Séance du 16 décembre 1999
M. le président. La parole est à M. About.
M. Nicolas About. Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'Etat à l'industrie et concerne l'avenir de France Télécom, c'est-à-dire son développement à l'international, qui constitue la garantie de son maintien parmi les grands opérateurs mondiaux de télécommunications.
France Télécom vient de subir un échec cuisant sur le marché allemand, dans sa tentative de prise de contrôle du numéro 3 de la téléphonie mobile outre-Rhin.
C'est le deuxième échec de France Télécom en Allemagne, après sa séparation d'avec Deutsche Telekom. Or l'Europe est au coeur de la stratégie de France Télécom, notamment l'Allemagne, premier partenaire économique de la France et premier marché européen des télécommunications.
Ces revers sont graves pour l'opérateur public, dont le capital, je le rappelle, est détenu à plus de 60 % par l'Etat.
Depuis quelques années, le marché des télécommunications s'est, en effet, accéléré, et des opérations gigantesques de plusieurs milliards d'euros sont réalisées. Cela s'explique notamment par l'essor du marché du téléphone mobile, qui va devenir l'un des premiers supports d'accès au commerce électronique.
Les fusions et acquisitions se font à des niveaux de plus en plus élevés, à l'avantage de groupes fortement capitalisés pour lesquels il est plus facile de procéder à des échanges d'actions. Or la part prépondérante de l'Etat dans le capital de France Télécom empêche l'opérateur français de recourir à cette solution.
Dans ces conditions, monsieur le secrétaire d'Etat, comment France Télécom peut-elle rester à l'écart d'une telle dynamique ?
Plus précisément, comment France Télécom pourra-t-elle disposer des moyens nécessaires à sa croissance sans passer par un désengagement significatif de l'Etat ? Son statut, en effet, est aujourd'hui un handicap à son développement.
A ce titre, vous avez déclaré, voilà quelques mois, que vous étiez prêt à « aller pas à pas vers l'ouverture de la concurrence ».
Je vous demande, monsieur le secrétaire d'Etat, si la progression au rythme de l'escargot est encore de mise et si, par votre attentisme, vous ne faites pas courir un grand risque à France Télécom, qui devra payer plus cher encore sa prochaine tentative d'acquisition. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie. Monsieur le sénateur, en effet, l'évolution des opérations de France Télécom en Allemagne a été marquée récemment non pas par l'échec de cette entreprise mais par l'échec de la tentative de Deutsche Telekom de se rapprocher de l'entreprise italienne Telecom Italia. Cette évolution pose également en des termes nouveaux le problème de la participation croisée de 2 % que France Télécom a acquise dans Deutsche Telekom et que Deutsche Telekom a acquise dans France Télécom.
Comme c'était d'ailleurs indiqué en filigrane de votre question, France Télécom est, en effet, une grande réussite technologique. C'est aujourd'hui le premier opérateur de téléphonie mobile en France et l'une des dix premières entreprises mondiales du secteur pour l'ensemble de ces opérations.
Cette réussite doit beaucoup à la qualité de ses équipes.
Sa capitalisation boursière est aujourd'hui l'une des premières du marché de Paris.
Enfin, grâce à ses moyens propres, elle est capable aujourd'hui d'être présente sur des marchés européens, en Grande-Bretagne, en Allemagne, en Pologne et dans les autres pays de l'Est, bref, sur beaucoup de marchés, grâce à des résultats qui sont considérables.
Cette réussite est d'autant plus remarquable que la conjoncture mondiale est marquée, comme vous le signaliez, par un certain dérèglement dans les acquisitions ce qui pousse les différents opérateurs à se livrer une véritable guerre. C'est qu'un client, aujourd'hui, peut représenter jusqu'à 50 000 francs ou 70 000 francs pour un opérateur mobile ! C'est, vous en conviendrez, au-delà du raisonnable.
Dans ce contexte, le Gouvernement français n'envisage pas de faire évoluer la situation statuaire de France Télécom. Ce n'est d'ailleurs pas un handicap. En effet, l'opérateur allemand Deutsche Telekom est possédé par des capitaux publics à 60 %, et personne ne s'en plaint comme d'un handicap lorsqu'il s'agit d'évaluer les chances des uns et des autres sur le marché mondial. Ce n'est donc pas plus un handicap en France qu'en Allemagne !
France Télécom a la capacité de consacrer les investissements nécessaires à assurer son développement et sa présence commerciale et technologique dans le monde entier. Le Gouvernement entend encourager cette entreprise dans la voie de l'internationalisation, de la présence sur l'ensemble des marchés mondiaux, qui est la voie de la réussite, réussite dont, d'ores et déjà, chacun ici se félicite. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
NAUFRAGE DU PÉTROLIER ÉRIKA