Séance du 25 janvier 2000
M. le président. « Art. 21. - En cas d'atteinte grave et immédiate à la sécurité et à la sûreté des réseaux publics de transport et de distribution ou à la qualité de leur fonctionnement, et sans préjudice des pouvoirs reconnus aux gestionnaires de réseaux par les articles 14, 15, 18 et 19 et à la Commission de régulation de l'électricité par l'article 36, le ministre chargé de l'énergie peut d'office ou sur proposition de la Commission de régulation de l'électricité ordonner les mesures conservatoires nécessaires.
« Afin de garantir la sécurité des personnes, la continuité du service public, la sécurité et la sûreté des réseaux publics, la reconstruction des ouvrages et accessoires des lignes de transport et de distribution d'énergie électrique détruits ou endommagés par les tempêtes de décembre 1999 est autorisée de plein droit dès lors que les ouvrages sont situés sur un emplacement identique et ont les mêmes fonctions et des caractéristiques techniques analogues. Cette autorisation est délivrée par le préfet après consultation d'une commission de concertation qu'il préside, dont il arrête la composition et qui comprend notamment des représentants des collectivités territoriales concernées, des distributeurs d'énergie, des associations d'usagers ainsi que des associations qui se consacrent à la protection de l'environnement et du patrimoine. Ces travaux sont dispensés de toute autre autorisation administrative.
« Lorsque le rétablissement d'une ligne existante détruite par ces tempêtes nécessite la reconstruction des supports à des emplacements différents et à proximité immédiate, le préfet peut, après consultation de la commission visée à l'alinéa précédent et nonobstant toute disposition contraire, autoriser l'occupation temporaire des terrains selon les procédures fixées par la loi du 29 décembre 1892 sur les dommages causés à la propriété privée par l'exécution des travaux publics. Cette autorisation ne peut être accordée qu'à la condition que les modifications apportées ne conduisent pas à accentuer l'impact de ces ouvrages sur les monuments historiques et les sites, et que, lorsque les ouvrages ont donné lieu à déclaration d'utilité publique, les nouveaux ouvrages soient implantés, à proximité immédiate des anciens, à l'intérieur des périmètres délimités par la déclaration d'utilité publique. Pendant la durée d'occupation temporaire, ces travaux sont dispensés de toute autre autorisation administrative.
« Les ouvrages réalisés selon les dispositions de l'alinéa précédent ne pourront être maintenus que s'ils font l'objet d'autorisations délivrées dans le cadre des procédures de droit commun dans un délai maximum de deux ans en ce qui concerne le réseau public de transport et au plus tard au 31 décembre 2000 en ce qui concerne les réseaux de distribution publics d'énergie.
« Les travaux réalisés en urgence à compter du 26 décembre 1999 et jusqu'à l'entrée en vigueur de la présente loi sont réputés avoir été exécutés conformément aux dispositions des trois alinéas précédents. »
Sur l'article, la parole est à M. Lefebvre.
M. Pierre Lefebvre. Face à la situation exceptionnelle résultant des tempêtes, le Gouvernement a décidé, en accord avec les députés, d'instaurer un régime dérogatoire au droit commun, pour accéléter la reconstruction des lignes du réseau électrique.
Dès lors qu'elle répond à une urgence, cette disposition législative est compréhensible et ne sera pas contestée.
C'est donc moins sur la procédure que je souhaite intervenir que sur les objectifs affichés par ce texte.
Il est, en effet, prévu de reconstruire à l'identique les réseaux publics de transport et de distribution d'électricité ou, le cas échéant, à « proximité immédiate » des anciens ouvrages détruits.
Or, nous avons pu le constater, il se peut que certaines lignes méritent d'être déplacées, pour contourner un espace boisé, ou un rapprochement des pylônes peut se révéler nécessaire pour consolider l'installation.
