SEANCE DU 18 JANVIER 2001
M. le président.
« Art. 7. - I. - L'article L. 2123-23 du même code est ainsi rédigé :
«
Art. L. 2123-23.
- Les indemnités maximales votées par les conseils
municipaux pour l'exercice effectif des fonctions de maire des communes et de
président de délégations spéciales sont déterminées en appliquant au terme de
référence mentionné à l'article L. 2123-20 le barème suivant :
POPULATION (HABITANTS) |
TAUX MAXIMAL EN % |
---|---|
Moins de 500 | 17 |
500 à 999 | 31 |
1 000 à 3 499 | 43 |
3 500 à 9 999 | 55 |
10 000 à 19 999 | 65 |
20 000 à 49 999 | 90 |
50 000 à 99 999 | 110 |
100 000 et plus | 145 |
« La population à prendre en compte est la population totale municipale
résultant du dernier recensement. » ;
« II. - L'article L. 2123-23-1 du même code est abrogé.
« III. - Dans le premier alinéa de l'article L. 3123-17, les mots : "majoré de
30 %" sont remplacés par les mots : "majoré de 45 %".
« IV. - Dans le premier alinéa de l'article L. 4135-17, les mots : "majoré de
30 %" sont remplacés par les mots "majoré de 45 %". »
Par amendement n° 17, M. Carle et les membres du groupe des Républicains et
Indépendants proposent d'insérer, après le II de cet article, un paragraphe
ainsi rédigé :
« ... - Le tableau du deuxième alinéa de l'article L. 3123-16 est ainsi rédigé
:
POPULATION DÉPARTEMENTALE
(habitants)
TAUX MAXIMAL EN %
Moins de 250 000 50 De 250 000 à moins de 500 000 60 De 500 000 à moins de 1 million 65 De 1 million à moins de 1,25 million 70 1,25 million et plus 75 »
La parole est à M. Carle.
M. Jean-Claude Carle.
La loi du 5 avril 2000 a prévu la revalorisation des indemnités des maires,
omettant celles des maires adjoints et des responsables des structures
intercommunales.
Le présent texte y remédie, et je m'en réjouis, parce qu'il reprend ma propre
proposition de loi ainsi que deux amendements que j'avais déposés et qui
avaient d'ailleurs été adoptés à l'unanimité par notre assemblée avec un avis
défavorable du Gouvernement. Bien sûr, ces amendements ont disparu, en deuxième
lecture, lors de l'examen du texte à l'Assemblée nationale.
En revanche, il n'est prévu aucune revalorisation des indemnités des
conseillers généraux, qui sont, je l'ai dit ce matin, des élus de proximité
très disponibles et dont les charges se sont accrues, notamment en raison de
l'accroissement de leurs compétences en matière de solidarité, qui font d'eux
des liens sociaux.
Aussi me paraît-il logique que les indemnités des conseillers généraux
puissent, elles aussi, être revalorisées.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
Nous avions effectivement souhaité satisfaire une
revendication qui émanait de l'ensemble des travées et qu'avaient formulée MM.
Carle et Legendre.
La loi du 5 avril 2000 avait prévu une revalorisation importante de la seule
indemnité de maire, d'où un décrochage avec les indemnités d'adjoint. Moyennant
quoi, un grand nombre de conseils municipaux n'avaient pas pu délibérer parce
que les maires ne voulaient pas se désolidariser de leurs adjoints.
Par ailleurs, nous nous sommes rendu compte que les indemnités de fonction des
présidents de conseil général et des présidents de conseil régional, fixées par
référence à l'indice 1015 de la fonction publique, étaient inférieures à celles
des maires de villes de plus de 100 000 habitants.
Nous avons donc souhaité « recaler » les indemnités des présidents de conseil
général et des présidents de conseil régional sur ces dernières. Nous avons
demandé à l'Assemblée des départements de France de nous préciser la graduation
par rapport à la population. A cet égard, nous remercions notre collègue
Jean-Claude Carle de nous avoir proposé quelque chose de tout à fait cohérent,
clair et logique.
J'invite l'Association des régions de France à faire de même, afin qu'au cours
de la navette les régions puissent bénéficier du même régime que les
départements.
