Séance du 9 décembre 1999
M. le président. Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi concernant le ministère de l'agriculture et de la pêche.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Joël Bourdin, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cette année encore, le budget de l'agriculture n'est pas un budget prioritaire pour le Gouvernement. Il s'établit, pour 2000, à 29 milliards de francs, en diminution de 13,5 %.
Toutefois, cette très forte baisse apparente s'explique principalement, il faut le reconnaître, par d'importantes modifications de périmètre. La subvention budgétaire d'équilibre du BAPSA - budget annexe des prestations sociales agricoles - est désormais comptabilisée au budget des charges communes. Un compte spécial du Trésor, intitulé « Fonds forestier national », est supprimé, et les dépenses correspondantes sont intégrées dans le budget de l'agriculture. Des emplois durablement mis à disposition sont transférés au budget des services du Premier ministre. Des dépenses de rémunération des agents des directions départementales de l'agriculture et de la forêt sont réintégrées au budget de l'agriculture. Ces opérations ont l'avantage d'avoir clarifié ce projet de budget.
Hors BAPSA et à périmètre constant, on peut donc estimer que le projet de budget qui nous est proposé diminue de 0,5 % par rapport à l'année dernière.
Les dépenses ordinaires du budget augmentent très fortement : de 9,1 %. Cette augmentation est due tout d'abord à l'impact de diverses mesures de politique générale de la fonction publique, déjà commentées par notre excellent collègue Gérard Braun dans sa présentation des crédits de la fonction publique. D'autres mesures sont propres au ministère de l'agriculture : il s'agit notamment de diverses créations d'emplois et de la mise en place d'un plan de résorption de l'emploi précaire. Il faut également noter qu'au cours de l'année 1999 le ministère a connu une réforme de ses structures dont l'élément principal est la création d'un nouvel établissement public : les « Haras nationaux ».
Les dépenses d'intervention diminuent encore plus, de 25 %, mais essentiellement sous l'effet de modifications de structure ; les principales actions en ce domaine sont préservées, voire renforcées.
Les dépenses en capital augmentent très fortement en raison de la budgétisation des dépenses du Fonds forestier national, le FFN, et d'un effort accru en faveur de l'enseignement et de la recherche agricoles.
En présentant votre projet de budget, monsieur le ministre, vous avez annoncé quatre grandes priorités pour 2000.
La première de ces priorités est le financement des CTE, les fameux « contrats territoriaux d'exploitation » institués par la loi d'orientation agricole et qui sont financés par un fonds spécifique créé au sein du budget. Cette année, il sera doté de 900 millions de francs, en partie grâce à des redéploiements de crédits, notamment au détriment du Fonds d'installation en agriculture et de la dotation aux jeunes agriculteurs. Ces crédits budgétaires seront complétés à hauteur de un milliard de francs par le produit de la modulation des aides communautaires, dont les modalités d'application pratique laissent à désirer. En outre, les crédits programmés sur votre budget - 300 millions de francs en 1999 et 950 millions en 2000 - ne sont-ils pas trop abondants ?
La deuxième priorité vise les actions en faveur de la forêt, et je rejoins votre préoccupation sur ce point, monsieur le ministre. La suppression du Fonds forestier national et sa budgétisation intégrale, ainsi que la revalorisation du versement compensateur à l'Office national des forêts, permettent de redonner toute sa place à la forêt dans ce budget. Néanmoins, il me semble indispensable de demeurer vigilant sur l'exécution de ces crédits.
La troisième priorité concerne une action qui me tient également à coeur : l'amélioration de la qualité sanitaire des aliments. Elle est d'actualité ! Ce qui est prévu à cet égard me paraît à la hauteur des enjeux, à cette nuance près : les crédits de l'identification permanente généralisée des bovins sont-ils suffisants pour assurer que les surcoûts ne seront pas répercutés sur les éleveurs ?
Quatrième et dernière priorité : développer la formation et l'emploi des jeunes.
S'agissant de l'enseignement, il est indéniable qu'un effort est consenti pour faire face aux accroissements d'effectifs dans l'enseignement agricole.
Mais que dire de l'emploi des jeunes, c'est-à-dire de leur installation en agriculture, quand on voit que le Fonds d'installation en agriculture, créé en 1998, est asséché en 2000 et que les crédits de la dotation aux jeunes agriculteurs sont amputés de près d'un quart ? Or les actions menées à l'aide de ces crédits étaient utiles ; aujourd'hui, ceux-ci sont transférés au fonds de financement des CTE, à vocation « multifonctionnelle ». J'estime que le signal envoyé aux jeunes agriculteurs qui souhaitent s'installer est particulièrement mauvais. En outre, il semble que le Gouvernement ait perdu toute volonté politique en ce domaine. Quels sont les objectifs ? Quels sont les moyens ?
Je poursuivrai mon propos en formulant quelques remarques plus précises.
Tout d'abord, je souhaite attirer votre attention, monsieur le ministre, sur un article de la loi de finances pour 1997 qui faisait obligation au Gouvernement de déposer un rapport sur l'incidence budgétaire du programme de maîtrise des pollutions agricoles, le fameux PMPOA, dont le Parlement n'a jamais été destinataire. Un rapport similaire vient d'être achevé par une mission d'évaluation, mais il semblerait qu'il soit tenu secret. Pourtant, le sujet mérite que le Parlement en soit tenu informé et il aurait été utile que nous disposions de ce rapport pour alimenter nos débats ; quand ce rapport nous sera-t-il communiqué ?
Le Gouvernement promet toujours une réforme d'ensemble de la fiscalité agricole qui ne vient pas : elle est aujourd'hui renvoyée à l'étude des conclusions d'un rapport qui sera remis, en principe, à la fin du mois de mars 2000. Toutefois, je remarque que le Gouvernement n'a pas attendu les conclusions du rapport de Mme Marre pour proposer l'instauration d'un nouveau compartiment de la TGAP, la taxe générale sur les activités polluantes, portant sur la taxation des produits phytosanitaires. Il me semble, en outre, plutôt étonnant que le produit de cette taxe aille abonder un fonds de compensation des allégements de charges sociales dans le cadre des 35 heures : quel est, monsieur le ministre, votre avis à ce sujet ?
Enfin, dernière critique de ce budget : la modulation des aides communautaires prévue pour financer les CTE a souligné les tergiversations du Gouvernement en la matière. Certes, le dispositif proposé, une fois la copie corrigée, est plus équitable que le premier. Néanmoins, la méthode du Gouvernement m'inquiète qui consiste, comme pour les 35 heures, à inventer des dispositifs complexes et onéreux qui l'obligent à trouver coûte que coûte les crédits nécessaires, sans que la réflexion et la concertation aient eu la place qui leur revenaient.
C'est en fonction de ces observations que je vous proposerai, mes chers collègues, de rejeter ce projet de budget pour 2000.
Je conclurai mon propos avec les articles rattachés à ce budget.
Les articles 64 A à D sont relatifs à la revalorisation des petites retraites agricoles, et nous ne pouvons qu'y être favorables.
L'article 64 bis est relatif à l'extension de l'exonération de droits d'enregistrement pour les SAFER ; je proposerai également au Sénat, qui avait été l'an dernier à l'origine de ce dispositif, aujourd'hui étendu, de l'approuver.
L'article 64 prévoit de proroger d'un an les majorations des taux des contributions additionnelles établies au profit du Fonds national de garantie des calamités agricoles. Je défendrai un amendement visant à réduire de 50 % les majorations prévues afin de rétablir une certaine équité entre les charges pesant respectivement sur les agriculteurs et sur l'Etat. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. César, rapporteur pour avis.
M. Gérard César, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan, pour l'agriculture. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, si l'année 1999 n'est pas « celle de tous les changements », elle n'en est pas moins exceptionnelle en raison des mutiples échéances qui l'ont rythmée : mise en place de l'euro, réformes de la politique agricole commune et de la politique des fonds structurels, promulgation de la loi d'orientation agricole, ouverture à Seattle des négociations dans le cadre de l'OMC.
Mais au-delà de ces dates importantes, qui sont autant de défis pour l'agriculture du troisième millénaire, ce sont les contradictions évidentes entre les différentes politiques qui frappent l'esprit.
En effet, alors que les récents travaux de l'OCDE en matière agricole, la réforme de la PAC et de nombreux Etats membres de l'OMC vont dans le sens de l'alignement du marché agricole européen sur le marché mondial au détriment des hommes, par une restructuration excessive des exploitations et des territoires, par une concentration de la production, la nécessaire préservation d'une agriculture à la fois performante, responsable, gérant l'espace et répondant aux attentes des consommateurs exige une régulation des marchés.
Le cadre d'action pour l'agriculture française que constitue la loi d'orientation agricole pour les dix années à venir et la position commune des quinze Etats membres sur la PAC devraient permettre à la France et à l'Europe, d'une part, d'affronter leurs partenaires internationaux lors des futures négociations du cycle du Millénaire au sein de l'OMC et, d'autre part, d'intégrer les pays d'Europe centrale et orientale, les PECO.
La multiplication des conflits avec les Etats-Unis, notamment sur la banane et la viande aux hormones, présagent des difficultés que l'Europe va rencontrer en matière agricole dans ce nouveau cycle de négociations. D'ailleurs, chacun de nous s'en est aperçu la semaine dernière.
Si l'on s'en tient au chiffre présenté par le ministère, le budget pour 2000 de l'agriculture augmente de 3 %. Nénamoins, à périmètre comparable, ce même budget baisse de 0,5 % puisqu'il s'élève à un peu plus de 28 milliards de francs, comme l'a souligné M. Bourdin, dans son excellent rapport.
Selon la présentation du budget par le ministère de l'agriculture et de la pêche, ce projet de budget privilégie quatre grandes orientations : le financement des contrats territoriaux d'exploitation, la qualité et la sécurité sanitaire des aliments, la promotion des actions en faveur de la forêt, enfin, la formation, l'enseignement et l'emploi des jeunes.
Je prends acte de ces priorités. Je souhaite néanmoins, mes chers collègues, porter à votre connaissance un certain nombre d'éléments de nature à relativiser l'enthousiasme de M. le ministre de l'agriculture, qui, lors de la présentation de son budget, a considéré qu'un tel budget « permettra de satisfaire toutes les priorités de la nouvelle loi d'orientation agricole ».
Je n'invoquerai pas le manque de crédits du ministère de l'agriculture, la rigueur dans la gestion de la dépense publique étant aujourd'hui un impératif, qui, soit dit en passant, n'est guère pris en compte au niveau global des dépenses de l'Etat pour l'année 2000.
Je préciserai, tout d'abord, que l'augmentation des crédits en faveur de la qualité et de la sécurité sanitaires, ainsi que la revalorisation insuffisante des retraites, qui est bien antérieure à 1997, relèvent de la solidarité nationale et qu'il manque toujours un maillon, vous le savez bien, monsieur le ministre : la retraite complémentaire obligatoire.
Par ailleurs, j'ai cherché en vain, dans le projet de loi de finances, les dispositions fiscales promises par le Gouvernement dans le domaine agricole lors de la discussion de la loi d'orientation agricole. Je considère que, depuis juin 1997, le Gouvernement aurait eu le temps de mettre en oeuvre les dispositions fiscales nécessaires à notre agriculture. M. le ministre va certainement nous répondre qu'il faut attendre les conclusions du rapport sur la fiscalité agricole. Admettons ! Mais souhaitons que cette attente sur la fiscalité agricole n'emprunte pas le chemin sinueux tracé par le Gouvernement pour l'avenir des retraites : réflexion, rapport, études, concertation et de nouveau un rapport.
Néanmoins, dans l'attente de ces dispositions fiscales, les agriculteurs devront se contenter de l'extension de la taxe générale sur les activités polluantes aux produits phytosanitaires affectée au budget de la sécurité sociale dans le cadre de la réduction du temps de travail. Je considère que la TGAP sur les produits phytosanitaires est un impôt injuste et inefficace et je m'étonne d'un telle affectation, qui pénalise le producteur sans répercussion possible sur le prix de vente à la consommation.
De plus, je juge avec une certaine sévérité le système mis en place pour le financement des CTE, et ce pour deux raisons principales.
En premier lieu, c'est à nouveau un redéploiement des crédits qui alimentera en partie ce fonds. Ainsi, on ampute des dotations telles que le fonds pour l'installation de 145 millions de francs, alors que de nombreuses opérations avaient été engagées sur ces fondements budgétaires. Seront-elles maintenues ? L'année passée, il s'agissait des opérations groupées d'aménagement foncier. A l'heure où, malheureusement, le nombre d'installations est tombé à un seuil critique, - on constate une diminution de 15 % des installations aidées en 1999 par rapport à 1998 - un tel redéploiement n'est guère raisonnable.
En second lieu, 950 millions de francs devraient provenir de la modulation des aides issues de la PAC. Si je ne suis pas systématiquement contre ce principe de modulation, je constate qu'une fois de plus le Gouvernement de la majorité plurielle met en place - on l'a dit souvent - une usine à gaz.
D'ailleurs, à peine ce mécanisme a-t-il été annoncé que le Gouvernement faisait marche arrière en précisant, lors de la conférence agricole du 21 octobre dernier, qu'il corrigeait les effets pervers. Il est vrai qu'entre-temps plusieurs études avaient apporté la démonstration que l'application de la modulation voulue par le ministère risquait d'entraîner, à moyen terme, la disparition de plusieurs centaines d'exploitations agricoles situées en zones intermédiaires. Je regrette l'annonce hâtive de M. le ministre de l'agriculture, le 28 juillet dernier, sur la modulation des aides.
De plus, comme beaucoup de personnes, je m'interroge sur les futurs contrôles financiers exercés pour les CTE par les Français de l'Union européenne.
J'ajoute que la dotation de seulement 50 millions de francs affectée au fonds de calamités agricoles est, certes, une amélioration par rapport à 1999, puisqu'aucun crédit n'était inscrit à cet effet auparavant mais, en raison de sa modicité, cela augure mal de la volonté de mettre en place une assurance « récolte », assurance qui existe déjà aux Etats-Unis et au Canada.
Compte tenu de ces observations, la commission des affaires économiques vous propose, mes chers collègues, de donner un avis défavorable à l'adoption des crédits du ministère de l'agriculture pour 2000. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. Gérard, rapporteur pour avis.
M. Alain Gérard, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan, pour la pêche. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, modestes par leur montant, les crédits consacrés dans le projet de loi de finances pour 2000 à la pêche maritime et cultures marines n'en ont pas moins une incidence importante sur ce secteur et son environnement.
L'évolution du secteur de la pêche maritime et des cultures marines apparaît contrasté. A l'échelon national, si les premiers résultats pour 1998 sont globalement positifs, on constate de fortes disparités selon les façades maritimes ou les métiers. La production française de produits de la mer est ainsi restée stable, en volume, mais elle a augmenté d'environ 5 % en valeur.
Cette progression s'accompagne d'une lente mais constante diminution du nombre de navires et de marins et d'un accroissement du montant du déficit commercial enregistré en 1998 pour les produits de la mer : il est estimé à plus de 14 milliards de francs.
Sur le plan communautaire, les négociations entamées en 1998 ont révélé de nombreuses divergences entre la Commission européenne et les Etats membres. L'année 1999 à néanmoins permis d'éviter la remise en cause du financement des actions structurelles dans le secteur de la pêche, grâce au maintien de l'instrument financier d'orientation de la pêche.
En outre, deux négociations importantes se sont poursuivies : l'une est relative à la proposition de règlement du Conseil définissant les modalités et les conditions des actions structurelles dans le secteur de la pêche et de l'aquaculture ; l'autre concerne la proposition de règlement du Conseil sur l'organisation commune des produits de la pêche. Ces deux textes ont d'ailleurs fait l'objet d'une résolution du Sénat au printemps dernier.
Je m'interroge sur le contenu de la future réforme de la politique commune de la pêche prévue en 2002. En effet, avec la modification des volets « marché » et « structures », il ne restera plus guère que l'aspect « ressources » à réformer.