La rédaction actuelle de cet article précise que le périmètre à l'intérieur duquel les nouveaux ouvrages seront implantés est délimité par la déclaration d'utilité publique.
Ce cadre n'est-il pas trop rigide si les distributeurs d'énergie estiment souhaitable de déplacer de plusieurs centaines de mètres une ligne électrique ? L'intervalle entre les pylônes pourra-t-il être revu et modifié en conséquence ?
Notre souci, vous le comprenez, est d'éviter de reproduire certaines erreurs commises par le passé sur l'emplacement des lignes et, surtout, d'éviter que notre réseau ne soit exposé aux mêmes dangers.
S'il se confirme, dans les prochaines années, que les changements climatiques constatés doivent se répéter, il est évident que la structure de nos réseaux de transport et de distribution devra être adaptée, consolidée. A cet égard, l'enfouissement des lignes est un élément de réponse parmi d'autres.
La difficulté pour EDF et les distributeurs est, à la fois, d'assurer dans l'immédiat l'approvisionnement des usagers, mais aussi, à plus long terme, de sécuriser les ouvrages et de les protéger des phénomènes semblables à ceux que nous venons de vivre.
Aussi, avant de voter cet article, des précisions sont nécessaires, me semble-t-il, sur les problèmes que je viens d'évoquer.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 51, M. Revol propose, au nom de la commission, dans la deuxième phrase du deuxième alinéa de l'article 21, après les mots : « des collectivités territoriales concernées, », d'insérer les mots : « des autorités concédantes de la distribution publique d'électricité visées à l'article 2224-31 du code général des collectivités territoriales, des distributeurs non nationalisés visés à l'article 23 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 précitée et des collectivités organisatrices de la distribution publique d'électricité les ayant constitués, ».
Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 40 est présenté par MM. Besson, Weber, Pastor, Bellanger et les membres du groupe socialiste et apparentés.
L'amendement n° 41 rectifié est proposé par Mme Bardou, MM. Louis Mercier et Pintat.
Tous deux tendent, dans la deuxième phrase du deuxième alinéa de l'article 21, après les mots : « des représentants des collectivités territoriales concernées, », à insérer les mots : « des autorités concédantes visées à l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales, ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 51.
M. Henri Revol, rapporteur. Il s'agit de préciser la place des autorités concédantes et des distributeurs non nationalisés dans les commissions de concertation prévues à l'article 21.
M. le président. La parole est à M. Besson, pour présenter l'amendement n° 40.
M. Jean Besson. Je voudrais attirer l'attention de M. le secrétaire d'Etat sur les conséquences pratiques de la procédure prévue par l'article 21. En particulier, il serait souhaitable que cette procédure qui se veut simplifiée pour permettre un rétablissement plus rapide du réseau n'aboutisse pas à l'effet contraire pour des travaux de lignes inférieures à un kilomètre, pour lesquelles il existe une procédure spécifique.
Pour de tels travaux, du moins en attendant que le préfet ait arrêté la composition de cette commission, la procédure d'autorisation prévue à l'article 49 du décret du 27 juillet 1927 modifié peut être plus rapide, le délai d'instruction étant seulement de trois semaines.
Dans ces conditions, monsieur le secrétaire d'Etat, il serait souhaitable que le Gouvernement précise que la procédure exceptionnelle prévue à l'article 21 ne sera pas systématiquement imposée au maître d'ouvrage des travaux de l'électrification - EDF, collectivités concédantes, régies, etc. - et qu'il sera toujours possible de mettre en oeuvre la procédure susvisée sans soumettre préalablement le projet au préfet qui consultera ensuite la commission.
Cela étant dit, le groupe socialiste se rallie à l'amendement que M. le rapporteur vient de présenter et il retire donc l'amendement n° 40.
M. le président. L'amendement n° 40 est retiré.
La parole est à Mme Bardou, pour défendre l'amendement n° 41 rectifié.
