SEANCE DU 11 OCTOBRE 2000
M. le président.
« Art. 1er. - L'article 356-1-4 de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 sur les
sociétés commerciales est ainsi rédigé :
«
Art. 356-1-4
. - Toute clause d'une convention prévoyant des
conditions préférentielles de cession ou d'acquisition d'actions admises aux
négociations sur un marché réglementé et portant sur au moins 0,5 % du capital
ou des droits de vote de la société qui a émis ces actions doit être transmise
dans un délai fixé par décret au Conseil des marchés financiers qui en assure
la publicité. A défaut de transmission, les effets de cette clause sont
suspendus, et les parties déliées de leurs engagements, en période d'offre
publique.
« Le conseil doit également être informé de la date à laquelle la clause prend
fin. Il assure la publicité de cette information.
« Les clauses des conventions conclues avant la date de publication de la loi
n° du relative aux nouvelles régulations économiques qui
n'ont pas été transmises au Conseil des marchés financiers à cette date doivent
lui être transmises, dans les mêmes conditions et avec les mêmes effets que
ceux mentionnés au premier alinéa, dans un délai de six mois. »
Par amendement n° 479, le Gouvernement propose :
I. - De rédiger comme suit le premier alinéa de cet article :
« L'article L. 233-11 du code de commerce est ainsi rédigé :. »
II. - Au début du second alinéa de ce même article, de remplacer la référence
: «
Art. 356-1-4
» par la référence : «
Art. L. 233-11
».
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Marylise Lebranchu,
secrétaire d'Etat.
Il s'agit d'un amendement de codification.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Cet amendement est le premier d'une très longue série. La
commission sera favorable à ces amendements excepté lorsque, pour des raisons
de coordination, la codification proposée entre en contradiction avec ses
propres amendements.
Mme Marylise Lebranchu,
secrétaire d'Etat.
C'est logique !
M. Philippe Marini,
rapporteur.
La codification dont il s'agit, dans notre esprit, se fait
bien à droit constant...
Mme Marylise Lebranchu,
secrétaire d'Etat.
Tout à fait !
M. Philippe Marini,
rapporteur.
... selon les principes en usage dans ce domaine.
Nous n'avons pas été en mesure, nous-mêmes, de « peigner », si j'ose
m'exprimer ainsi, l'ensemble de la matière. Nous espérons donc que, dans cette
codification, aucune transcription n'aille au-delà du concept du droit
constant.
Bien entendu, nos votes d'aujourd'hui et des jours à venir en cette matière ne
nous engagent aucunement s'agissant des positions que nous serons amenés à
prendre lors de l'examen du projet de loi de ratification sur lequel les
assemblées auront ultérieurement à se prononcer.
Cela dit, je pense qu'il y a vraiment très peu de risque, le travail ayant été
bien fait, que nous ayons à revenir dans le détail sur tel ou tel vote.
Sous le bénéfice de ces observations, la commission est favorable à cet
amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 479, accepté par la commission.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 157, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose, dans la première phrase du deuxième alinéa de l'article 1er, de
remplacer les mots : « dans un délai fixé par décret », par le mot : «
immédiatement ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Nous entrons maintenant dans le domaine du droit boursier. Il
s'agit de prévoir ici que la transmission des clauses comportant des conditions
préférentielles d'acquisition ou de cession au Conseil des marchés financiers
se fait immédiatement et non pas dans un délai fixé par décret.
Cette modification assurera l'application immédiate du dispositif dès la
promulgation de la loi. Point ne sera besoin d'attendre la sortie d'un
hypothétique décret. Ce dispositif, qui a une réelle utilité pour faire
progresser la transparence du marché, doit s'appliquer sans retard.
C'est donc dans cet esprit, pour travailler à l'amélioration des procédures de
la place de Paris, que nous proposons l'amendement n° 157.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement souhaite renforcer la transparence du
fonctionnement des marchés financiers, et c'est à cette fin que l'article 1er
du projet de loi prévoit la transmission au Conseil des marchés financiers des
clauses des conventions d'actionnaires comportant des conditions
préférentielles de cession ou d'acquisition d'actions de sociétés cotées.
Vous proposez, monsieur le rapporteur, de préciser que cette transmission se
fasse immédiatement. Objectivement, en droit, la notion « immédiatement » est
floue et une formulation aussi imprécise risque de poser des problèmes
juridiques.
C'est pourquoi j'ai proposé de prévoir un délai de transmission fixé par
décret. Le décret indiquera également comment ce délai doit être calculé. Il va
de soi que le délai doit être court, vous avez raison sur le fond.
Je vous demande donc, monsieur le rapporteur, de retirer cet amendement n°
157. A défaut, nous y serons défavorables dans la mesure où nous nous engageons
à faire un bon travail technique pour que ce délai soit court.
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini,
rapporteur.
De quoi s'agit-il ? Il s'agit de pactes ou d'accords
d'actionnaires comportant des clauses préférentielles d'acquisition. Cette
notion juridique est très bien cernée ; il n'y a aucune ambiguïté à ce sujet.
Il s'agit donc de prévoir que de telles clauses sont bien portées à la
connaissance du marché, et ce sans délai.
Le Gouvernement nous propose de fixer ce délai par un décret, et donc
d'attendre la sortie de ce décret et l'expiration du délai qu'il prévoira.
Pourquoi s'infliger cette double attente alors que l'on peut faire les choses
tout de suite ? Le terme « immédiatement » veut dire que, dès la promulgation
de la loi, il est du devoir des initiateurs de tels accords ou simplement des
détenteurs de tels accords de les communiquer matériellement au Conseil des
marchés financiers.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 157.