C'est la raison pour laquelle la commission est tout à fait favorable à cet
amendement, qui corrige une injustice et qui répond à une véritable demande
exprimée sur le terrain et souvent relayée ici tant par M. Vasselle que par M.
Hérisson.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
S'agissant des exécutifs des OPCI, il faudra, me
semble-t-il, prévoir des mesures plus ciblées, plus souples, comme celles que
j'ai évoquées tout à l'heure pour les élus municipaux, plutôt qu'une
revalorisation systématique telle que proposée par la commission.
En ce qui concerne les présidents de conseil général et de conseil régional,
il n'est pas illégitime, en effet, monsieur le rapporteur, d'envisager de
relever leurs indemnités. Mais, là aussi, je plaiderai pour que cette mesure
s'inscrive dans la cohérence de la réflexion d'ensemble qui me paraît
nécessaire.
Le Gouvernement est donc défavorable à la fois à l'article et à
l'amendement.
La revalorisation du barème des conseillers généraux par un alignement
systématique sur la strate supérieure ne paraît pas constituer véritablement
une priorité, même à la veille des élections cantonales. En effet, plutôt
qu'une telle mesure à caractère très général, le Gouvernement entend, dans le
projet qu'il élabore actuellement, privilégier une approche différenciée et
équitable de la revalorisation des indemnités selon le niveau et l'importance
des responsabilités exercées. Ce que je disais tout à l'heure pour les
conseillers municipaux vaut donc pour les conseillers généraux.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 17.
M. Pierre Hérisson.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson.
Pour rebondir sur ce qu'a dit M. le rapporteur, j'ajouterai qu'il y a une
logique à espérer de la lecture à l'Assemblée nationale qu'elle donne au
président de l'Association des régions de France le temps de fournir les
éléments nécessaires et une grille indiciaire semblable à celle qui est
proposée par notre collègue Jean-Claude Carle, à l'amendement n° 17, afin que
nous aboutissions à une identité de traitement.
Comme je le disais tout à l'heure à M. Karoutchi, que je remercie, au passage,
d'avoir compris mon propos au sujet de l'Association des maires de France, il
faut éviter d'avoir à gérer les récriminations de tous ceux qui ne sont pas
servis à chaque fois que l'on retouche, de façon ponctuelle, le dispositif.
En outre, j'observe, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'une des difficultés
tient au fait que l'indemnité peut varier, mais jusqu'à un maximum, et non pas
en fonction d'une grille. Cela éviterait de sombres « bidouillages » dès lors
que les élus font l'addition de leurs indemnités pour savoir s'ils se font
voter l'indemnité maximum et s'ils peuvent échapper à l'impôt.
De surcroît, il y a solidarité dans la délibération concernant la fixation de
l'indemnité des élus. Lorsque vous êtes maire, vous êtes tout seul, et la
délibération ne concerne que votre indemnité. Mais elle sert à déterminer
ensuite, en pourcentage, l'indemnité des adjoints, qui sont tous traités de la
même manière. Si, par malheur, un des adjoints est également président ou
vice-président d'un groupement intercommunal, il va dépasser le seuil, il sera
fiscalisé et, au bout du compte, son indemnité nette sera inférieure à celle
des autres, qui, eux, auront échappé à la fiscalisation ! Notre collègue Alain
Vasselle a rouvert le débat sur le principe de la fiscalisation et sur la
difficulté que posent les seuils en la matière.
Là aussi, monsieur le secrétaire d'Etat, si nous devons avoir à connaître,
dans un avenir proche, un texte plus cohérent, pourquoi permettre qu'il y ait
des élus « à deux vitesses » ?
N'est-il pas logique de prévoir la fiscalisation systématique de toutes les
indemnités, dès le premier franc, plutôt que de laisser les élus s'embarquer
dans toute sorte de calculs pour savoir s'ils doivent demander l'indemnité
maximum ou pas, et ce dans le seul but d'échapper à la fiscalité ?