Mme Janine Bardou. Cet amendement allant dans le sens de l'amendement de la commission, je le retire au profit de celui qui a été présenté par M. le rapporteur. Il s'agit de permettre aux autorités concédantes de participer aux travaux de la commission de concertation, puisque cela s'inscrit dans le droit-fil des compétences qui sont reconnues à celle-ci par l'article 17 du projet de loi.
M. le président. L'amendement n° 41 rectifié est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 51 ?
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. J'ai déjà annoncé lors de la nouvelle lecture à l'Assemblée nationale, lorsque j'ai présenté l'amendement au nom du Gouvernement, que les collectivités territoriales seraient majoritaires au sein des commissions réunies par les préfets pour traiter de la reconstruction ou de la réparation des lignes. C'est d'ailleurs à la demande de députés issus de tous les groupes que j'ai fait cette réponse et accepté de modifier l'amendement présenté par le Gouvernement.
Il faut rappeler que, dans les procédures de droit commun, les avis des représentants des collectivités, notamment ceux des maires, sont toujours requis. Il est donc légitime d'associer les collectivités locales aux travaux de ces commissions. En ce qui concerne les autorités concédantes, leur représentation au sein de celles-ci est déjà largement assurée par la procédure du droit commun que nous connaissons. S'agissant des distributeurs non nationalisés et d'EDF, leur participation est prévue par le même alinéa, sous les termes « distributeurs d'énergie ».
En tout état de cause, il appartient au préfet de chaque département de fixer, en fonction des spécificités locales, la composition qu'il jugera la plus adaptée aux réalités départementales s'agissant de la commission dont nous examinons la création. Je pense que l'on peut faire confiance aux préfets pour avoir une position qui « colle » à la réalité, qui permette ainsi la représentation de tous. Conformément à la loi, si vous acceptez ce texte qui, je le rappelle, a été voté à l'unanimité par l'Assemblée nationale, les collectivités locales seront majoritaires au sein de la commission.
Je réponds brièvement à M. Besson, qui a soulevé la question des petites lignes. S'agissant du régime de simple déclaration ou de l'absence de permis de construire, qui est la situation réglementaire des petites lignes de distribution, ces procédures simplifiées et plus rapides pourront être mises en oeuvre à la place de la procédure dérogatoire prévue par l'article 21.
Monsieur le rapporteur, puisque vous avez satisfaction et comme M. Besson s'est rallié à votre amendement, je vous demande de bien vouloir retirer ce dernier. En effet, le texte adopté à l'unanimité par l'Assemblée nationale est satisfaisant à cet égard.
M. le président. Monsieur le rapporteur, l'amendement n° 51 est-il maintenu ?
M. Henri Revol, rapporteur. Oui, monsieur le président. La plupart des intervenants au sein de la commission des affaires économiques ainsi que les auteurs d'amendements souhaitent - nous n'avons en effet pas aussi confiance que vous en nos préfets, monsieur le secrétaire d'Etat, même si nous les respectons - que les collectivités concédantes, les distributeurs non nationalisés et les syndicats d'électrification soient nommément visés. Dans certains départements, en effet, on pourrait supposer que le préfet désigne des représentants des collectivités locales concernées, notamment un certain nombre de maires, en passant par l'association des maires de France, mais que ce ne soient pas forcément les plus compétents qui soient choisis.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 51.
M. Ladislas Poniatowski. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Poniatowski.
M. Ladislas Poniatowski. Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez raison : a priori, nous avons tendance à faire confiance aux préfets pour le choix des personnes qu'ils nommeront au sein de cette commission de concertation, qui sera une commission consultative. Toutefois, il me paraît préférable, à l'instar de ce que proposent non seulement M. le rapporteur, mais également les sénateurs socialistes et apparentés, ainsi que deux sénateurs Républicains et Indépendants, que les préfets, même si nous leur faisons confiance, soient obligés de désigner des autorités concédantes comme membres de cette commission.
