SEANCE DU 8 FEVRIER 2001
M. le président.
« Art. 1er. - I. - Dans le premier alinéa de l'article L. 2123-2 du code
général des collectivités territoriales, après les mots : "Les pertes de revenu
subies", sont insérés les mots : "et, le cas échéant, les frais supportés pour
la garde d'un ou de plusieurs enfants" ; dans le même alinéa, le mot :
"compensées" est remplacé par le mot : "compensés". »
« II. - Dans le second alinéa du même article, les mots : "Cette compensation"
sont remplacés par les mots : "La compensation des pertes de revenu subies".
»
Par amendement n° 1, M. Delevoye, au nom de la commission, propose de rédiger
comme suit cet article :
« Les fonctions et mandats visés par la présente loi sont exercés à titre
bénévole. »
Monsieur le rapporteur, tous les amendements émanant de la commission, je vous
propose de procéder à une présentation générale.
Je vous donne la parole.
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
Monsieur le président, j'accepte bien volontiers votre
suggestion.
J'ajoute, à l'intention de Mmes Luc et Boravo, que nous souhaitons, nous
aussi, qu'un texte soit adopté le plus rapidement possible. Il y avait une
solution toute simple : le Gouvernement, aurait parfaitement pu inscrire à
l'ordre du jour de l'Assemblée nationale le texte adopté par le Sénat le 18
janvier.
Ce qui est important, c'est de mettre en commun nos efforts et je crois que la
proposition de la loi adoptée par le Sénat est une référence intéressante. Il
est cependant bien légitime que, notamment sur les modifications du code du
travail et sur la protection sociale, il existe des divergences d'appréciation
entre nous.
Intellectuellement, votre logique se comprend : à partir du moment où l'on
augmente le coût du fonctionnement de la démocratie locale, il convient de
demander à l'Etat une dotation destinée à la prendre en charge. Il faudra un
jour ouvrir un débat sur ce sujet.
Toutefois, selon moi, on ne peut pas revendiquer l'autonomie financière pour
les collectivités locales et, dans le même temps, les priver de toute
indépendance sur le plan du fonctionnement de la démocratie locale.
Il nous faut nous intéresser à la mécanique aujourd'hui enclenchée par l'Etat,
qui consiste à transformer de plus en plus d'impôts locaux en dotations d'Etat,
et donc à réduire la capacité de fonctionnement autonome des collectivités
locales. La péréquation est effectivement une question d'autant plus grave
aujourd'hui qu'un certain nombre de communes très importantes seront dans
l'incapacité de faire face à l'augmentation qui est prévue.
Le problème de fond, c'est d'arrêter cette mécanique de recentralisation des
ressources, de faire en sorte que les règles de péréquation permettent à
chacune des collectivités locales de retrouver des marges de manoeuvre, mais
surtout, me semble-t-il, que l'Etat laisse aux collectivités locales la liberté
de décision d'une affectation de leurs ressources au fonctionnement de leur
démocratie, de leurs investissements ou des coûts sociaux.
Je peux comprendre votre réflexion sur l'aspect injuste du dispositif, une
collectivité locale pouvant être dans l'incapacité de traiter ses élus à
égalité. Mais je crois que nous ne pouvons vous suivre jusqu'au bout de votre
démarche, qui revient à demander la création d'une dotation de l'Etat pour
faire fonctionner la démocratie locale.
Le vrai problème aujourd'hui, c'est celui de l'autonomie des collectivités
locales, de la répartition des ressources entre l'Etat et les collectivités.
J'exposerai maintenant, monsieur le président, l'ensemble des dispositions qui
ont été adoptées par la commission des lois à travers les amendements qu'elle
présente.
La commission réaffirme le caractère bénévole de l'exercice des mandats et
propose de protéger les candidats et les élus locaux, jusqu'à six mois après le
scrutin ou la fin du mandat, contre les mesures disciplinaires et les
licenciements, sauf faute d'une exceptionnelle gravité.
Elle prévoit de porter de six à dix-huit jours par mandat les droits des élus
en termes de formation et de dresser un bilan annuel des actions de formation
sous la forme d'un document annexé au compte administratif.
