Séance du 9 mai 2000
M. le président. « Art. 25. - La section 2 du chapitre II du titre préliminaire du livre III du code de la construction et de l'habitation est ainsi rédigée :
« Section 2.
« Dispositions particulières à certaines agglomérations.
« Art. L. 302-5 . - Les dispositions de la présente section s'appliquent aux communes dont la population est au moins égale à 1 500 habitants en Ile-de-France et 3 500 habitants dans les autres régions qui sont comprises, au sens du recensement général de la population, dans une agglomération de plus de 50 000 habitants comprenant au moins une commune de plus de 15 000 habitants, et dans lesquelles le nombre total de logements locatifs sociaux représente, au 1er janvier de la pénultième année, moins de 20 % des résidences principales, à l'exception de celles comprises dans une agglomération dont le nombre d'habitants a décru entre les deux derniers recensements de la population et qui appartiennent à une communauté urbaine, une communauté d'agglomération ou une communauté de communes compétentes en matière de programme local de l'habitat, dès lors que celui-ci a été approuvé.
« Les logements sociaux retenus pour l'application du présent article sont :
« 1° A. - Les places des centres d'hébergement et de réinsertion sociale agréés par les directions départementales des affaires sanitaires et sociales ;
« 1° B. - Les logements locatifs appartenant aux organismes d'habitations à loyer modéré, à l'exception de ceux construits, acquis ou améliorés à compter du 5 janvier 1977 et ne faisant pas l'objet d'une convention définie à l'article L. 351-2 ;
« 2° Les logements conventionnés dans les conditions définies à l'article L. 351-2 appartenant aux sociétés d'économie mixte et aux autres bailleurs définis au quatrième alinéa de l'article 41 ter de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 tendant à favoriser l'investissement locatif, l'accession à la propriété de logements sociaux et le développement de l'offre foncière ;
« 3° Les logements appartenant aux sociétés d'économie mixte des départements d'outre-mer, les logements appartenant à l'Entreprise minière et chimique et aux sociétés à participation majoritaire de l'Entreprise minière et chimique, les logements appartenant aux houillères de bassin, aux sociétés à participation majoritaire des houillères de bassin ainsi qu'aux sociétés à participation majoritaire des Charbonnages de France ;
« 4° Les logements locatifs sociaux appartenant à d'autres bailleurs et faisant l'objet d'une convention conclue avec l'Etat en application de l'article L. 351-2, pour être mis à la disposition des personnes défavorisées mentionnées à l'article 1er de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en oeuvre du droit au logement et les centres d'hébergement d'urgence ;
« 5° Les logements améliorés avec le concours financier de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat et faisant l'objet d'une convention conclue avec l'Etat en application de l'article L. 351-2 et publiée au fichier immobilier ou inscrite au livre foncier ;
« 6° Les logements foyers dénommés résidences sociales, les foyers de jeunes travailleurs et les foyers de travailleurs migrants.
« Les résidences principales retenues pour l'application du présent article sont celles qui figurent au rôle établi pour la perception de la taxe d'habitation.
« Art. L. 302-5-1 . - Dans les communes situées dans les agglomérations visées par la présente section, les personnes morales, propriétaires de logements sociaux au sens de l'article L. 302-5, sont tenues de fournir chaque année avant le 1er juillet, au préfet du département, un inventaire par commune des logements sociaux dont elles sont propriétaires au 1er janvier de l'année en cours.
« Le défaut de production de l'inventaire mentionné ci-dessus, ou la production d'un inventaire manifestement erroné donne lieu à l'application d'une amende de 10 000 francs recouvrée comme en matière de taxe sur les salaires.
« Le préfet du département communique chaque année à chaque commune visée ci-dessus, avant le 1er octobre, le nombre de logements sociaux décomptés en application de l'article L. 302-5 sur son territoire au 1er janvier de l'année en cours. La commune dispose d'un mois pour présenter ses observations.
« Après examen de ces observations, le préfet notifie avant le 31 décembre le nombre de logements sociaux retenus pour l'application de l'article L. 302-5.
« Art. L. 302-6 . - A compter du 1er janvier 2002, il est effectué chaque année un prélèvement sur les ressources fiscales des communes visées à l'article L. 302-5, à l'exception de celles qui bénéficient de la dotation de solidarité urbaine prévue par l'article L. 2334-15 du code général des collectivités territoriales, lorsque le nombre des logements sociaux y excède 15 % des résidences principales.
« Ce prélèvement est égal à 1 000 francs multipliés par la différence entre 20 % des résidences principales au sens du I de l'article 1411 du code général des impôts et le nombre de logements sociaux existant dans la commune l'année précédente, comme il est dit à l'article L. 302-5, sans pouvoir excéder 5 % du montant des dépenses réelles de fonctionnement de la commune constatées dans le compte administratif afférent au pénultième exercice. Les communes seront dispensées du versement de ce prélèvement au prorata du nombre de logements présenté dans chaque dossier de réalisation de logements déposé en bonne et due forme auprès des services de l'Etat, qui auront reçu un avis favorable de financement et qui n'auront pas pour autant fait l'objet d'un financement effectif de la part de ce dernier.
« Pour toutes les communes dont le potentiel fiscal par habitant défini à l'article L. 2334-4 du code général des collectivités territoriales est supérieur à 5 000 francs l'année de la promulgation de la loi n° du janvier relative à la solidarité et au renouvellement urbains, ce prélèvement est fixé à 20 % du potentiel fiscal par habitant multipliés par la différence entre 20 % des résidences principales au sens du I de l'article 1411 du code général des impôts et le nombre de logements sociaux existant dans la commune l'année précédente, comme il est dit à l'article L. 302-5, sans pouvoir excéder 5 % du montant des dépenses réelles de fonctionnement de la commune constatées dans le compte administratif afférent au pénultième exercice.
« Le seuil de 5 000 francs est actualisé chaque année suivante en fonction du taux moyen de progression du potentiel fiscal par habitant de l'ensemble des communes de plus de 1 500 habitants.
« Le prélèvement n'est pas effectué s'il est inférieur à la somme de 25 000 francs.
« Le prélèvement est diminué du montant des dépenses exposées par la commune, pendant le pénultième exercice, au titre des subventions foncières mentionnées à l'article L. 2254-1 du code général des collectivités territoriales, des travaux de viabilisation des terrains mis ensuite à disposition pour la réalisation de logements sociaux et des moins-values correspondant à la différence entre le prix de cession de terrains donnant lieu à la réalisation effective de logements sociaux et leur valeur vénale estimée par le service du domaine.
« Le produit de la taxe foncière sur les propriétés bâties, de la taxe foncière sur les propriétés non bâties, de la taxe d'habitation et de la taxe professionnelle inscrit à la section de fonctionnement du budget des communes soumises au prélèvement institué au présent article est diminué du montant de ce prélèvement. Celui-ci est imputé sur les attributions mentionnées au premier alinéa de l'article L. 2332-2 du code général des collectivités territoriales.
« Lorsque la commune appartient à une communauté urbaine, à une communauté d'agglomération ou à une communauté de communes compétente pour effectuer des réserves foncières en vue de la réalisation de logements sociaux et lorsque cette communauté est dotée d'un programme local de l'habitat, la somme correspondante est versée à la communauté. Elle est utilisée pour financer des acquisitions foncières et immobilières en vue de la réalisation de logements locatifs sociaux et, notamment dans les quartiers inscrits en contrat de ville ou dans les zones urbaines sensibles, des opérations de renouvellement et de requalification urbains.