Dans certains départements, ces autorités concédantes sont en effet très importantes - il s'agit parfois de syndicats regroupant la totalité des communes d'un département et engageant plusieurs centaines de millions de francs de travaux de renforcement ou d'enfouissement - et on ne peut donc pas prendre le risque de les écarter. Par conséquent, mieux vaut que la loi prévoie leur présence dans ces commissions, conformément à la position qu'ont très bien défendue les auteurs des trois amendements. Je vous invite donc à vous rallier à cette proposition, monsieur le secrétaire d'Etat.
Par ailleurs, lorsqu'une reconstruction à l'identique des réseaux ou des installations - les poteaux basse, moyenne ou haute tension - est envisagée, la procédure se limite à juste titre à la consultation de cette commission de concertation. En effet, il faut une certaine souplesse pour pouvoir agir vite.
Selon l'estimation réalisée par EDF, le montant de la réparation de tout le réseau et de tous les poteaux à la suite de la tempête s'élève, aujourd'hui, à 17 milliards de francs - mais le chiffre va encore augmenter. Sur cette somme, 4 milliards de francs à 5 milliards de francs concernent les réparations dites « d'urgence », faites à l'identique, et visées par l'article 21.
Cependant, monsieur le secrétaire d'Etat, j'en reviens à la question de ce matin, à laquelle j'aimerais bien que vous répondiez : quand on peut faire mieux qu'une reconstruction à l'identique, il faut le faire. Dès lors, ce n'est plus l'article 21 qui s'applique. En effet, dès qu'une modification est prévue - l'enfouissement de la ligne, au lieu de la reconstruction d'une ligne aérienne, par exemple - ce n'est plus la même installation, et il est donc normal que l'on en revienne à la procédure habituelle de construction d'une installation électrique, quelle que soit son importance. Dans ces conditions, j'ai très peur que l'article 21 ne soit une incitation à reconstruire à l'identique.
Dès lors, je considère - et j'aimerais avoir votre approbation à cet égard, monsieur le secrétaire d'Etat - que, s'il faut procéder le plus vite possible à la reconstruction de ce qui est vraiment urgent, il ne faut néanmoins pas se précipiter pour le reste. En effet, mieux vaut, si c'est possible, procéder à l'enfouissement des lignes plutôt que de reconstruire des lignes aériennes qui risqueront de retomber, demain, si une autre tempête survient.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Je ferai deux réponses : l'une à M. Poniatowski, qui vient de réitérer une question très intéressante, posée déjà ce matin, et l'autre en direction du Sénat.
Je suis convaincu que l'argumentation que je développais voilà quelques instants est la bonne ; mais, pour cette raison, c'est-à-dire parce que je sais que les autorités concédantes sont visées par la rédaction actuelle du texte, je m'en remets à la sagesse du Sénat sur l'amendement n° 51.
En effet, monsieur Poniatowski, je ne prône en aucune manière la pure et simple reconstruction à l'identique. Au contraire, je suis un fervent partisan - et je l'ai montré avant la survenue de la tempête - d'un effort supplémentaire, conforme à la convention de 1992 signée entre l'Etat et EDF, en faveur de l'enfouissement d'un certain nombre de lignes.
Le problème se présente de la manière suivante : en basse et en moyenne tensions, l'enfouissement ne pose pas de difficultés techniques et - le Sénat doit en être conscient - ne coûte pas sensiblement plus cher que la réalisation d'une ligne aérienne. Toutefois, les lignes enterrées posent quelques problèmes techniques s'agissant de leur surveillance et de leur entretien, qui sont plus délicats, et des délais de dépannage, qui sont allongés. En outre, elles sont plus vulnérables aux inondations - on l'a vu récemment dans le Sud-Ouest - et aux glissements de terrain, comme on a pu parfois le constater dans l'Aude. Pour le réseau à basse et à moyenne tensions, il est donc nécessaire de procéder plus souvent à l'enfouissement des lignes.