De plus, le débat sur les orientations futures de la politique commune de la pêche montre les divergences de vues entre la proposition de libéraliser totalement les eaux, l'approche « régionaliste » qui préconise la « renationalisation » des eaux et la volonté d'un relatif statu quo sur les fondements et les principes de cette politique.
Par ailleurs, les propositions de la Commission européenne sur le programme d'orientation pluriannuel 5, applicable après 2001, sont actuellement rejetées par la grande majorité des Etats membres.
Enfin, et ce malgré l'échec des négociations internationales à Seattle au sein de l'Organisation mondiale du commerce, la plus grande vigilance s'impose, les secteurs de la pêche et de l'agriculture étant souvent utilisés comme monnaie d'échange lors de ces négociations multilatérales.
C'est dans cet environnement incertain que s'inscrit l'action des pouvoirs publics français.
Outre la participation aux négociations communautaires sur la réforme des fonds structurels et des actions structurelles dans le domaine de la pêche et celle de l'organisation commune de la pêche, l'année 1999 a vu la parution d'une demi-douzaine de textes d'application de la loi d'orientation sur la pêche maritime et les cultures marines.
Précisons, enfin, que l'installation, le 20 janvier dernier, de l'Office de produits de la mer, l'OFIMER, et, le 16 février, du nouveau Conseil supérieur d'orientation des politiques halieutique, aquacole et halioalimentaire marque une étape supplémentaire dans la mise en oeuvre de la loi d'orientation adoptée en novembre 1997.
S'agissant du budget proprement dit, les dotations consacrées à la pêche maritime et aux cultures marines sont en légère augmentation puisqu'elles passent de 186,29 millions de francs à 190,58 millions de francs, soit un accroissement de 2,3 %.
Les dotations ordinaires pour 2000 s'élèvent à 150,48 millions de francs, dont 95,59 millions de francs sont affectés à l'OFIMER et 54,88 millions de francs à la restructuration des entreprises de pêche et des cultures marines, soit une augmentation de 1,60 % des dépensens ordinaires.
Les dépenses en capital s'élèvent à 84,9 millions de francs, soit un accroissement de 7,6 %.
Je ne peux que me féliciter de la poursuite de l'effort budgétaire engagé depuis plus de six ans dans le secteur de la pêche maritime et des cultures marines.
Je souhaite, en conclusion, que la commission des affaires économiques reste vigilante sur la définition des objectifs dans les contrats de plan 2000-2006 en matière de pêche maritime et de cultures marines et sur les modalités de renouvellement de notre flottille de pêche, afin que celle-ci soit à la hauteur des flottes de pêche de nos grands partenaires européens. Ceux-ci n'hésitent pas à débarquer le produit de leur pêche dans nos ports, comme l'ont fait récemment les « bolincheurs » espagnols en Bretagne, pouvant ainsi faire chuter à tout moment le prix du poisson.
Par ailleurs, je regrette le retard mis dans la publication des textes d'application à caractère social de la loi d'orientation pour la pêche maritime et m'inquiète des signes avant-coureurs d'une crise en raison de la baisse de la ressource, de la vétusté des bateaux et du coût du carburant.
Compte tenu de ces observations, la commission vous propose de s'en remettre à la sagesse du Sénat sur les crédits du ministère des finances pour 2000 consacrés à la pêche maritime et aux cultures marines. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à Mme Bardou, rapporteur pour avis. Mme Janine Bardou en remplacement de M. Henri Revol, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan, pour le développement rural. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à titre liminaire, j'indiquerai que la commission des affaires économiques, sur l'initiative de son président et de son rapporteur pour avis, a souhaité substituer aux termes « d'aménagement rural » les termes de « développement rural », non seulement au vu du caractère par trop réducteur de la notion « d'aménagement rural » mais aussi en raison de l'évolution des politiques nationale et communautaire qui ont consacré, depuis quelques années déjà, le concept de « développement rural » : celui-ci prend en compte, en effet, outre les multiples activités qui se déroulent en milieu rural, l'exploitation agricole dans ses dimensions économique, sociale, territoriale et environnementale.
L'année 1999 a d'ailleurs consacré la vigueur de la politique de développement rural au travers de l'adoption de la loi d'orientation agricole, de la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire, ainsi que des réformes de la politique agricole commune et des fonds structurels.
Sur le plan national, le vote de deux textes importants a de fortes répercussions sur la politique de développement rural.
Il s'agit, en premier lieu, de la loi d'orientation agricole. La mise en place des contrats territoriaux d'exploitation et les dispositions relatives à l'espace agricole et forestier constituent une reconnaissance de la multi-fonctionnalité de l'agriculture, secteur essentiel du développement rural.
En second lieu, la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire, au travers, notamment, des notions de pays et de schéma collectif des espaces naturels et ruraux, a trait à la politique de développement rural.
Le Sénat, sur ces deux textes, n'a pas adopté de position dogmatique en proposant un contre-projet mais il a, au contraire, favorisé l'enrichissement de ces lois. La voix de la Haute Assemblée n'a, malheureusement, pas toujours été entendue.
Dans le domaine communautaire, la réforme de la politique agricole commune et de la politique des fonds structurels constitue un moment fort pour l'avenir du développement rural en Europe.
En effet, l'adoption, aux côtés des grandes organisations communes de marché et au sein même de la PAC, d'un règlement relatif à la politique de développement rural permet la prise en compte, dans un cadre unique, de la dimension environnementale et de l'élargissement du concept de « zones défavorisées » à des zones soumises à des contraintes environnementales.
Enfin, la modification du dispositif relatif aux fonds structurels européens et ses conséquences sur le plan national, en matière de zonage notamment, ont des effets évidents sur le développement rural.
L'avis que consacre la commission des affaires économiques aux crédits de développement rural est l'occasion, non seulement de rappeler la politique menée au cours de l'année écoulée, mais aussi et surtout, d'examiner l'évolution des crédits qui y sont consacrés, soit au sein du « bleu » budgétaire, soit en prenant en compte l'ensemble des concours publics consacrés au développement rural.
Les crédits de développement rural stricto sensu stagnent, avec un peu plus de 82,74 millions de francs.
En y ajoutant les opérations d'aménagement rural - opérations foncières et hydrauliques, grands aménagement, notamment -, on constate une forte diminution des crédits. En effet, l'ensemble de ces postes budgétaires diminue de 15 % en autorisations de programme et de 26 % en crédits de paiement.
La plupart des crédits consacrés à la forêt peuvent être aussi considérés comme profitant au développement rural : ils sont en forte augmentation pour l'année 2000.
Votre rapporteur pour avis constate que, pour la première fois, le fonds forestier national est intégré au budget de l'Etat.
La commission des affaires économiques inclut aussi, au titre du développement rural, les crédits de compensation de handicaps ou de contraintes spécifiques, dont le montant se chiffre à plus de 1,5 milliard de francs.
Les dotations budgétaires affectées aux CTE, d'un montant de 950 millions de francs, qui seront doublées grâce à la modulation des aides communautaires, viennent compléter les 4,2 milliards de francs consacrés au développement rural pris au sens large.
Les crédits consacrés au développement rural peuvent être examinés à travers la notion de « concours publics à l'agriculture ».
Deux ensembles traitent du développement rural. Il s'agit, en premier lieu, du sous-ensemble 1-4, destiné à la compensation de handicaps ou de contraintes spécifiques, qui s'élève à 4 581 millions de francs, et, en second lieu, du sous-ensemble 5-1, rassemblant les crédits d'aménagement et de protection de l'espace rural, dont les dotations se montent, pour 1998, à 2 108 millions de francs.
Ce sont donc, au total, près de 10 milliards de francs qui sont mobilisés pour le développement rural.
Cependant, compte tenu de la forte baisse des crédits sur les grandes opérations d'aménagement rural - surtout pour l'hydraulique - et des problèmes de mise en oeuvre des CTE, qui se concilient difficilement avec le dispositif communautaire relatif au développement rural, la commission des affaires économiques, mes chers collègues, a donné un avis défavorable à l'adoption des crédits de développement rural inscrits au projet de budget du ministère de l'agriculture et de la pêche. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. Dussaut, rapporteur pour avis.
M. Bernard Dussaut, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan, pour les industries agricoles et alimentaires. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le rapport pour avis consacré par la commission des affaires économiques aux industries agroalimentaires revêt cette année une importance toute particulière. En effet, le groupe de travail consacré à ce secteur, créé au sein de la commission le 5 mai dernier, a remis il y a quelques jours ses conclusions. Certaines d'entre elles, d'ordre budgétaire, trouvent leur traduction concrète dans les propositions que je formule dans mon rapport.
Mais, avant tout, dressons un bilan de l'année écoulée, notamment des derniers mois, pour le premier secteur industriel français.
S'agissant des industries agroalimentaires, leur chiffre d'affaires s'est élevé, en 1998, à 803 milliards de francs, soit une augmentation de 1,3 % par rapport à 1997.
C'est, en fait, la forte réduction des débouchés extérieurs qui caractérise l'année 1998. L'environnement international est à l'origine d'un recul de 11,6 % de l'excédent du commerce extérieur agroalimentaire de la France, qui s'est élevé à un peu moins de 60 milliards de francs.
Par ailleurs, ce secteur a créé 1,4 % d'emplois salariés en 1998, ce redressement étant sensible dans les industries des viandes et dans le travail du grain.
Soulignons que ces industries sont confrontées à des enjeux essentiels.
Sur le plan international, tout d'abord, l'échec des négociations du cycle du Millénaire, à Seattle, a montré que les Européens étaient résolus à défendre leurs positions et que le modèle européen, dans les domaines agricole et alimentaire, devait être sauvegardé. Il est nécessaire que les négociations reprennent sur des bases plus équilibrées. La libéralisation des échanges ne doit pas conduire à s'affranchir des considérations d'ordre environnemental, social et sanitaire qui perturbent fortement le commerce international.
Sur le plan communautaire, la mise en place de la réforme de la PAC, notamment la baisse des prix des céréales, a reçu un accueil favorable. Néanmoins, l'évolution des projets communautaires, par exemple en matière de restitutions à l'exportation, démontre, s'il en était besoin, la vigilance dont doit faire preuve le secteur de l'industrie agroalimentaire.
Enfin, en France, le défi auquel doivent faire face ces industries réside dans la qualité et la sécurité alimentaire.
Le deuxième trimestre de 1999 a été marqué, à cet égard, par plusieurs crises dont celle du poulet dit « à la dioxine ». Votre rapporteur pour avis insiste sur le fait que, en l'espèce, l'origine du problème ne s'est jamais située dans le secteur agroalimentaire. Malgré cela, cette crise a provoqué de nombreuses fermetures d'entreprises alimentaires qui ne sont pas parvenues à faire face à la chute d'activité.
Les leçons de cette crise doivent être tirées au plus vite, non seulement par les professionnels de la filière, mais aussi par les pouvoirs publics, en ce qui concerne tant la traçabilité que la mise en oeuvre du principe de précaution. Mais tel est bien le sens de votre action, monsieur le ministre.
Signalons, sur le plan budgétaire, que les concours publics en faveur de ce secteur représente 0,5 % du total des dépenses profitant à l'agriculture et à la forêt, et qu'ils proviennent pour moitié de l'Union européenne.
Les crédits d'investissement, c'est-à-dire les crédits de politique industrielle, sont stables. Les crédits de paiement s'élèvent à 154,80 millions de francs. Les autorisations de programme de l'article 10 du chapitre 61-61 et de l'article 20 du même chapitre sont reconduites, à l'instar des crédits de paiement, qui s'élèvent à 44,4 millions de francs, à l'article 10, et à 61,3 millions de francs, à l'article 20.
En revanche, les crédits affectés aux actions de promotion baissent de 5 millions de francs. Votre rapporteur pour avis ne peut que regretter cette diminution des crédits consacrés à la société pour l'expansion des ventes des produits agricoles et alimentaires, la SOPEXA.
Il convient d'ajouter aux crédits de politique industrielle d'autres dotations du ministère, qui concernent également le secteur agroalimentaire. Certaines de ces dotations sont en hausse, notamment celles qui financent les actions de développement de la qualité et de la sécurité des produits et les actions de promotion.
La commission des affaires économiques s'inquiète de la baisse de 9 % des crédits de recherche appliquée dans ce domaine, alors que la recherche y reste très inférieure à celle des autres branches industrielles.
Des crédits d'autres ministères vont également au secteur agroalimentaire, comme ceux du ministère de la recherche et, pour partie, ceux du ministère de l'aménagement du territoire.
Contrairement aux conclusions de son rapporteur pour avis, la commission des affaires économiques et du Plan, en raison des baisses des crédits de la SOPEXA et de la recherche, a donné un avis défavorable à l'adoption des crédits du ministère de l'agriculture et de la pêche pour 2000 consacrés aux industries agroalimentaires. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. Vecten, rapporteur pour avis.
M. Albert Vecten, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, pour l'enseignement agricole. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en 2000, les crédits de l'enseignement agricole progresseront de 3,58 % pour s'établir à 7 139,58 millions de francs.
Cette évolution tranche avec celle de l'ensemble du budget du ministère de l'agriculture, qui diminue, lui, de 0,5 %, et avec celle des dépenses de l'Etat, qui progressent de 0,9 %.
Pour autant, faut-il considérer que le projet de budget est à la hauteur des besoins de l'enseignement agricole ? C'est une autre question !
Les mesures prévues pour 2000 doivent être appréciées non pas par rapport aux exercices budgétaires précédents mais par rapport aux difficultés auxquelles cet enseignement, traditionnellement réduit à la portion congrue, doit faire face depuis de trop nombreuses années.
A cet égard, le projet de budget comporte quelques mesures très positives.
Je me félicite de la progression des dépenses pédagogiques de l'enseignement public qui, cette année - c'est assez exceptionnel pour que je le souligne - profite également à l'enseignement technique et à l'enseignement supérieur.
Les mesures destinées à renforcer les moyens en personnel marquent une prise de conscience salutaire, même un peu tardive, des difficultés engendrées par l'insuffisance des créations d'emplois dans un contexte de forte croissance des effectifs.
Les soixante emplois d'ATOSS créés en 2000 sont bienvenus. J'avais souligné l'an dernier la nécessité de poursuivre à un rythme plus soutenu l'effort destiné à remédier à l'insuffisance du nombre de ces personnels administratifs, techniques, ouvriers, sociaux, de santé et de service qui conduit nombre d'établissements à fonctionner dans des conditions à la limite des normes de sécurité. Les créations d'emplois destinées à la « déprécarisation » doivent également être saluées.
En ce qui concerne l'enseignement privé, la mise à niveau de la subvention de fonctionnement des établissements à temps plein sera enfin achevée. Par ailleurs, les subventions versées aux écoles privées d'ingénieurs seront réévaluées.
Cependant, on constate encore des insuffisances. Ainsi, les dotations d'investissement destinées à l'enseignement supérieur sont reconduites en francs courants pour 2000, ce qui ne permettra guère d'accompagner la rénovation que, monsieur le ministre, vous appeliez à juste titre de vos voeux lors des débats sur la loi d'orientation agricole. De même, les mesures de « déprécarisation » sont encore loin de correspondre à l'ampleur du phénomène de précarité. Quant aux créations d'emplois de personnels non enseignants, elles ne sont pas de nature à remédier définitivement aux déficits constatés.
L'effort de rattrapage devra donc, pour porter ses fruits, être poursuivi dans les années à venir. A cet égard, il ne serait pas inutile de prendre la mesure exacte des besoins des établissements, notamment en ce qui concerne les personnels ATOSS. Je n'ignore pas les difficultés de l'exercice, mais je crois que cela pourrait éviter certains malentendus.
Vous avez manifesté, monsieur le ministre, la volonté d'élaborer un nouveau « projet pour l'enseignement agricole ». Il est effectivement temps de remédier à l'absence de prospective.
La politique de maîtrise des effectifs, à laquelle nous nous étions vigoureusement opposés, a montré ses limites. Le ralentissement de la progression des effectifs qui, parfaitement prévisible, avait déjà été observé l'an dernier, a été confirmé cette année, traduisant l'incapacité d'anticiper correctement l'évolution effective de la demande de formation.