« A défaut et hors Ile-de-France, elle est versée à l'établissement public foncier créé en application de l'article L. 324-1 du code de l'urbanisme, si la commune appartient à un tel établissement.
« A défaut, elle est versée à un fonds d'aménagement urbain affecté aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale pour des actions foncières et immobilières en faveur du logement social.
« Art. L. 302-7 . - Les dispositions de la présente section ne sont pas applicables aux communes dont plus de la moitié du territoire urbanisé est soumis à une inconstructibilité résultant d'une zone A, B ou C d'un plan d'exposition au bruit approuvé en application de l'article L. 147-1 du code de l'urbanisme ou d'une servitude de protection instituée en application des articles 7-1 à 7-4 de la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement.
« Le conseil municipal définit un objectif de réalisation de logements locatifs sociaux qui ne peut être inférieur au nombre de logements locatifs sociaux nécessaires pour atteindre 20 % du total des résidences principales.
« Toutefois, lorsqu'une commune appartient à une communauté urbaine, une communauté d'agglomération, une communauté de communes, une communauté d'agglomération nouvelle ou à un syndicat d'agglomération nouvelle compétent en matière de programme local de l'habitat, celui-ci fixe, de façon à favoriser la mixité sociale en assurant entre les communes une répartition équilibrée et diversifiée de l'offre de logements, l'objectif de réalisation de logements locatifs sociaux sur le territoire de la commune de manière à accroître la part de ces logements par rapport au nombre de résidences principales. L'objectif de réalisation de logements locatifs sociaux pour l'ensemble des communes de la communauté ne peut être inférieur au nombre total de logements locatifs sociaux dont la réalisation serait nécessaire, dans les communes soumises au prélèvement prévu par le premier alinéa de l'article L. 302-6, pour atteindre 20 % du total des résidences principales de ces communes, chacune de ces dernières devant se rapprocher de l'objectif de 20 %. Les communes non soumises au prélèvement prévu au premier alinéa de l'article L. 302-6 ne peuvent se voir imposer la construction de logements sociaux supplémentaires sans leur accord.
« Les programmes locaux de l'habitat précisent l'échéancier et les conditions de réalisation de logements sociaux, soit par des constructions neuves soit par l'acquisition de bâtiments existants, par période triennale. Ils définissent également un plan de revalorisation de l'habitat locatif social existant, de façon à préserver partout la mixité sociale sans créer de nouvelles ségrégations. A défaut de programme local de l'habitat approuvé dans le délai de dix-huit mois à compter de la publication de la loi n° du janvier précitée, la commune prend, sur son territoire, les dispositions nécessaires pour permettre la réalisation du nombre de logements locatifs sociaux prévus au deuxième alinéa ci-dessus.
« L'accroissement net du nombre de logements locatifs sociaux prévu pour chaque période triennale ne peut être inférieur à 15 % de la différence entre le nombre de logements sociaux correspondant à l'objectif fixé au deuxième alinéa et le nombre de logements sociaux sur le territoire de la commune. Ces chiffres sont réévalués à l'issue de chaque période triennale.
« A Paris, Lyon et Marseille, le programme local de l'habitat fixe, de façon à favoriser la mixité sociale en assurant entre les arrondissements une répartition équilibrée et diversifiée de l'offre de logements, l'objectif de réalisation de logements sociaux sur le territoire de l'arrondissement de manière à accroître la part de ces logements par rapport au nombre de résidences principales.
« Art. L. 302-8 . - La collectivité ou l'établissement public de coopération intercommunale ayant approuvé le programme local de l'habitat établit, au terme de chaque période triennale, un bilan portant en particulier sur le respect des engagements en matière de mixité sociale. Celui-ci est communiqué au conseil départemental de l'habitat. Lorsque les engagements figurant dans le programme local de l'habitat n'ont pas été tenus, ou lorsque, à défaut de programme local de l'habitat, le nombre de logements locatifs sociaux à réaliser en application de l'avant-dernier alinéa de l'article L. 302-7 n'a pas été atteint, le préfet, après avis du conseil départemental de l'habitat, constate la carence de la commune par arrêté motivé.
« A compter de cet arrêté, le prélèvement résultant de l'application de l'article L. 302-6 est doublé, sans pouvoir excéder 10 % du montant des dépenses réelles de fonctionnement de la commune constatées dans le compte administratif afférent au pénultième exercice et aucun agrément de bureaux prévu à l'article L. 510-1 du code de l'urbanisme ne peut plus être accordé.
« Art. L. 302-9 . - Dans les communes ayant fait l'objet de l'arrêté préfectoral prévu par l'article L. 302-8, le préfet passe dans un délai n'excédant pas un an, en concertation avec le conseil départemental de l'habitat, une convention avec un organisme pour la construction ou l'acquisition-réhabilitation de logements sociaux, en vue de réaliser les objectifs fixés au deuxième alinéa de l'article L. 302-7.
« Lorsque l'Etat verse à ces opérations une subvention foncière, une dépense égale est mise à la charge de la commune.
« Art. L. 302-10 . - Un décret en Conseil d'Etat détermine, en tant que de besoin, les conditions d'application du présent chapitre notamment celles nécessitées par la situation particulière des départements d'outre-mer. Il précise les dépenses à retenir pour l'application du sixième alinéa de l'article L. 302-6. »
Mes chers collègues, je tiens à vous indiquer qu'il reste cinq orateurs inscrits sur cet article particulièrement important du projet de loi.
Par ailleurs, 154 amendements ont été déposés sur cet article, dont 87 sur le texte proposé pour l'article L. 302-5 du code de la construction et de l'habitation.
La parole est à M. Schosteck.
M. Jean-Pierre Schosteck. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, l'urgence dans laquelle le Gouvernement nous oblige à examiner ce projet de loi, si complexe et si contraignant, est très inquiétante. Pourquoi le Gouvernement est-il aussi pressé ?
Il aurait fallu, en effet, prendre le temps de la réflexion et celui de la cohérence pour élaborer ensemble un projet sérieux.
Votre manière autoritaire ne convient pas ; elle consiste, notamment au moyen de cet article 25, à infliger une sanction financière sans appel à ceux qui ne voudraient pas suivre les impératifs décidés dans le clair-obscur des bureaux des ministères, sans aucune considération pour les réalités locales.
Nous souhaitons, quant à nous, une plus grande autonomie des collectivités locales et une liberté réelle de décision. Le gouvernement auquel vous appartenez semble l'avoir oublié. Cet article 25 est aux antipodes de la décentralisation dont vous vous prétendiez, naguère, les ardents défenseurs.
Nous avons le sentiment, à travers tout ce projet de loi et surtout dans cet article, que nous sommes parvenus au bout de la centralisation, au point d'être désormais complètement bloqués dans un système redoutable pour les élus locaux, système dans lequel les décisions seront prises dans le cadre de chaînes hiérarchiques officielles ou officieuses dont la clef de voûte se trouve dans les administrations centrales.
Quel dirigisme de votre part ! Vous me rappelez Tocqueville - il est toujours bon de reprendre les propos des sages ! - qui, en 1856, dénonçait cette administration réglementaire contraignante, voulant prévoir tout, toujours plus au courant des intérêts de l'administré que ce dernier ne l'est lui-même, cette administration sans cesse active et stérile.
Plus dramatique est le risque que ce projet de loi fait courir aux finances locales, déjà trop lourdement taxées et qui voient chaque année leurs dotations rognées. Il serait grand temps de faire une pause !
Le dispositif présenté par cet article symbolise parfaitement l'approche idéologique, partisane et probablement électoraliste du Gouvernement sur ce projet de loi.