En revanche, s'agissant de la haute tension, l'enfouissement soulève des difficultés techniques et coûte de trois à cinq fois plus cher que la réalisation d'une ligne aérienne.
On réservera donc, en haute tension, l'enfouissement à des cas de protection du paysage, pour des raisons notamment touristiques, ou de protection de l'environnement, cas qui, nécessairement, seront plus réduits à cause du coût.
Pour la très haute tension, il n'existe pas de technologie maîtrisée permettant d'enterrer les lignes en dehors de petits tronçons, comme l'arrivée dans les villes. La plupart des compagnies électriques, dont EDF, développent des programmes de recherche que j'espère voir aboutir rapidement : ce sont les recherches sur les câbles à isolation gazeuse ou sur les câbles à isolation synthétique. Cependant, ces travaux ne sont pas encore complètement mûrs pour que l'on puisse garantir au Parlement la progression de l'enfouissement dans la très haute tension.
Je me suis référé, voilà un instant, au protocole relatif à l'insertion des réseaux électriques dans l'environnement du 25 août 1992 entre l'Etat et EDF. Je demande naturellement à EDF, lors de la reconstruction de ses réseaux, d'aller plus loin que la situation moyenne actuelle, c'est-à-dire une part totale des réseaux souterrains en basse et en moyenne tensions à plus 1 % par an. C'est un peu faible, en effet, et il faut que l'entreprise consente des efforts supplémentaires. C'est d'autant plus vrai que, en moyenne tension, par exemple, le taux d'enfouissement est de 81 % en Belgique, de 61 % en Allemagne, de 32 % en Italie, contre 31 % en France ; il est certes de 5 % seulement en Irlande, mais le niveau de développement de ces pays n'est pas comparable.
En basse tension, le taux d'enfouissement est de 75 % en Allemagne, contre 27 % en France. En dehors des densités de populations - le nombre d'habitants au kilomètre carré est évidemment un indicateur qui explique de telles différences de pourcentages, EDF n'étant pas là en cause - il y a, à mon avis, un effort à réaliser, que M. Poniatowski a eu raison de signaler. C'est pourquoi j'avais, dès décembre 1999, veillé à ce que, dans les zones rurales, le taux de l'aide accordée dans le cadre du FACE, le fonds d'amortissement des charges d'électrification, soit porté de 50 % à 65 % dans les zones à maîtrise d'ouvrage assurée par les collectivités locales.
L'aide accrue à l'enfouissement va permettre une meilleure insertion dans l'environnement et une meilleure résistance aux intempéries des réseaux électriques. Le Sénat aura ainsi satisfaction. Le Gouvernement s'engage, à la suite des rapports que j'ai demandés à l'inspection générale, à ce que l'opérateur historique, en liaison permanente avec le ministère chargé de l'énergie, puisse progresser dans la voie d'une meilleure insertion dans l'environnement et d'une plus grande sécurité pour l'ensemble des réseaux.
M. Raymond Courrière. Très bien !
M. Gérard Cornu. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Cornu.
M. Gérard Cornu. Monsieur le président, j'allais reprocher à M. le secrétaire d'Etat son intransigeance à l'égard de l'amendement n° 51 ! M. le ministre nous dit qu'il fait confiance aux préfets. Nous faisons tous confiance aux préfets ! Ce que nous reprochons à la disposition adoptée par l'Assemblée nationale, c'est de citer les représentants des collectivités territoriales concernées, les distributeurs d'énergie, les associations d'usagers ainsi que les associations se consacrant à la protection de l'environnement et du patrimoine, sans faire référence aux autorités concédantes ; cela nous semble anormal.
Mais je crois, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous avez évolué sur ce point et que vous vous montrez maintenant moins intransigeant, puisque vous vous en êtes finalement remis à la sagesse du Sénat.
Je me félicite donc que le Sénat puisse améliorer la disposition adoptée par l'Assemblée nationale.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?
