienvenu pour notre appareil commercial.
S'il est temps que les pratiques de la grande distribution changent, je reconnais aussi que la grande distribution française fait obstacle, actuellement, à l'entrée sur le marché intérieur d'autres acteurs qui ne seraient peut-être pas faciles à gérer.
Par conséquent, tout cela demande beaucoup d'anticipation, beaucoup d'études. Mais il importe aussi que les règles de l'équilibre soient partagées, ce qui n'est pas encore le cas aujourd'hui. La concurrence doit revêtir un caractère plus collectif. Elle doit être ancrée dans des territoires et non pas être sous-tendue par une doctrine totalement désincarnée.
Je veux apporter la démonstration, par mon action au sein du Gouvernement, que le vaste secteur dont j'ai la charge peut être le moteur d'un nouveau mode de croissance économique fondé sur la solidarité. Pour ce faire, il me faut le plein soutien de la représentation nationale. Je regrette que, pour des raisons qui sont les vôtres, mesdames, messieurs les sénateurs, ce ne soit pas tout à fait le cas ce soir. Mais ce le sera sûrement un autre jour. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Nous allons procéder à l'examen des crédits figurant aux états B et C et concernant l'économie, les finances et l'industrie : III. - Petites et moyennes entreprises, commerce et artisanat.
Je rappelle au Sénat que ces crédits seront mis aux voix aujourd'hui même, à la fin de l'examen des crédits affectés au commerce extérieur.
ÉTAT B
M. le président.
« Titre III : 4 806 315 457 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre III est réservé.
« Titre IV : 6 121 105 900 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre IV est réservé.
ÉTAT C
M. le président.
« Titre V. - Autorisations de programme : 1 607 450 000 francs ;
« Crédits de paiement : 1 158 870 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre V est réservé.
« Titre VI. - Autorisations de programme : 7 383 000 000 francs ;
« Crédits de paiement : 2 113 280 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre VI est réservé.
J'appelle en discussion les articles 69, 69
bis,
69
ter
et 69
quater,
qui sont rattachés pour leur examen aux crédits des petites et
moyennes entreprises, du commerce et de l'artisanat.
Article 69