La commission demande d'inscrire dans la loi le principe selon lequel les
indemnités de fonction ne constituent pas une rémunération et n'entrent pas en
compte pour la détermination des droits sociaux des élus et de prévoir que
l'indemnité de fonction est fixée à son montant maximal, sauf délibération
contraire de l'assemblée concernée ou en cas d'application des dispositions en
vigueur concernant l'écrêtement des indemnités allouées aux membres de
l'assemblée concernée.
Elle propose par ailleurs d'autoriser une assemblée délibérante à prendre en
charge les cotisations de l'assurance personnelle du chef de l'exécutif de la
collectivité ou du président de la structure intercommunale contractée pour
garantir sa responsabilité civile et administrative dans l'exercice de ses
fonctions et d'autoriser, à certaines conditions - ce qui figure dans le texte
de Mme Fraysse - le remboursement des dépenses de toute nature exposées par
l'élu dans le but exclusif de lui permettre soit de remplir des mandats
spéciaux, soit de participer aux séances et réunions liées à l'exercice de son
mandat, formule qui permettrait, par exemple, de compenser les frais de garde
d'enfant.
En outre, les pertes de revenu résultant de la participation à une réunion à
la demande de l'Etat ou d'une collectivité autre que celle dont il est l'élu
seraient remboursables par l'Etat ou par la collectivité concernée.
Pour les présidents de conseils généraux et de conseils régionaux, ainsi que
pour les présidents d'établissements publics de coopération intercommunale
dotés d'une fiscalité propre, des indemnités pour frais de représentation dans
les mêmes conditions que pour les maires seraient inscrites dans le code des
collectivités territoriales.
Leurs mandataires pourraient aussi bénéficier de telles indemnités.
Il s'agit également de rétablir le principe de la détermination des indemnités
de fonction des élus municipaux et des responsables de structures
intercommunales par référence à celles qui sont prévues par la loi pour les
maires, de sorte que ces élus puissent bénéficier de la majoration accordée aux
seuls maires par la loi du 5 avril 2000.
Il s'agit aussi d'aligner le montant des indemnités des présidents de conseil
général et de conseil régional sur celui qui est prévu pour les maires des
communes d'au moins 100 000 habitants et de revaloriser le barème des
indemnités allouées aux conseillers généraux et aux conseillers régionaux.
Il s'agit encore de majorer le barème des crédits d'heures accordés aux élus
poursuivant leur activité professionnelle et d'étendre à tous les maires
adjoints, conseillers généraux et régionaux, présidents et vice-présidents
d'établissements publics de coopération intercommunale le régime de suspension
du contrat de travail avec droit aux prestations en nature des assurances
maladie et vieillesse.
Il s'agit par ailleurs d'accorder un droit aux prestations en espèces
d'assurance maladie aux élus ayant suspendu leur activité professionnelle et
privés d'indemnités de fonction par suite d'une maladie et de prévoir le
paiement de cotisations d'assurance maladie et d'assurance vieillesse au titre
du temps passé par l'élu hors de son entreprise pour exercer son mandat.
Il s'agit enfin d'instituer une compensation financière durant six mois à
l'élu qui, à l'issue de son mandat, dispose de revenus inférieurs aux
indemnités de fonction qu'il percevait antérieurement, le financement du
dispositif étant assuré par les cotisations des élus concernés et d'assouplir
les conditions requises pour conférer l'honorariat aux maires ayant exercé
leurs fonctions pendant au moins dix-huit ans.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble des amendements ?
Mme Michelle Demessine,
secrétaire d'Etat.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les
sénateurs, je souhaite vous rappeler l'importance que le Gouvernement accorde
au sujet abordé aujourd'hui.
M. le Premier ministre l'a dit devant l'Assemblée nationale et le ministre de
l'intérieur vous l'a rappelé le 18 janvier dernier : l'amélioration des
conditions d'exercice des mandats locaux est une des conditions d'une
démocratie locale de proximité.
Elle n'en est cependant pas la seule et vous savez que le Gouvernement ne
souhaite pas traiter séparément les préoccupations des élus, qui portent
quotidiennement la décentralisation, et le besoin d'une plus grande
participation des citoyens.