Je mets aux voix l'amendement n° 51, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. J'observe que cet amendement a été adopté à l'unanimité.
Par amendement n° 46, MM. Lefebvre, Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, dans la deuxième phrase du deuxième alinéa de l'article 21, après les mots : « des distributeurs d'énergie », d'insérer les mots : « et des représentants de leurs salariés ».
La parole est à M. Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Nous comprenons l'opportunité de la disposition ajoutée par l'Assemblée nationale - la constitution des commissions consultatives auprès des préfets - disposition qui, malgré son caractère dérogatoire et exceptionnel, apporte une garantie nécessaire pour éviter des décisions par trop technocratiques, coupées de la réalité du terrain.
Ces commissions seraient composées majoritairement d'élus locaux et des représentants des distributeurs d'énergie, des associations d'usagers et des associations de protection de l'environnement.
Il nous semble toutefois nécessaire de prévoir dans la loi, même si rien n'interdit au préfet de le décider, le cas échéant, l'élargissement de ces structures aux représentants des salariés qui se sont démenés sans compter pour réapprovisionner l'ensemble des foyers privés d'électricité.
Il serait dommage, à mon sens, de se priver de cette expérience d'hommes et de femmes qui ont été, durant plusieurs semaines, les seuls intermédiaires entre certaines populations isolées et la société.
Du reste, les élus locaux ont dû travailler au quotidien avec les agents électriciens pour gérer au mieux cette situation de crise ; il est juste que cette collaboration se poursuive jusque dans ces commissions.
Tel est le sens de cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Henri Revol, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 46, repoussé par la commission et pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 39, MM. Cornu, César et Gerbaud proposent de compléter in fine l'article 21 par trois alinéas ainsi rédigés :
« Afin de garantir la sécurité des personnes et la continuité du service public, la reconstruction ou la réparation des ouvrages appartenant au domaine public endommagés par les tempêtes de décembre 1999 est autorisée de plein droit dès lors qu'ils sont situés sur un emplacement identique et ont les mêmes fonctions et des caractéristiques techniques analogues.
« Cette autorisation est délivrée par le préfet après consultation des collectivités territoriales et locales concernées.
« Cette autorisation passe outre la procédure habituelle des marchés publics. »
La parole est à M. Cornu.
M. Gérard Cornu. Chacun, dans cet hémicycle, a été marqué par la tempête survenue fin décembre 1999, et nous avons tous été d'accord pour accepter, en les complétant, les dispositions adoptées à cet égard par l'Assemblée nationale.
Nous avons maintenant à légiférer sur les problèmes des réseaux électriques. Je voudrais profiter de la discussion de ce texte pour alerter le Gouvernement sur un point bien précis : le problème qui se pose, au-delà des réseaux, est celui des bâtiments publics, qui ont subi de sérieux dommages. Certains élus locaux sont d'ailleurs dépassés par l'ampleur des dégâts au niveau tant financier qu'administratif.
Actuellement, lorsque le montant des travaux est supérieur à 300 000 francs, la procédure des marchés publics doit s'appliquer, ce qui prend automatiquement au moins quatre à cinq mois. Et je n'envisage même pas le cas de marchés infructueux !
Aujourd'hui, il est urgent de procéder aux réparations, d'autant que ce sont les toitures qui ont été touchées, risquant ainsi d'aggraver l'état de délabrement dans lequel se trouvent certains bâtiments publics, qu'il s'agisse de collèges ou de lycées.
Soyons pragmatiques, rendons service à l'ensemble des élus locaux et permettons-leur de passer outre les procédures habituelles des marchés publics : à circonstances exceptionnelles, législation exceptionnelle !
Le Sénat s'honorerait de répondre à cette demande de l'ensemble des élus locaux.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Henri Revol, rapporteur. La commission est très sensible aux arguments de M. Cornu : nous savons que de nombreuses collectivités locales rencontrent beaucoup de difficultés pour reconstruire les ouvrages publics détruits par la tempête.
