SEANCE DU 5 OCTOBRE 2000


M. le président. « Art. 11 bis. - I. - Le titre II du livre III du code des ports maritimes est complété par un chapitre V ainsi rédigé :
« Chapitre V.
« Des déchets d'exploitation et résidus de cargaisons.
« Art. L. 325-1 . - Les capitaines de navire faisant escale dans un port maritime sont tenus, avant de quitter le port, de déposer les déchets d'exploitation et résidus de cargaison de leur navire dans les installations de réception flottantes, fixes ou mobiles existantes.
« Les officiers de port peuvent interdire la sortie du navire qui n'aurait pas déposé ses déchets d'exploitation et résidus de cargaison dans une installation de réception adéquate, et subordonner leur autorisation à l'exécution de cette prescription.
« Toutefois, s'il s'avère que le navire dispose d'une capacité de stockage spécialisée suffisante pour tous les déchets d'exploitation qui ont été et seront accumulés pendant le trajet prévu jusqu'au port de dépôt, il peut être autorisé à prendre la mer.
« Le présent article s'applique à tous les navires, y compris les navires armés à la pêche ou à la plaisance, quel que soit leur pavillon, faisant escale ou opérant dans le port, à l'exception des navires de guerre ainsi que des autres navires appartenant ou exploités par la puissance publique tant que celle-ci les utilise exclusivement pour ses propres besoins.
« On entend par :
« - "déchets d'exploitation des navires" : tous les déchets et résidus autres que les résidus de cargaison, qui sont produits durant l'exploitation d'un navire, ainsi que les déchets liés à la cargaison ;
« - "résidus de cargaison" : les restes de cargaison à bord qui demeurent dans les cales ou dans les citernes à cargaison après la fin des opérations de déchargement et de nettoyage, y compris les excédents et quantité déversés lors du chargement ou déchargement.
« Un décret en Conseil d'Etat précise les conditions d'application du présent article.
« Art. L. 325-2 . - Lorsqu'un navire ne se conforme pas aux dispositions de l'article L. 325-1, son armateur et son capitaine sont passibles d'une amende calculée comme suit :
« - pour les bâtiments d'une longueur hors tout inférieure ou égale à 20 mètres : 600 à 2 000 euros ;
« - pour les bâtiments d'une longueur hors tout comprise entre 20 et 100 mètres : 2 000 à 4 000 euros ;
« - pour les bâtiments d'une longueur hors tout supérieure ou égale à 100 mètres : 4 000 à 20 000 euros. »
« II. - Les dispositions prévues aux articles L. 325-1 et L. 325-2 du code des ports maritimes entrent en vigueur le premier jour du sixième mois suivant la publication du décret en Conseil d'Etat prévu audit article L. 325-1. »
Par amendement n° 6, M. Richert et les membres du groupe de l'Union centriste proposent de rédiger comme suit le texte présenté par le I de cet article pour l'article L. 325-2 du code des ports maritimes :
« Art. L. 325-2. - Lorsqu'un navire ne se conforme pas aux dispositions de l'article L. 325-1, son armateur et son capitaine sont passibles d'une amende calculée comme suit :
« - pour les bâtiments d'une longueur hors tout inférieure ou égale à 20 mètres : 1 000 à 4 000 euros ;
« - pour les bâtiments d'une longueur hors tout comprise entre 20 et 100 mètres : 4 000 à 8 000 euros ;
« - pour les bâtiments d'une longueur hors tout supérieure à 100 mètres : 8 000 à 40 000 euros. »
La parole est à M. Huchon.
M. Jean Huchon. Il n'y a pas de règle efficace sans sanction. Si un navire ne procède pas au déballastage dans un port, il le fera en mer. C'est ce risque qu'il faut éviter, en prévoyant des sanctions réellement dissuasives. Quand on sait que les déversements illégaux d'hydrocarbures atteignent, en Méditerranée, 600 000 tonnes par an, on mesure l'ampleur du défi.
Par cet amendement, nous proposons un nouveau barème de sanctions plus rigoureux que celui du projet initial, mais plus adapté à l'enjeu.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. La commission remercie chaleureusement l'auteur de l'amendement et ceux qui s'y sont associés, tant il est vrai que l'accentuation de la répression peut avoir un effet dissuasif. Aussi longtemps que les pénalités seront inférieures au coût du dégazage dans un port ou insuffisamment dissuasives, il est évident que la tentation sera forte d'aller dégazer en mer.
C'est la raison pour laquelle la commission, qui s'est réjouie de cette initiative, émet sur cet amendement un avis extrêmement favorable.
