SEANCE DU 7 NOVEMBRE 2000
M. le président.
La parole est à Mme Dieulangard, auteur de la question n° 893, adressée à Mme
le ministre de l'emploi et de la solidarité.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Ma question, qui s'adresse à Mme le secrétaire d'Etat à la santé, concerne les
modalités de mise en oeuvre de la préretraite « amiante » et le calcul des
dates de fin d'exposition à ce matériau dangereux. Elle concerne également la
liste des établissements retenus, car certaines entreprises sous-traitantes de
la construction et de la réparation navale ont été oubliées.
En 1998, le Gouvernement a souhaité instituer une allocation de cessation
anticipée d'activité pour les salariés ayant été exposés à ce matériau,
susceptible de provoquer des pathologies graves telles que les plaques
pleurales, les asbestoses ou les mésothéliomes.
Un arrêté du 7 juillet 2000 précise la liste des entreprises, des métiers et
des périodes d'exposition pour la construction et la réparation navale.
Plusieurs organisations syndicales, mais aussi l'association de défense des
victimes de l'amiante, se mobilisent car, pour le chantier de Saint-Nazaire, le
choix de l'année 1975 comme date de fin d'exposition à l'amiante pose un
problème.
En effet, l'écoulement des stocks d'amiante pour le flocage s'est poursuivi
au-delà de 1975. Puis un autre procédé a été utilisé jusqu'aux années
quatre-vingt-dix : il s'agit de panneaux en marinite, composé d'amosite qui
est, selon l'Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention
des accidents du travail et des maladies professionnelles, une des variétés
d'amiante les plus dangereuses. A l'occasion de leur manipulation, des fibres
ont été inhalées par les salariés jusqu'aux années 1990, et des joints
contenants de l'amiante ont été employés jusqu'en 1997.
Vous comprendrez donc, madame la secrétaire d'Etat, que les salariés aient été
émus lors de la parution de l'arrêté de juillet dernier alors que, pour les
sites de la Normed, où étaient exercés les mêmes métiers dans des conditions
techniques comparables, la date retenue correspond, en fait, à la fermeture de
cette entreprise en 1989.
Par ailleurs, certaines personnes qui seraient concernées par la préretraite «
amiante » échappent, de fait, à ce dispositif. Elles sont aujourd'hui au
chômage. Je pense en particulier aux 450 salariés de l'entreprise Dubigeon, qui
avaient été remerciés. Pour eux, la situation est encore plus injuste, car ils
sont privés de ce dispositif.
En outre, sont absentes de la liste de certaines entreprises de sous-traitance
navale, ainsi que des entreprises de services, notamment de nettoyage.
Il paraît donc essentiel que le temps réel d'exposition à l'amiante soit pris
en compte - et ce pour tous les salariés -, tout comme il paraît équitable de
faire bénéficier de ce dispositif les salariés atteints d'affections pleurales,
considérées comme bénignes et classées en catégorie B du tableau n° 30 des
maladies professionnelles, car ils ne sont pas répertoriés parmi les
bénéficiaires de ce dispositif.
Madame la secrétaire d'Etat, pouvez-vous nous indiquer les critères qui ont
été retenus pour arrêter l'année 1975 comme date limite d'exposition pour ces
entreprises ? Le Gouvernement envisage-t-il de réexaminer cette décision,
notamment au vu des informations fournies par les représentants des personnels
? Peut-il, de même, envisager d'intégrer parmi les bénéficiaires de ce
dispositif les salariés atteints par des lésions pleurales dites bénignes ?
M. le président.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Dominique Gillot,
secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.
Madame la sénatrice, nous
savons tous les souffrances qu'endurent ceux qui ont été exposés à l'amiante et
la détresse de ceux qui leur sont proches.
Comme souvent, l'injustice s'est acharnée sur les plus fragiles. Ce sont le
plus souvent les salariés astreints à des emplois pénibles qui, aujourd'hui,
sont fauchés par la maladie.
C'est pourquoi, depuis que ce gouvernement est en place, il a oeuvré pour que
ces drames humains ne se doublent pas de drames sociaux. D'importantes mesures
ont été prises pour faciliter l'accès à la reconnaissance et à la réparation
des maladies professionnelles pour l'ensemble des personnes qui en sont
victimes. Des mesures plus spécifiques pour les maladies liées à l'amiante ont
également été mises en oeuvre.
Le dispositif de cessation anticipée d'activité pour les travailleurs de
l'amiante est, bien évidemment, un élément fondamental de cette politique. Créé
en 1999, il a été élargi par la loi de financement de la sécurité sociale pour
2000 au secteur de la construction et de la réparation navale.
La mise en oeuvre de ce dispositif nécessitait de recenser les entreprises
concernées et, pour chacune, les périodes pendant lesquelles l'amiante avait
été utilisée. C'est l'objet de l'arrêté du 7 juillet 2000.
Je crois utile de préciser que ce travail de recensement est particulièrement
lourd et minutieux, vous le savez. Il s'agit de repérer des centaines
d'entreprises, or certaines ont disparu depuis longtemps, tandis que d'autres,
touchées par les restructurations, ont changé plusieurs fois de dénomination,
de raison sociale ou de propriétaire.
Ce travail est réalisé en étroite concertation avec les services déconcentrés
du ministère, avec les caisses de sécurité sociale ou encore avec les mutuelles
des secteurs concernés.
Comme nous l'avons fait pour les entreprises de fabrication d'amiante, nous
prendrons autant de textes qu'il sera nécessaire dans le domaine de la
construction et de la réparation navale pour couvrir tant les entreprises que
les périodes ouvrant droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité.
Pour ce faire, nous nous appuyons notamment sur les informations transmises
par les organisations syndicales et par les associations d'aide aux victimes.
Je tiens d'ailleurs à souligner la qualité et le sérieux de leurs
interventions. En ce domaine, leur collaboration nous est indispensable !
Des modifications de l'arrêté du 7 juillet 2000 sont d'ores et déjà prévues
et, dans le cas particulier des Chantiers de l'Atlantique, grâce aux
informations transmises par les syndicats, après vérification auprès des
caisses régionales d'assurance maladie et des directions régionales du travail,
de l'emploi et de la formation professionnelle, nous allons prolonger la
période ouvrant droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité dans
cette entreprise dans le sens que vous souhaitez. Les modifications nécessaires
seront prochainement soumises pour avis, comme le prévoit la procédure, à la
commission des accidents du travail et feront l'objet d'un arrêté
modificatif.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Je vous remercie, madame la secrétaire d'Etat, de cette réponse très ouverte,
de nature à donner satisfaction aux salariés intervenant dans la construction
et la réparation navale.
Restent ceux qui sont atteints de maladies professionnelles classées dans la
catégorie B du tableau n° 30.
Je vous demande de ne pas fermer ce dossier. En effet, nous nous trouvons dans
une situation paradoxale où des salariés ayant été exposés mais ne manifestant
aucun signe pathologique peuvent envisager de partir en préretraite anticipée
alors que d'autres, qui ont une pathologie déclarée, certes considérée comme
bénigne, se voient refuser le bénéfice de ce dispositif.
MAINTIEN À DOMICILE DES PERSONNES ÂGÉES