Séance du 16 mai 2000







M. le président. « Art. 51. - Il est inséré, après l'article 21 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 précitée, un article 21-1 ainsi rédigé :
« Art. 21-1 . - L'Etat, qui fixe les obligations générales de service public pour les transports ferroviaires de voyageurs, choisit le mode de dévolution de l'exploitation des services ferroviaires régionaux de voyageurs.
« En sus des services routiers réguliers non urbains d'intérêt régional au sens de l'article 29 de la présente loi, et sans préjudice des dispositions particulières prévues aux articles L. 4413-3 et L. 4424-26 du code général des collectivités territoriales, la région, en tant qu'autorité organisatrice des transports collectifs d'intérêt régional, est chargée, à compter du 1er janvier 2002, de l'organisation :
« - des services ferroviaires régionaux de voyageurs, qui sont les services ferroviaires de voyageurs effectués sur le réseau ferré national, à l'exception des services d'intérêt national et des services internationaux ;
« - des services routiers effectués en substitution des services ferroviaires susvisés.
« A ce titre, la région décide, sur l'ensemble de son ressort territorial, le contenu du service public de transport régional de voyageurs et notamment les dessertes, la tarification, la qualité du service et l'information de l'usager, en tenant compte du schéma national multimodal de services collectifs de transport de voyageurs et du schéma régional de transport, dans le respect des compétences des départements, des communes et de leurs groupements ainsi que de la cohérence et de l'unicité du système ferroviaire dont l'Etat reste le garant, et du système tarifaire national.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application du présent article, et notamment les modalités de détermination de la consistance des services transférés qui correspond aux services existants à la date du transfert. »
La parole est à M. Teston.
M. Michel Teston. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'avais prévu d'intervenir assez longuement sur cet article, qui devrait permettre de franchir une étape importante dans le processus de décentralisation engagé en 1982.
Néanmoins, en raison de la longueur inhabituelle des débats, qui n'est pas de notre fait, vous en conviendrez, je me contenterai de souligner que l'Etat demeure responsable de la définition des obligations générales de service public applicables aux transports ferroviaires régionaux de voyageurs.
Les principes généraux de tarification, les exigences en matière de sécurité et d'environnement, comme d'ailleurs les conditions d'accès aux personnes à mobilité réduite, notamment, sont des principes intangibles dont l'Etat doit effectivement rester le garant. En outre, l'Etat choisit le mode de dévolution de l'exploitation des services ferroviaires régionaux de voyageurs.
L'unicité du service public ferroviaire doit rester - j'y insiste - un principe de base fondamental. Il est à mon sens souhaitable que ces points essentiels soient solidement inscrits dans les conventions relatives aux transports collectifs d'intérêt régional.
Aussi, monsieur le ministre, je souhaite que vous puissiez apporter des garanties sur cet aspect important de l'organisation ferroviaire française. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Revet.
M. Charles Revet. Monsieur le ministre, j'ai déjà indiqué, comme bon nombre de mes collègues, combien il paraissait souhaitable de retrouver, conformément à une aspiration de nos concitoyens, un meilleur équilibre en matière d'aménagement du territoire entre les grandes agglomérations, les villes moyennes et le milieu rural. Le problème se pose en termes d'habitat - nous l'avons déjà dit, et nous reviendrons sur ce point dans la suite de la discussion de ce projet de loi - d'équipements publics et de moyens de transports.
J'ai cru comprendre, monsieur le ministre, que vous étiez plutôt favorable au développement du transport ferroviaire. Je vous ai d'ailleurs entendu, ce matin, évoquer la future liaison ferroviaire Lyon-Turin.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Ah ! C'est bien !
M. Charles Revet. C'est effectivement très bien !
Il faut penser au développement du TGV. J'aurais souhaité, pour ne parler que d'une région que je connais bien, que l'on puisse étudier d'un peu plus près les liaisons TGV entre, notamment, Le Havre, Rouen et Paris, entre Le Havre, Rouen et Bruxelles, ainsi qu'un raccordement au réseau TGV, ce qui est loin d'être le cas actuellement. Songez qu'il faut plus de temps aujourd'hui qu'il y a cinquante ans pour se rendre du Havre à Paris ! Voilà qui prouve que de nombreuses améliorations peuvent être apportées ! Mais tel n'est pas l'objet de mon propos en cet instant.
