SEANCE DU 17 OCTOBRE 2000
M. le président.
Par amendement n° 25, le Gouvernement propose d'ajouter, après l'article 75,
un article additionnel ainsi rédigé :
« Il est créé, sous le nom d'Agence française pour les investissements
internationaux, un établissement public national à caractère industriel et
commercial, placé sous la tutelle du ministre chargé de l'économie et des
finances et du ministre chargé de l'aménagement du territoire.
« L'agence a pour mission la promotion, la prospection et l'accueil des
investissements internationaux en France. Elle assure cette mission en
partenariat avec les collectivités territoriales. Elle associe à son action les
acteurs économiques.
« L'agence est administrée par un conseil d'administration composé :
« - de représentants de l'Etat,
« - de représentants des collectivités territoriales,
« - de personnalités qualifiées,
« - de représentants du personnel désignés dans les conditions prévues au
chapitre II du titre II de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la
démocratisation du secteur public.
« Pour accomplir ses missions, l'agence comprend notamment des services
centraux et des bureaux à l'étranger. Ces bureaux sont des services de l'Etat.
Les personnels de l'agence peuvent être des agents de droit public.
« Les ressources de l'agence sont constituées par des dotations de l'Etat, des
redevances pour service rendu, le produit des ventes et des locations ainsi que
par des emprunts, dons et legs et recettes diverses.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application du présent
article. »
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Marylise Lebranchu,
secrétaire d'Etat.
Les investissements internationaux en France sont un
facteur important de développement économique du territoire, tout le monde en
est convaincu. L'article proposé prévoit de créer une agence française pour les
investissements internationaux, ce qui permet de regrouper en une structure
unifiée les différents moyens de l'Etat consacrés à la promotion, la
prospection et l'accueil des investissements internationaux en France. Cette
structure est un établissement public à caractère industriel et commercial pour
permettre une meilleure participation des collectivités locales et des acteurs
économiques.
Au cours d'autres débats dans cette enceinte, il avait été fait référence à
l'absence d'outils de ce type. Par conséquent, je crois que satisfaction est
donnée à nombre d'entre vous.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Cet amendement arrive trop tard pour que nous puissions
réellement disposer de tous les éléments nécessaires, mais ces sujets ont déjà
fait l'objet, c'est vrai, de différents rapports et de diverses propositions.
Je n'entrerai pas dans le détail du dispositif ; il suffira de dire que la
commission des finances n'est pas opposée à cette initiative et qu'elle s'en
remet à la sagesse du Sénat.
M. le président.
Personne ne demande la parole ? ...
Je mets aux voix l'amendement n° 25, pour lequel la commission s'en remet à la
sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 75.
Par amendement n° 26, M. Charasse propose d'ajouter, après l'article 75, un
article additionnel ainsi rédigé :
« I. - La dernière phrase de l'article L. 212-7 du code de la propriété
intellectuelle est supprimée.
« II. - Les dispositions de l'article L. 212-7 du code de la propriété
intellectuelle :
« 1° Ne sont pas applicables aux actes d'exploitation de l'interprétation d'un
artiste-interprète décédé qui ont été autorisés avant la date d'entrée en
vigueur de la présente loi ;
« 2° Ne sont pas opposables à l'exploitation des oeuvres, fixations ou
programmes en vue de la réalisation desquels les actes d'exploitation
mentionnés au 1° ont été autorisés. »
La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse.
Je suis navré de prolonger de quelques instants cette séance déjà longue, et
j'essaierai d'être très bref.
Mme Tasca m'avait en quelque sorte donné rendez-vous, mais je ne pensais pas,
chère madame, que l'on se rencontrerait si tard et pour si peu de temps !
(Sourires.)
Il s'agit en effet d'une question que j'avais soulevée - et le Sénat avait
d'ailleurs apprécié que je le fasse puisqu'il avait approuvé mes propositions -
lors de l'examen de la loi sur l'audiovisuel, celle des droits à rémunération
des héritiers d'artistes décédés ayant obtenu un droit à rémunération pour les
oeuvres antérieures à l'entrée en vigueur de la loi Lang de 1985 lorsqu'il
s'agissait de modes d'exploitation exclus par ce contrat, c'est-à-dire
lorsqu'il s'agissait de ce que l'on appelle aujourd'hui les droits dérivés et
les droits nouveaux.
Il est vrai que le texte qui avait été voté, sur ma proposition, une première
puis une seconde fois par le Sénat, mais qui n'avait pas été retenu par
l'Assemblée nationale méritait d'être réexaminé, et ce pour les raisons
techniques qu'avait à l'époque soulevées le ministre. Celui-ci avait suggéré
que nous nous retrouvions à l'occasion de l'examen du projet de loi relatif aux
nouvelles régulations économiques, et c'est pourquoi je représente aujourd'hui
cet amendement.
Il s'agit en quelque sorte de rétablir, ou plutôt d'établir, les droits des
héritiers qui ont été, à l'époque, spoliés sans porter atteinte aux droits qui
sont nés de la loi de 1985 en faveur des non-héritiers, c'est-à-dire des
producteurs qui ont obtenu le droit d'exploiter ces droits.