Je me permettrai de contribuer à la réflexion qui s'engage en formulant une mise en garde contre une conception trop étroite de l'enseignement agricole.
L'agriculture de demain devra, certes, répondre à une exigence de qualité mais également être compétitive. Ce constat impose que soient formés des diplômés en aval, dans les secteurs de la recherche et de la sécurité sanitaire, mais également en amont, dans les secteurs de la transformation et de la commercialisation, encore insuffisamment pris en compte, notamment par l'enseignement supérieur.
En outre, le dynamisme de l'économie rurale dépend étroitement d'une diversification des formations agricoles qu'impose, par ailleurs, la multifonctionnalité de l'agriculture.
Monsieur le ministre, je forme le voeu que le projet que vous élaborerez tienne compte de ces constats. La pérennité du succès de l'enseignement agricole en dépend.
S'il ne constitue pas une réponse définitive aux difficultés chroniques de l'enseignement agricole et comporte des lacunes, ce projet de budget va incontestablement dans le bon sens. C'est pourquoi, mes chers collègues, la commission des affaires culturelles a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de l'enseignement agricole. (Applaudissements.)
M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République, 63 minutes ;
Groupe socialiste, 42 minutes ;
Groupe de l'Union centriste, 30 minutes ;
Groupe des Républicains et Indépendants, 29 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 19 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 16 minutes ;
Réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe, 2 minutes.
La parole est à M. Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'examen de ce projet de budget intervient au terme d'une année déterminante pour l'avenir du monde agricole : il y a tout d'abord eu l'adoption, par le Parlement, de la loi d'orientation agricole qui consacre, pour la première fois, la notion de multifonctionnalité de l'agriculture ; la réforme de la politique agricole commune, intervenue à Berlin ; la succession de révélations inquiétantes sur les modes alimentaires des animaux d'élevage, ainsi que sur la toxicité des produits de consommation ; la crise des fruits et légumes ; l'ampleur et la durée des crises porcine et avicole, ces derniers jours, qui, loin de s'estomper, ont jeté les producteurs dans le plus grand désarroi ; enfin, cette année 1999 aura vu l'émergence d'un mouvement paysan contestataire qui aura fortement contribué, après la forte dénonciation des règles imposées par l'OMC, à faire capoter, à Seattle, les projets de libéralisation des échanges mondiaux.
M. Joël Bourdin, rapporteur spécial. N'exagérons rien !
M. Gérard Le Cam. D'emblée, je tiens à me réjouir de la position de fermeté prise par le Gouvernement français face aux concessions inacceptables sur lequelles était prêt à céder le négociateur européen, M. Pascal Lamy. Je m'interroge toutefois sur les propos tenus par celui-ci et selon lesquels le mandat qui lui a été confié par l'Union européenne ne pourrait être respecté à 100 %. Faut-il croire que M. Lamy pensait trouver, le moment venu, l'appui de certains Etats membres de l'Union pour remettre en cause ce qui a été signé à Berlin, et aller ainsi contre l'avis de la France ?
Je pense plutôt que le représentant de l'Europe a plié sous la pression américaine, qui s'est faite d'autant plus forte que les Européens avaient eux-mêmes accepté des concessions importantes, en rapprochant toujours plus la PAC des conditions du marché mondial. Ainsi Berlin, loin de constituer un bouclier derrière lequel les Quinze faisaient montre d'être solidaires, a-t-il contribué, à l'inverse, à attiser les velléités des Etats-Unis contre le modèle agricole européen.
Mais je pense, monsieur le ministre, que vous aurez à coeur d'exprimer, devant le Sénat, votre interprétation de l'échec de Seattle.
J'en viens au projet de budget proprement dit, qui progresse, à périmètre constant, d'environ 3 %.
Le financement du contrat territorial d'exploitation, dispositif phare de la loi du 9 juillet 1999, sera doté de 950 millions de francs, programmés dans le présent projet de loi de finances, ainsi que de 750 millions de francs, issus des crédits européens.
L'enveloppe budgétaire sera, pour partie, alimentée par des crédits supplémentaires à hauteur de 650 millions de francs et, pour une autre partie, donnera lieu à un redéploiement aux dépens de la dotation aux jeunes agriculteurs, la DJA, dont les crédits seront réduits de 155 millions de francs, et du fonds pour l'installation en agriculture, le FIA, dont la ligne budgétaire disparaît et qui représentait 145 millions de francs en 1999.
Toute forme de redéploiement suscite de ma part une certaine réserve. En l'occurrence, s'il est concevable que le CTE puisse séduire certains jeunes qui désirent s'installer, pour autant il faut prendre garde à ne pas pénaliser ceux qui bénéficient, aujourd'hui, d'une aide à l'installation mais ne souhaitent pas signer un CTE ou préfèrent vérifier que le CTE sera à même de leur assurer un complément de revenu suffisant. Ainsi, monsieur le ministre, pouvez-vous nous rassurer sur la pérennité des dispositifs existants en faveur de l'installation et préciser quels seront leurs modes de financement ? A ce propos, j'ai lu avec attention le courrier que vous avez adressé à M. Coste, président du Centre national des jeunes agriculteurs, et dans lequel vous apportez un certain nombre d'éléments rassurants.
Certains ne manquent pas, à cette tribune, de prétendre que l'on sacrifie l'installation des jeunes agriculteurs pour le financement du CTE, qu'ils combattent depuis le début. C'est oublier un peu vite que bon nombre de jeunes qui s'installent échappent d'ores et déjà à toute forme de soutien public. Précisément, pour cette catégorie de population, le CTE peut représenter le moyen de s'engager pour une durée de cinq ans, sur une exploitation, sans être soumis à la contrainte de la rentabilité maximale et immédiate. Encore faut-il - je ne cesserai de le répéter - que les aides versées, par la voie du CTE, soient à la mesure des engagements pris par l'agriculteur, faute de quoi elles seraient très rapidement réservées à une certaine forme d'agriculture, traditionnellement moins productive. Selon nous, le CTE doit couvrir l'ensemble de la profession pour adapter nos techniques de production, et non s'adresser à une catégorie d'agriculteurs donnée.
On escompte la signature de 50 000 CTE d'ici à un an. Près de deux milliards de francs seront débloqués, dont la moitié sera le produit de la modulation des aides directes européennes à l'agriculture. Toutefois, cette modulation paraît bien insuffisante pour faire face à la montée en puissance du CTE et, dans le même temps, rééquilibrer plus équitablement les subventions communautaires.
Seuls 2 % du montant des aides seraient en effet réorientés vers les plus petites exploitations et ne concerneraient que 5 % des exploitations. Peut-on envisager, monsieur le ministre, pour les prochaines années, un renforcement de la modulation ? Disposez-vous, à cet effet, de l'aval de la Commission de Bruxelles ?
Pour en revenir ponctuellement aux efforts consentis en faveur de l'installation des jeunes, je regrette que le Gouvernement n'ait pas profité de la réduction de 900 millions de francs des dépenses de bonification de prêts consécutive à la baisse des taux d'intérêt pour mettre en place des prêts à 0 %.
Le chiffre, trop faible, de 8 000 installations par an ne pourra pas permettre, chacun en a conscience, le renouvellement des générations et ne peut que favoriser l'extension des grandes exploitations qui phagocytent les surfaces vendues, à la suite des départs en retraite.
Une proposition me semble souhaitable et réalisable, dès la prochaine loi de finances : il s'agit du relèvement de la rémunération du stage de six mois, auquel est soumis tout jeune bénéficiant de la DJA. L'Etat pourrait prendre en charge une partie de cette indemnité, qui devrait être revalorisée à hauteur du SMIC net.
Le rôle des SAFER, en faveur du développement de l'emploi agricole, est également prépondérant. Deux dispositions fiscales concernant les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural ont été adoptées par l'Assemblée nationale. La première tend à exonérer de TVA les opérations réalisées par les SAFER ; la seconde exonère de droits d'enregistrement les cessions de terrains à destination agricole.
Bien évidemment, ces mesures vont dans le bon sens, dès lors qu'elles contribuent à renforcer les missions des SAFER en faveur de la transmission des domaines fonciers, de la viabilité des exploitations les plus petites et de la préservation de l'emploi.
Je pense, toutefois, que cette marge de manoeuvre supplémentaire octroyée aux SAFER doit avoir pour contrepartie un contrôle plus strict de leurs opérations de transmissions.
A l'occasion de l'examen du projet de loi d'orientation agricole, je vous avais fait observer, monsieur le ministre, une certaine contradiction entre la volonté affichée par le texte de renforcer le contrôle des structures, d'une part, et le régime d'exception réservé aux SAFER, d'autre part, qui bénéficient, depuis la nouvelle loi, d'une absence de contraintes administratives.
Or, à ce jour, nombreux sont les contentieux qui mettent en cause certaines SAFER qui abusent de leur droit de préemption et vont à l'encontre de leurs missions de service public.
Aussi, monsieur le ministre, je souhaite que vous apportiez les modifications nécessaires, par la voie législative ou réglementaire, pour soumettre les SAFER aux mêmes obligations dans leurs opérations d'acquisitions et de cessions de parcelles agricoles.
Après l'emploi agricole, une autre priorité qu'affiche ce projet de budget est la sécurité sanitaire et alimentaire. Il s'agit là d'une préoccupation majeure, exprimée par nos concitoyens à l'aube du XXIe siècle.
Notre groupe avait proposé, voilà quelques mois, la création d'une commission d'enquête sénatoriale sur cette question, à l'instar de celle que préside mon ami M. Félix Leyzour, à l'Assemblée nationale. La commission des affaires sociales n'a, hélas ! pas jugé bon de nous suivre. Je le regrette.
Dans les travaux de la récente mission d'information sur les industries de l'agroalimentaire, menée par nos collègues Dussault, Deneux et Bizet, ce problème apparaît en effet en filigrane, alors qu'est privilégiée l'intégration dans l'économie mondiale des industries agroalimentaires.
Le principe de précaution, auquel chacun d'entre nous se montre attaché, fait l'objet d'interprétations différentes, selon les pays concernés. La conception française doit faire école, tant au sein de l'Union européenne qu'à l'OMC, si nous souhaitons offrir toutes les garanties aux consommateurs.
Ce principe de précaution, pour être respecté et crédible, nécessite des moyens humains et financiers importants. J'approuve le fait que ce budget prenne la mesure de l'enjeu avec 921 millions de francs de crédits inscrits, soit une augmentation de 6 %. De même, il faut saluer les moyens nouveaux de l'AFSSA, l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments, dont le rôle s'est révélé déterminant pour conforter la position de refus de la France de lever l'embargo sur la viande bovine d'origine britannique.
A la suite des dernières observations de l'AFSSA, je me rejouis que le Gouvernement ait maintenu une position de clarté et de fermeté en faisant prévaloir le principe de précaution, quitte à provoquer des tensions avec nos partenaires britanniques et la Commission européenne.
Il est à souhaiter que cette crise débouche sur une meilleure prise en compte à l'échelon des instances européennes de la sécurité des consommateurs, qui ne saurait être sacrifiée sur l'autel du libre commerce.
Peut-on imaginer qu'un produit qui comporte un risque pour la santé soit librement mis en vente, même si, par ailleurs, le consommateur est informé de sa provenance ? En cas d'accident, la culpabilité ne serait-elle pas, dès lors, transférée sur le consommateur qui est censé connaître le danger encouru, et non sur le producteur et le distributeur ?
A cet égard, nous ne sommes pas hostiles - bien au contraire - à la mise en place d'une agence sanitaire européenne, dès lors qu'elle s'inspire du modèle français, qu'elle ne se limite pas à une simple évaluation des risques, mais qu'elle puisse procéder également à des contrôles rigoureux sur la qualité des produits échangés.
J'observe, enfin, une augmentation des crédits destinés à financer Génoplante, dont la création a provoqué, au sein même de la communauté scientifique, une certaine méfiance. D'aucuns y perçoivent le risque de placer la recherche publique sous la coupe d'intérêts mercantiles et industriels, avec la perspective d'un brevetage du vivant. Aussi souhaiterais-je vous entendre, monsieur le ministre, sur les finalités de cette structure et sur l'opportunité d'y associer des industriels de l'agrochimie.
A présent, je souhaiterais aborder, brièvement, l'évolution du budget de l'enseignement agricole public.
Dans un contexte marqué par une spectaculaire progression du nombre des élèves de l'enseignement agricole public, les crédits de l'enseignement agricole progressent, dans le projet de budget pour 2000, de 3,77 %.
Cette augmentation est certes supérieure à celles de 1997 et de 1998, mais elle reste très inférieure aux besoins des établissements.
Le 17 novembre dernier, l'ensemble des personnels se mobilisait pour demander un plan pluriannuel de rattrapage.
Aujourd'hui, l'écart est manifeste entre le nombre d'élèves accueillis et les moyens dont disposent les personnels. La précarité s'instaure en mode de gestion.
Cette précarité accentue l'instabilité de la communauté éducative au sein des établissements. D'ailleurs, les chiffres parlent d'eux-mêmes.
Selon le rapport Moulias, 25 % des personnels enseignants sont en situation précaire dans l'enseignement agricole.
Du côté des personnels administratifs, techniques, ouvriers, sociaux, de santé et de service, les ATOSS, l'ampleur de la précarité est encore plus grande et les contrats emplois consolidés viennent en renfort des contrats emploi-solidarité.
La création de quelque 158 emplois d'enseignant, 60 pour les personnels ATOSS, ne sera pas de nature à résorber au plus tôt la précarité dénoncée à l'instant.
L'intérêt de nos jeunes pour l'enseignement agricole devrait, selon nous, faire l'objet d'une attention toute particulière.
Le renouveau de l'agriculture, les engagements de notre pays en matière de sécurité alimentaire exigent et exigeront une formation de plus en plus grande des générations d'agriculteurs à venir.
En outre, l'enseignement agricole peut se prévaloir de méthodes modernes, d'une pédagogie active, particulièrement adaptée, mais exigeante en moyens humains. Les établissements comptent en effet un grand nombre d'internats, et des installations importantes qui réclament un entretien particulier.
Dès lors, nous souhaiterions que la politique conduite en matière d'enseignement agricole s'attache à répondre aux aspirations des jeunes et de la communauté éducative, engagés dans cet enseignement.
A ce titre, une programmation pluriannuelle nous paraît être l'instrument adapté à l'amélioration du système éducatif agricole.
Enfin, pour clore le volet agricole, il m'est difficile de ne pas évoquer ici la situation dramatique vécue par les producteurs bretons. La tension ne cesse de grandir de jour en jour et donne lieu, parfois, à certains débordements qui, sans vouloir les excuser, doivent être compris tant la colère contenue depuis plusieurs mois, voire plusieurs années, est insoutenable.
Je prends acte de votre décision de nommer un chargé de mission dont la tâche sera d'apprécier l'ampleur de la crise et, ainsi, d'apporter les solutions adéquates.
Cependant, si des mesures de nature structurelle sont indispensables, notamment celles qui favorisent un meilleur contrôle de la production et du renforcement de l'organisation des filières porcine et avicole, d'autres mesures d'urgence s'imposent pour éviter la faillite de milliers d'exploitations et la mort d'une profession qui contribue au développement de l'agriculture bretonne.
Dans un récent courrier, je vous ai fait part, monsieur le ministre, d'un certain nombre de suggestion qui, sans être exhaustives, auraient pour mérite d'amortir les effets de ce genre de crise et de prévoir un dispositif de soutien aux exploitants les plus en difficulté, notamment par le biais d'une caisse de solidarité approvisionnée par l'ensemble des acteurs de la filière, y compris le système bancaire.
Je vous renouvelle également notre proposition en faveur de la mise en place d'un coefficient multiplicateur qui serait applicable en cas de crise extrême et garantirait un revenu suffisant aux producteurs.
Il convient également de prévoir un rééchelonnement, voire une annulation, de l'endettement des exploitants qui sont dans une situation particulièrement critique.