Il faut diversifier les offres de transport. On a fait du « tout-routier », et on mesure dans les banlieues des grandes villes - je pense, par exemple, à Rouen ou au Havre - les difficultés de circulation, le matin et le soir. Il faut donc développer les lignes secondaires de transport ferroviaire. L'histoire est un éternel recommencement : jeune étudiant, j'ai vu circuler à Rouen le tramway, lequel a ensuite été supprimé, pour être réintroduit plus tard sous forme de métro-bus.
Ce qui est vrai à l'intérieur d'une ville l'est aussi pour l'ensemble du pays. Ainsi, un certain nombre des voies secondaires qui ne fonctionnent plus actuellement mériteraient d'être remises en service compte tenu du développement de la population dans les villes moyennes et dans les milieux ruraux. Or les conditions actuelles le permettent difficilement.
Je sais bien qu'avec la régionalisation ce domaine relève de la responsabilité des régions.
M. Jean-Pierre Raffarin. En accord avec les départements !
M. Charles Revet. Oui ! Je souhaite d'ailleurs, pour ma part, que les départements puissent s'y impliquer davantage. Mais je ne suis pas convaincu, monsieur le ministre, que la SNCF y soit très favorable et prenne des mesures incitatives en ce sens.
Dans ces conditions, permettez-moi une question simple, monsieur le ministre : à partir du moment où le transport ferroviaire peut contribuer à un bon aménagement du territoire, que comptez-vous faire pour créer les conditions susceptibles de le développer ? Ce type de transport répondrait en effet à bien des attentes, que ce soit chez les jeunes ou chez les personnes âgées, et aurait un caractère social, dans la mesure où les familles qui ont choisi d'aller vivre à quelques dizaines de kilomètres d'une grande ville sont obligées de posséder deux voitures, ce qui entraîne quelquefois des difficultés financières. Là où c'est possible, un transport ferroviaire adapté permettrait de faciliter les échanges sans provoquer cette charge supplémentaire.
Comment entendez-vous développer le transport en commun, notamment dans le domaine ferroviaire, pour un bon aménagement du territoire, monsieur le ministre ?
M. le président. La parole est à M. Gerbaud.
M. François Gerbaud. Toutes réserves confondues, je souhaite ardemment la régionalisation, le plus rapidement et le plus largement possible. En effet, il est clair que, telle qu'elle est issue de la loi que j'ai eu l'honneur de rapporter devant le Sénat, la régionalisation constitue inconstestablement une possibilité de rapprochement entre l'entreprise SNCF et le terrain. Cela me paraît être la meilleure manière de concilier le plus parfaitement possible l'esprit d'entreprise et le service public.
Une segmentation par activité dans une vision comptable me paraît donc être la réponse attendue par les régions avant qu'elles s'engagent, puisque ce sont elles qui vont être appelées à financer en compensation les services qu'elles commencent déjà à rendre en la matière.
Cela étant, les régions du centre de la France sont très intéressées, notamment celles d'entre elles qui ne sont pas encore intégrées dans le projet de liaison POLT - Paris-Orléans-Limoges-Toulouse - et je voudrais que vous puissiez nous confirmer que des financements complémentaires pourront intervenir bientôt, par exemple au travers d'un comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire, afin que soit finalisé le financement du pendulaire entre Paris, Châteauroux, Limoges et Toulouse.
Ce serait une réponse à ceux qui souhaitent l'élargissement de la régionalisation.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur Gerbaud, je comprends votre enthousiasme s'agissant de la généralisation de la régionalisation. C'est en effet à ce niveau que les besoins sont le plus clairement exprimés en matière de transports ferroviaires de voyageurs.
Vous m'interpellez sur le projet de ligne Paris-Orléans-Limoges-Toulouse. Que puis-je vous dire à cette heure, sinon que je suis dans le même état d'esprit que vous, à savoir que je souhaite que les prochaines décisions apparaissent clairement en faveur de cette réalisation ?
M. François Gerbaud. Pendulons ensemble ! (Sourires.)
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Ne m'en demandez pas plus en cet instant, parce que je ne peux pas vous en dire plus. Comme vous, en tout cas, je souhaite que les décisions interviennent prochainement en faveur de cette réalisation, assorties d'éléments concrets, c'est-à-dire financiers.
Monsieur Teston, de manière très sage et responsable, vous avez souligné la longueur des débats et votre souci de ne pas les allonger encore. En même temps, de manière concise mais très forte, vous avez évoqué la question de l'unicité du service public.