Le débat de ce matin, comme celui du 18 janvier dernier, était utile. Il a
notamment permis de dégager des convergences sur des points importants,
notamment des questions de principe : les garanties à offrir afin que les
mandats ne portent aucun préjudice à ceux qui ont le courage de les exercer,
l'idée que la démocratie locale a des exigences qu'il faut savoir assumer.
J'ai bien noté aussi que le souci d'éviter d'aller vers ce qui s'apparenterait
à une « fonctionnarisation » des élus est assez largement partagé par votre
assemblée.
La discussion a aussi fait apparaître les points sur lesquels un
approfondissement, souvent d'ordre technique, est encore nécessaire. Je pense
notamment aux questions de répartition de la charge financière des mesures
envisageables.
La discussion a néanmoins aussi confirmé des désaccords. Je pense ici à la
question de la qualification des indemnités. C'est un vrai débat et je
réaffirme que le Gouvernement est en accord avec vous sur le fait que les
indemnités de fonction ne doivent pas être un « salaire ».
Pour autant, certaines prestations sociales peuvent être liées à des plafonds
de ressources de toute nature, n'incluant pas seulement des salaires. C'est au
regard de ces exigences qu'il faut analyser, au cas par cas, la situation des
indemnités, afin d'éviter tout traitement inéquitable par rapport à l'ensemble
de nos concitoyens. Ces derniers attendent de la fonction d'élu qu'elle ne soit
pas une source d'enrichissement particulier. Il est donc très important de
prendre en compte cette donnée sur laquelle nous reviendrons.
Le Gouvernement vous proposera très prochainement un projet de loi sur la
démocratie locale citoyenne, dans lequel ces convergences pourraient se
cristalliser et les divergences être aplanies ; j'en forme en tout cas le
souhait.
Nous sommes là face à des mesures d'amélioration de la décentralisation,
concrètes et applicables assez rapidement, dont les citoyens, autant que les
élus, pourront tirer bénéfice, car notre objectif est de favoriser la
démocratisation des mandats.
A cet égard, je remercie particulièrement le groupe communiste de l'Assemblée
nationale d'avoir pris l'initiative de mesures concrètes significatives et
complémentaires - vous comprendrez que j'y sois très sensible - de la parité
entre les hommes et les femmes qu'il proposait.
Toutes ces notions, vous le savez, sont encore plus dirigées vers les femmes
qui vont intégrer les conseils municipaux grâce à la loi sur la parité, qui va
s'appliquer aux prochaines élections.
Il aurait peut-être été plus accueillant...
Mme Hélène Luc.
Symbolique !
Mme Michelle Demessine,
secrétaire d'Etat...
plus symbolique, en effet, de donner d'emblée les
moyens d'exercer cette fonction. Nous aurons l'occasion d'en débattre à nouveau
très prochainement quand vous sera soumis le projet de loi qui reprendra
certaines des propositions du Sénat.
A l'issue de ce débat, je vous confirme donc la position que le Gouvernement a
exprimée le 18 janvier dernier.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 1.
Mme Hélène Luc.
Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président.
Madame Luc, pouvez-vous m'indiquer si votre intervention vaudra également
explication de vote sur l'ensemble ?
Mme Hélène Luc.
Elle vaudra tout ce qu'on voudra, monsieur le président !
(Sourires.)
M. le président.
Vous avez la parole, madame.
Mme Hélène Luc.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je
tiens à réitérer la demande formulée voilà un instant par mon amie Nicole
Borvo, au nom du groupe communiste républicain et citoyen. J'appelle la
majorité sénatoriale à faire preuve de bon sens et à choisir la voie de
l'efficacité. Tel aurait été le sens de mon intervention, monsieur le
rapporteur, si vous aviez accepté que je vous interrompe tout à l'heure.
Le 18 janvier dernier, vous avez eu l'occasion d'exposer l'ensemble de vos
propositions. Aujourd'hui, l'objet de notre débat n'est pas d'élaborer dans sa
globalité un statut de l'élu. Un projet de loi est annoncé dans de très brefs
délais pour y parvenir, ainsi que vient de nous le dire Mme la secrétaire
d'Etat.