Sans ces mesures d'urgence, à la fois justes et efficaces, il est à craindre la disparition des exploitations à dimension humaine et l'extension d'un modèle d'agriculture productiviste et industriel dont on connaît les dangers en termes d'emploi, de santé publique, d'environnement et d'aménagement du territoire.
Pour terminer mon propos, j'évoquerai un autre secteur auquel je suis très attaché, celui de la pêche maritime, auquel votre budget consacre près de 194 millions de francs, soit une progression de 2,3 % des crédits.
Le 22 novembre dernier, s'est tenu un Conseil européen sur la pêche chargé d'entériner la réforme de l'OMC-pêche.
A l'occasion de l'examen de la résolution adoptée par le Sénat le 27 mai dernier, j'ai, au nom du groupe communiste républicain et citoyen, insisté, en particulier, sur la nécessaire limitation de la pêche minotière, sur un meilleur contrôle des produits de la mer importés à des prix abusivement bas et, enfin, sur l'objectif d'harmonisation des conditions de travail des marins-pêcheurs européens, autant de points sur lesquels, monsieur le ministre, je souhaite obtenir des éclaircissements.
S'agissant de l'application des 35 heures dans la profession de la pêche, je crois savoir qu'il existe certaines difficultés, alors que la volonté d'aboutir des pêcheurs est très forte. Qu'en est-il, monsieur le ministre ?
En conclusion, ce budget marque des évolutions intéressantes justifiant l'approbation du groupe communiste républicain et citoyen, qui souhaite encourager cette révolution « agriculturelle » dont la France a besoin pour affronter les enjeux du siècle à venir. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen et sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Pelletier.
M. Jacques Pelletier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je veux insister sur le malaise, sur une certaine désespérance, qui touche les agriculteurs, spécialement les jeunes, même dans une région comme la mienne.
Depuis trente ans, les prix de tous les produits agricoles n'ont cessé de baisser et les charges, notamment les charges sociales, n'ont cessé d'augmenter.
Certes - et heureusement ! - la productivité à permis de rétablir un certain équilibre. Mais la productivité connaît des limites, surtout à une époque où l'on jette, à juste titre, l'anathème sur les pollueurs et où les produits bio ont le vent en poupe.
La taxe sur les activités polluantes va servir, tout au moins en partie, à financer les 35 heures. Passe encore si cette taxe alimentait un fonds destiné à réduire les pollutions ! Dans le fond, on nous refait en quelque sorte le coup de la vignette Ramadier, qui, c'est le moins que l'on puisse dire, n'a pas eu sa destination originelle !
Je souhaite vous interroger, monsieur le ministre, sur le financement de la mise aux normes des bâtiments d'élévage. Le programme a débuté en 1994, avec un moratoire de cinq ans ; nous arrivons à la fin du moratoire.
Dans l'Aisne, le total théorique des dossiers est de 715 : 85 sont financés, 130 sont encore en attente de financement, 500 sont à mettre en route. Le financement va-t-il suivre ? Les agriculteurs dont les dossiers sont en attente vont-ils devoir payer une taxe pour pollution ?
Je tiens également à vous dire, monsieur le ministre, que les problèmes administratifs liés aux mises aux normes sont d'une grande complexité. Remplir les documents considérés est impossible pour un agriculteur « normal », qui n'a pas fait l'ENA. (Sourires.) L'agriculteur, en période de grosse activité, travaille douze, treize, voire quatorze heures par jour ; il ne dispose pas de plusieurs jours pour remplir un questionnaire de dix-huit pages avec une notice explicative de douze pages !
Simplifions, monsieur le ministre, simplifions !
Il en va de même pour la mise en oeuvre des contrats territoriaux d'exploitation : la circulaire du 17 novembre dernier, adressée aux préfets, contient... 157 pages ! Cela n'est pas raisonnable.
M. Gérard César, raporteur pour avis. Il faut décrypter !
M. Jacques Pelletier. Je ne peux m'empêcher de lire une toute petite partie de l'arrêté du 8 novembre 1999 sur le contrat territorial d'exploitation : « Le montant théorique total de l'aide annuelle est calculé en multipliant la totalité des superficies faisant l'objet d'un engagement par la rémunération correspondante, dans le respect des plafonds par hectare susvisés. Le montant moyen par hectare - MM - est calculé en divisant le montant théorique total par le nombre d'hectares réels - HAR - faisant l'objet d'un ou plusieurs engagements combinés. Le montant de l'aide est calculé par tranche, en multipliant pour chaque tranche MM par les coefficients suivants, calculés en fonction de la surface minimale d'installation prévue à l'article L. 312-5 du code rural. Chaque produit ainsi calculé est multiplié par les fractions d'hectares de la superficie sous engagements, comprises dans les limites précisées dans le tableau ci-dessous ». Et ainsi de suite !
Personnellement, je ne suis pas sûr d'avoir bien compris ce texte.
Recevant, il y a quelques jours, un ami polytechnicien, je lui ai mis ce texte sous les yeux, je ne suis pas sûr que, lui non plus, ait bien compris !
M. Bernard Piras. C'est normal, pour un poly-technicien ! (Rires.)
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Pour un paysan, c'est clair ! (Nouveaux rires.)
M. Hilaire Flandre. Il faut être socialiste pour comprendre !
M. Jacques Pelletier. Monsieur le ministre, clarifions, simplifions ! L'une des raisons du malaise paysan actuel réside dans cet environnement paperassier,...
M. Hilaire Flandre. C'est vrai !
M. Jacques Pelletier ... dans cet encadrement si préjudiciable à cette liberté si chère au monde agricole. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Pastor.
M. Jean-Marc Pastor. Monsieur le ministre, le budget de l'agriculture pour 2000 est le premier budget qui suit la réforme de la PAC issue des accords de Berlin, lesquels ont montré votre opiniâtreté à défendre les intérêts de la France.
Ces accords, ni bons ni mauvais, chacun s'accorde à dire qu'ils constituent un bon compromis. En effet, si, au départ - chacun ici s'en souvient - les positions françaises étaient pour le moins éloignées de celles de l'ensemble des Etats membres, tel n'est plus le cas aujourd'hui : l'Europe fait front uni. Je n'en veux pour preuve que le dernier débat sur l'OMC.
Contrairement à ce que j'ai pu entendre à cette tribune, je ne considère pas que Seattle ait été un échec. J'ai même tendance à dire que c'est une réussite dans la mesure où vous avons pu y montrer la détermination de la France et de l'Europe à défendre une certaine éthique du monde agricole.
Les accords de Berlin constituent dorénavant un modèle à défendre, celui d'une politique agricole européenne. Ils constitueront, bien entendu, notre force et ils joueront, à n'en pas douter, un rôle majeur dans les prochaines négociations commerciales internationales qui se dérouleront dans le cadre de l'OMC.
Qu'allons-nous défendre dans ce cycle de négociations ouvert à Seattle depuis le début du mois ?
Voilà quelques semaines, nous étions ensemble aux Etats-Unis, monsieur le ministre, où j'ai pu me rendre compte de l'échec cuisant de la politique libérale agricole, qui a conduit à la faillite près de 25 % des exploitations et qui a fait qu'aujourd'hui, par des moyens détournés, l'agriculteur américain est le plus subventionné au monde.
Heureusement, les accords de Berlin étaient signés ! L'Europe a ainsi pu se présenter unie et défendre les thèses françaises sur le maintien d'une agriculture subventionnée nécessaire à notre équilibre, en intégrant dans le débat tous les actes non marchands que nous jugeons indispensables : protection sanitaire, protection alimentaire, protection sociale, etc.
Par ailleurs, le budget pour 2000 est le premier budget d'application de la loi d'orientation agricole, texte d'importance qui nous a permis de reconnaître et d'affirmer la multifonctionnalité de l'agriculture et de réorienter nos concours publics en vue de parvenir à une agriculture productive, certes, mais centrée aussi sur la qualité des produits, les modes de production et participant pleinement au développement durable.
Fort de tous ces éléments et riche d'un tel contexte, vous avez donc élaboré, monsieur le ministre, votre budget pour 2000.
Je le dis d'entrée, c'est un bon budget. Il est cohérent, fidèle à vos engagements et tourné vers l'avenir. Nous l'avons étudié attentivement, avec beaucoup de rigueur. Il s'articule autour de quatre grandes priorités que nous approuvons et que nous voulons voir menées à bien.
Il s'agit, tout d'abord, de mettre en place la mesure phare de la loi d'orientation agricole, à savoir les CTE, nouvel instrument de soutien public.
Je n'ai pas oublié les propos pessimistes que tenaient, voilà un an, à cette même tribune, certains de nos collègues sur les cofinancements. Je n'ai pas oublié non plus votre réponse, monsieur le ministre. Vous avez tenu parole et dans la négociation de Berlin, et dans le principe de l'application d'un choix politique, social, équitable, en prélevant une petite partie de l'aide publique accordée à près de 60 000 exploitants, soit environ 5 % de leur dotation, dans une fourchette allant de 3 % à 15 % des 700 000 exploitations, pour la reventiler aux autres par le biais des CTE.
Cette modulation protège l'emploi puisque vous retirez toutes les charges salariales avant modulation. C'est une très bonne chose qui mérite d'être rappelée aujourd'hui.
Globalement, les CTE se verront doter, pour l'an 2000, d'une dotation, d'environ 2 milliards de francs. Aujourd'hui, on peut donc rassurer tout le monde sur la poursuite de cette orientation.
A côté des CTE, dont reparlera mon collègue André Lejeune tout à l'heure, les moyens traditionnels en faveur de l'installation en agriculture sont préservés.
Priorité des priorités, bien sûr, vous vous donnez les moyens, cette année, dans ce budget, de faciliter l'installation de candidats nouveaux, hors cadre familial. Avec près de 490 millions de francs, la dotation aux jeunes agriculteurs devrait permettre l'installation de près de 8 000 jeunes, ce qui marque votre ambition pour le monde agricole, monsieur le ministre.
Le fonds pour l'installation en agriculture a beaucoup fait parler de lui. Je n'y reviens pas, puisque vous avez apporté une réponse personnelle à chacun des agriculteurs dans votre courrier, en précisant, bien évidemment, que cette dotation était rattachée au fonds de financement des CTE et que, si quelque part, une partie de cette enveloppe permettait de financer des organismes oeuvrant dans le domaine de l'animation, vous étiez prêt à contribuer à ce financement, ce qui est de nature à rassurer tout le monde.
Le deuxième enjeu de ce budget, c'est de répondre aux attentes en matière de qualité des produits et de sécurité sanitaire des aliments.
La réorientation de notre agriculture passe par le renforcement de la qualité de nos productions. Les crédits prévus à ce titre sont incontestablement en nette hausse dans ce budget.
L'Agence française de sécurité sanitaire des aliments est également bien dotée, afin de renforcer ses capacités de veille, d'expertise sanitaire et d'appui scientifique et technique.
Cela m'amène à évoquer le principe de précaution et à insister sur la nécessité de faire avancer la conception française de ce principe.
Le dossier du boeuf britannique est quasiment réglé, encore que, par les temps qui courent, il faille manier le terme « quasiment » avec prudence ! En tout cas, je veux saluer ici le courage dont vous-même et le Gouvernement avez fait preuve dans la protection du consommateur français.
La troisième priorité budgétaire, c'est, cette année encore, la politique éducative, qui répond à trois préoccupations majeures : accompagner la hausse des effectifs, mettre en oeuvre la réforme des lycées et, enfin, diminuer les emplois précaires.
Pour ce faire, vous proposez une hausse de 4 % des crédits. Mon collègue Bernard Piras reviendra sur ce volet important de votre budget.
Enfin, quatrième et dernière priorité de ce budget, la relance de la politique forestière, que vous nous avez déjà annoncée l'an dernier, à la suite de l'adoption de la loi d'orientation agricole.
Conscient des atouts de notre forêt pour notre agriculture et notre économie, vous avez décidé, à la suite de l'excellent rapport Bianco, de redynamiser la politique en faveur de la forêt française. Vous nous présenterez bientôt, dans un projet de loi consacré à la forêt, les grandes orientations que vous envisagez pour celle-ci. Ce projet, nous l'attendons, bien sûr, avec beaucoup d'impatience, monsieur le ministre. Vous savez en effet combien notre assemblée est attentive à ces orientations. Comment comptez-vous, d'ailleurs, associer le Parlement à l'étude de ce sujet important ?
Ce budget met donc en oeuvre une grande partie de la loi d'orientation agricole, nous venons de le voir.
Pour autant, il permet également la mise en oeuvre des engagements pris dans le cadre d'une politique plus générale par le Gouvernement dans le domaine de la solidarité : je veux parler ici du plan de revalorisation des retraites agricoles. Notre collègue Bernard Piras évoquera, à l'occasion de l'examen du BAPSA, l'ensemble des propositions de notre groupe à ce sujet.
Enfin, monsieur le ministre, nous tenons à saluer tout particulièrement vos efforts pour faire de votre budget un véritable outil d'intervention, dans le prolongement de l'acte politique que constituait la loi d'orientation agricole, renforçant ainsi notre capacité de soutien à la modernisation de l'agriculture française et à son insertion dans son environnement économique, social et territorial.
Revalorisation de la prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes, poursuite des efforts d'adaptation des filières, revalorisation des indemnités compensatoires des handicaps naturels, reconduction des crédits de programmes agri-environnementaux antérieurs aux CTE, voilà autant de signaux qui montrent un effort budgétaire constant en faveur des actions économiques agricoles et de l'aménagement de l'espace rural, sujet qui sera développé tout à l'heure par notre collègue Paul Raoult. Quant à Pierre-Yvon Trémel, il vous posera un certain nombre de questions au nom de notre groupe et je laisserai à notre collègue Yolande Boyer le soin de vous parler plus particulièrement de la femme en agriculture, sans oublier, bien sûr, la mer et la pêche, tous sujets à l'ordre du jour, mes chers collègues.
En conclusion, monsieur le ministre, je dirai que votre budget correspond aux choix politiques que vous avez faits pour l'agriculture française. Il traduit un certain volontarisme et illustre parfaitement les mutations que connaît le monde agricole et rural, auxquelles il lui donne les moyens de répondre.
Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste abordera avec une très grande sérénité le prochain millénaire, car votre budget, établi avec finesse, permet le virage nécessaire pour redonner espoir à notre agriculture et à notre ruralité. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. Souplet.
M. Michel Souplet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il est encore un peu trop tôt pour juger l'efficacité de l'application de la loi d'orientation agricole dans notre pays. Je limiterai donc volontairement mon intervention.
Cependant, à l'occasion de ce débat budgétaire sur l'agriculture et au lendemain des discussions de Seattle, je relèverai quelques contradictions flagrantes entre la volonté affirmée par le Gouvernement de changer de politique agricole et les moyens dont il se dote à court terme pour y parvenir.
Je constate, tout d'abord, que l'idée que j'ai avancée ici à plusieurs reprises, en mars et en avril, consistant à défendre, par le biais de la loi d'orientation agricole, un modèle de politique agricole qui pourrait être européen et qui, dans le cadre de la pluriactivité, définirait bien les facettes multiples des fonctions de l'agriculture, a fait son chemin. Je m'en félicite. C'est bien sûr cette définition essentielle de la fonction économique, sociale et environnementale de l'agriculture européenne que les discussions de l'OMC ont, en fait, échoué. Deuxième constat, l'agriculture européenne a tout à gagner à s'allier avec les consommateurs du monde entier en leur garantissant la sécurité alimentaire, en quantité et en qualité. La traçabilité, l'exigence de connaissance de l'origine, la valorisation de nos terroirs sont autant de facteurs de garantie qui rassurent les consommateurs, lesquels doivent, en revanche, en admettre les coûts spécifiques.
Mon troisième constat est plus négatif, voire tendancieux. Pourquoi avoir donné dans les médias une image aussi tronquée de l'agriculture française, voire européenne, lors de la réunion de Seattle ? M. José Bové, pour sympathique qu'il soit, met en exergue les produits de haut de gamme que nous avons toujours défendus. Ils sont le fleuron de nos exportations alimentaires, mais seuls les nantis peuvent se les procurer. Ils visent ainsi une clientèle aisée à qui nous fournissons ce qu'elle souhaite - tant mieux pour elle - mais la solution de l'aide alimentaire pour le tiers de la population mondiale qui souffre de malnutrition est ailleurs. Elle réside dans la prise de conscience par les Etats riches de leur responsabilité à fournir à ces peuples des produits de masse bon marché que seules des agricultures compétitives, comme la nôtre, peuvent produire.