Le cadre juridique fixé par la LOTI et le cahier des charges de la SNCF confirment la garantie d'unicité ainsi que la satisfaction du droit aux transports et les principes du service public. Je veux donc vous rassurer sur ce point. Au demeurant, je ne suis pas le seul à penser de la sorte : sur tous les bancs du Sénat et de l'Assemblée nationale, cette volonté s'est également exprimée.
Monsieur Revet, en ce qui concerne le développement des transports régionaux, je vous donnerai tout d'abord une information : leur croissance a été de 4,5 % en 1999 et, dans les régions concernées par l'expérimentation que nous avons menée et que nous voulons généraliser, l'augmentation du trafic est plus importante encore. Il me semble que cela va tout à fait dans le sens que vous souhaitez !
Cela étant, je souhaiterais que l'on ne parle plus aujourd'hui de voies secondaires !
M. Charles Revet. Parlons de voies tout court, alors !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Voilà ! En effet, à force de dire qu'il y a l'important et le secondaire, on perd de vue, en fin de compte, que, à tout endroit du territoire, on peut avoir intérêt au développement du trafic voyageurs ou marchandises. Sur telle ou telle desserte, il nous arrivera donc - j'espère que nous pourrons le vérifier tous ensemble - de rouvrir certaines lignes ferroviaires.
Je sais bien que cette distinction entre lignes principales et lignes secondaires date de note histoire des chemins de fer, mais je suis de ceux - et tel est l'état d'esprit du Gouvernement - qui veulent développer le transport ferroviaire pour permettre un meilleur équilibre dans les flux de voyageurs et de marchandises transportés. J'ai donc tendance à dire que c'est l'ensemble du réseau qu'il nous faut examiner, en recherchant dans chaque cas ce qui peut être utile au développement.
Je vous rappelle, monsieur le sénateur, que notre objectif est de doubler le trafic marchandises sur le réseau ferroviaire dans les dix ans. Par ailleurs, 120 milliards de francs d'investissements sont programmés pour les infrastructures afin de permettre, au-delà des améliorations sur le seul TGV, la régénération, la modernisation et l'entretien du réseau existant. Cette notion de réseau existant englobe d'ailleurs, pour moi, aussi bien les grandes lignes, les lignes rapides nationales et régionales, que tout ce qui peut être utile au développement du trafic marchandises et voyageurs, à l'échelle tant hexagonale qu'européenne. J'ai en effet proposé la création d'un réseau ferré de fret européen afin de favoriser le transport de marchandises sur le rail et non plus seulement sur la route.
M. Charles Revet. Très bien ! Vous voulez que j'applaudisse ? Soit ! (M. Revet applaudit.)
M. le président. Sur l'article 51, je suis tout d'abord saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 317, M. Althapé, au nom de la commission des affaires économiques, propose de supprimer le premier alinéa du texte présenté par l'article 51 pour l'article 21-1 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 précitée.
Par amendement n° 974, M. Lefebvre, Mme Terrade, M. Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de rédiger comme suit le premier alinéa du texte présenté par l'article 51 pour l'article 21-1 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 :
« Compte tenu des impératifs de sécurité et de continuité de service public et pour garantir le développement des transports ferroviaires, l'Etat fixe les obligations de service public pour les transports ferroviaires voyageurs ainsi que les principes selon lesquels sont exploités ces services de transport. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 317.
M. Louis Althapé, rapporteur. Le premier alinéa du texte proposé par l'article 51 ne paraît pas à sa place, dans la mesure où il s'agit d'un texte de décentralisation. Or d'autres articles de la LOTI - les articles 4, 7 et 9 - évoquent le rôle et la responsabilité de l'Etat dans le domaine du service public des transports.
M. le président. La parole est à M. Muzeau, pour défendre l'amendement n° 974.
M. Roland Muzeau. La clarté dans la répartition des rôles en matière de régionalisation des transports ferroviaires et la pertinence même du choix des autorités amenées à assumer telle ou telle responsabilité sont indissociables d'une réussite de l'expérimentation qui est aujourd'hui menée et qui est appelée, aux termes de cet article 52 et des articles suivants, à se généraliser.
Le sens de cet amendement est donc, pour nous, relativement simple : il s'agit de définir de manière objective et précise le rôle de l'Etat dans la mise en oeuvre de la politique de régionalisation ferroviaire et d'inscrire cette définition dans le corps de la loi d'orientation sur les transports intérieurs, que le présent projet de loi modifie de manière sensible, prolongeant en cela les expériences menées depuis l'adoption de cette loi en 1982.