Puisque c'est une question dont nous avons déjà parlé, je me bornerai à dire
que c'est une mesure de justice qui vise à mettre un terme à la spoliation d'un
certain nombre d'héritiers en supprimant la différence qui existe aujourd'hui
entre l'artiste vivant, qui conserve tous ses droits, et l'artiste mort, car
les droits des héritiers des artistes disparus avant le terme légal de leurs
droits sont lésés. Cette situation concerne beaucoup d'enfants d'artistes, et
non pas un très petit nombre comme on pourrait le croire.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Notre collègue M. Michel Charasse soulève à nouveau le
problème très réel de la rémunération des artistes interprètes décédés. Il
reprend ici le principe d'un amendement qu'il a déjà fait voter par le Sénat
dans un autre texte. Si nous avons bien compris, le Gouvernement, sans
méconnaître l'injustice d'une situation qui prive certains héritiers de droits
pour les conférer à des non-héritiers, souhaite parvenir à des solutions
négociées. Par l'amendement qui est présenté, notre collègue entend stimuler le
zèle du Gouvernement. Nous ne pouvons que soutenir cet effort et être
attentifs, madame le ministre, à l'avis que vous voudrez bien donner sur cet
amendement, pour lequel nous nous en remettons à la sagesse du Sénat.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Tasca,
ministre de la culture et de la communication.
Monsieur le président, je
suis obligée de m'exprimer assez longuement sur ce sujet dont nous avons en
effet déjà débattu au mois de juin ici même car, au fond, si nous ne sommes pas
parvenus à un accord, c'est précisément en raison de sa complexité
juridique.
Je souhaite rappeler le contexte général dans lequel se situe l'amendement.
Avant 1985, les artistes-interprètes étaient de simples salariés ; la loi de
1985 a créé des droits moraux et patrimoniaux en leur faveur. Une telle
innovation juridique devait être accompagnée d'un règlement des situations nées
des contrats passés avant l'entrée en vigueur de la loi, en tenant compte des
intérêts des parties en cause, les artistes, mais aussi les producteurs. Un
compromis a été trouvé avec l'accord des parties intéressées, dont la
traduction juridique réside dans l'article L. 212-7 du code de la propriété
intellectuelle.
Certes, l'amendement présenté aujourd'hui modifie le dispositif initialement
proposé par M. Charasse lors de la discussion d'un précédent projet de loi en
évitant de donner aux droits nouvellement consentis un effet rétroactif. Le
Gouvernement n'y est cependant pas favorable, et cela pour deux raisons.
D'une part, cet amendement institue un double régime juridique sur une même
prestation, en faisant renaître des droits jusqu'alors éteints, créant ainsi un
mécanisme juridique tout à fait exceptionnel.
D'autre part et surtout, il remet en cause un compromis, qui avait été obtenu
au terme d'une large concertation des parties intéressées et qui a été consacré
par le législateur en 1985.
Pour répondre par ailleurs à un argument juridique avancé par M. Charasse, je
souhaite préciser, concernant les aspects communautaires, que la directive
93-98 du 29 octobre 1993 harmonise certes la durée de protection des droits
voisins à cinquante ans à compter du 1er janvier 1995, mais elle ne contient
aucune disposition relative aux droits liés à des contrats passés avant cette
date. La directive laisse aux législations nationales le soin de prendre les
dispositions nécessaires pour préserver les droits acquis des tiers et de
veiller à ce que les situations nées sous l'empire de l'ancienne règle ne
soient pas perturbées, afin de ne pas nuire à la sécurité juridique.
Le Gouvernement préfère donc que ce sujet fasse l'objet d'une concertation
avec les parties prenantes, et, à cet effet, je souhaite le soumettre à
l'examen du Conseil supérieur de la propriété artistique, qui a été créé en
juillet dernier.
M. le président.
Monsieur Charasse, l'amendement n° 26 est-il maintenu ?
M. Michel Charasse.
J'ai toujours eu du mal à comprendre pourquoi les enfants des auteurs
devraient voir les producteurs gagner beaucoup d'argent en exploitant les
oeuvres de leur mère ou de leur père, mais j'ai bien entendu la proposition de
Mme le ministre... et cet amendement va finir par apparaître l'amendement le
plus retiré de France, puisque cela fera trois fois !
(Rires.)
Soit ! Consultons le nouveau Conseil supérieur : s'il s'agit de lui demander
son avis et que l'on puisse décider de ne pas exactement le suivre, à la
limite, moi, je veux bien ! Mais si c'est pour s'en remettre à l'avis d'une
instance dans laquelle les représentants des artistes interprètes sont deux sur
trente-deux, on connaît la réponse. Les producteurs ont déjà fait le coup en
1985, et ce sont eux qui, aujourd'hui, gagnent de l'argent au détriment des
héritiers ! Si la même chose se reproduit avec le nouveau Conseil supérieur, je
n'en vois pas très bien l'intérêt.
Je sais que Mme le ministre a un réel désir de régler cette question et de
mettre un terme à cette injustice insupportable, et, à mon avis, contraire à la
convention européenne en matière de droits d'auteur. Par conséquent, sous
réserve des indications qui viennent d'être données par Mme le ministre, et
dans l'attente de la consultation de ce fameux conseil, qui ne doit pas être le
porte-parole d'un certain nombre d'intérêts, mais donner un avis en équité, je
veux bien, une fois de plus, retirer cet amendement. Il paraît qu'à la
cinquième fois je gagne un filet garni !
(Sourires.)
M. le président.
L'amendement n° 26 est retiré.
Mme Catherine Tasca,
ministre de la culture et de la communication.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Catherine Tasca,
ministre de la culture et de la communication.
Je précise que le nouveau
Conseil supérieur est bien évidemment une instance consultative et que nous ne
sommes donc pas liés par ses avis.
Par ailleurs, la défense des intérêts des artistes n'est pas proportionnelle
au nombre et à la qualité des membres qui composent le Conseil. Cette
préoccupation est bien évidemment partagée, au-delà des représentants des
artistes-interprètes, par le Gouvernement lui-même.
Vote sur l'ensemble