Voilà le modèle européen agricole de demain, monsieur le ministre ! Ce n'est pas en tenant des propos qui dressent les gros contre les petits, les céréaliers contre les éleveurs, les gens du Nord contre ceux du Sud, que l'on va créer un climat favorable dans le monde agricole et à l'extérieur, d'autant que ces idées sont reliées par les médias qui ne se privent pas de les répandre. J'ai bien compris quelles étaient les priorités de votre budget, monsieur le ministre : le financement des CTE, le développement de l'emploi et de la formation, la qualité sanitaire, la revalorisation des retraites.
Mais comment comprendre, alors, la suppression des crédits du FIA, que votre prédécesseur avait mis en place, et l'amputation de près du quart des dotations aux jeunes agriculteurs, d'une part, face à votre effort en matière d'enseignement agricole, d'autre part ? Il me semble y avoir une certaine incohérence quand, d'un côté, on essaie de donner la meilleure formation aux jeunes - ce qui est tout à fait souhaitable - et que, de l'autre, on ne se donne pas les moyens suffisants pour leur permettre de s'installer.
Je regrette que, dans ce budget, on ne se soit pas doté des moyens que j'ai à plusieurs reprises évoqués. En particulier, aucune avancée fiscale n'a été proposée.
Certes, monsieur le ministre, vous allez me répondre tout à l'heure qu'aucune décision ne pouvait être prise aussi vite dans ce domaine. Je vous signale cependant que cela fait plus de quinze ans que je me bats sur ce dossier de la modernisation de la fiscalité agricole !
Vous allez me dire que Mme Marre et M. Cahuzac sont en train de préparer un rapport et qu'il faut attendre de connaître les résultats de leurs études. Mais, chaque année, on nous renvoie au projet de loi de finances suivant, on nous fait observer que nos requêtes, fiscales en particulier, ne sont pas prioritaires et que l'on doit s'attacher, dans un contexte de difficultés économiques et sociales, à une plus grande équité dans l'attribution des soutiens publics.
Cette fois-ci, il faut attendre les rapports puis, après les rapports, on remettra en place des groupes de réflexion et, quand ceux-ci auront effectivement réfléchi, nous aurons patienté une année de plus et rien n'aura été fait.
A mon avis, certaines mesures fiscales pouvaient ne pas attendre ces rapports : je pense notamment à des mesures relatives à la TVA ou à la taxation sur les plus-values. Si de telles mesures avaient été proposées dans le cadre de ce projet de loi de finances, elles auraient pu rassurer les agriculteurs sur votre volonté de faire progresser ce dossier rapidement.
Ces mesures ne sauraient toutefois interférer avec des adaptations plus fondamentales des prélèvements obligatoires frappant l'activité agricole. Je vous rappelle ainsi que les propositions des organisations professionnelles agricoles en matière fiscale visaient la mise en place d'un système d'exonération dégressive des plus-values en cas de transmission à un jeune agriculteur la possibilité d'évaluer les exploitations sur la base de leur valeur de rendement, l'adaptation d'aménagements fiscaux qui permettraient de favoriser la cession du capital d'exploitation à de jeunes agriculteurs par les anciens exploitants sans les exposer à des situations dramatiques, avec des emprunts impossibles à rembourser.
Je ne voudrais pas quitter cette tribune sans vous dire tout le mal que je pense de la TGAP : comment justifier que les recettes de ce nouvel impôt à la charge des agriculteurs - en effet, cet impôt se répercutera sur les prix des produits sans que les agriculteurs puissent le faire supporter aux consommateurs étant donné la formation des prix agricoles - soient affectés au budget de la sécurité sociale ? On passe d'une logique environnementale à une logique budgétaire !
L'enjeu, pour la profession agricole, est double : il s'agit de valoriser l'image des exploitations, car nous devons démontrer aujourd'hui que notre agriculture produit avec le souci de veiller à la transparence des techniques de production, et de protéger l'environnement par des actions fondées sur le volontariat.
C'est pourquoi l'institution d'une taxe générale sur les activités polluantes est, de mon point de vue, une grave erreur politique. Elle va à l'encontre de la démarche de la profession agricole, qui à toujours su réagir sur les grands enjeux de notre société.
Du point de vue de la protection de l'environnement, la TGAP est inefficace car elle constitue plus un droit à polluer qu'une taxe sur les produits.
Voila quelques-unes des idées que m'a inspirées le budget de l'agriculture ; j'en aurais beaucoup d'autres à développer, mais j'ai dit que je serais bref.
Je suis personnellement d'accord pour que nous reprenions, dans quelque temps, les discussions dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce, mais celles-ci ne doivent pas aboutir à des résultats médiocres. Je suis partisan d'un accord mondial du commerce, mais pas à n'importe quel prix, car la loi de la jungle ne doit pas l'emporter.
Les Etats-Unis ont été jusqu'au-boutistes dans cette première épreuve. Pourquoi pas ! N'y a-t-il pas une élection présidentielle chez eux dans quelques mois ? Il était donc normal qu'ils réagissent durement. Mais il est heureux que, face à eux, la Commission ait réagi elle aussi durement ! Nous avions craint un mauvais accord, et tel n'a pas été le cas. Tant mieux ! Mais il faudra reprendre les discussions et, à ce moment-là, les Européens, en particulier les Français, devront être très fermes.
Je regrette d'ailleurs que le ministre de l'agriculture ne fasse pas partie de la délégation française.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Je vous expliquerai pourquoi !
M. Michel Souplet. J'attends donc vos explications, mais j'espère que, la prochaine fois, vous y serez. Soyez très ferme !
Nous disposons d'un délai nouveau, profitons-en pour bien fourbir nos armes, pour bien faire comprendre à l'opinion publique l'importance de l'enjeu, pour bien faire comprendre aux agriculteurs que ce n'est pas avec des coups de gueule que l'on fait avancer les choses. Il nous faut réellement - je crois que là est notre combat - définir la place de l'agriculture dans notre société.
L'agriculture française a besoin de demeurer une agriculture exportatrice de produits de masse et de produits de qualité. Il faut donc continuer de garder nos débouchés intérieurs et les accroître, aussi bien sur le plan alimentaire que sur le plan non alimentaire. Or, monsieur le ministre, vous savez qu'à chaque fois que nous voulons avancer sur le non-alimentaire on nous répond études nouvelles, on nous renvoie à des dossiers qui ne sont pas bouclés. Nous en avons marre de cette position !
M. Bernard Joly. Bravo !
M. Michel Souplet. Nous avons besoin de débouchés à l'intérieur de la Communauté, que ce soit sur l'alimentaire ou sur le non-alimentaire, mais il nous faut aussi conquérir de nouveaux débouchés sur le marché extérieur, dans le monde entier où tant de gens meurent de faim. Notre rôle, le voilà ! Moi, paysan, je ne serai jamais heureux tant que je saurai que je n'ai pas répondu à ma vocation parce que j'ai laissé des gens mourir de faim à côté de moi. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Mathieu M. Serge Mathieu. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, contrairement à d'autres secteurs, l'agriculture n'est pas une priorité pour le Gouvernement. Hors BAPSA et à périmètre constant, le budget de l'agriculture connaît une baisse de 0,5 %.
Mais il y a plus grave : cette réduction des moyens se traduit par une diminution des crédits d'intervention et une forte hausse - 9,1 % ! - des dépenses des services.
Ainsi, ce budget n'apporte pas toutes les réponses aux questions que se posent nos agriculteurs, ce qui hypothèque l'avenir.
Je me contenterai, ici, de retenir quelques-unes de ces interrogations, pour consacrer ensuite mon propos à la viticulture.
L'actuel environnement économique et social n'est pas encourageant pour notre agriculture.
Tout d'abord, la politique d'installation des jeunes est menacée par la réduction des crédits de la DJA et par la suppression du fonds d'installation.
Ensuite, le financement des CTE demeure très problématique, en particulier à cause de la modulation des aides.
L'application des 35 heures est quasiment inimaginable pour le secteur agricole, notamment pour ceux qui travaillent la terre.
Enfin, les agriculteurs sont touchés de plein fouet par l'augmentation de la fiscalité, notamment par l'élargissement de l'assiette de la TGAP, bien que la majorité sénatoriale s'y soit fermement opposée.
En conséquence, ni le présent budget ni votre politique macro-économique ne permettront à l'agriculture de relever aisément les défis de l'avenir.
En outre, je me permets de souligner que, lors de nos récents débats sur la première partie du projet de loi de finances, à chaque question ou à chaque amendement fiscal ou social émanant de la majorité sénatoriale, le ministre a inlassablement répondu en renvoyant au futur rapport de nos collègues députés Mme Marre et M. Cahuzac sur la situation fiscale et sociale de l'agriculture. Sans contester la valeur des travaux de nos collègues, dont je n'ai pas pris connaissance, je m'interroge cependant sur la faiblesse des ambitions du Gouvernement, qui remet à plus tard, et sous bénéfice d'inventaire, des réformes non seulement attendues mais encore nécessaires.
En ce qui concerne la viticulture, je rappellerai en premier lieu les positions que nous avons défendues au moment de la mise en place de la nouvelle OCM et qu'il faut toujours garder à l'esprit.
Nous avons en effet jugé, lors de nos travaux du début de l'année, que l'accroissement autorisé de la surperficie du vignoble était insuffisant ; que l'interdiction de la vinification des moûts en provenance des pays tiers devait être maintenue ; que l'organisation de notre filière vitivinicole devait être préservée ; que des dispositions devaient être prises, au niveau communautaire, afin de soutenir la promotion commerciale des produits et la modernisation des entreprises viticoles.
Sur ces différents points, j'espère, monsieur le ministre, que vous saurez faire preuve de fermeté auprès de nos partenaires européens sur les conditions d'application de cette OCM.
Au-delà de ces questions d'ordre international, permettez-moi aussi de revenir sur les conclusions de la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie. Nous savons tous aujourd'hui combien la loi Evin, en s'attaquant à la publicité, a raté sa cible en matière de santé publique.
Or il semble que les mêmes erreurs et les mêmes assimilations hâtives ont encore cours au sein de la majorité plurielle.
Le vin fait partie, surtout dans notre pays, d'une tradition qui appartient à notre identité culturelle et qu'on ne saurait renier au nom d'un « socialement correct » très hypothétique.
L'alcool n'est pas une drogue. Seule est condamnable la consommation excessive d'alcool, contre laquelle c'est une véritable politique de prévention qu'il faut mener.
La consommation modérée de vin, et de bon vin, relève d'un art de vivre que nous ne devons pas abandonner.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. C'est une thérapeutique ! (Sourires.)
M. Serge Mathieu. Il faut continuer à encourager la production de produits de qualité, notamment au travers des AOC.
Ces productions se caractérisent, en effet, par leur valeur ajoutée et le savoir-faire qu'y apportent les producteurs et les négociants ; la qualité permet une meilleure valorisation du travail agricole et garantit un revenu plus élevé aux agriculteurs.
Ce sont également des productions qui connaissent la faveur des consommateurs, car ces derniers sont à la recherche d'une plus grande authenticité, d'une plus grande sécurité, d'une plus grande identité dans leurs produits alimentaires. Les produits de qualité, notamment les AOC, rassurent nos concitoyens.
Ces cultures font vivre nos terroirs : elles ont un rôle primordial dans l'aménagement du territoire, la préservation de nos paysages, l'équilibre entre la ville et les campagnes. Souvent, la production de qualité assure l'existence d'entreprises et d'exploitations dans des zones difficiles ou aux caractéristiques très particulières ; elle transforme les handicaps en facteurs de compétitivité.
Enfin, les AOC constituent un des premiers postes excédentaires de notre balance commerciale avec un solde, désormais structurel, de plusieurs dizaines de milliards de francs.
La valorisation de nos « terres d'excellence » est un gage d'avenir et de modernité. La qualité des produits doit donc être un axe majeur de développement.
Dans les différentes pespectives que je viens d'aborder, monsieur le ministre, il faut que notre politique de qualité, quelles que soient les appellations, trouve des appuis forts. Or le projet de budget ne répond pas aux conditions d'une telle politique.
D'abord, le soutien à l'installation est faible.
Ensuite, le budget des dépenses relatives aux industries agroalimentaires et à la qualité baisse, sur le moyen terme, de 470 millions de francs en 1996 à 395 millions de francs en 1999.
Enfin, les crédits de promotion des produits sont réduits, cette année, de 5 millions de francs, ce qui augure mal de l'appui qui sera donné à nos entreprises pour conquérir de nouveaux marchés.
Dans ces conditions, et pour toutes celles qui ont été dénoncées par notre rapporteur, je m'opposerai, monsieur le ministre, au projet de budget de l'agriculture pour 2000, tel qu'il nous est présenté. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE).
M. le président. La parole est à M. Darniche.
M. Philippe Darniche. Monsieur le ministre, mon intervention sera brève : deux minutes pour deux questions ! (Sourires.)
En premier lieu, je voudrais vous faire part des inquiétudes de mon collègue, sénateur de l'Aube, Philippe Adnot, quant à l'avenir du fonds pour l'installation en agriculture, le FIA, dans le cadre du projet de budget 2000.
En effet, ce fonds, qui a pour objectif de promouvoir des installations supplémentaires en accueillant de nouveaux candidats, donne, depuis sa mise en place en 1995, des résultats très encourageants.
Or, monsieur le ministre, alors que, selon vos propres termes, « la politique d'installation en agriculture constitue une des actions prioritaires du Gouvernement », il est choquant de constater que vous proposez, dans le même temps, l'intégration du FIA dans le fonds de financement des contrats territoriaux d'exploitation.
Vous commettez là une confusion nuisible au FIA dès lors que vous fusionnez politique de développement des exploitations et politique d'installation des jeunes agriculteurs, deux stades pourtant si différents en pratique.
Je vous rappelle que le FIA joue un rôle primordial d'animation, d'encouragement de l'installation, de financements et d'éducation en faveur des jeunes agriculteurs.
Avec mon collègue Philippe Adnot, j'estime que la remise en cause de ce fonds représente une grave menace pour la politique d'installation des jeunes agriculteurs dans son ensemble.
En second lieu, je souhaite, à titre personnel, vous interpeller sur le budget de la pêche et le problème de l'application de la loi sur les 35 heures pour les patrons pêcheurs français face à la concurrence espagnole.
Dans mon département, la Vendée, le secteur de la pêche a été durement touché, notamment en raison des disposition européennes concernant les filets maillants dérivants.
Les pêcheurs français de la façade atlantique qui pêchent dans le golfe de Gascogne se retrouvent en forte concurrence avec leurs homologues espagnols.
L'application de la loi sur les 35 heures impose la réduction des jours de pêche et crée une distorsion supplémentaire par rapport à l'Espagne, qui n'a pas cette contrainte sociale.
Cette trop grande rigidité du droit du travail pénalise de façon supplémentaire ces entreprises françaises et la pêche en général. Comment, monsieur le ministre, pensez-vous qu'il soit possible d'y remédier ?
M. le président. La parole est à M. Rispat.
M. Yves Rispat. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, c'est aujourd'hui, bien sûr, le sénateur du Gers qui s'exprime, mais c'est aussi l'ancien président de la chambre d'agriculture du département le plus agricole et le plus rural de France.
Monsieur le ministre, je tiens, à la suite de mon prédécesseur à cette tribune, à vous faire part de l'incompréhension et de l'inquiétude des jeunes agriculteurs de notre département face à la suppression du FIA. Cette suppression va gravement mettre en cause l'ensemble des actions locales, en particulier celles qui sont liées à l'installation progressive des jeunes.