La proposition de loi dont nous débattons aujourd'hui vise à inscrire dans la
loi quelques dispositions urgentes, utiles et attendues, d'application
immédiate pour les élections municipales à venir. Il est bien évident que ce
texte serait un premier geste très symbolique après la loi sur la parité,
puisqu'il permettrait aux conseillères municipales de participer pleinement à
leurs activités d'élues.
Madame la secrétaire d'Etat, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, ce
texte est donc très attendu par tous les conseillers municipaux, en particulier
par les femmes. Je peux en témoigner en ce qui concerne les conseillères
municipales du Val-de-Marne que j'ai réunies, en tant que présidente de la
délégation des femmes du conseil général. Nous avons été mandatées, mon amie
Eliane Hulot, première vice-présidente du conseil général, les représentantes
de tous les groupes politiques, y compris le vôtre, monsieur Delevoye, et
moi-même, pour rencontrer M. Mauroy avant qu'il ne remette son rapport au
Premier ministre.
Monsieur le rapporteur, amender le texte comme vous voulez le faire
aujourd'hui - mais j'espère encore que vous allez y renoncer - n'a aucun
intérêt politique. Vous avez eu un débat le 18 janvier dernier pour cela. De
plus, ces amendements empêcheront que la proposition de loi ne soit adoptée
conforme et donc d'application immédiate.
Je demande à M. le rapporteur et à la majorité sénatoriale de retirer leurs
amendements afin de ne pas bloquer l'avancée démocratique que représente cette
proposition de loi. Votre attitude nous montrera si vous voulez vraiment que
des mesures très rapides soient adoptées ou bien si vous manoeuvrez pour ne pas
faire adopter notre proposition de loi, déjà votée par l'Assemblée nationale, à
la différence du texte examiné le 18 janvier monsieur Delevoye.
Au cas où vous ne retireriez pas vos amendements, je vous informe que nous ne
participerons pas à la discussion, mais j'espère que vous les retirerez ; vos
conseillères municipales en seraient très heureuses !
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
Je vous remercie, madame la présidente, de votre engagement.
Je suis persuadé que vous soutiendrez la démarche du Sénat consistant à inviter
le Gouvernement à inscrire le plus rapidement possible à l'ordre du jour de
l'Assemblée nationale le texte qui, depuis le 18 janvier, a été adopté par le
Sénat. Cette inscription à l'ordre du jour relève de sa liberté de décision. En
revanche, on ne peut pas vouloir revendiquer le droit à l'initiative
parlementaire et s'en remettre au dépôt d'un projet de loi.
Par ailleurs, c'est pour vous rendre service que nous allons refuser votre
proposition, madame Luc. Connaissant en effet votre attachement à l'unité, à la
notion d'égalité, et à la très forte cohésion entre tous les membres de votre
parti politique, nous ne souhaitons pas un seul instant que les élus
communistes municipaux bénéficient d'un statut plus privilégié que celui des
élus communistes départementaux et régionaux !
(Sourires.)
C'est la
raison pour laquelle nous avons désiré mener une approche globale.
En outre, pour éviter que vous ne soyez quelque peu déstabilisée dans vos
positions, nous apportons une contribution qui est plus une contribution de
camarades qu'une contribution d'élus concernés par la volonté d'améliorer la
démocratie locale.
(Rires sur les travées de l'Union centriste.)
Enfin, puisque vous êtes attachée à l'expression de la démocratie, faites en
sorte que ce gouvernement se saisisse de nos débats, que notre contribution
fasse gagner du temps à tout le monde, plutôt que d'attendre le dépôt d'un
projet de loi, qui ne doit pas primer sur l'initiative parlementaire.
Je vous remercie de votre participation au débat et je suis convaincu qu'avec
votre sagesse légendaire vous pourrez vous rallier à nos propositions.
(Très
bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et
Indépendants et de l'Union centriste.)
Mme Hélène Luc.
Mais vous maintenez vos amendements ! Vous ne voulez donc pas que cette
proposition de loi soit votée !
M. le président.
Il ne vous a pas échappé, monsieur le rapporteur, que le Sénat a consacré
beaucoup de temps à un débat approfondi sur une question importante...