M. Michel Charasse.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse.
Je comprends bien le souci du rapporteur mais la brutalité du mot «
immédiatement » m'effraie un peu quant à ses conditions d'application.
A la limite, s'il était proposé que le décret doive paraître dans un délai de
quinze jours, ou trois semaines ou dans un délai approchant, je comprendrais.
Mais j'ai bien entendu les propos de M. le rapporteur qui a dit : « dès la
promulgation de la loi », c'est-à-dire en réalité dès qu'elle est applicable,
soit une jour franc après l'arrivée du
Journal officiel
dans le lieu
considéré. Cela signifie que le jour ne sera pas le même selon que l'on se
trouve à Paris ou en province.
Que se passe-t-il si on ne le fait pas le jour même ? Y a-t-il une sanction ou
est-ce qu'ayant raté le jour immédiat on ne peut plus le faire ? Je pose la
question à notre rapporteur, qui est meilleur spécialiste du droit financier et
bancaire que moi dans ce domaine.
Je crains que le mot « immédiatement » - même si je comprends bien le motif de
sa proposition : il pense en effet qu'il faut le faire le plus vite possible -
ne risque d'entraîner des difficultés et des contentieux.
A cela s'ajoute le fait que la date d'application de la loi parue au
Journal officiel
n'est pas la même selon qu'on est à Paris ou en
province, s'il y a un dimanche ou s'il n'y en a pas, s'il y a un jour ouvrable
ou s'il n'y en a pas.
J'appelle donc votre attention : quel que soit le sort de cet amendement, les
modalités pratiques d'application de ce dispositif ne me paraissent pas si
évidentes que cela.
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Je crois devoir répondre à M. Michel Charasse qu'il existe
toute une jurisprudence sur l'application des lois et sur les délais de
promulgation et d'acheminement de l'information. Cette jurisprudence tient très
exactement compte de ce qu'il a dit, c'est-à-dire de la capacité plus ou moins
immédiate où l'on se trouve de prendre connaissance d'un nouveau texte et il
est très simple de s'y référer. Tout cela, allais-je dire, est vieux comme le
Journal officiel
!
S'agissant des risques de contentieux qui ont été évoqués, je voudrais en
souligner un qui me semble découler de la rédaction du Gouvernement, madame le
secrétaire d'Etat. Que se passerait-il dans le cas où une offre publique serait
déclenchée entre le moment de la signature d'un pacte et l'expiration du délai
de transmission au Conseil des marchés financiers ? Cela ne risquerait-il pas
de donner lieu à contentieux ?
Nous disons donc que, en l'absence d'un délai, un pacte non transmis au
Conseil des marchés financiers ne peut, du fait de la loi, avoir d'effets en
période d'offre publique. Nous évoquons en effet des événements qui
s'enchaînent très rapidement.
C'est donc précisément dans le souci de simplifier, d'aller plus vite,
d'améliorer la transparence et d'éviter les risques de contentieux que nous
avons déposé cet amendement.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 157, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 356, MM. Cornu, Courtois, Cazalet, Francis Giraud et Murat
proposent, dans le quatrième alinéa de l'article 1er, de remplacer les mots : «
avant la date de la publication de la loi n° du relative aux
nouvelles régulations économiques » par les mots : « depuis le 1er janvier 1995
».
La parole est à M. Murat.
M. Bernard Murat.
Le dispositif de l'article 1er, qui étend l'obligation de transmission au
Conseil des marchés financiers de l'ensemble des pactes d'actionnaires, doit
être modifié pour simplifier son application. Il est proposé à cette fin de
fixer une limite dans le temps, en imposant la publication des seuls pactes
conclus depuis le 1er janvier 1995.
On évitera ainsi que ne soit réalisé un historique obligatoire des accords
passés par une entreprise ayant disparu. Cette mesure de simplification ne
remet évidemment pas en cause l'objectif de transparence qui sous-tend
l'article 1er.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
La commission approuve le souci de simplification qui a
justifié le dépôt de l'amendement n° 356, mais il est de mon devoir de rappeler
que des pactes relativement anciens, en l'occurrence conclus avant le 1er
janvier 1995, sont susceptibles d'avoir aujourd'hui encore des effets en
période d'offre publique alors que le marché n'en a pas connaissance. Dès lors,
le fonctionnement du marché est bel et bien faussé.
Mon propos ne repose pas sur une fiction : il est facile de se référer aux
épisodes des offres publiques bancaires qui ont eu lieu au printemps et à l'été
1999. Lors de l'un de ces épisodes, il est arrivé que les parties «
redécouvrent », de façon sans doute pas tout à fait innocente, un pacte vieux
d'une quinzaine d'années au beau milieu d'une opération, ce qui a donné lieu à
la publication, par la Commission des opérations de bourse, d'un communiqué qui
figure à la page 35 du rapport de la commission des finances.
C'est donc bien par souci de transparence, et malgré les conséquences sur une
gestion matérielle sans doute plus lourde, que la commission des finances ne
peut aller dans le sens de l'amendement n° 356. Il lui semble que la
transparence du marché, l'information de tous les membres du marché, de tous
les investisseurs est un principe avec lequel on ne peut en aucun cas
transiger.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu,
secrétaire d'Etat.
Il faut rejeter cet amendement, car il ne correspond
pas à notre souhait à tous d'assurer une transparence accrue du marché
financier.
M. le président.
Monsieur Murat, l'amendement est-il maintenu ?
M. Bernard Murat.
Nous le retirons, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° 356 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er, modifié.
M. Robert Bret.
Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstient.
M. Michel Charasse.
Le groupe socialiste également.
(L'article 1er est adopté.)
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