Nous ne pouvons installer des jeunes que si nous disposons d'exploitations à transmettre, d'exploitations que nous identifions au travers d'actions spécifiques, en liaison avec les SAFER, telles que le repérage d'exploitants sans successeurs, l'aide à la location des terres à un jeune, l'aide à la transmission du capital d'exploitation, l'incitation financière au propriétaire, le soutien pour différer l'installation par des conventions de mise à disposition proposées, notamment, par les SAFER.
La notion d'installation progressive consiste, vous le savez, à étaler dans le temps l'entrée d'un jeune dans l'activité agricole afin de lui ouvrir tous les accès possibles aux aides à l'installation. J'ai la conviction que l'aide directe à l'installation comme l'amélioration des compétences et des connaissances permettraient d'aider plus concrètement et plus efficacement les jeunes. Ce ne sont pas les CTE qui pourront pallier cette difficulté. Ils n'ont d'ailleurs pas vocation à cela. Il faut donc maintenir le FIA et le consolider, peut-être par la mise en place des CTE. Cette solution me paraîtrait idéale.
Le renouvellement et le maintien des exploitations dans des départements qui, comme les nôtres, ne dépassent pas les 20 habitants au kilomètre carré, sont prioritaires, car celles qui restent - quelques centaines au plus - sont loin d'être en nombre suffisant pour compenser les départs. Nous sommes donc dans l'obligation d'encourager et de soutenir le renouvellement et le maintien des exploitations sous toutes leurs formes.
Dans le même esprit, il faudrait peut-être envisager, dans les zones défavorisées, une réforme des prêts bonifiés. Il faudrait accélérer leur mise en place, les proposer à plus long terme, trente ans par exemple, en tout cas les offrir à taux zéro, car les jeunes agriculteurs ont tendance à leur préférer aujourd'hui d'autres prêts. Je pense, entre autres, aux prêts AGILOR du Crédit agricole, qui se caractérisent par leur souplesse, par la rapidité de leur mise en place - quarante-huit heures suffisent - et qui n'imposent aucune contrainte particulière d'accès.
C'est la PAC 1992 qui a conduit à la naissance du FIA et qui a dangereusement engagé notre agriculture sur la voie des aides directes. Dans notre département, le produit agricole brut est, six ans après, le même qu'en 1989.
Monsieur le ministre, si je vous félicite de votre fermeté pour le maintien de l'embargo sur les viandes britanniques, et si j'ai aussi apprécié certaines de vos déclarations, dimanche, sur TF 1, je ne peux en revanche accepter que vous repreniez toujours ce slogan facile qui oppose et divise à la fois les catégories sociales et les agriculteurs, et qui consiste à dire que 80 % des aides vont à 20 % des paysans !
Plusieurs sénateurs sur les travées socialistes. C'est pourtant la vérité !
M. Yves Rispat. C'est peut-être vrai dans deux ou trois départements, mais c'est faux dans le cas du Gers, où les pourcentages sont respectivement de 60 % et de 40 % ! Si nous sommes le troisième département pour le montant global des aides, pour le montant par exploitation nous ne sommes plus que le quarantième département ! Cela démontre bien que votre argumentation n'est pas justifiée, monsieur le ministre. Il est trop facile aujourd'hui de soutenir ceux qui utilisent tous les médias possibles pour affirmer ces contrevérités ! Ne nous opposons pas entre nous, monsieur le ministre !
Nous allons nous retrouver demain. J'espère que vous nous apporterez des informations et, surtout, une solution de compromis permettant de favoriser les CTE, auxquels vous tenez, tout en évitant la suppression du FIA, lequel est absolument indispensable pour nos jeunes agriculteurs. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
(M. Paul Girod remplace M. Jean Faure au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. PAUL GIROD
vice-président
M. le président.
La parole est à M. Joly.
M. Bernard Joly.
Monsieur le ministre, rejoignant les excellentes analyses et propositions de
nos rapporteurs, je limiterai mon propos à deux questions pour respecter le
très bref temps de parole qui m'est imparti. Ces deux préoccupations vont dans
le sens du renforcement de la qualité des produits et de la sécurité
alimentaire auxquels vous consacrez vos efforts.
La Suisse souhaite aujourd'hui réserver l'usage du terme « gruyère » aux seuls
fromages produits selon un cahier des charges reposant sur les pratiques de
fabrication spécifiques aux producteurs et fromageries d'une zone géographique
définie et située en Suisse romande. Pour cela, elle espère obtenir une
appellation d'origine protégée au niveau européen qui interdirait toute
production sous ce terme en dehors de cette zone, donc en France. La Suisse
romande en aurait l'exclusivité.
Outre les quatre départements franc-comtois, les fabricants français de «
gruyère » sont dans les Hautes-Alpes, la Savoie et la Haute-Savoie. Leur
production annuelle est de l'ordre de 2 000 tonnes. Leur inquiétude est vive,
car ils ont déjà pâti d'une interdiction frappant le « comté ».
Actuellement, conformément à la convention de Stresa, signée en 1952 entre la
France et la Suisse, les deux pays sont autorisés à produire sous le même
terme.
Le syndicat interprofessionnel du gruyère français s'attache à conserver à la
France l'usage du terme, en limitant l'usage de la dénomination par un cahier
des charges strict et en réancrant la fabrication dans son bassin d'origine,
l'arc alpin.
Il conviendrait donc de définir une zone de production afin de qualifier une
indication géographique protégée et de mettre en place une attestation de
spécificité. Ce cadre permettrait d'éviter l'évasion vers d'autres zones et
d'assurer une qualité de fabrication à un haut niveau.
L'attaque menée par la Suisse n'est pas anodine : elle mettrait en péril
l'équilibre déjà fragile d'exploitations agricoles de régions où la tradition
intègre ce type de production. Or l'argumentation de Bruxelles, par la voix si
souvent entendue de Mme Emma Bonino lorsqu'elle était commissaire européen,
consistait à conseiller aux producteurs français de labelliser des produits de
qualité afin de pouvoir les faire circuler sans problèmes.
Par ailleurs, mon département craint de se voir interdire une production de
qualité labellisée, la saucisse de Morteau.
Heureusement, le Conseil d'Etat vient d'annuler un arrêté ministériel visant à
attribuer une indication géographique protégée aux producteurs de saucisses de
Morteau installés dans la partie montagneuse des départements du Doubs et du
Jura, et uniquement ceux-là. Monsieur le ministre, cette décision aurait été
grave et néfaste, et à deux niveaux : la production et la transformation.
Pour les producteurs de porcs, l'intégration dans la zone IGP permet la
labellisation de produits déjà fabriqués mais non valorisés par un signe de
qualité. La valeur ajoutée globale de la filière s'en trouve confortée, du
moment que les producteurs ne portent pas atteinte à la logique de
positionnement « haut de gamme » du produit.
Le même raisonnement s'applique aux transformateurs, dont l'enjeu majeur est
l'obtention de l'IGP. C'est logique, car leur intervention confirme le
caractère spécifique d'un terroir, l'intégralité des opérations étant réalisée
dans ses limites.
Il me semble tout à fait opportun, monsieur le ministre, que vos services
aient toutes ces données présentes à l'esprit lorsqu'il s'agira de définir à
nouveau le zonage de ce produit agro-alimentaire de qualité labellisée.
La situation économique des élevages porcins est telle que les producteurs
pourront faire face à la redevance pollution. Il est impératif de ne pas
sciemment les pénaliser.
Des efforts importants sont entrepris pour répondre à une demande de plus en
plus exigeante des consommateurs et s'inscrivent totalement dans la position
française défendant la lisibilité et la traçabilité des produits mis sur le
marché. J'espère donc, monsieur le ministre, être entendu.
(Applaudissements
sur les travées du RDSE, du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union
centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Lejeune.
M. André Lejeune.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme l'a
annoncé mon ami Jean-Marc Pastor, mon intervention portera essentiellement sur
le financement de la mise en oeuvre des contrats territoriaux d'exploitation,
les CTE.
En ce qui les concerne, le projet de budget pour 2000 est conforme aux
engagements que vous aviez pris, monsieur le ministre, lors du vote de la loi
d'orientation agricole l'an dernier. En effet, ce projet traduit la priorité
donnée au financement de ces contrats.
S'ajoutant aux 300 millions de francs inscrits dans le projet de loi de
finances pour 1999, la dotation du chapitre budgétaire des CTE s'établit à 950
millions de francs en 2000. Les promesses faites par le Gouvernement sont donc
tenues, et je vous en félicite, monsieur le ministre.
Les crédits alloués au fonds de financement des CTE dans le projet de budget
pour 2000 seront complétés par les financements communautaires, ce qui
permettra de disposer au total de près de 2 milliards de francs et de signer 40
000 contrats supplémentaires.
Les moyens mis en oeuvre permettront de répondre aux nouvelles attentes des
agriculteurs et de la société qui souhaite pouvoir consommer des produits de
qualité et vivre sur un territoire entretenu, où l'environnement est
respecté.
Le marché ne permettant pas de rémunérer les nouveaux modèles de production
qui devront être mis en place, un effort financier de la collectivité, en
contrepartie des engagements qui seront pris, se révèle nécessaire.
Le CTE, qui repose sur une démarche contractuelle et reconnaît la
multifonctionnalité de l'agriculture, est appelé à devenir un outil de
développement pour les agriculteurs. Ceux-ci ont bien compris l'intérêt de
cette démarche et se sont vite appropriés ce nouvel outil.
Tout a été mis en place pour que les premiers CTE puissent être signés à
partir du mois de novembre 1999, c'est ainsi que, dans mon département, une
centaine de contrats sont envisagés.
L'implication des acteurs sur le terrain est un gage de réussite et sera
observée avec intérêt par nos partenaires européens, qui sont à la recherche de
ce qui pourrait être un modèle dans la discussion au sein de l'OMC.
Le contrat territorial d'exploitation comporte deux parties : une partie
économique et relative à l'emploi et une partie territoriale et
environnementale.
La rémunération de la partie économique suppose un projet dynamique, modifiant
ou perfectionnant le système d'exploitation, améliorant la qualité des
produits, créant ou diversifiant les activités ayant un impact sur l'emploi, en
particulier l'installation des jeunes.
Cependant, le plafond de financement fixé pour la durée du projet doit tenir
compte de la diversité des régions afin d'accélérer le développement de celles
dont les revenus agricoles sont les plus bas.
Pour la partie environnementale et territoriale, l'aide sera allouée
annuellement en fonction de la perte de revenus encourue et des coûts
additionnels résultant des engagements agri-environnementaux. C'est un
encouragement nécessaire à la mise en place de bonnes pratiques.
Toutefois, lorsque les pratiques actuelles sont déjà très respectueuses de
l'environnement, il conviendrait d'en tenir compte. En effet, il sera beaucoup
plus difficile aux agriculteurs qui ont déjà un bon comportement de trouver des
mesures nouvelles pour limiter la pollution qu'aux exploitants dont l'activité
continue à générer des nuisances.
Les aides versées au titre du contrat territorial d'exploitation seront
conformes au règlement « développement rural de la politique agricole commune
». Or le financement plafond pour les mesures qu'il comporte et qui sont
éligibles au CTE est calculé à l'hectare. N'y a-t-il pas là un risque
d'altération de l'idée du contrat en tant que projet global ?
Il me semble qu'il faudra être très vigilant si l'on veut éviter le risque de
dérive qui consisterait, afin d'obtenir un financement de Bruxelles, à
s'orienter vers certaines mesures avec, comme seul objectif, la recherche d'une
aide maximale. On en reviendrait alors à une logique de guichet, à juste titre,
ce qu'on a voulu éviter. Il est donc très important de privilégier la notion de
projet global et de lui donner un contenu.
Le contrat territorial d'exploitation est appelé à évoluer pour devenir
l'outil fédérateur d'un grand nombre de mesures d'aide à l'agriculture. Il
permettra ainsi de les réorienter et d'en assurer une meilleure répartition. Il
s'agit, ni plus ni moins, d'une « révolution culturelle », ainsi que vous
l'avez dit, monsieur le ministre.
Il convient également de veiller à ce que les aides liées aux contraintes
naturelles ne soient pas intégrées dans le financement des CTE. Les
agriculteurs de mon département, comme ceux des autres régions défavorisées,
seront très attentifs à cette évolution.
Afin de ne pas pénaliser les agriculteurs à l'avenir, il faudrait veiller à ce
que les crédits prévus pour le financement de la prime à l'herbe soient
maintenus hors du cadre de ce contrat, comme les indemnités compensatoires de
handicaps naturels.
Le projet de loi de finances qui nous est soumis aujourd'hui montre que nous
sommes sur la bonne voie. Les moyens supplémentaires accordés permettent une
mise en place rapide de la loi d'orientation agricole et nous nous en
réjouissons.
(Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur
celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. Herment.
M. Rémi Herment.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les
agriculteurs sont toujours moins bien lotis que la moyenne nationale. En effet,
ils n'ont pas comblé leur retard en matière de revenus, puisque celui-ci
demeure encore inférieur de 9 % au revenu de l'ensemble des ménages.
A un moment où l'agriculture française subit plusieurs crises graves, on ne
peut que s'interroger sur l'avenir qui lui est réservé, si tant est qu'elle en
ait encore un dans ce pays.
Alors que ce secteur économique essentiel doit faire face à une politique
agricole commune réformée, aux négociations de l'Organisation mondiale du
commerce, aux attentes des Français en matière de sécurité alimentaire, ainsi
qu'à celles des agriculteurs face aux crises sectorielles qu'ils subissent,
nous nous attendions à un budget pour 2000 moins décevant, c'est-à-dire à un
budget tendant à permettre à nos agriculteurs de relever les défis de la
mondialisation, de la qualité et de l'aménagement du territoire. Or nous
constatons que l'agriculture n'est pas dans les priorités du Gouvernement.
On ne peut malheureusement que regretter que vous ne vous donniez
malheureusement pas les moyens d'une véritable politique agricole et que vous
la fondiez presque exclusivement sur des redéploiements et des prélèvements.
Je voudrais maintenant parler de la modulation. La France est aujourd'hui la
seule à appliquer la modulation, ce qui ne peut que pénaliser notre
agriculture, alors que celle-ci doit pouvoir être présente sur les marchés
extérieurs.
La modulation pose un problème de fond, à la fois économique et territorial.
C'est l'avenir de certaines filières qui est en jeu, les cultures spécialisées
par exemple.
Dans la mesure où la mise en place de la modulation reste uniquement
d'application française, il y aura inévitablement distorsion de concurrence à
l'égard des autres pays membres de l'Europe. A l'heure de la monnaie unique et
d'un projet européen, c'est tout à fait inacceptable.
L'objectif d'être de la modulation devait être une redistribution équitable
des aides. Or, dans l'état actuel du système, il n'est pas atteint. Au
contraire, l'impact de cette modulation va avoir un effet dévastateur sur les
revenus des familles d'exploitants de nombreux départements.
En premier lieu, la modulation ne tient pas compte des diversités
géographiques. En second lieu, les exploitations en difficulté seront affectées
comme les autres et leurs difficultés seront donc aggravées. En troisième lieu,
la modulation va entraîner des distorsions selon le statut des exploitations.
En quatrième lieu, elle va encore ralentir les installations, sans pour autant
freiner la course à l'agrandissement.
Le seuil actuel de déclenchement de la modulation est fixé à un niveau de
marge brute standard de 50 000 euros, soit, par exemple, pour la Lorraine, 75
hectares d'équivalent blé. Or, demain, avec l'application de la nouvelle
réforme de la PAC, qui induit une baisse des prix partiellement compensée, la
suppression du régime spécifique des oléagineux et le démantèlement des
mécanismes de soutien, le revenu à l'hectare sera de l'ordre de 1 000 francs,
pas plus. Moduler à partir de 50 000 euros, cela signifie moduler à partir d'un
revenu annuel de 75 000 francs, soit l'équivalent du SMIC !
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
On rêve !
M. Rémi Herment.
Il faut donc que ce seuil soit relevé et soit porté à 100 000 euros.
Il nous paraît par ailleurs injuste que des agriculteurs, qui ont le même
statut, et donc les mêmes obligations, en ce qui concerne tant le travail que
les cotisations sociales, n'aient pas les mêmes droits.