Je crois que nous avons besoin d'une simplification, mais d'une simplification
véritable ! Nous sommes maintenant d'accord - c'est en tout cas le sens de
l'article qui a été voté tout à l'heure - pour reconnaître que l'indemnité ne
constitue pas une rémunération en contrepartie d'un travail fourni. Pourquoi,
donc, ne pas continuer dans cette logique de simplification ? Ou bien les
indemnités sont fiscalisées ou elles ne le sont pas ; mais on ne peut pas
rester avec ce système des seuils, qui, en plus, évoluent sans arrêt en
fonction des décisions et des délibérations.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 17, accepté par la commission et repoussé par
le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'article 7.
M. Alain Vasselle.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle.
Je veux profiter de l'occasion qui m'est fournie par ce dernier article sur
les indemnités versées aux élus pour formuler deux remarques, dont la première
à l'intention de notre collègue Pierre Hérisson.
D'après notre collègue, on attendrait un texte plus cohérent que celui-ci pour
faire d'autres avancées sur le statut de l'élu.
J'ose espérer que le mot lui a échappé, car je considère que le texte que j'ai
proposé, et qu'il a lui-même signé, est tout à fait cohérent et équilibré !
(Sourires.)
Ma seconde remarque intéresse la commission des lois, notamment son
rapporteur. J'ai noté que, sauf erreur de ma part, ni dans la discussion
générale, ni dans l'examen des articles, M. le rapporteur, si ce n'est une
brève allusion qui se trouve dans son rapport, n'a fait référence à l'article 7
de la proposition de loi qui a été signée par l'ensemble de mes collègues et
qui avait pour objet d'ouvrir une réflexion sur l'indemnisation des élus, en
tenant compte de la perte de revenu que subissent certaines catégories
professionnelles dans le cadre de l'exercice de mandats électifs.
En effet, mes chers collègues, jusqu'à aujourd'hui, le statut de l'élu tel
qu'il existe depuis les lois de décentralisation, mais modifié à plusieurs
reprises sans une véritable approche globale, permet de conforter certaines
catégories professionnelles par rapport à d'autres.
Quels sont ceux qui sont confortés ? Les fonctionnaires, et aujourd'hui un peu
plus qu'hier, et les salariés des entreprises, sans compter les retraités, qui,
par définition, n'exercent plus d'activité professionnelle. Qu'en est-il de
toutes les autres catégories professionnelles ? Je n'ai pas entendu un seul
orateur s'appesantir sur leur situation, sinon pour considérer qu'il n'y avait
pas de problème. Or il n'en est rien !
Et les professions libérales, les professions indépendantes, les cadres
supérieurs, et même les agents de maîtrise, les cadres moyens, les commerçants,
les artisans ? Ce problème est typiquement français, et nous l'avons déjà
rencontré lorsqu'il s'est agi de la constitution des retraites complémentaires
ou des fonds de pension. Notre tissu législatif est tel que nous peinons à
trouver des dispositions qui ne suscitent pas de distorsions entre les
différentes catégories professionnelles. Lorsque nous légiférons, nous prenons
toujours comme référence la situation des salariés, considérant, en quelque
sorte, que les autres professions seraient déjà nanties, dotées qu'elles sont
d'un statut qui devrait leur permettre de se sortir de toutes les situations.
Encore une fois, il n'en est rien.
Je vous livre une anecdote, qui vous touchera tous, quelles que soient vos
sensibilités politiques.
En 1979, le département de l'Oise a eu un président de conseil général qui
était médecin généraliste. Ce président, un socialiste, s'est investi
complètement et pendant deux ans dans sa fonction, perdant, entre-temps, toute
sa clientèle. L'année suivante, lors du renouvellement, il perd les élections.
Du jour au lendemain, ce médecin libéral s'est trouvé sans activité et sans
revenus. Il lui fallait reconstituer, après vingt ans de carrière
professionnelle, toute sa clientèle. Il n'a dû son salut qu'à l'intervention du
Président de la République de l'époque, François Mitterrand, qui, par le tour
extérieur, l'a nommé inspecteur général de la santé. C'est par ce biais que le
médecin dont je parle a retrouvé une vie professionnelle. Sinon, c'était le
chômage !