Il s'agit donc de spécifier que l'Etat dispose d'une responsabilité particulière dans la définition de la sécurité des transports ferroviaires, dans l'insertion de la régionalisation dans le développement coordonné du réseau ferroviaire et dans la détermination de toute orientation permettant de le faciliter.
C'est sous le bénéfice de ces observations que je vous invite, au nom de notre groupe, à adopter cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur cet amendement n° 974 ?
M. Louis Althapé, rapporteur. Cet amendement fait doublon avec la disposition que l'Assemblée nationale a introduite et que la commission préfère tout simplement supprimer. D'où un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 317 et 974 ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. L'amendement n° 317 vise à supprimer une disposition adoptée en première lecture à l'Assemblée nationale et qui, dans l'optique de la future entrée en vigueur d'un règlement communautaire, indiquait clairement qu'en France l'Etat était l'autorité compétente pour choisir le mode de gestion.
Le Gouvernement avait fait valoir que cet amendement était inapproprié, non pas que l'idée n'était pas juste, mais parce qu'il était incompatible avec la LOTI, en ce qu'il posait la question de la dévolution, qui ne se pose pas aujourd'hui.
Pour en revenir à l'amendement n° 317, le Gouvernement préfère la rédaction de l'amendement n° 977, qui tend à insérer un article additionnel après l'article 52 et qui va dans le même sens. Je demande donc à M. le rapporteur, dans sa sagesse, que je sais très grande, de bien vouloir retirer l'amendement.
Poursuivant la même démarche, je me tourne vers les auteurs de l'amendement n° 974 pour leur demander également de bien vouloir le retirer au profit de ce même amendement n° 977.
M. le président. Retirez-vous l'amendement n° 317, monsieur le rapporteur ?
M. Louis Althapé, rapporteur. Je préfère le maintenir, monsieur le président.
M. le président. Retirez-vous l'amendement n° 974, monsieur Muzeau ?
M. Roland Muzeau. Oui, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 974 est retiré.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 317.
M. Guy Fischer. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Cet amendement de la commission des affaires économiques comporte, en fait, une petite imperfection. M. le ministre vient d'ailleurs d'en faire la démonstration.
Nous comprenons aisément - c'est le sens d'une bonne part des amendements qui ont trait à cet article 51 relatif à la régionalisation des transports ferroviaires de voyageurs - que l'on souhaite marquer, au sein de ce projet de loi, les orientations générales de la mise en place des TER.
Pour autant, l'équilibre déterminé dans la loi instaurant la séparation entre autorité propriétaire des infrastructures et exploitant n'a en aucune façon prévu d'autre orientation que celle consistant à donner à l'Etat une mission essentielle de régulation et de fixation des règles de fonctionnement du transport ferroviaire.
Croire que la pertinence des choix opérés en la matière serait renforcée au sein d'une régionalisation fixant également les obligations générales de service public et les modes de dévolution de l'exploitation est, de notre point de vue, une erreur.
La cohérence des services régionaux de transport ferroviaire de voyageurs ne peut et ne doit se concevoir que dans le cadre des compétences naturelles de l'Etat et, dans le cas qui nous préoccupe, du ministère des transports.
Nous ne pouvons donc suivre la commission des affaires économiques dans la voie de son amendement n° 317.
M. Jacques Bellanger. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Bellanger.
M. Jacques Bellanger. Je dois reconnaître que l'amendement de l'Assemblée nationale n'est pas d'une rédaction parfaite. Toutefois, il présente un certain nombre d'avantages et il affirme des principes qui ne nous semblent pas inintéressants.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Absolument !
M. Jacques Bellanger. L'unicité du réseau est réaffirmée à l'avant-dernier alinéa. La décentralisation, dans ses principes, n'est nullement remise en cause. Cela étant, c'est l'Etat qui fixe les obligations générales du service public pour les transports ferroviaires de voyageurs et qui choisit la dévolution de l'exploitation de ce service, ce qui nous semble normal.
Pour notre part, ces principes nous semblant bons, nous voterons contre leur suppression.
M. Jean-Pierre Raffarin. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Raffarin.
M. Jean-Pierre Raffarin. Je n'avais pas l'intention d'intervenir, mais à entendre nos collègues, j'en viens à me demander si nous faisons un texte sur l'étatisation du transport régional ou sur la régionalisation !