M. Emmanuel Hamel.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Hamel.
M. Emmanuel Hamel.
Je suis gêné, monsieur le président, que l'ensemble des amendements aient été
présentés globalement, car le dernier, qui porte sur l'intitulé de la
proposition de loi, est très important.
Notre collègue M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur de la commission des lois,
président de l'Association des maires de France, a tellement contribué à
l'amélioration, à l'enrichissement et à l'extension de la portée historique de
cette proposition de loi que je suggère qu'elle ait désormais comme intitulé,
non par celui qui est proposé dans l'amendement n° 32, mais tout simplement «
loi Delevoye » !
(Sourires.)
M. Marcel Debarge.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Debarge.
M. Marcel Debarge.
Je souhaite formuler à l'encontre de M. Delevoye une observation amicale et
conviviale comme il sait l'être. Il n'est pas dans mes habitudes de dire que le
politicien est l'autre et jamais soi-même.
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
Je n'ai jamais dit cela !
M. Marcel Debarge.
C'est ce que je crois avoir compris !
Par ailleurs, si le Sénat n'a pas eu la faculté de respecter le calendrier
prévu, dans lequel était notamment inscrit un important débat relatif à la
décentralisation, ce n'est pas le fait de la minorité sénatoriale. Vous avez,
comme nous, des droits de parlementaires, droits que nous respectons, mais il
faut tout de même que les choses soient claires !
Ce débat se situe ni plus ni moins dans le prolongement de celui du 18
janvier, mais les amendements proposés portent atteinte à l'intégralité des
dispositions adoptées, sur l'initiative du groupe communiste, par l'Assemblée
nationale le 14 décembre 2000. Sans vouloir alourdir la discussion,
permettez-moi quand même d'apporter quelques précisions.
S'agissant tout d'abord de la méthode, j'ai toujours soutenu qu'il était
possible d'obtenir le plus large consensus sur la définition d'un statut de
l'élu local. Mais pour parvenir à un accord concernant toutes celles et tous
ceux qui participent à la vie des collectivités locales, à quelque niveau que
ce soit, il aurait été préférable d'y travailler ensemble avant, plutôt que de
se prononcer sur un texte qui, bien qu'il comporte des aspects positifs, peut
apparaître comme étant examiné avec une certaine fébrilité par opportunisme
politique.
S'agissant du financement des mesures que vous proposez, il reste en suspens,
même s'il existe, selon vous, différentes possibilités pour l'étudier.
Le texte est encore insuffisant sur le plan de la démocratie participative.
En outre, il me semble que nous aurions pu attendre le débat sur la
décentralisation, suite à la commission présidée par Pierre Mauroy, pour en
tirer un certain nombre de conséquences.
Enfin, le choix d'un projet de loi me paraît plus efficace et plus rapide dans
la mesure où le Gouvernement s'est engagé, le 17 janvier, par la voix du
Premier ministre, à mettre à l'ordre du jour la démocratie citoyenne avec le
volet qui consiste à améliorer les conditions d'exercice des mandats locaux.
Ce sont autant d'éléments qui vont relancer le débat, car il ne suffit pas
qu'un texte soit adopté à l'Assemblée nationale, l'expérience le confirme ;
encore faut-il qu'il soit également adopté par la majorité sénatoriale pour
avoir force de loi. Les deux assemblées doivent suivre les procédures légales
habituelles en la matière et trouver un accord.
Nous défendrons ce principe et nous interviendrons avec force, comme
vous-même, pour améliorer les conditions d'exercice des mandats locaux, mais
dans le cadre d'un projet de loi. Par conséquent, en fonction de ce qui s'est
dit - débat qui n'a pas été inutile - nous maintenons notre position qui
consiste à ne pas participer au vote.
M. Daniel Goulet.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Goulet.
M. Daniel Goulet.
Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, monsieur le rapporteur,
mes chers collègues, ce débat n'aura pas été inutile.
