Séance du 9 février 2000






CONVENTION INTERNATIONALE
DE 1989 SUR L'ASSISTANCE

Adoption d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 107, 1999-2000) autorisant l'adhésion du Gouvernement de la République française à la convention internationale de 1989 sur l'assistance. [Rapport n° 167 (1999-2000).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, j'ai l'honneur de soumettre à votre approbation le projet de loi autorisant l'adhésion de la République française à la convention de 1989 portant modification de la convention de 1910 sur l'assistance en mer.
Cette convention a été signée à Londres, le 28 avril 1989, au siège de l'Organisation maritime internationale et est entrée en vigueur le 14 juillet 1996. Son but est de compléter la convention de 1910, qui ne donne pas de définition précise des notions d'assistance et de sauvetage en mer et ne permet donc pas de rémunérer l'assistance qui, sans avoir sauvé le navire, a pu protéger l'environnement.
Les coûts des opérations de lutte contre la pollution se sont accrus du fait de l'amélioration des techniques d'assistance et du recours à des moyens et à des équipements plus importants. Aussi est-il devenu nécessaire de tenir compte, pour le calcul de la rémunération de l'assistance, de la disponibilité, de l'efficacité et de la valeur des matériels spécialisés utilisés. En outre, il convient d'assurer les assistants professionnels de l'obtention d'une indemnité spéciale en cas d'opération destinée à prévenir ou à limiter des dommages à l'environnement, quel que soit le résultat de l'opération d'assistance.
Par rapport à la convention de 1910, deux innovations essentielles sont apportées.
La première est le rappel du droit d'intervention de l'Etat côtier, notamment en ce qui concerne les instructions données par rapport aux opérations d'assistance ;
La seconde réside dans le principe d'une indemnité spéciale due à l'assistant et versée par l'assisté lorsque l'opération a pour objet de prévenir ou de limiter les dommages à l'environnement. Lorsqu'une telle opération conduit à un résultat positif, cette indemnité est augmentée de 30 % à 100 %. Elle correspond aux dépenses réelles, lorsque la rémunération attendue du sauvetage ne couvre pas les dépenses engagées. Elle constitue donc une garantie pour l'assistant.
En revanche, les dispositions du contrat d'assistance sont maintenues, comme l'obligation de porter secours en vue de sauver des vies humaines. De telles opérations n'ouvrent pas droit à une rémunération.
La France, pour sa part, a décidé d'inclure deux réserves à l'application de cette convention, comme le texte l'y autorise.
La première vise à exclure du champ d'application de la convention les biens culturels maritimes qui présentent un intérêt préhistorique, archéologique ou historique, se trouvant au fond de la mer. Cette réserve est justifiée par l'existence d'une législation spécifique en France pour les épaves à caractère archéologique et historique.
La seconde réserve consiste à exclure les eaux intérieures du champ d'application de la convention. En effet, sur le réseau national de voies navigables, l'obligation d'assistance est déjà prévue par le règlement général de police de la navigation intérieure. De même, sur les voies navigables du Rhin et de la Moselle internationale, cette obligation est imposée par le règlement de police pour la navigation du Rhin.
Telles sont, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appelle la convention internationale de 1989 sur l'assistance, faite à Londres le 28 avril 1989, qui est aujourd'hui soumise à votre approbation et sur l'actualité de laquelle il n'est pas nécessaire d'insister.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. André Boyer, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, sans revenir sur l'ensemble du dispositif de la convention de Londres du 28 avril 1989, qui a été exposé par M. le ministre, je concentrerai mon analyse sur ce qui me paraît l'essentiel, c'est-à-dire le souci de protection de l'environnement, qui constitue la principale nouveauté de cette convention.
