SEANCE DU 21 NOVEMBRE 2000
M. le président.
Avant de mettre aux voix les conclusions de la commission des lois, je donne
la parole à Mme Borvo pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le texte que
nous nous apprêtons à voter a pour objet essentiel de réparer quelques oublis,
imprécisions ou erreurs qui subsistaient après le vote de la loi du 15 juin
2000. De ce point de vue, évidemment, le résultat est positif.
En premier lieu, la proposition de loi initiale visait à réparer l'injustice
née de la distorsion et du défaut de cohérence entre les articles 149 et 626 du
code de procédure pénale, distorsion qui avait eu des effets particulièrement
choquants. L'harmonisation préconisée répare donc cette injustice flagrante, et
nous ne pouvons qu'en être satisfaits.
Quant aux articles de la présente proposition de loi, ils visent à rendre
applicable la loi sur la présomption d'innocence - pour reprendre les termes
utilisés par M. le rapporteur - et, bien entendu, nous ne pouvons que les
approuver.
Cela étant, permettez-moi deux remarques.
Premièrement, plus personne ne s'y retrouve dans le foisonnement des textes
actuels. Il est tout de même inquiétant que l'on doive apporter des correctifs
à une loi cinq mois seulement après son adoption ! Que les services
ministériels et les assemblées parlementaires, au terme de deux lectures et
d'une commission mixte paritaire, aient pu laisser échapper des erreurs montre
à quel point la loi est devenue illisible, même pour les spécialistes !
Cette situation illustre bien les aspects particulièrement négatifs d'une
inflation législative qui n'a rien d'accidentel et dont les effets pervers sont
dénoncés depuis fort longtemps. Cette inflation est source d'insécurité
juridique permanente, ce qui n'est pas tolérable et qui suscite bien des
interrogations sur le sens du principe selon lequel « nul n'est censé ignorer
la loi ».
En tant que législateurs, nous avons notre part de responsabilité et nous
devons en tirer tous des enseignements pour l'avenir.
Deuxièmement, ce retour inopiné sur la loi relative au renforcement de la
présomption d'innocence ne peut pas aller sans évoquer les difficultés
rencontrées sur le terrain pour la mise en place des nouvelles dispositions.
Tant les avocats que les magistrats dénoncent l'absence de moyens suffisants
et anticipés pour faire face à ces changements.
Les amendements présentés par le Gouvernement relatifs à l'organisation des
permanences en période de congés et dans les petites juridictions, que nous
avons adoptés, révèlent bien ces difficultés.
Je ne développerai pas plus mon propos - nous aurons l'occasion d'y revenir au
moment de la discussion budgétaire - sinon pour dire, là aussi, combien il nous
faut être vigilants si nous ne voulons pas que les dispositions adoptées
restent lettre morte faute d'être matériellement applicables. Un suivi effectif
de la loi s'avère d'ores et déjà nécessaire !
C'est en ayant à l'esprit tous ces éléments que les sénateurs du groupe
communiste républicain et citoyen voteront ce texte dans son ensemble.
M. Charles Jolibois,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Charles Jolibois,
rapporteur.
En réponse à Mme Borvo, je tiens à rappeler que le code de
procédure pénale n'avait pas été modifié de manière aussi importante depuis
1897, époque à laquelle avait été révisée la procédure d'instruction. Il
s'agissait, par conséquent, d'un travail tout à fait énorme !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Vous oubliez 1958 !
M. Charles Jolibois,
rapporteur.
Le travail était plus important qu'en 1958 !
Quand j'ai rapporté le projet de code pénal, nous avons dû, là aussi, procéder
à quelques rectifications, M. Dreyfus-Schmidt s'en souvient sans doute. Des
textes de cette ampleur entraînent forcément des rectifications ! Et il est
heureux de les faire rapidement, si possible avant l'application du texte
concerné.
Je pense donc que nous ne pouvons que nous féliciter du travail qui a été
fait, même si je dois m'en excuser auprès de ceux de mes collègues qui ont pu
considérer que cet exercice pourtant très utile était un peu ennuyeux.
M. le président.
La parole est à M. Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Je veux simplement dire que le groupe socialiste votera ce texte, cela
n'étonnera personne. Quoi qu'il en soit, je reconnais mon enfant beaucoup mieux
à l'issue de ce débat qu'à son commencement. J'en remercie mes collègues ainsi
que le Gouvernement.
M. le président.
La parole est à M. Gélard.
M. Patrice Gélard.
Je veux revenir sur les propos très intéressants de Mme Borvo. Nous sommes, en
effet, confrontés à des problèmes qu'un garde des sceaux doit s'attacher à
résoudre.
Je représente le Sénat à la commission supérieure de codification et j'ai été
frappé par le trop petit nombre de fonctionnaires chargés de suivre ces
problèmes. Trop de ministères délaissent les questions juridiques et ne
délèguent pas les personnels suffisants. Je me souviens encore d'un jour où
nous délibérions d'un sujet relatif à l'outre-mer, sur lequel le garde des
sceaux a dû détacher deux magistrats faute de fonctionnaires compétents en
matière juridique. C'est un problème particulièrement important !
Un exemple choquant peut illustrer cette situation : quelques semaines après
la promulgation de l'ordonnance relative au code de commerce, il a fallu
publier un rectificatif. Il ne faut pas que ce genre de choses se reproduise
!
Notre code de procédure pénale a vieilli et il est peut-être temps, à la
lumière du travail que nous venons d'accomplir sur la présomption d'innocence,
de penser à une révision complète et totale de ce code.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les conclusions rectifiés modifiées de la commission des lois
sur la proposition de loi n° 474 (1999-2000).
(Ces conclusions sont adoptées.)
M. le président.
Je constate que le vote est intervenu à l'unanimité.
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