Sans aucune consultation préalable des élus locaux, il tend, en effet, à une recentralisation des pouvoirs vers l'Etat et à une densification de l'urbanisation de nos agglomérations.
S'agissant tout d'abord de la recentralisation, cet article précise notamment que le préfet peut passer, au nom de la commune, une convention avec un organisme afin d'assurer la construction des logements sociaux qu'il estime manquants, remettant ainsi en cause l'autonomie des collectivités locales. Ce faisant, une atteinte grave est portée à l'article 72 de la Constitution, que la technostructure d'Etat ne supporte décidément plus !
Cette substitution du préfet au maire est, de plus, aggravée d'une sanction financière directement prélevée sur le budget des communes concernées.
Pour ne citer que le département des Hauts-de-Seine, que je connais particulièrement bien, je peux affirmer que vos objectifs sont totalement irréalisables, soit parce que certaines communes ont sur leur territoire un patrimoine historique ou boisé tellement incontournable qu'on ne peut même pas envisager d'y toucher, soit parce qu'elles sont tellement bâties qu'il faudrait démolir et reconstruire, ce qui revient à ignorer les coûts de ces opérations en matière foncière en Ile-de-France. Mon collègue Denis Badré, maire de Ville-d'Avray, a d'ailleurs fait une remarquable démonstration de cette situation dans son intervention, lors de la discussion générale.
M. Denis Badré. Merci ! (Sourires.)
M. Jean-Pierre Schosteck. Si le projet actuel venait à être voté, qu'adviendrait-il de nos espaces naturels qu'il nous revient de protéger ? Je pense aux 5 055 hectares d'espaces verts du département des Hauts-de-Seine, jugés indispensables au « poumon vert » de l'Ile-de-France. Faudrait-il rogner aussi l'oxygène que respirent nos concitoyens ? Tout cela n'est pas raisonnable !
Vous voulez d'abord et avant tout « faire de la ville ». Mais, à nos yeux, on ne peut la faire qu'avec ses habitants et dans la concertation. La ville du XXIe siècle, vous ne l'imposerez pas par vos menaces ! Elle suppose une volonté humaine et contractuelle, avec des acteurs sincères et bien intentionnés qui respectent les territoires et ceux qui les gèrent.
Voici autant d'exemples qui montrent ici l'absurdité et la perversité du dispositif proposé : le Gouvernement nous propose de passer de la contractualisation à la contrainte, de l'incitation à la sanction et de la décentralisation et à la recentralisation des pouvoirs de l'Etat.
J'en viens à la densification de l'urbanisation.
Aucun bilan précis d'application de la loi d'orientation sur la ville n'a été élaboré par le Gouvernement. Ce dernier ne tient pas compte des efforts que certaines communes ont déjà réalisés dans le cadre des programmes locaux de l'habitat.
En outre, le seuil de 20 % de logements sociaux n'est pas modulé en fonction des situations locales, notamment en tenant compte du rapport de l'offre et de la demande de logement social dans les communes et des caractéristiques foncières et techniques de chacune d'entre elles.
La définition du logement social, quant à elle, est beaucoup trop restrictive : non seulement cet article supprime le critère lié aux ressources de l'habitant de la commune, mais il n'inclut pas les logements sociaux construits, acquis ou réhabilités par les communes avec des financements de l'Etat, les logements mis à bail par les associations d'aide aux personnes défavorisées, ou encore les logements appartenant à des propriétaires privés ayant bénéficié d'aides de l'Etat pour leur réhabilitation ou ayant fait l'objet d'une opération de rénovation, ou, enfin, les logements en accession sociale à la propriété.
Ainsi, votre dispositif va non seulement accroître les problèmes sociaux et économiques des grands ensembles urbanisés déjà existants, mais aussi étendre aux zones rurales une urbanisation inopportune.
De plus et surtout, il s'inscrit dans une politique d'étranglement financier des villes non éligibles à la dotation de solidarité urbaine.
Un tel dispositif idéologique ne peut entraîner de notre part qu'une opposition totale. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR.)
M. André Vezinhet. On voit qu'il n'y a pas eu d'armistice ! Cela continue ! (Rires sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo. Je vois effectivement que le week-end n'a pas fait tomber la tension sur cet article 25 ! De même, la hargne que vient de manifester notre collègue montre bien à quel point l'opposition entend lutter contre la volonté politique bien affirmée par le Gouvernement de modifier les choses en matière de logement social.
L'article 25 pose le principe d'une mixité sociale par commune, ce qui est tout à fait positif.
Le territoire retenu par le texte initial pour l'application d'une répartition équilibrée du nombre de logements sociaux me semble bien évidemment plus adapté et plus empreint de réussite que le dispositif proposé par les commissions du Sénat, qui relèguent le principe de mixité au niveau intercommunal.
Cela peut particulièrement bien être visualisé au niveau de la COURLY, la communauté urbaine de Lyon ; dans cette dernière, l'adoption des amendements de la majorité sénatoriale conduirait à ce que l'EPCI, l'établissement public de coopération intercommunale, puisse décider de réaliser les logements sociaux non pas dans les communes dont le taux de logements sociaux est inférieur à 20 %, mais dans les communes qui comptent déjà un nombre important de grands ensembles - bien commode, n'est-ce pas ? - ce qui ne résoudrait en rien les déséquilibres constatés ! Plus le territoire d'application est large, plus le principe est dilué. C'est évident !
Aussi, nous nous félicitons de l'introduction à l'Assemblée nationale du dernier alinéa de l'article L. 302-7 du code de la construction et de l'habitat, qui vise à faire en sorte qu'à Paris, à Lyon et à Marseille, le programme local de l'habitat fixe l'objectif de réalisation de logements sociaux sur le territoire de l'arrondissement, de façon à favoriser la mixité sociale entre arrondissements, et donc dans les villes.
Evidemment, en procédant à la réécriture de cet article, vous supprimez cette disposition présentée en séance par la commission, sur l'initiative des députés communistes.
Je trouve cette décision particulièrement dommageable. En effet, les déséquilibres en terme de logements sociaux à l'intérieur de Paris, pour prendre cet exemple que je connais bien, sont particulièrement éloquents. Ainsi le taux de logements sociaux est estimé à près de 40 % dans le XVIIIe arrondissement, alors qu'il varie entre 1 % et 3 % dans le centre de Paris.
En ce qui me concerne, je refuse l'idée de réserver certains arrondissements, et donc de les spécialiser à certaines activités.
Il suffit de comparer les arrondissements de la périphérie - XIIIe, XVIIIe, XIXe et XXe arrondissements - à ceux du centre - IIIe, IVe et VIIe arrondissements - pour voir que cette politique d'aménagement a été menée dans la capitale. Et on connaît les résultats !
Faut-il arrêter le logement social pendant vingt ans, puisque, dans certains arrondissements, il avoisine 40 %, alors que 70 000 Parisiens sont inscrits au ficher des personnes mal logées ? Ou faut-il, au contraire, procéder à un rééquilibrage sur l'ensemble des arrondissements ? C'est évidemment cette dernière solution que je préconise.
Aujourd'hui, la municipalité a trouvé la parade : elle refuse de payer la surcharge foncière, sauf pour les opérations menées par l'OPAC, l'office public d'aménagement et de construction. Cette surcharge foncière est normalement prise en charge à 80 % par l'Etat si la commune accueille l'opération et accepte de prendre 20 % à sa charge, afin d'alléger les coûts supportés par les opérateurs, quand le prix du terrain est élevé.