En effet, jusqu'à présent, le droit de l'assistance était régi au niveau international par la convention de Bruxelles de 1910, qui avait pour objet d'organiser les rapports juridiques entre l'assisté et l'assistant, c'est-à-dire entre le navire en danger de se perdre et le navire qui vient lui porter secours. Comme on le voit, il ne s'agissait que de régir des rapports de droit privé entre deux personnes privées. Cette conception exclusivement privatiste du droit maritime semble insuffisante aujourd'hui.
En effet, depuis 1910, le transport maritime a profondément évolué. Il a crû en volume et, surtout, le transport par voie de mer d'hydrocarbures, de produits chimiques et de toutes sortes de produits dangereux a atteint des quantités telles qu'elles font courir des risques élevés au littoral.
La première grande « marée noire », celle du Torrey Canyon, en 1967, a permis de prendre la mesure du danger, avant que d'autres, tout aussi dramatiques, comme celles de l' Amoco Cadiz, en 1978, de l' Exxon Valdez, en 1989, ou de l' Erika, aujourd'hui, ne rendent indispensables des solutions concrètes.
La convention de 1989 a précisément pour objectif de prévenir ce genre de catastrophe. Pour cela, elle édicte au moins quatre mesures importantes.
La première est la compétence reconnue au capitaine du navire en danger de prendre toutes les décisions utiles pour sauver son bâtiment et sa cargaison au nom de leurs propriétaires respectifs, sans attendre systématiquement leur accord.
Ensuite, la convention légitime l'action de l'Etat côtier pour prévenir une pollution. Si la notion d'« assistance imposée » n'est pas reconnue, la convention fait un pas en avant significatif dans ce sens et conforte en droit international la prise en compte de ses intérêts.
En outre, la convention de 1989 modifie les critères d'évaluation de la rémunération d'assistance. Cette modification vise, d'une part, à mieux rémunérer l'assistant en fonction de l'effort qu'il fournit et des moyens spécifiques qu'il met en oeuvre. D'autre part, elle intègre la protection de l'environnement comme un critère supplémentaire venant accroître la rémunération d'une opération d'assistance qui a réussi.
Enfin, et c'est la principale innovation de la convention, une « indemnité spéciale » est créée. Cette indemnité a pour objectif de pallier l'absence ou de compenser l'insuffisance de la rémunération d'assistance quand celle-ci a échoué ou n'a que partiellement réussi, mais quand l'action de l'assistant a permis de préserver l'environnement. Le plus souvent, elle couvrira tout ou partie des dépenses engagées, mais elle pourra également, si l'assistant le mérite, s'élever au double de ce montant. C'est donc un mécanisme incitatif. Tous les moyens doivent être mis en oeuvre pour éviter une pollution, ils ne doivent pas se trouver limités par le montant espéré de la rémunération d'assistance.
Toutefois, je crois nécessaire de faire deux observations.
En premier lieu, il me semble nécessaire d'approfondir notre réflexion et notre coopération, aussi bien dans le cadre de l'union européenne que dans celui de l'Organisation maritime internationale, pour qu'une solution aussi complète que possible soit trouvée en vue de garantir la sécurité du transport maritime et la protection de l'environnement.
En second lieu, il faudra également faire en sorte que les responsables soient clairement identifiés, car il ne suffit pas de créer une rémunération supplémentaire, il faut aussi que l'assisté soit solvable. Or, trop souvent, il s'agit de navires en mauvais état, battant pavillon de complaisance et au propriétaire inconnu ou insaisissable. Il y a bien là un autre chantier : celui de la réforme de certaines pratiques maritimes, qui, légitimées par une concurrence acharnée, nuisent à la collectivité.
Sous le bénéfice de ces observations, je vous propose, au nom de l'ensemble des membres de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, d'approuver le présent projet de loi, qui autorise l'adhésion à une convention allant dans un sens souhaité par tous. (Applaudissements.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique du projet de loi.
« Article unique. - Est autorisée l'adhésion du Gouvernement de la République française à la convention internationale de 1989 sur l'assistance, faite à Londres le 28 avril 1989, et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

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