J'ai l'impression que tout se passe comme si l'on allait vers cette régionalisation un peu à reculons, en disant : donnons-leur un peu de liberté, mais, surtout, que l'Etat reste au coeur du dispositif, qu'il garde tous ses moyens ; faisons en sorte que l'on puisse utiliser leur argent, mais, surtout, gardons-nous de leur donner des responsabilités !
M. Charles Revet. Voir le contrat de plan !
M. Jean-Pierre Raffarin. Personnellement, je soutiens l'amendement de la commission parce qu'il est clair. On reconnaît, c'est vrai, l'exigence d'une dimension nationale, mais on est favorable aussi à une régionalisation.
M. Charles Revet. Une vraie régionalisation !
M. Jean-Pierre Raffarin. Notre collègue M. Gerbaud l'a dit tout à l'heure, s'il n'y avait que vous dans le Gouvernement, monsieur le ministre, nous serions entendus. Mais, naturellement, il y a les finances qui, du matin jusqu'au soir, essaient de faire « capoter » cette réforme, nous empêchent de la financer et font que ceux qui avaient une attitude positive sont aujourd'hui hésitants parce que les moyens ne leur sont pas donnés pour mener à bien ladite réforme.
Aussi, aujourd'hui, plutôt que de faire cette réforme avec frilosité, faisons-la avec combativité, et demandons à M. Fabius, qui a, dit-on, les idées très larges et très ouvertes, les moyens de la réussir. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. J'espère que votre appel sera entendu, mon cher collègue.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 317, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 318, M. Althapé, au nom de la commission des affaires économiques, propose, dans l'avant-dernier alinéa du texte présenté par l'article 51 pour l'article 21-1 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 précitée, après les mots : « du système ferroviaire dont l'Etat », de remplacer le mot : « reste » par le mot : « est ».
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 1063, présenté par M. Hérisson, et tendant à compléter le texte proposé par l'amendement n° 318 par les mots : « , dans le respect des compétences relatives aux autres réseaux ferrés ouverts au public, visés au dernier alinéa de l'article 18, ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 318.
M. Louis Althapé, rapporteur. L'Etat est garant de l'unicité du système ferroviaire. Le verbe « rester » apporte ici une restriction qui ne semble pas souhaitable.
M. le président. La parole est à M. Hérisson, pour présenter le sous-amendement n° 1063.
M. Pierre Hérisson. Il s'agit d'un sous-amendement de précision.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 1063 ?
M. Louis Althapé, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 318 et sur le sous-amendement n° 1063 ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Parce que M. le rapporteur a le souci que la nation - notamment les élus nationaux - ne perde pas son rôle, y compris avec la régionalisation proposée, le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 318, monsieur Raffarin ! (Sourires.)
En revanche, il est défavorable au sous-amendement n° 1063 parce que le texte ne concerne que le réseau national. N'en rajoutons pas !
M. le président. Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 1063.
M. Pierre Hérisson. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson. Monsieur le ministre, ce sous-amendement, même s'il n'a qu'une valeur de principe, aurait pour effet de conforter la confiance que vous a exprimée M. Raffarin.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 1063, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 318, ainsi modifié.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 975, M. Lefebvre, Mme Terrade, M. Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de compléter in fine le cinquième alinéa du texte présenté par l'article 51 pour l'article 21-1 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 par les mots : « dont les règles sont applicables à ce service ».
La parole est à M. Lefebvre.
M. Pierre Lefebvre. Cet amendement porte sur une des questions qui demeurent posées par le développement de la régionalisation ferroviaire, au regard, notamment, des principes essentiels de service public tels qu'ils ont pu être définis et mis en oeuvre.
La régionalisation des services de transport ferroviaire pourrait en effet, si l'on n'y prenait garde, conduire à une différenciation trop sensible de tarification, selon que la région organisatrice bénéficie ou non des moyens, singulièrement financiers, de faire face aux conditions de développement de ses services.
On doit, en particulier, souligner que la diversité des populations, et donc des revenus, est susceptible de motiver, dans telle ou telle région, telle ou telle orientation quant à la politique tarifaire.
Autre chose est de constater que ces choix, traduits notamment dans la mise en oeuvre des dispositions d'allégement tarifaire, ne peuvent en aucune manière aller à l'encontre des orientations que mène elle-même la Société nationale des chemins de fer français quant à sa politique commerciale et à ses choix tarifaires.