En refusant de payer, la Ville de Paris bloque la construction de logements très sociaux.
M. Michel Caldaguès. C'est totalement faux !
Mme Nicole Borvo. Pour débloquer cette situation, le Gouvernement a décidé, en juillet 1999, de prendre entièrement à sa charge la surcharge foncière des opérations très sociales engagées à Paris par des organismes non liés à la Ville.
L'Etat paiera donc en totalité la surtaxe pour 163 des 204 logements de ce type dont la construction a été engagée en 1999.
Il est inadmissible que la municipalité ait une attitude si irresponsable et si sectaire, obligeant par la même l'Etat à se substituer à la Ville de Paris, dont les moyens sont pourtant importants.
Il est temps d'agir autrement, de rétablir les équilibres et de redonner aux populations à revenus modestes la possibilité d'habiter à Paris.
Voilà pourquoi, bien évidemment, nous soutiendrons l'amendement voté à l'Assemblée nationale. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur celles du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Braye. (Aïe aïe aïe ! sur les mêmes travées.)
M. Dominique Braye. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, lors de la discussion générale, j'avais dénoncé une vision de la mixité sociale qui relève davantage du nivellement par le bas que de la promotion sociale. (Exclamations sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
Cela vous avait irrités, chers collègues de gauche, comme cela avait irrité M. le ministre de la ville.
En effet, à mes propos suivant lesquels «SRU » devrait plutôt signifier, dans le texte de loi qui nous est proposé, « socialisme et rabaissement urbain » (Exclamations et rires sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen) , vous m'aviez répondu, monsieur le ministre de la ville, par un trait d'humour que j'aurais apprécié s'il n'avait pas été pour vous le moyen d'esquiver - comme souvent - la réponse sur le fond, à savoir la politique du tout-HLM, proposée par ce texte, au détriment de l'accession sociale à la propriété et la remise en cause du principe essentiel de la loi Chevènement du 12 juillet 1999, selon lequel seul le périmètre de l'agglomération doit être pris en compte pour résoudre certains problèmes importants, dont celui de l'équilibre social de l'habitat.
Mais je m'aperçois qu'à gauche on n'est pas à cela près de voter, à quelques mois d'intervalle, deux textes qui se contredisent !
Quant à M. le secrétaire d'Etat au logement, il avait engagé le dialogue avec moi, en s'étonnant de la vivacité de mes propos sur un sujet qui, d'après lui, n'était pas si grave que cela puisque sa propre ville de Chambéry compte 32 % de logements sociaux.
Je vous répondrai tout d'abord, messieurs les ministres, que, si mes propos furent passionnés, ils ne furent que le reflet du courroux - et c'est un euphémisme - de la quasi-totalité des élus de mon département, de droite comme de gauche, d'ailleurs, face au dispositif de l'article 25.
La vivacité de mes propos exprimait aussi un sentiment d'exaspération face à certains problèmes vécus au quotidien par les habitants et les élus de mon agglomération. Mon devoir était de m'en faire l'écho et de tout faire pour que cette situation ne s'aggrave pas à l'avenir.
En effet, à force de vouloir imposer sans nuance le taux de 20 % de logements locatifs sociaux à toutes les communes situées en agglomération, vous oubliez des spécificités locales essentielles.
Permettez-moi donc, puisque Mme Borvo a cité Paris, de souligner celles de mon agglomération de Mantes-la-Jolie, qui détient, hélas ! de tristes records :
Un record en matière de logements sociaux, avec un taux de 42 %, qui cache, en outre, le fait que la ville-centre, Mantes-la-Jolie, compte 64 % de logements sociaux, avec la plus vaste ZUP de France, le Val Fourré, 23 000 habitants, dont la ville-centre la plus proche est ma commune, Buchelay, à laquelle vous voulez imposer de nouveaux logements sociaux.
Un record du taux de chômage, le plus élevé des Yvelines, qui atteint même 34 % dans le quartier des Peintres, au Val Fourré, tandis que le taux d'activité, c'est-à-dire le nombre d'emplois proposés, est le plus faible puisqu'il est passé de 0,78 à 0,64 en quinze ans.
Un record du taux de population étrangère : le Val Fourré, messieurs les ministres, mes chers collègues, est peuplé de plus de 80 % d'étrangers, soit près de 20 000 dans une ville de 43 000 habitants, dont 55 % d'origine maghrébine, 15 % originaires d'Afrique de l'Ouest et 15 % d'origines diverses - Turcs, Pakistanais, Sri-Lankais, etc. - le tout représentant une mosaïque de 82 nationalités !
Un record, dans ces conditions, du taux de retard scolaire, qui atteint 48 % en 6e et 57 % en 3e.
Un record, naturellement, du taux de délinquance, que j'avais illustré ici-même en citant des articles d'un quotidien régional de la veille : en moins de vingt-quatre heures, il y avait eu une attaque à main armée d'une grande surface, et ce pour la deuxième fois en trois semaines, une rixe entre dealers qui, pour la seconde fois en un mois, avait envoyé un des protagonistes à l'hôpital avec trois balles dans l'abdomen et, enfin, des incendies de voitures, devenus hélas ! pour nous, des incidents bien banals.
Ces faits, survenus le 27 avril dernier, s'étant tous déroulés non pas sur la commune de Mantes-la-Jolie, mais sur celle de Buchelay, à laquelle, je le répète, on veut pourtant imposer de nouveaux logements sociaux.
Monsieur le ministre, vous ne voulez pas reconnaître que le périmètre pertinent pour aborder ces problèmes de logements sociaux doit être l'agglomération. Les délinquants, eux, l'ont compris depuis longtemps, en abandonnant la commune comme seul territoire d'action.
Alors, monsieur le ministre, au vu de ces tristes records, pensez-vous toujours que l'intégration républicaine est une réussite dans ce type d'agglomération ? Ne pensez-vous pas que la ghettoïsation, l'exclusion et la violence y sont déjà suffisamment à l'oeuvre pour ne pas en rajouter ? Estimez-vous vraiment nécessaire de nous imposer encore plus de logements sociaux ?
Au risque de réveiller brutalement certaines belles consciences, ou plutôt des consciences autistes, dirai-je, et même si cela n'est pas « politiquement correct », je tiens à les informer que le problème majeur d'une telle agglomération tient non pas tant à un taux excessif de logements sociaux qu'au peuplement de ceux-ci.
M. Ladislas Poniatowski. Bien sûr !
M. Dominique Braye. Quand on en arrive à de tels déséquilibres sociaux, le point de rupture est dramatiquement proche, sauf à être autiste ou aveugle, ou les deux à la fois, devant la réalité des faits et certaines dérives de notre société.
Favoriser la mixité sociale, monsieur le ministre, est un objectif louable et généreux, à condition de ne pas aboutir à l'effet inverse en chargeant encore plus la barque là où elle est déjà au bord du chavirement. En imposant toujours plus de logements sociaux dans une telle agglomération, vous n'allez qu'aggraver les tristes records dont elle est détentrice.
La mixité sociale serait pour nous une excellente chose, monsieur le ministre, mais il faudrait qu'elle se fasse, justement, dans le sens inverse de celui que vous envisagez ! Mon deuxième adjoint, instituteur au Val-Fourré, a depuis plusieurs années des classes qui ne comportent aucun enfant français ou d'origine française, aucun ! Il n'a que des enfants d'origine étrangère. La mixité sociale, messieurs les ministres, nous la voudrions. Donnez-nous la solution !
Aussi, je vous demande d'accepter les amendements raisonnables et de bon sens que le groupe du RPR et la majorité sénatoriale ont déposés sur l'article 25.