De quel droit peut-on priver de transparence des associés exploitants qui
participent aux travaux, qui n'ont pu choisir le statut de GAEC pour des
raisons juridiques - par exemple un couple - et qui n'ont donc eu d'autre
possibilité que de choisir l'EARL ?
Comment expliquer à une femme qui a choisi de cotiser en tant qu'agricultrice
que, dans le cadre de l'association avec son mari en EARL, elle ne soit pas
totalement reconnue en tant qu'exploitante, puisqu'elle n'est comptée que comme
actif salarié, alors que, si un troisième associé arrive, la société peut être
transformée en une GAEC, ce qui lui permettra d'être reconnue ?
A l'heure de l'égalité des droits entre les personnes, cela paraît d'autant
plus paradoxal que, dans la première version de la modulation, les associés en
EARL pouvaient bénéficier de la transparence. Faut-il en déduire que l'année
2000 sera l'année de la dégradation des acquis sociaux ?
L'actualité a longuement fait état des problèmes alimentaires des animaux. Il
est indéniable que les besoins en protéines végétales vont être fortement en
hausse, et la production française, voire européenne, risque d'être
déficitaire.
Alors, pourquoi ne pas exclure de la modulation les productions, comme le
colza, qu'il faudra encourager demain ?
La nouvelle loi d'orientation prévoit un renforcement du contrôle des
structures. La profession agricole a souhaité ce renforcement, qui permet de
mieux lutter contre certains montages juridiques et d'inciter certains
exploitants à plus de transparence.
S'agissant du programme de maîtrise des pollutions d'origine agricole, il
n'est pas juste que les plus petits élevages soient pénalisés.
En effet, le moratoire de trois ans doit être accordé à tous les éleveurs et
la redevance pollution ne doit pas s'appliquer à ceux qui n'ont pu terminer
leurs travaux, faute de crédits de l'Etat, par manque de temps des entreprises
ou pour des raisons d'ordre administratif.
Les agriculteurs en ont par ailleurs assez, plusieurs orateurs l'ont dit avant
moi, de l'excès d'administration dans leur profession. A chaque réforme
s'ajoute une déclaration et des contrôles. Il est plus que temps, monsieur le
ministre, de simplifier toutes ces démarches par le regroupement des
déclarations et des contrôles.
Enfin, s'agissant de la TGAP, que mes collègues du groupe de l'Union centriste
et moi-même avons très largement décriée et dont nous avons d'ailleurs voté la
suppression lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité
sociale pour 2000, je note que le niveau des cinq taxes regroupées en son sein
évoluera en fonction des besoins financiers du budget de l'Etat et non en
fonction des actions pour l'environnement.
Demander à des agriculteurs, qui ne peuvent compter leur temps de travail, de
financer la réduction du temps de travail des salariés ne nous semble pas
acceptable. Le produit de la « TGAP-phyto » doit être affecté à des actions en
faveur de l'environnement. Et pourquoi pas dans le volet environnemental du CTE
? Notre opposition au financement des 35 heures par la TGAP est ferme.
Monsieur le ministre, je suis sûr que vous êtes sensible à l'ensemble de ces
arguments et que vous souhaitez privilégier une agriculture sans injustice, qui
puisse produire en toute transparence et en cohérence avec les autres
réglementations.
Je vous demande donc, avec mes collègues du groupe de l'Union centriste, de
bien vouloir peser de tout votre poids pour que l'ensemble des dossiers que je
viens d'évoquer voient leur traitement modifié avant qu'il ne soit trop tard.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Emorine.
M. Jean-Paul Emorine.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans un
contexte national et international particulièrement chargé en événements liés à
l'agriculture et qui inquiètent nos concitoyens, qu'il s'agisse de l'épandage
des boues, des OGM, de la crise de la viande bovine ou de la conférence de
Seattle, entre autres, nous sommes aujourd'hui saisis du projet de budget
relatif à l'agriculture et à la pêche.
Comme l'a justement indiqué le rapporteur spécial, le budget de l'agriculture
et de la pêche n'est pas une priorité pour le Gouvernement, et ce pour trois
raisons : la politique économique et sociale menée par l'actuel gouvernement
est particulièrement préjudiciable aux agriculteurs ; les réformes nécessaires
sont reportées à plus tard ; ce budget est en baisse.
Tout d'abord, hors BAPSA et à périmètre constant, le projet de budget de
l'agriculture et de la pêche connaît une baisse de 0,5 %. Cette baisse pèse
d'autant plus sur les moyens d'intervention que les moyens des services
augmentent fortement : de 9,1 %.
Je ne concéderais qu'un bon point à ce budget : l'augmentation des crédits
dans le domaine de la sécurité et de la qualité alimentaires. Mais comment
pourrait-il en être autrement quand l'actualité est si chargée à cet égard ?
Ensuite, la politique macroéconomique du Gouvernement se transforme en une
course d'obstacles pour les agriculteurs.
Si l'on ne sait pas très bien encore comment s'appliqueront les 35 heures aux
salariés, les agriculteurs n'y ont même pas songé pour eux-mêmes ! De plus, le
Gouvernement veut financer ces mêmes 35 heures par l'élargissement de
l'assiette de la TGAP, notamment aux produits phytosanitaires, ce à quoi le
Sénat s'et opposé lors du débat du projet de loi de financement de la sécurité
sociale. Il s'agit là d'un accroissement de la fiscalité qui pèse sur les
agriculteurs.
Enfin, les réformes nécessaires sont reportées à plus tard, notamment dans les
domaines fiscaux et sociaux, puisque, comme cela nous a été répété lors de
l'examen des articles de la première partie, le Gouvernement attend les
conclusions du rapport confié à Mme Marre et à M. Cahuzac pour décider
d'éventuelles modifications législatives substantielles, au nom de quoi
plusieurs de nos amendements ont été ou seront refusés. Or ce rapport ne sera
rendu public, au mieux, qu'en avril prochain. Pourquoi de tels délais ? Mme
Béatrice Marre semble être le seul spécialiste de l'agriculture, et les autres
parlementaires sont tenus à l'écart de toute réflexion !
De même, le projet de loi sur la forêt, annoncé depuis longtemps, n'a toujours
pas été présenté au Parlement. Aucune disposition fiscale - hormis la
suppression du Fonds forestier national - n'est d'ailleurs envisagée dans le
présent projet de budget, ce qui ne laisse rien augurer de bon quant à la
grande réforme attendue.
La budgétisation du FFN comporte des risques de régulation budgétaire sur
lesquels le Parlement n'a aucune prise. C'est pourquoi, monsieur le ministre,
nous comptons sur votre engagement de préserver les crédits en faveur de la
forêt.
Après ces considérations d'ordre général, je souhaiterais revenir, de façon
plus précise, sur quelques points qui me paraissent essentiels pour l'avenir de
notre agriculture, son développement, sa compétitivité et son rôle dans
l'aménagement du territoire.
Premièrement, la politique d'installation des jeunes est menacée par la
réduction de près de 25 % de la dotation aux jeunes agriculteurs et par la
suppression du fonds d'installation des jeunes. Vous arguez du fait que ces
crédits demeurent puisqu'ils sont affectés aux CTE. Mais cela signifie en
réalité que, pour s'installer et être aidé, tout jeune devra souscrire un CTE.
De ce fait, certaines actions de parrainage ou de repérage des exploitations
sans successeur ne seront alors plus soutenues.
En 1999, 7 000 jeunes agriculteurs seulement se sont installés. Quelle
déception, sachant qu'un agriculteur est actif pendant quarante ans ! Cela
laisse présager que, dans une dizaine d'années, il ne restera plus que 380 000
à 400 000 agriculteurs en France. La situation de notre agriculture, le revenu
de nos agriculteurs n'encouragent déjà guère les jeunes à s'installer. A cela
vient désormais s'ajouter le « concert » des 35 heures.
Monsieur le ministre, je vous avais proposé l'an passé de reconduire la
préretraite aux agriculteurs de cinquante-cinq ans qui cédaient leur
exploitation, à condition que ce soit dans la perspective de l'installation
d'un jeune. Vous m'aviez alors répondu que le dispositif de préretraite avait
favorisé l'agrandissement des exploitations.
Mais ce que je vous propose est différent puisqu'il s'agit de remplacer un
cédant par un jeune exploitant : le rapport est bien de un à un, alors que,
dans le cadre général, il y a souvent deux cédants pour une installation.
Cette proposition a, en outre, un aspect social dans la mesure où
l'agriculteur de cinquante-cinq ans travaille généralement depuis quarante ans.
Dans d'autres secteurs, votre Gouvernement est bien plus sensible à cet aspect
des choses : sans doute l'enjeu électoral y est-il plus important.
Deuxièmement, la gestion et le financement des CTE aboutissent, comme je le
soulignais déjà lors de nos débats sur la loi d'orientation agricole, à une
étatisation des crédits et à une fonctionnarisation des agriculteurs. Ce sont
au total 2 milliards de francs qui sont aujourd'hui prévus pour les CTE : 950
millions de francs sur le budget de l'Etat - dont 650 millions de francs
reconduits ou redistribués - et 950 millions de francs en provenance de la
modulation des aides en provenance de l'Union européenne.
Or la modulation des subventions agricoles est un système contestable parce
qu'il aboutit à une renationalisation de la PAC, à des alourdissements
administratifs et à des distorsions de concurrence avec les autres producteurs
européens. Le nouveau dispositif touchera, de plus, de plein fouet certaines
régions agricoles, notamment celles de plantations en oléo-protéagineux.
Monsieur le ministre, vous annoncez le financement de 50 000 CTE. Peut-être...
C'est en tout cas un objectif très ambitieux ! En Saône-et-Loire, j'ai
participé aux travaux de la commission départementale d'orientation de
l'agriculture ; très peu de projets ont été présentés, malgré l'insistance de
M. le préfet.
Mais ce qu'il faut surtout savoir, c'est que le montant de l'aide dépendra des
engagements pris par l'exploitant, au risque de disparités entre départements
et entre agriculteurs.
Troisièmement, en ce qui concerne les retraites agricoles, nous notons avec
satisfaction que l'actuel gouvernement inscrit son action dans la continuité de
celle de ses prédécesseurs en poursuivant les mesures de revalorisation.
Cependant, il est regrettable que l'effort n'ait pas été intensifié cette
année, comme permettaient de l'envisager le retour de la croissance et la
hausse des rentrées fiscales.
Quatrièmement, le Fonds de garantie des calamités agricoles, qui ne
bénéficiait d'aucune subvention l'an passé, sera doté cette année de 50
millions de francs. Est-ce que ce sera suffisant ? Quelle est l'importance de
la trésorerie de ce fonds ? Le Gouvernement tiendra-t-il les délais de
présentation du rapport sur l'indemnisation des calamités agricoles, prévu pour
le mois de janvier prochain ?
Dans le cadre de la loi d'orientation agricole, vous vous êtes également
engagé, monsieur le ministre, à ce qu'un rapport soit présenté sur l'assurance
récolte. Où en est-on à cet égard ?
Enfin, en tant que membre de la délégation parlementaire qui a accompagné le
Gouvernement à Seattle, je n'ai pu que regretter votre absence, monsieur le
ministre. Lors de cette conférence, la position des Etats-Unis a été claire :
obtenir la diminution des aides de l'Union européenne. Je me permets de vous
proposer une réflexion pour l'avenir : pourquoi ne pas envisager de supprimer
l'aide aux produits - par exemple, à la vache allaitante, aux bovins mâles ou
aux références en céréales - et mettre en place, sous forme d'aide à l'hectare,
un système prenant en compte l'espace et l'environnement ? Cette proposition
pourrait être l'objet d'une négociation et résoudrait aussi, à long terme, la
question de la modulation des aides.
Pour toutes les raisons que je viens d'évoquer, monsieur le ministre, le
budget de l'agriculture et de la pêche ne nous paraît pas satisfaisant. Le
groupe des Républicains et Indépendants ne le votera pas.
(Applaudissements
sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union
centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Besse.
M. Roger Besse.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, alors que
nous en sommes à la première année d'application de la loi d'orientation
agricole, force est de constater que le budget de l'agriculture baisse de 0,5
%.
Au lieu d'être animés d'un nouvel élan, les agriculteurs ressentent de lourdes
inquiétudes, sur fond de grande désillusion.
J'évoquerai d'abord les CTE. Je considère qu'il s'agit d'un concept
intelligent et intéressant à bien des égards. Cependant, comme nombre de mes
collègues, et notamment M. Pelletier, je déplore le caractère abscons des
textes qui y font référence. A travers plus de 157 pages émaillées de formules
sibyllines, pour ne pas dire franchement incompréhensibles, celle-ci a, parmi
d'autres, retenu mon attention : « Fauchage à rotation brute et attaque
centrale ». Comprenne qui pourra ! Il s'agit apparemment d'une technique très
élaborée, qui devrait permettre à ses utilisateurs inspirés de bénéficier d'une
prime de 200 francs à l'hectare.
(Sourires.)
De grâce, monsieur le ministre, simplifiez les textes et les
procédures !
Je souhaiterais également vous faire part de mon inquiétude concernant le
financement de ces CTE et leur labyrinthique mise en place.
Ne craignez-vous pas que, compte tenu de l'insuffisance notoire des crédits
affectés aux CTE, l'on n'approfondisse dans un même département la fracture
sociale qui va s'installer entre les agriculteurs bénéficiaires du contrat et
ceux, les plus nombreux, qui ne pourront y prétendre ?
Ainsi, dans mon département, le Cantal, l'enveloppe ne couvrira que 200 CTE,
alors qu'environ 5 000 agriculteurs souhaitent y prétendre.
Vous me l'accorderez, il est difficile de comprendre qu'une politique qui se
veut volontariste en matière d'installation prévoit une baisse de 24 % des
crédits de la dotation aux jeunes agriculteurs.
Par ailleurs, vous supprimez le fonds d'installation en agriculture, présenté
par votre prédécesseur comme l'outil-sésame pour ouvrir les portes de l'espoir.
Il est vrai que M. Le Pensec a dû être déçu car, dans cette caverne d'Ali Baba,
les agriculteurs ne trouvent pas de trésor
(Nouveaux sourires)
et le
nombre des installations ne cesse de chuter, notamment celui des installations
aidées.
Comment ne pas regretter la politique dynamique et interactive du précédent
gouvernement, qui, à travers une véritable charte avec la profession, signée en
1995, avait provoqué une augmentation de plus de 10 % du nombre des
installations ?
Je souhaite également signaler que, lors de l'examen du volet agricole du
projet de loi de finances pour 2000, à l'Assemblée nationale, le 17 novembre
dernier, les députés se sont prononcés en faveur de la disparition du fonds
pour l'installation en agriculture au profit du fonds de financement des CTE,
et ce en dépit de la forte mobilisation des jeunes agriculteurs, ces derniers
mois, en faveur du maintien du FIA.
Une grande partie des actions locales en faveur de l'installation, menées dans
le cadre des programmes pour l'installation des jeunes agriculteurs et le
développement des initiatives locales, les PIDIL, et financées par le FIA,
semble ainsi aujourd'hui remise en cause. Sont concernés, en particulier, le
repérage des exploitants sans successeurs, l'inscription des exploitations sans
successeurs au répertoire et le parrainage d'un jeune pour favoriser
l'installation hors du cadre familial.
La disparition de ces actions, alors qu'elles donnent des résultats concrets
et encourageants, remet en cause les moyens mobilisés en faveur de
l'installation et nie les efforts réalisés depuis la charte nationale pour
l'installation.
Une telle décision affecterait de plein fouet les départements de montagne où
l'installation des jeunes hors du cadre familial constitue l'une des seules
voies possibles pour parvenir au renouvellement des générations au sein de la
famille agricole.
Par ailleurs, il est important de rappeler, comme l'a fait notre collègue Yves
Rispat, que les CTE ont vocation à régler non pas la problématique de
l'installation, mais celle du développement des exploitations agricoles.
Il est donc essentiel que la ligne budgétaire du FIA soit maintenue.