Il nous semble donc indispensable que le présent projet de loi prévoie expressément que les orientations mises en oeuvre par la SNCF et qui visent à élargir l'accès au transport ferroviaire et à faciliter son utilisation soient pleinement respectées dans le cadre des conventions passées entre l'Etat, la SNCF et les régions organisatrices.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Althapé, rapporteur. La commission considère que la précision proposée est inutile. Elle émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je comprends bien l'esprit qui inspire cet amendement, mais je fais observer à ses auteurs que le projet initial prévoit que les régions exercent leurs compétences en cohérence avec le système tarifaire national, ce qui n'exclut pas des tarifications spécifiques au sein des régions.
Le présent amendement va au-delà du principe énoncé. Il est difficilement compatible avec la liberté tarifaire au titre de laquelle les régions définissent leurs propres objectifs d'intervention. De fait, il n'est pas de nature à clarifier la compréhension du texte.
Pour ces raisons, je demande à ses auteurs de bien vouloir le retirer, faute de quoi le Gouvernement émettra un avis défavorable.
M. le président. L'amendement est-il maintenu, monsieur Lefebvre ?
M. Pierre Lefebvre. Sous le bénéfice des explications de M. le ministre, et aussi parce que c'était une précision que nous recherchions en déposant cet amendement, nous le retirons.
M. Jean-Pierre Raffarin. Voilà qui est sage !
M. le président. L'amendement n° 975 est retiré.
Par amendement n° 826, MM. Plancade, Bellanger et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent :
I. - Après le texte présenté par l'article 51 pour l'article 21-1 de la loi du 30 décembre 1982, d'insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. 21-2. - Il est créé auprès de chaque région en tant qu'autorité organisatrice des transports mentionnés à l'article 21-1, un comité régional des partenaires du transport public. Ce comité est consulté sur l'offre, les stratégies tarifaires et de développement, la qualité des services de transport proposés par la région.
« Il est notamment composé de représentants des organisations syndicales des transports collectifs, des associations d'usagers des transports collectifs, des organisations professionnelles patronales, des organismes consulaires.
« Un décret précise la composition du comité, les conditions de désignation de ses membres, ainsi que les modalités de son organisation et de son fonctionnement. »
II. - En conséquence, dans le premier alinéa de cet article, de remplacer les mots : « un article 21-1 ainsi rédigé » par les mots : « un article 21-1 et un article 21-2 ainsi rédigés ».
La parole est à M. Plancade.
M. Jean-Pierre Plancade. Monsieur le président, je souhaite rectifier cet amendement, en remplaçant les mots : « Il est créé... » par les mots : « Il peut être créé... », de manière à tenir compte d'amendements similaires.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 826, rectifié, présenté par MM. Plancade, Bellanger et les membres du groupe socialiste et apparentés, et tendant :
I. - Après le texte proposé par l'article 51 pour l'article 21-1 de la loi du 30 décembre 1982, à insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. 21-2. - Il peut être créé auprès de chaque région en tant qu'autorité organisatrice des transports mentionnés à l'article 21-1, un comité régional des partenaires du transport public. Ce comité est consulté sur l'offre, les stratégies tarifaires et de développement, la qualité des services de transport proposés par la région.
« Il est notamment composé de représentants des organisations syndicales des transports collectifs, des associations d'usagers des transports collectifs, des organisations professionnelles patronales, des organismes consulaires.
« Un décret précise la composition du comité, les conditions de désignation de ses membres, ainsi que les modalités de son organisation et de son fonctionnement. »
II. - En conséquence, dans le premier alinéa de cet article, à remplacer les mots : « un article 21-1 ainsi rédigé » par les mots : « un article 21-1 et un article 21-2 ainsi rédigés ».
Veuillez poursuivre, monsieur Plancade.
M. Jean-Pierre Plancade. L'objet de cet amendement est d'ouvrir la possibilité aux régions de créer un comité de partenaires, comité qui paraît d'autant plus nécessaire que l'article 51 organise la régionalisation des transports ferroviaires. La décentralisation n'a-t-elle pas aussi pour objet de rapprocher les lieux de décision des citoyens ?
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Althapé, rapporteur. Compte tenu de la rectification qui a été apportée à cet amendement, la commission y est favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Dans la mesure où cet amendement a été rectifié et où il est noté que : « Il peut être créé... », le Gouvernement peut y être favorable. (Sourires.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 826 rectifié, accepté par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 51, modifié.

(L'article 51 est adopté.)

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