Tenez compte du taux moyen de logements locatifs sociaux sur l'ensemble des agglomérations, surtout quand elles sont constituées en établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ! Tenez compte des difficultés locales spécifiques ! En un mot, tenez compte de ce que vous voulez, mais, de grâce, n'imposez pas de nouvelles HLM aux agglomérations qui n'en peuvent plus !
Si vous ne le faites pas, messieurs les ministres, mes chers collègues, très lourde sera votre responsabilité vis-à-vis de ces quartiers que le « politiquement correct » ose encore qualifier de sensibles alors qu'il s'agit de quartiers complètement destructurés qui ne connaissent plus du tout les lois de notre république. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, mon intervention portera sur la question - pour le moins discutée, à voir le nombre et la teneur des amendements déposés sur l'article 25 ! - de la définition du logement social, telle qu'elle sera utilisée à l'avenir pour apprécier la politique d'urbanisation poursuivie dans les agglomérations et les communes urbaines de notre pays.
Force est de constater que le débat mené à l'Assemblée nationale a permis, pour une part, de caractériser assez précisément ce que l'on peut aujourd'hui qualifier de logement social.
J'incline d'ailleurs à penser que certains des effets pervers qui paraissaient induits par l'étude d'impact de l'article 25 me semblent désormais évités, certaines communes, dont l'urbanisation a pu, par exemple, procéder du développement de l'activité minière, ayant vu justement réintégrer une part importante de leur patrimoine locatif dans le périmètre du logement social.
Pour autant, messieurs les ministres, se posent aussi un certain nombre de questions quant à la qualité des logements sociaux dévolus à des ensembles locatifs qui ne procèdent pas de la législation relative aux HLM, mais dont les caractéristiques, de même que celles de la population qui les occupe, procèdent de la même définition.
Il s'agit en effet de logements locatifs dont le financement essentiel a été assuré par des organismes collecteurs de la participation des employeurs à l'effort de construction - ce que l'on appelle le 1 % - qui sont, juridiquement, pour une part majoritaire, des filiales de ces organismes, tandis que le financement de leur construction a été, le plus souvent, assis sur des prêts accordés par le Crédit foncier de France.
A titre d'exemple, je veux citer le grand ensemble du Bois-des-Roches, à Saint-Michel-sur-Orge, dont le maire, M. Englander, m'a déjà entretenu et qui pose quelques problèmes de définition.
Sur ce cas spécifique, dont je ne doute pas qu'il puisse être éventuellement généralisé à d'autres ensembles comme, par exemple, le Pont-de-Pierre, à Bobigny, ou le groupe du Gros-Saule, à Aulnay-sous-Bois, je me permettrai de souligner, messieurs les ministres, que le niveau des loyers, les modalités d'attribution des logements ou encore le niveau de ressources de la population participent, objectivement, de la définition du logement social.
Aussi, en vue de rassurer mes collègues élus locaux, je souhaiterais, messieurs les ministres, que vous nous disiez si oui ou non ces logements sont effectivement inclus dans la définition du logement social telle qu'elle ressort de l'article 25 dans sa rédaction actuelle. (M. Jean-Pierre Schosteck s'exclame.)
Dans l'affirmative, je ne pourrai manquer de souligner à quel point certains amendements de nos collègues de la majorité sénatoriale n'ont que peu de portée et ne participent que d'une volonté générale de blocage de la discussion de ce texte. Au demeurant, l'intervention du collègue qui m'a précédé, sénateur des Yvelines, en est la parfaite illustration. (M. Nicolas About s'exclame.)
Ils participent, en fait, surtout d'une volonté d'escamoter les véritables enjeux du développement du parc locatif social, qui sont d'abord la mixité des locataires et la nécessité de construire de tels logements sociaux non seulement dans des villes populaires mais également dans celles où la ghettoïsation se fonde, mes chers collègues, sur la fortune des habitants et non sur la modicité de leurs ressources.
Messieurs les ministres, je me permets d'attirer votre attention sur les cas particuliers que j'ai soulevés en espérant que vous pourrez trouver une solution qui réponde aux aspirations légitimes de ces maires qui gèrent des grands ensembles particulièrement difficiles. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen et sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Karoutchi.
M. Roger Karoutchi. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, l'article 25 présente, en fait, deux défauts majeurs.
Le premier est d'augmenter le nombre de logements HLM coûte que coûte, avec, pour le Gouvernement, un objectif de densification du logement social ne répondant qu'à un seul critère statistique : obtenir 20 % sans se préoccuper nullement de la qualité des constructions.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Non, c'est faux !
M. Roger Karoutchi. Le résultat le plus immédiat serait, bien sûr, la constitution de vastes ensembles d'HLM comparables à ceux des années soixante,...
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Mais non !
M. Roger Karoutchi. ... dont on avait cru comprendre que, malaise des banlieues à l'appui, plus personne ne voulait. D'ailleurs, le fait que le Gouvernement envisage de réduire très significativement la taxe locale d'équipement sur les logements collectifs montre bien qu'il considère la politique du logement social sous le seul angle de la masse.
Le second défaut de l'article 25 est de traduire une attitude autoritaire et une volonté d'uniformisation, credo dorénavant connu du Gouvernement : de belles paroles de décentralisation, des actions concrètes régulières contre l'autonomie des communes ou des régions.
De fait, l'objectif d'imposer 20 % de logements sociaux est totalement irréaliste : il signifierait la construction de 450 000 logements HLM supplémentaires dans les communes concernées par ce texte, dont 165 000 pour la seule région d'Ile-de-France.
Ce texte ne tient pas compte des réalités foncières locales et ne prévoit aucune véritable compensation financière pour aider les communes à acquérir des terrains. Or, et chacun le comprend bien, l'application d'un objectif unique pour toutes les communes, quelle que soit la disponibilité des terrains constructibles, est tout simplement absurde.
Pour couronner le tableau, les délais accordés aux collectivités sont très insuffisants, ce qui aura pour conséquence de voir les communes soit payer, soit créer de manière obligée les nouveaux ghettos urbains.
En fait, le Gouvernement veut faire assumer aux maires et aux contribuables locaux son incapacité à réaliser ses promesses en termes de construction de logements sociaux. Alors que, depuis 1997, on nous annonce, chaque année, la construction de 80 000 PLA, le Gouvernement arrive tout juste à en mettre la moitié en construction, soit 45 000 en 1999 !
Si ce projet de loi est finalement adopté, le Gouvernement aura en réalité encore accru la pression fiscale.
L'Ile-de-France, qui subit un accroissement de pression fiscale considérable depuis trois ans, paiera, pour les 182 communes concernées, 165 millions de francs la première année. Pour la seule ville de Paris, c'est un prélèvement de 75 millions de francs que vous voulez mettre en place !
Tout cela n'est plus possible. Une approche plus pragmatique doit absolument prévaloir sur celle, sectaire et idéologique, du Gouvernement.
Cette approche, reposant sur l'expérience locale, doit permettre d'atteindre trois objectifs prioritaires.
Il faut, tout d'abord, favoriser le principe d'une vraie mixité sociale par des impulsions positives, et non par des sanctions, là où il faut encourager le logement social, mais aussi par une politique d'habitat plus équilibré dans certaines communes qui freinent le logement libre ou le PLI.
Il faut, ensuite, diversifier les formes du logement social : parallèlement au logement HLM, les municipalités peuvent multiplier les initiatives. De plus, une loi sur le logement social devrait prendre en compte l'ensemble du logement social de fait - logement des administrations, logements mis à la disposition des personnes défavorisées par les associations, résidences étudiantes - et non pas seulement le logement social HLM. Chacun comprendra nos raisons idéologiques.