Pour ces motifs, j'ai cosigné deux amendements visant à réduire les crédits
sur le chapitre 44-84, article 10, relatif au fonds de financement des contrats
territoriaux d'exploitation. Ces diminutions concernent, d'une part, 155
millions de francs, afin d'allouer cette somme au chapitre 44-41, article 21,
relatif à la dotation d'installation aux jeunes agriculteurs, et, d'autre part,
145 millions de francs, afin d'affecter cette somme au chapitre 44-41, article
27, relatif au fonds pour l'installation en agriculture.
Monsieur le ministre, je crois que vous ne souhaitez pas ce transfert, jugeant
que le reliquat permettra de poursuivre les actions existantes. Cependant, vous
le savez, les crédits inscrits ne suffiront pas.
De surcroît, en 2001 et pour les années suivantes, comment seront financées
ces actions d'accompagnement de l'installation ?
S'agissant du volet « environnement » des CTE, je regrette que, dans les
mesures envisagées, on se refuse à prendre en compte l'existant naturel qui, à
l'évidence, mérite d'être préservé en l'état et impose des mesures nouvelles
qui ne peuvent que consacrer une situation acquise au prix d'efforts et de
difficultés.
Monsieur le ministre, vous devez tenir compte de l'hétérogénéité des
territoires et des situations. En effet, comment comparer la situation d'un
agriculteur breton ou briard et celle d'un agriculteur de zone de montagne ?
Pour conclure, je vous serais reconnaissant, monsieur le ministre, vous
adressant à des agriculteurs dont vous connaissez le bon sens et le goût du
concret, de privilégier les réalités de terrain plutôt que les vérités de
bureau. Tel est le sens de mon message.
(Bravo ! et applaudissements sur les
travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union
centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Othily.
M. Georges Othily.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cette
intrusion inhabituelle d'un élu d'outre-mer dans un débat traditionnellement
métropolitain dans cette enceinte n'a pas pour ambition d'analyser ce budget de
l'agriculture pour 2000. Je souhaite simplement vous exposer brièvement,
monsieur le ministre, les préoccupations des agriculteurs guyanais, en vous
demandant de bien vouloir répondre à leurs interrogations.
En premier lieu, le financement des contrats territoriaux d'exploitation
appelle quelques observations pour la Guyane.
Bien qu'aucun CTE n'y ait encore été contractualisé, cet outil pourrait
trouver là une application utile, par exemple dans les zones de productions
maraîchères et arboricoles intensives de Cacao et Javouhey occupées aujourd'hui
par les Hmongs ou encore dans le programme intégré d'aménagement des savanes de
Sinnamary et d'Iracoubo pour notre projet sucrier.
Ces futurs CTE seront financés en partie par le prélèvement sur les aides
directes perçues par les agriculteurs au titre de la PAC. Comment le
Gouvernement envisage-t-il l'application du dispositif de modulation, récemment
présenté aux exploitations familiales guyanaises ?
Comme vous le savez, l'agriculture outre-mer bénéficie, en plus des aides PAC,
d'aides compensatoires dans le cadre du programme de rattrapage structurel
POSEIDOM, le programme d'options spécifiques à l'éloignement et à l'insularité
des départements d'outre-mer. En Guyane, les principaux bénéficiaires en sont
les éleveurs. Ces compléments seront-ils inclus dans l'assiette des aides
directes entraînant la modulation ?
Une telle hypothèse équivaudrait à reprendre d'une main ce que l'Europe donne
de l'autre, alors même que celle-ci vient de confirmer le bien-fondé des
mesures particulières aux régions ultrapériphériques. Sortant à peine des
soubresauts du « plan vert », de nombreuses exploitations encore fragiles sont
susceptibles d'être touchées par une telle modulation aveugle et uniforme.
L'autre point sur lequel j'aimerais avoir votre sentiment, monsieur le
ministre, concerne le projet sucrier auquel les agriculteurs et les élus
guyanais apportent leur soutien.
Ce projet agro-industriel moderne vise un objectif de production de 60 000
tonnes de sucre sur un espace foncier aménagé de 10 000 hectares situé dans
l'ouest de la Guyane. Toutes les études engagées ont prouvé la viabilité du
projet. Pourquoi celui-ci est-il toujours bloqué alors que le Gouvernement
devait procéder à un arbitrage avant la fin du mois de septembre ?
Monsieur le ministre, nous ne demandons pas un assistanat supplémentaire, bien
au contraire ; nous revendiquons seulement un droit à produire. Dans ce
contexte, il est demandé à l'Etat de mettre à disposition les quotas
nécessaires à l'écoulement de la production sucrière sur le marché
communautaire et de faire son affaire de l'aménagement foncier des espaces à
mettre en culture.
Je me permets d'insister auprès de vous aujourd'hui pour que soit prise, sans
délai, une décision définitive, afin que ce projet puisse être inscrit au
contrat de plan 2000-2006, dont la signature doit intervenir avant la fin de
l'année. Permettez-moi de développer deux autres arguments pour vous en
convaincre.
La mise à disposition de 45 000 tonnes de sucre de quotas A sur les 200 000
tonnes, quotas encore actuellement flottants attribués à la région des DOM, est
suffisante pour démarrer l'activité. Une telle décision est aujourd'hui sans
risque, car elle ne deviendra effective qu'à la mise en marche de l'usine. Dans
le cas où l'ingénierie du détail et l'étude d'impact du projet s'avéreraient
négatives, ces quotas resteraient disponibles.
Par ailleurs, le nécessaire développement du secteur agricole de la Guyane
appelle, dans tous les cas, la réalisation d'un aménagement foncier des
savanes, quel que soit le type de culture envisagé. Si le projet sucrier devait
se développer sur ces nouvelles surfaces, les agriculteurs guyanais en
bénéficieraient, disposant alors de plus de 2 000 hectares.
Pour conclure, j'évoquerai simplement un chiffre pour m'étonner des disparités
existantes dans le traitement social de l'activité agricole : en Guyane, une
retraite de chef d'exploitation atteint 500 à 1 000 francs, alors que, sur le
continent, elle est au minimum de 2 200 francs.
Je vous remercie, monsieur le ministre, des précisions que vous apporterez à
tous ces points.
(Applaudissements sur les travées du RDSE, du RPR, des
Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à Mme Yolande Boyer.
Mme Yolande Boyer.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme
Jean-Marc Pastor l'a annoncé, j'interviendrai essentiellement sur le projet de
budget « pêche » que vous nous proposez, monsieur le ministre : en augmentation
de 2,3 % par rapport à celui de l'an passé, il s'élève à plus de 190 millions
de francs.
En matière d'investissement, l'augmentation de 10,4 % permettra d'assurer la
modernisation et le renouvellement de notre flotte de pêche.
Je rappelle d'ailleurs, en ce début d'intervention, l'importance économique du
secteur de la pêche en France : selon les modes de calcul, ce sont entre 17 000
et 25 000 pêcheurs, une production d'environ 800 000 tonnes et un chiffre
d'affaires de 9 milliards de francs.
Je rappelle aussi que la France possède les plus grandes façades maritimes et
le plus grand nombre de ports de pêche de l'Union européenne. J'indiquerai au
passage que ma région, la Bretagne, compte 35 % des emplois nationaux dans ce
domaine.
Je souhaite replacer ce projet de loi de finances dans le contexte actuel.
Nous connaissons la situation fragile de la pêche, due à des phénomènes
conjoncturels : coûts, niveau des cours, état de la ressource, même si la santé
économique des entreprises s'est rétablie après la crise terrible des années
1993-1994.
Nous sommes, par ailleurs, dans un contexte institutionnel particulier, avec
la mise en place de la loi d'orientation, les modifications des règlements
européens concernant les actions structurelles, l'organisation commune des
marchés, enfin, les réflexions en cours, qui aboutiront à la révision de la
politique commune de pêche prévue pour 2002.
La présentation de ce projet de budget intervient, en outre, dans un contexte
de demande intérieure en constante augmentation, qui se traduit par une
progression de 24 % des importations en 1998. Il est donc essentiel de relancer
l'activité pêche dans notre pays. Pour ce faire, nous avons des outils, en
particulier l'OFIMER.
La transformation du FIOM en un office de type agricole est un axe majeur de
la loi d'orientation sur la pêche de 1997. Cet office doit permettre de
développer un véritable outil de filière pour favoriser le dialogue entre amont
et aval et pour contribuer à l'amélioration de la qualité des produits et à
leur promotion.
Toutefois, le montant de la subvention est simplement maintenu à hauteur de
95,6 millions de francs. Vu le rôle qu'est appelé à jouer cet office, on peut
regretter cette stagnation.
Je sais, par ailleurs, qu'il est impossible de parler de relance de la pêche
sans se situer dans le contexte européen et sans souligner l'indispensable
adaptation de la capacité des outils à la ressource. En effet, la préservation
des écosystèmes marins est une condition
sine qua non
du maintien d'une
activité durable de pêche maritime.
Les programmes d'orientation pluriannuels ont précisément pour objet
d'instaurer un équilibre à long terme entre l'effort de pêche et les ressources
disponibles.
Le plan de sortie de flotte d'envergure, mis en place en 1998 et conforté par
la contribution des régions, a permis d'engager une reprise mesurée des
investissements avec l'ouverture d'une enveloppe « kilowatts ».
Sur le plan européen, nous pouvons vous féliciter, monsieur le ministre, pour
les résultats que vous avez obtenus au dernier Conseil des ministres européens
de la pêche, le 23 novembre dernier. La France a marqué des points en obtenant
la possibilité d'un renouvellement à l'identique sur les segments à jour des
objectifs annuels jusqu'en 2006. Ainsi, la règle absolue des 130 % sur laquelle
s'appuyait la Commission étant inacceptable pour la France, vous avez obtenu
que chaque segment soit examiné à part et ne paie pas pour les autres.
Une autre mesure peut être portée à votre actif : les jeunes pêcheurs pourront
obtenir des subventions publiques pour acheter leur premier bateau, de même que
les organisations de producteurs qui mettent en place des mesures pour
améliorer la qualité de leur production.
Le dossier de la casse de bateaux, en application des plans de sortie de
flotte, m'amène à évoquer un aspect qui me tient à coeur.
Au lieu de détruire les bateaux, des pêcheurs, des associations se proposent
de les destiner à des pays en développement. Mais la réglementation est
extrêmement stricte. La réponse des pouvoirs publics est invariablement la même
: « comment peut-on faire autrement ? »
Or cette proposition d'action de coopération envers des hommes et des femmes
vivant dans des pays qui n'ont ni les mêmes chances ni les mêmes atouts que
nous me semble être un devoir pour les pays riches. Je sais que, fiscalement,
cela pose de gros problèmes et que les règlements de la politique des pêches
privilégient la casse des outils au détriment de l'aide humanitaire. Pourtant,
cela relève d'une philosophie de l'aide aux pays en développement : donner les
outils pour permettre le développement et ne pas imposer son aide, sa culture,
sa façon de faire.
La Commission peut-elle être sensible à de tels arguments ? Comment
pouvez-vous les faire valoir, monsieur le ministre.
La pêche, ce sont des bateaux à préserver, à construire, bien sûr, mais ce
sont aussi des hommes et des femmes qui travaillent dans des conditions souvent
difficiles, parfois, malheureusement, au péril de leur vie.
Vous avez déclaré, monsieur le ministre, qu'avec une ressource naturelle
quantifiée le métier a de beaux jours devant lui s'il joue la carte de la
traçabilité, de la qualité, de la valeur ajoutée. Certes, mais encore faut-il,
pour donner envie à ces jeunes de se lancer dans ce dur métier, qu'ils puissent
bénéficier de conditions de travail comparables à celles d'autres travailleurs.
Je pense, bien sûr, à la réduction du temps de travail.
La loi du 13 juin 1998 avait exclu le secteur de la pêche, mais la circulaire
du 4 mars 1999 a prévu des dispositions spécifiques pour les entreprises de
pêche qui pratiquent la rémunération à la part. Quelques accords ont été
conclus dans ce cadre. Ils ont permis une réduction du temps de travail pour
des marins qui pouvaient travailler jusqu'à trois cents jours par an.
C'est une avancée sociale importante qui permet plus de présence dans la
famille, évite une fatigue trop grande et, il faut l'espèrer, diminuera le
nombre d'accidents en mer.
Je souhaiterais que vous précisiez la démarche que vous comptez adopter,
monsieur le ministre, pour adapter ce mouvement au secteur de la pêche.
Je pense, aussi à la situation des conjointes d'artisan pêcheur ou pêcheur
associé. Je plaide pour qu'elles puissent accéder aux formations réservées aux
artisans pêcheurs et pêcheurs associés.
Je pense, plus généralement, à la formation, qui est un autre aspect essentiel
pour le métier, notamment en ce qui concerne l'installation des jeunes. J'ai
rencontré des professionnels qui se prononcent pour la création d'un véritable
baccalauréat professionnel « secteur pêche » ; ils insistent également sur la
nécessité impérieuse de sensibiliser les jeunes aux problèmes des ressources
biologiques et de la qualité des produits.
Je terminerai en faisant un certain nombre de constats et en posant quelques
questions.
Le prix du carburant, qui est une question d'actualité, a doublé en un an.
Certes, il est détaxé, mais de 0,75 franc le litre à la coopérative de
Concarneau au début de l'année, il atteint aujourd'hui près de 1,60 franc. Les
bateaux en consomment des quantités importantes. Cette augmentation a donc des
conséquences à la fois sur le salaire des matelots et sur l'équilibre financier
des entreprises. C'est un constat. Je sais bien que vous n'avez guère de prise
sur ce point, mais il s'agit de prendre en compte ce paramètre lorsque l'on
considère les problèmes de la pêche.
En ce qui concerne les suites de la loi d'orientation sur la pêche maritime et
les cultures marines, permettez-moi d'exprimer quelques interrogations.
Un audit est prévu sur la bande côtière par l'article 13 de la loi. Quand
sera-t-il disponible ?
Le décret relatif à la pêche à pied n'est toujours pas paru. Qu'en est-il ?
Les contrats territoriaux d'exploitation prévus pour les ostréiculteurs et les
conchyliculteurs sont-ils en bonne voie ?
Une mission sur les perspectives des pêches maritimes françaises a été créée.
Comptez-vous y associer la représentation nationale ?
Pour conclure sur cet aspect de la pêche, monsieur le ministre, j'insisterai
sur l'importance de la présidence française de l'Union européenne, à compter du
second semestre 2000, pour faire évoluer les questions relatives à la pêche.
C'est l'occasion de réaffirmer, comme vous avez su le faire récemment, nos
positions en vue des échéances de 2002 sur le politique commune des pêches.
C'est le moment de réaffirmer notre position forte sur le contrôle des quotas.
C'est enfin aussi l'occasion de réaffirmer que, pour la France, la pêche fait
partie des points durs des négociations de l'OMC.
C'est avec conviction que le groupe socialiste votera votre projet de budget.
Nous vous faisons confiance, monsieur le ministre, pour poursuivre la politique
engagée, car nous connaissons votre détermination à faire en sorte que la
France maintienne une activité de pêche dynamique.
Elue bretonne, je ne peux quitter cette tribune sans évoquer la crise, très
grave, que traverse l'agriculture bretonne. Vous avez pris des engagements et
mis en place des mesures d'urgence, ce qui témoigne de l'attention que vous
portez à cette agriculture. Nous comptons sur votre vigilance et sur votre
soutien.
De façon plus optimiste, j'évoquerai la forte revalorisation des crédits
destinés au remplacement des agricultrices en congé de maternité. Cela souligne
la volonté du Gouvernement de supprimer les inégalités qui existent encore
entre les femmes, selon leurs activités professionnelles. J'y suis d'autant
plus sensible qu'à l'occasion de la discussion du projet de loi d'orientation
agricole, j'avais présenté, au nom du groupe socialiste, un amendement allant
en ce sens.
(Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
Mes chers collègues, à la demande de M. le ministre, nous allons interrompre
nos travaux pendant quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures cinq, est reprise à douze heures
dix.)