Toutefois, nous souhaiterions entendre le Gouvernement sur les caractéristiques techniques de la procédure proposée.
La commission s'en remet, en attendant, à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Je comprends, monsieur Cornu, qu'il soit nécessaire d'aller vite. Je suis moi-même maire-adjoint d'une commune où un toit d'école a été soufflé par le vent. Cet établissement scolaire ayant subi de graves dommages, nous devons le reconstruire très rapidement. S'agissant d'un ouvrage public, nous allons donc procéder par marché négocié, avec publicité réduite et délais réduits, mais nous respecterons - c'est indispensable, monsieur le sénateur - le code des marchés publics.
Même si nous avons tous conscience de l'impérieuse nécessité dans laquelle nous nous trouvons de réparer très vite les dommages causés aux ouvrages publics, je ne pense pas qu'il soit sage de sortir du cadre légal, d'autant que le code des marchés publics prévoit explicitement un certain nombre de circonstances exceptionnelles dans lesquelles il est possible de raccourcir les délais et de simplifier les procédures.
Je propose donc au Sénat non seulement de tenir compte des arguments de M. Cornu, qui sont justes, mais aussi de se caler fermement sur le droit positif existant, en appliquant le code des marchés publics et la procédure des marchés négociés.
M. le président. Quel est, dans ces conditions, l'avis de la commission ?
M. Henri Revol, rapporteur. Je souhaiterais connaître la réaction de l'auteur de l'amendement, monsieur le président.
M. le président. Monsieur Cornu, l'amendement n° 39 est-il maintenu ?
M. Gérard Cornu. Je comprends qu'il soit difficile de sortir du cadre légal. Cela dit, en déposant cet amendement, je voulais me faire l'interprète des élus locaux qui risquent de se retrouver dans l'illégalité dans la mesure où ils veulent aller très vite.
Je comprends bien qu'il ne soit pas possible de légiférer dans l'urgence. Néanmoins, monsieur le secrétaire d'Etat, comprenez aussi la détresse des élus ! Vous êtes vous-même élu local et vous avez cité un exemple qui peut s'appliquer à toute la France.
Par ailleurs, il faut savoir qu'il n'est pas facile aujourd'hui de trouver des entreprises pour répondre aux offres de marché. Ainsi, trouver des couvreurs dans la période actuelle relève réellement de l'exploit, car tous sont débordés. Nous sommes donc dans une impasse, et c'est pourquoi j'ai déposé cet amendement : ne serait-il pas possible d'être moins rigides dans la procédure des marchés publics ?
Les élus locaux, qu'on accuse aujourd'hui de tous les maux, se découragent, et la moitié des maires des petites communes ne veulent pas se représenter en 2001. Imaginez leur détresse !
Quoi qu'il en soit, monsieur le secrétaire d'Etat, je comprends bien vos explications et après avoir alerté l'ensemble du Sénat et le membre du Gouvernement que vous êtes, je suis prêt à retirer mon amendement.
M. le président. L'amendement n° 39 est retiré.
M. Henri Revol, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri Revol, rapporteur. M. Cornu a fort bien expliqué ce que nous ressentons tous. Cela étant, monsieur le secrétaire d'Etat, ne serait-il pas possible d'adresser une instruction aux préfets afin qu'ils informent les maires des petites communes au sujet des procédures de simplification que vous avez évoquées ? Certaines communes disposent en effet de services importants et connaissent bien la législation, mais de nombreuses petites communes ne connaissent pas ces procédures.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. M. le rapporteur a raison, et une circulaire est actuellement en cours de rédaction. Elle sera adressée très rapidement aux préfets par le ministère de l'intérieur et par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, afin de préciser les procédures d'application du texte.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article 21, modifié.
(L'article 21 est adopté.)
Article 22