Il faut, enfin, privilégier la réalité du terrain et la concertation : le principe de subsidiarité devrait être la règle n° 1 d'une politique sur le logement social. Les communes devraient pouvoir élaborer un cahier des charges adapté à chacune d'elles, l'Etat, par l'intermédiaire du préfet, étant chargé de l'impulsion et du contrôle a posteriori . Les sanctions financières ne seraient alors que la conséquence du non-respect des objectifs définis en concertation.
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, la logique coercitive se fondant sur un objectif quantitatif et obligatoire est totalement inadaptée.
L'Etat doit faire confiance aux municipalités pour résoudre localement, au plan des agglomérations, le problème du logement social. Ce n'est qu'en dernier ressort, après concertation, qu'il devrait intervenir. Il en va de l'avenir de la décentralisation et donc de la réalité de l'autonomie de nos communes. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste ainsi que sur certaines travées du RDSE.) M. Claude Bartolone, ministre délégué à la ville. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Claude Bartolone, ministre délégué. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite revenir sur plusieurs thèmes qui ont été abordés par les différents intervenants sur l'article 25, ce qui me permettra d'être plus bref lors de la discussion d'un certain nombre d'amendements.
En premier lieu, je veux répondre à l'idée partagée par tous les sénateurs de l'opposition nationale qui consisterait à prendre en compte le seuil de 20 % au niveau de la structure intercommunale dans son ensemble et non commune par commune.
Pour résumer ma pensée, je dirai que cette proposition est décalée par rapport à l'objectif initial du projet de loi. En effet, le Gouvernement n'a pas l'intention d'imposer 20 % de logements sociaux dans chacune des agglomérations françaises. Il s'agirait certes d'un objectif politique louable, mais relativement faible au niveau des agglomérations.
M. Patrick Lassourd. Mais non !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. L'enjeu de ce texte est plutôt de rééquilibrer nos agglomérations, et donc de parvenir à une meilleure répartition du logement social entre les communes.
Cette transformation de l'esprit du texte proposée par la majorité sénatoriale produit dès lors deux effets qui ne me paraissent pas pertinents sur le fond.
Le premier est de faire sortir du dispositif la plupart des communautés urbaines et des communautés d'agglomération où se posent les enjeux les plus forts en termes de mixité. Lors de la discussion générale, j'avais pris l'exemple - vous vous en souvenez certainement, monsieur le rapporteur - de la communauté urbaine de Lyon. Mais je pourrais vous citer aussi Avignon, dont Mme le maire soutient le projet de loi, position que l'on ne peut pas taxer de partisane. Je pourrais également évoquer Lille, Strasbourg, Mulhouse, Nancy, Poitiers, Orléans, Rouen ou Chambéry, au total trente-six agglomérations dans lesquelles un rééquilibrage en termes de logements sociaux s'impose d'évidence, et qui seraient hors du champ d'application de ce texte, aux termes de la proposition de la majorité du Sénat.
Demain, compte tenu du développement de l'intercommunalité, soutenu par le Gouvernement, c'est la plupart des agglomérations les plus concernées par cet enjeu de mixité qui sortirait du dispositif, et ce parce que votre proposition, messieurs les rapporteurs, ne porte pas sur le déséquilibre de l'agglomération, mais concerne le nombre total de logements sociaux.
Le second effet de la proposition de la majorité sénatoriale est de faire entrer dans le dispositif des petites unités urbaines comme Aurillac, Châtellerault, La Roche-sur-Yon, Lannion, Rochefort, Cambrai, Royan ou Voiron, car la structure intercommunale, qui est plus grande que l'unité urbaine, compte plus de 50 000 habitants.
Même des communes rurales, qui ont joué le jeu de l'intercommunalité mais qui font partie de communautés qui n'ont pas 20 % de logements sociaux, seraient concernées par le dispositif proposé par le Sénat.
M. Dominique Braye. Des villes de plus de 3 500 habitants, il y en a peu en province. Il faudrait un peu sortir de la région parisienne !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. M. Fréville y sera sensible, je pense, notamment pour reprendre son intervention, à Acigné, Betton, Le Rheu, Mordelles, Noyal-sur-Vilaine, Thorigné-Fouillard, Pacé, Vern-sur-Seiche qui font partie de la communauté d'agglomération de Rennes.
M. Dominique Braye. N'importe quoi !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. Monsieur Fréville, ce n'est pas le Gouvernement qui propose de faire entrer ces communes dans le dispositif, c'est la majorité sénatoriale !
M. Dominique Braye. N'importe quoi !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. Regardez le texte que vous proposez ! Nous sommes au Sénat : les sénateurs doivent faire attention à ce qu'ils proposent. (Protestations sur les travées du RPR.)
M. Michel Caldaguès. Soyez courtois !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. Les sénateurs et le Gouvernement sont sur un pied d'égalité : si vous faites des propositions inacceptables, vous aurez la réponse qui convient. (Protestations sur les travées du RPR.)
M. Michel Caldaguès. Vous êtes vraiment discourtois !
M. Bernard Piras. C'est vous qui êtes discourtois comme d'habitude.
M. Claude Bartolone, ministre délégué. La problématique du logement social dans les petites agglomérations, plus encore dans les communes rurales, se pose de manière différente. La question de l'implantation de logements sociaux y est généralement moins liée à une absence de volonté politique qu'à la mise en place d'infrastructures publiques adaptées.
Messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs de l'opposition nationale, cette analyse des communes concernées par votre proposition montre bien que, sur le fond, celle-ci est décalée par rapport au véritable enjeu. Je ne peux donc être d'accord avec vous sur ce point car vous voulez faire évoluer le texte dans un sens qui ne me paraît ni juste ni efficace.
Le second point que vous évoquez concerne l'intégration des logements en accession sociale à la propriété dans la comptabilisation de l'objectif de 20 %.
Pour le Gouvernement, l'offre en accession sociale à la propriété demeure un outil indispensable à la diversification du marché du logement.
M. Dominique Braye. En paroles !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. Dans le cadre de la politique de la ville, celle-ci est même devenue l'emblème de la réussite, le symbole d'une mixité retrouvée...
M. Dominique Braye. Paroles !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. ... d'une nouvelle attractivité d'un quartier, généralement après un travail patient de reconquête sociale et urbaine.
C'est pourquoi ce Gouvernement s'est fortement engagé sur l'accession sociale à la propriété,...
M. Dominique Braye. En paroles !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. ... par exemple en rebudgétisant le prêt à taux zéro - ce qui n'avait pas été fait par la précédente majorité - (Protestations sur les travées du RPR) en baissant les droits de mutation dont le niveau trop élevé était dénoncé depuis trente ans.
Grâce à cette politique du logement conduite par Jean-Claude Gayssot et Louis Besson, et grâce à la reprise économique, l'offre en accession sociale se porte bien actuellement.
M. Dominique Braye. Pour le ministre, pas pour les Français !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. Nul ne le conteste. En fait, les plus grandes difficultés se situent non plus sur ce segment du marché du logement mais sur le parc locatif à destination des populations les plus modestes.
D'un côté, les communes qui ont beaucoup construit par le passé souhaitent aujourd'hui conserver un minimum de mixité et donc réaliser moins de logements sociaux, voire plus du tout.
M. Dominique Braye. Venez donc à Mantes-la-Jolie !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. D'un autre côté, des communes qui avaient peu construit jusqu'à présent continuent de refuser des logements sociaux.