Je profite de l'occasion pour rappeler à M. le ministre ce que je lui ai dit tout à l'heure à propos du droit maritime et de la sécurité maritime. Il sera nécessaire, dans des temps proches, voire très proches, de créer un institut du droit et de la sécurité maritime, faute de quoi nous n'aurons pas les moyens en personnel pour traiter les problèmes. Il faut donc faire avancer la réflexion sur le sujet.
J'ai dit aussi à M. le ministre, mais sous une autre casquette, cette fois, celle de président du conseil général de la Manche, que Cherbourg était tout à fait prêt à accueillir un tel institut.
M. le ministre est un homme de bon sens. On sait ce que disait Jules Renard sur le sens : il y a le beau, il y a le bien et il y a un certain nombre de sens. Pour ma part, je ne fais appel qu'à un seul sens, qui et très simple, à savoir le bon.
Monsieur le ministre, vous ferez preuve de bon sens, et c'est pourquoi vous ne pourrez que réserver un avis favorable à la suggestion que je viens de vous faire.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Sur l'amendement n° 6, le Gouvernement émet un avis favorable. Il faut effectivement, comme M. Huchon et M. le rapporteur viennent de le dire, que la sanction tombe et qu'elle soit suffisamment dissuasive pour être efficace.
Cela étant, je rappelle que des peines lourdes existent déjà, qui peuvent aller jusqu'à deux ans de prison ferme. Le problème, malheureusement, c'est que nous avons souvent du mal à repérer les contrevenants, à les identifier, et donc à assurer les poursuites.
Mais l'action commence à s'organiser, notamment grâce au travail que nous menons à l'échelon international. Par ailleurs, c'est une bonne chose que, comme l'Assemblée nationale l'a déjà fait dans le texte qu'elle a adopté en première lecture, on renforce encore les sanctions pécuniaires.
Et puisque M. le rapporteur a profité de l'occasion pour rappeler ce qu'il avait dit dans son intervention, sous sa casquette de rapporteur, je lui répondrai que je suis favorable à la proposition qui a été faite de la création d'un institut du droit et de la sécurité maritimes.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 6.
Mme Anne Heinis. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Heinis.
Mme Anne Heinis. Il est bien évident que je ne peux qu'être favorable à cet amendement.
Par ailleurs, je remercie M. le ministre de nous avoir indiqué qu'il serait favorable à la crétion d'un institut du droit et de la sécurité maritimes à Cherbourg. (M. le ministre rit.)
Je tiens toutefois à souligner, en prélude aux discussions que nous aurons lors de l'examen du projet de budget de la mer, que le problème du déballastage est difficile à régler pour deux raisons.
D'abord, on l'a dit très justement, il faut effectivement repérer ceux qui procèdent au déballastage n'importe où, s'assurer que c'est bien eux, en apporter la preuve et, ensuite, prévoir des sanctions si l'on veut être efficace.
Mais il faut également attirer de nouveau l'attention sur le fait que nous n'avons pas, à l'heure actuelle, suffisamment de postes de déballastage dans les ports. C'est un point important qu'il nous faudra examiner lors de l'examen du budget de la mer.
Voilà donc ce que je voulais rappeler : si la sanction est nécessaire, parce que sans sanction on n'a aucun moyen d'obliger les gens à faire ce qu'il faut, il faut aussi prévoir des moyens pour qu'ils puissent se conformer à la loi, et, aujourd'hui, nos moyens sont tout de même limités.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Madame Heinis, c'est vrai, il faut que les navires aient les moyens de procéder au déballastage, de dégazer, pour pouvoir repartir avec les soutes propres.
Mais d'autres questions se posent. Il y a notamment les vidanges des moteurs, qui participent à la pollution.
Nous travaillons à l'échelon européen pour faire en sorte que les ports soient à même de créer les conditions de ce déballastage. Nous recensons les besoins tant à l'échelon européen qu'à celui de notre pays, où nous établissons un plan de financement pour réaliser ces équipements, qui existent déjà dans certains ports.
Par ailleurs, des travaux sont effectués actuellement qui montrent que l'on pourra bientôt, à partir des déballastages illicites, en prélevant le pétrole concerné, procéder à l'identification des navires. Ces travaux, nous les encourageons.
C'est la convergence de toutes ces actions qui nous permettra d'avancer sur ce dossier particulièrement important.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6, accepté par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 11 bis, ainsi modifié.

(L'article 11 bis est adopté.)

Articles 11 ter , 12, 13, 14 bis , 15, 16, 18 et 21