Et voilà que nous ne légiférons qu'en faveur des salariés et des
fonctionnaires, lesquels, de par leur statut, bénéficient déjà d'une situation
privilégiée, sans prévoir de dispositions pour traiter le cas des autres,
notamment des professions libérales.
C'est la raison pour laquelle j'avais tenté d'introduire à l'article 7 une
disposition, bien timide, mais qui permettait au moins d'ouvrir le débat au
sein de la commission des lois. Elle consistait à prendre en compte la
situation de ceux qui, du fait de leur entrée dans la vie publique, subissent
une perte de revenus d'au minimum 30 % par rapport à la situation
professionnelle qui était la leur auparavant.
Je tenais à soulever de nouveau cette question. Cependant, comme le
Gouvernement considère que le moment n'est pas venu d'aller plus loin en ce qui
concerne le statut de l'élu, attendons la discussion du texte relatif à la
décentralisation pour régler, dans une approche globale, la question du lien
entre les fonctions électives et les compétences qu'assument les collectivités
dans le cadre des lois de décentralisation.
Je souhaite cependant, monsieur le secrétaire d'Etat - et je reviendrai à la
charge le moment venu, croyez-moi - que la situation des différentes catégories
professionnelles dont j'ai parlé soit prise en compte. Sinon, nous irons vers
une exclusion des fonctions électives non pas de ceux qui ont le moins de
revenus, mais de ceux qui disposent de revenus moyens ou supérieurs, lesquels,
risquant justement une baisse de leur pouvoir d'achat du fait de leur situation
a priori
plus favorable, renonceront à présenter leur candidature.
De manière générale, on me dit toujours, et sur toutes les travées, que le
moment n'est pas bien choisi pour parler des indemnités ou du cumul des
indemnités des élus, tant l'on craint les réactions de l'opinion publique.
Il est vrai qu'aussitôt nos concitoyens imaginent que les élus « s'en mettent
plein les poches » et profitent de la situation. Mais ceux qui font cette
critique n'ont, le plus souvent, jamais exercé de fonctions électives et jamais
mesuré le poids de la responsabilité qui pèse sur nos épaules.
Je termine sur une réflexion personnelle, que je sais partagée, en privé, mais
que personne n'ose exprimer en public.
Nous avons voté un texte sur le cumul des mandats et le cumul des fonctions,
reconnaissant donc à un élu le droit de cumuler au minimum une fonction et un
mandat, voire deux fonctions. Il est vrai que certaines divergences de vues
opposaient le Gouvernement, l'Assemblée nationale et le Sénat concernant le
texte sur le cumul des mandats. Mais à l'exception de la question de savoir où
nous devions placer le curseur, il y avait un accord général en faveur d'une
limitation du cumul.
En dehors de cette question de curseur, à partir du moment où nous avons admis
qu'un élu était capable de cumuler deux fonctions ou une fonction et un mandat,
je ne vois pas pourquoi subsiste encore dans notre législation une disposition
qui fixe le montant maximum des indemnités à une fois et demie l'indemnité
parlementaire. Je considère, moi, que l'élu national, le maire, l'adjoint, le
conseiller général ou le président d'un conseil général devraient pouvoir
cumuler, si l'assemblée délibérante en a ainsi décidé - puisque c'est la loi
qui nous donne la possibilité de minorer ou de majorer le montant maximum -
l'indemnité de président de conseil général et l'indemnité de parlementaire ou
l'indemnité de maire et l'indemnité de président du conseil général ou de
conseiller général. D'autant que les indemnités sont fiscalisées.
Le parlementaire ou l'élu seraient ainsi traités comme n'importe quel citoyen
au regard de la fiscalité. C'est un point sur lequel il faudrait avoir le
courage de revenir. Toutefois, je ne me fais pas trop d'illusions, la plupart
des parlementaires sont assez timorés sur ce sujet, non parce qu'ils s'en
désintéressent, mais par peur des réactions de l'électorat.
Mes chers collègues, il faut savoir faire preuve d'un peu de pédagogie auprès
de la population et nos concitoyens seront tout à fait prêts, selon moi, à
accepter les mesures que nous prendrions.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article 7, modifié.
(L'article 7 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 7