Au bout du compte, aujourd'hui, le parc locatif social ne se dévelope plus assez.
Or, au moment où le Gouvernement s'engage dans une politique ambitieuse de renouvellement urbain, de construction-démolition, il nous faut renouveler ce parc.
M. Dominique Braye. Baratin !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. Ah ! puisque M. Braye, toujours un modéré dans cet hémicycle, parle de baratin, mesdames, messieurs les sénateurs, je vais vous rappeler deux chiffres.
M. Dominique Braye. La question est trop grave pour que nous restions modérés !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. Décidément, monsieur Braye !
M. Bernard Piras. Un peu de courtoisie !
M. le président. Mes chers collègues, je vous en prie, au lieu d'en arriver aux invectives, mieux vaudrait présenter des arguments !
M. Bernard Piras. C'est effectivement ce que M. le ministre est en train de faire !
M. Dominique Braye. Si vous appelez cela des arguments ! Ce sont de faux arguments !
Mme Hélène Luc. Monsieur le président, quand des orateurs parlent de cette manière, vous devez aussi les rappeler à l'ordre !
M. le président. Madame, s'il vous plaît, je rappelle tout le monde à l'ordre !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. Je voudrais revenir sur l'intervention du « modéré » sénateur Braye,... (M. Piras rit.)
M. Dominique Braye. Comme si le pouvoir en place était modéré !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. ... pour citer un chiffre qu'il semble oublier lorsqu'il parle de la différence qui existe entre les réalisations du Gouvernement et les faits. Il parlait de « baratin », expression singulière dans cette enceinte, mais chacun est responsable des mots qu'il emploie...
M. Dominique Braye. Eh oui, je ne suis pas politiquement correct !
M. le président. Monsieur Braye, je vous en prie !
M. Dominique Braye. Je suis interpellé, je peux répondre !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. Mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais vous citer deux chiffres qui donnent bien la dimension du travail qui est fait par le Gouvernement lorsqu'il parle d'opérations de reconstruction-démolition.
Dans le quartier du Val Fourré, ce sont actuellement 700 démolitions qui sont prévues.
M. Dominique Braye. Tout est prévu et rien n'a été fait en quatre ans !
Mme Hélène Luc. Laissez parler le ministre !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. Je disais donc que 700 démolitions sont financées pour permettre d'en finir avec un certain urbanisme des années soixante...
M. Dominique Braye. C'est prévu depuis dix ans !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. ... qui, ajourd'hui, accueille une population dont on peut davantage dire qu'elle est assignée à résidence qu'ayant réellement fait le choix d'habiter ces logements.
M. Dominique Braye. Cela fait dix ans que cela dure, dix ans !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. En contrepartie de ces 700 démolitions qui sont prévues, ce qui est demandé dans le cadre de cette intercommunalité à la ville de Buchelay...
M. Dominique Braye. Peut-être que dans dix ans cela sera fait !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. ... c'est la construction de cinq logements sociaux par an.
M. Dominique Braye. La communauté d'agglomération s'y refuse à l'unanimité !
M. Guy Fischer. C'est la politique de la terre brûlée !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. Je pense que ce chiffre réduit à néant un certain nombre d'arguments qui sont avancés.
M. Dominique Braye. Que faites-vous de la loi Chevènement ?
M. Claude Bartolone, ministre délégué. Mesdames, messieurs les sénateurs, l'article 25 doit donc viser ce parc.
Outre cette dimension du problème, je tiens à ajouter que le droit d'intégrer l'accession dans la définition du logement social représenterait une offre de logement très supérieure à 20 % en moyenne. Pour être efficace, en termes de mixité, ce n'est donc plus un ratio minimal de 20 % par commune...
M. Dominique Braye. Mais, nous, nous voulons la mixité !
M. le président. Monsieur Braye, si vous souhaitez interrompre M. le ministre, demandez-lui l'autorisation ! Mais, cessez ce genre d'altercation.
Veuillez poursuivre monsieur le ministre, je vous prie.
M. Claude Bartolone, ministre délégué. Pour être efficace en termes de mixité, ce n'est donc plus un ratio minimal de 20 % par commune qu'il faudrait prévoir, mais un pourcentage bien plus élevé. Une part importante du parc de logements et du parcours résidentiel de nos concitoyens entrerait dès lors dans le champ de cette loi ; ce qui ne me paraît pas opportun.
Vouloir que, dans chaque commune, il y ait un logement sur cinq destiné à être loué aux deux Français sur trois les plus modestes me semble donc constituer la mesure la plus équilibrée, la plus conforme à l'objectif de mixité et la plus adaptée aux défis actuels du renouvellement du parc locatif social.
Pour clore sur ce point, je voudrais revenir sur les propos de M. Lassourd, lorsqu'il dit que la location n'est pas une fin en soi, mais que la fin en soi, c'est la propriété.
Pour nous, monsieur Lassourd, qui ne sommes pas animés par l'idéologie, la fin en soi n'est ni la location ni la propriété. La fin en soi, c'est la liberté de choix entre ces deux statuts. Bien sûr, une très forte proportion de nos concitoyens souhaitent passer du statut de locataire à celui de propriétaire, et le Gouvernement, comme je le disais il y a quelques instants, a facilité ce choix par de nombreuses mesures.
Mais, monsieur Lassourd, pour une autre partie de nos concitoyens - les jeunes ménages qui ne comptent pas sur un héritage, ou les salariés à statut précaire - le choix est entre un logement locatif et pas de logement du tout !
M. Patrick Lassourd. Vous ne m'avez pas écouté, monsieur le ministre !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. Je voudrais donc que vous ne les oubliiez pas, car c'est pour eux que nous voulons développer, dans chaque commune, une offre locative sociale qui leur soit accessible.
M. Jean-Pierre Schosteck. C'est faux !
M. Patrick Lassourd. Vous ne m'avez pas écouté !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. Messieurs les rapporteurs, vous proposez par ailleurs la mise en place d'un contrat d'objectifs, qui vise à engager l'Etat et la collectivité locale sur les moyens à mettre en oeuvre pour réaliser le nombre de logements sociaux prévu. En ce sens, le document que vous proposez est plus un contrat de moyens qu'un contrat d'objectifs, et il existe déjà aujourd'hui : il s'agit des « conventions post-PLH ». J'avoue que le nom n'est pas des plus esthétiques, mais sur le fond, cela se fait déjà.
En fait, à travers la création de ce document, votre souci, je présume, est surtout d'obtenir la garantie que l'Etat s'engage bien à la hauteur des obligations prévues par la loi, en nombre de PLUS accordés par exemple. Il est vrai que les conventions post-PLH n'engagent pas l'Etat sur un objectif a priori.
Alors, sur ce point, je tiens à vous dire d'ores et déjà que la réponse est oui. L'objectif du Gouvernement est bien que cette loi soit appliquée, et l'Etat s'engagera à la hauteur des obligations prévues par la loi.
M. Jean-Pierre Schosteck. Il ne les respectera pas, comme d'habitude !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. Tout est déjà prévu dans le budget ; Louis Besson, qui sera avec nous tout à l'heure, ne me démentira pas, et pourra le confirmer.
M. Jean-Pierre Schosteck. Ça, sûrement !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. Messieurs les rapporteurs, vous proposez également que la structure intercommunale, lorsqu'elle est compétente en matière de PLH, assume la responsabilité de la réalisation des logements sociaux manquants. Vous lui transférez ainsi la charge de la contribution de 1 000 francs par logement manquant, même si l'on ne sait pas vraiment, dans votre dispositif, à qui doit être versée cette contribution. Nous y reviendrons certainement dans la discussion.
J'aimerais attirer votre attention sur le fait que la commune garde des compétences essentielles, notamment en matière d'urbanisme, et que son engagement demeure indispensable en vue de réaliser des logements sociaux sur son territoire.
M. Nicolas About. C'est faux !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. La défausser de toute responsabilité en la matière me paraît abusif.
En ce sens, je rejoins Mme Terrade. L'enjeu politique de ce texte étant le rééquilibrage de nos agglomérations et la solidarité urbaine, je m'étonne que vous passiez par pertes et profits le niveau communal.
M. Nicolas About. Il n'est pas compétent !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. Le Gouvernement souhaite au contraire trouver le juste équilibre entre communes et structure d'agglomération.
M. Nicolas About. Il n'est pas compétent !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. Tel est le sens du texte initial du projet de loi, où les deux niveaux territoriaux partagent les responsabilités.
Vous proposez enfin, mesdames, messieurs les sénateurs de l'opposition nationale, de modifier le mécanisme en cas de non-réalisation des objectifs. Vous proposez la suppression du doublement des 1 000 francs, vous souhaitez introduire un système de pénalités de retard plus limité et, surtout, « sous réserve de disponibilités foncières », comme si l'acquisition-amélioration n'existait pas, vous voulez supprimer le pouvoir de substitution du préfet en cas de carence de la commune. Bien évidemment, toutes ces dispositions limitent considérablement la portée du texte, et je m'interroge sur leur sens.
Vous le savez tous ici, la loi d'orientation pour la ville de 1991, dite LOV, qui a été combattue pied à pied au sein du Sénat - même si, aujourd'hui, vous la parez de toutes les vertus ! - a été fragilisée par son faible mécanisme de sanction !
Vous savez aussi que la seule pédagogie n'a pas suffi à convaincre toutes les communes d'agir. Alors souhaitez-vous encore, mesdames, messieurs les sénateurs de l'opposition nationale, que la loi reste inappliquée sur un certain nombre de territoires ?
M. Guy Fischer. Bien sûr !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. Souhaitez-vous vraiment que certaines communes puissent s'exonérer de leurs obligations républicaines ?
M. Guy Fischer. Tout à fait !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. Mesdames, messieurs les sénateurs, je m'interroge sincèrement sur le sens de nos débats et...
M. Jean-Pierre Schosteck. Il faut toujours s'interroger !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. ... sur le sens de vos propositions quand je vois que certains amendements n'ont qu'un objectif : permettre de contourner la loi ! Comme je sais que des conseils municipaux ont pris des délibérations en ce sens - ce qui me choque au plus haut point, car nous parlons ici de respect de la loi - je ne doute pas un seul instant que certaines communes en profiteraient.
Bien sûr, quand j'entends MM. Poniatowski et Lassourd, je vois bien la difficulté et l'ambiguïté de leur position. Je vois bien qu'ils sont personnellement favorables à ce texte,...
M. Dominique Braye. C'est une interprétation ! M. le ministre interprète tout de travers depuis le début !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. ... mais prisonniers d'une position plus radicale, qui est celle que je dénonce ici.
M. Philippe de Gaulle. C'est le marxisme !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. Quand j'entends MM. Calméjane et Fournier, comment ne pas être frappé du caractère archaïque des propos qui ont été tenus et de ce qu'ils dissimulent de mépris pour les plus modestes de nos concitoyens ? Tout y passe ! Le « Gosplan », le « nivellement par le bas »,...
M. Dominique Braye. C'est pourtant de cela qu'il s'agit ! (Protestations sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Claude Bartolone, ministre délégué. Monsieur Braye, j'ai compris depuis très longtemps que vous étiez un modéré. Alors, n'en rajoutez pas !
M. Dominique Braye. Quand j'entends des inepties, je ne peux pas m'en empêcher, monsieur le ministre !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. ... et si la première expression fait sourire tout le monde par son extravagance, la deuxième me choque profondément, car c'est une insulte pour tous les Français qui ont un jour occupé un logement social dans leur vie.
Mme Hélène Luc. Absolument !
M. Dominique Braye. Vous insultez les Français par ce projet de loi !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. Savez-vous, monsieur Calméjane, que vous parlez d'un Français sur trois qui, un jour dans leur vie, ont occupé un logement social ? Le mépris qui a été accordé à ces Français lorsque M. Calméjane évoquait ce logement social tout à l'heure est vraiment inadmissible.
M. Jean-Pierre Schosteck. Vous n'avez pas le droit de dire cela !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. Mesdames, messieurs les sénateurs, je savais que ce texte allait susciter des débats, et cela me paraît normal compte tenu du fait que nous parlons ici de nos conceptions des valeurs républicaines.
M. Jean Chérioux. On ne peut pas laisser dire cela. C'est injurieux !
M. Dominique Braye. En avez-vous ?
M. Claude Bartolone, ministre délégué. Monsieur Braye, arrêtez, vous allez faire apparaître tout à l'heure Gengis Khan pour un modéré compte tenu des positions que vous prenez !
M. Jean Chérioux. Il ne faut pas exagérer quand même !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. Mais se dire qu'à l'aube du troisième millénaire, nous ayons encore à entendre certains propos au sein de cette assemblée, même si je reconnais qu'ils demeurent marginaux, fort heureusement, montre le travail qui reste à faire pour bâtir des villes du vivre ensemble.
Tout cela renforce encore ma détermination à défendre ce texte,...
M. Jean-Pierre Schosteck. Vos moyens ne sont pas les nôtres !
M. Claude Bartolone, ministre délégué. ... qui est une nécessité pour faire vivre la devise de notre République.
M. Patrick Lassourd. Je demande la parole pour répondre au Gouvernement.
M. le président. La parole est à M. Lassourd.
M. Patrick Lassourd. Je veux répondre à M. le ministre parce qu'il me semble qu'avec notre collègue Ladislas Poniatowski nous avons été mis en cause.
Je ne vous permets pas, monsieur le ministre, de dire que je suis favorable à votre projet de loi tel qu'il est formulé. C'est toute la différence qu'il y a entre votre façon de voir et la nôtre !
Nous sommes tous, sur ces bancs, y compris de ce côté, très attachés au principe de mixité sociale. (Exclamations sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen ainsi que sur les travées socialistes.) Je prendrai pour exemple le fait que je conduis depuis plusieurs années une politique de logement social dans une capitale régionale qui est montrée en exemple dans la France entière, et je ne vous permets pas d'en rire !
M. Nicolas About. Surtout quand on sait ce que les communistes font à Trappes !
M. Dominique Braye. Les communistes n'ont pas le monopole du logement social !
M. Patrick Lassourd. Nous avons, monsieur le ministre, une vision tout à fait différente de la chose !
Nous sommes également attachés à cette cohérence que vous voulez dans les agglomérations.
En revanche, nous sommes totalement opposés aux modalités que vous nous proposez et qui ne vous permettront pas d'atteindre les objectifs que vous vous êtes fixés.
En tous les cas, je ne vous permets pas d'insinuer que nous sommes favorables à votre projet de loi tel qu'il est formulé ! (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. Je rappelle qu'en vertu de notre règlement un seul orateur peut prendre la parole pour répondre au Gouvernement.
Sur l'article 25, je suis saisi d'un très grand nombre d'amendements, que, pour la clarté du débat, j'appellerai successivement.
ARTICLE L. 302-5 DU CODE DE LA CONSTRUCTION
ET DE L'HABITATION