Ce texte s'inscrit dans un contexte, dans un processus de réflexion plus vaste
qui va sans doute aboutir à l'élaboration d'un statut de l'élu semblable à
celui que nous cherchons et qui est dans l'esprit du texte que nous avons
examiné le 18 janvier dernier. Toutes les contributions ont permis de
l'enrichir et d'élaborer une synthèse, grâce à M. le rapporteur, à qui je veux
rendre hommage car cela n'était pas facile.
En réalité, nous voulons que, dès maintenant, les élus locaux soient rassurés
; nous voulons d'ores et déjà leur lancer un signe fort, à la veille du grand
débat municipal car il n'est pas facile aujourd'hui d'être candidat.
Nous voulons qu'ils sachent que le Sénat, représentant des collectivités
locales, a toujours fait des moyens dont disposent les élus locaux l'une de ses
préoccupations majeures.
Ne serait-ce qu'à ce titre, le débat d'aujourd'hui, qui est en quelque sorte
complémentaire de celui qu'ont pu mener nos collègues de l'Assemblée nationale,
participe de ce signe fort que nous voulons donner aux élus de France.
Il s'agit non pas de faire de l'élu une catégorie socioprofessionnelle
protégée mais d'encadrer et de faciliter l'accomplissement de fonctions qui, on
l'a rappelé, sont bénévoles. Les élus, aujourd'hui candidats, devaient d'ores
et déjà le savoir. En tout cas, nous voulons protéger les candidats pour
soutenir et développer les vocations.
Nous avons fait un pas lorsque nous avons débattu du cas des élus
fonctionnaires et salariés. Il nous reste à travailler sur le cas des élus qui
exercent des professions libérales ; il ne faut pas les oublier.
Nous avons également avancé pour ce qui est des indemnisations perçues par les
mandataires des exécutifs locaux.
Nous avons ébauché des règles de formation pour faciliter et promouvoir cette
formation, qui est aussi source d'inquiétudes pour les candidats aux élections
municipales ou cantonales, nous le constatons chaque semaine dans nos
départements.
Le texte que le Sénat a adopté le 18 janvier dernier, fondé sur la proposition
de loi déposée par nos collègues MM. Vasselle, Legendre et Schosteck, et celui
dont nous discutons aujourd'hui vont dans le bon sens et devraient faire
l'unanimité.
Il faudra encore travailler et consulter les élus, les associations de maires,
l'Association des régions de France, l'Assemblée des départements de France. Il
faudra surtout écouter les élus des toutes petites communes, qui ont le
sentiment d'être oubliés parfois. Il faudra également soutenir les
regroupements communaux pour faire avancer la coopération intercommunale, qui
constitue une réponse au phénomène de désertification de nos campagnes. Tout
cela se tient, je suis bien placé pour en parler car, dans mon département,
pratiquement, les 506 communes sont regroupées.
Il nous faudra aussi, dans le même temps, veiller à la simplification
administrative et tenter d'éviter que la décentralisation repensée - puisque
elle doit faire l'objet d'un texte qui viendra prochainement en discussion -,
ne constitue pas en réalité une occasion de complication pour les responsables
locaux.
Nous ne pouvons que nous réjouir d'ores et déjà de voir que l'Assemblée
nationale a adopté des dispositions semblables à celles que nous avions
adoptées nous-mêmes le 18 janvier 2001. En effet, c'est le cas des articles
qu'a mentionnés tout à l'heure M. le rapporteur.
Enfin, nous nous réjouissons qu'un large accord ait déjà pu se dégager entre
les deux assemblées pour améliorer la démocratie locale.
C'est la raison pour laquelle le groupe du RPR votera le texte proposé par M.
le rapporteur, qui, je l'ai dit tout à l'heure, est une remarquable synthèse
des différentes contributions et qui nous paraît d'ores et déjà répondre aux
nécessités d'exercice de leur mandat par nos élus locaux.
(M. Hamel
applaudit.)
M. Pierre Hérisson.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson.
Quelques-uns critiquent avec constance la longueur des débats qui peuvent
avoir lieu sur certains textes de loi. Mais je crois qu'il nous appartient de
prendre le temps nécessaire à une discussion en profondeur. La durée de nos
interventions n'est pas critiquable dans la mesure où la discussion
parlementaire est le fondement de notre démocratie.
Au demeurant, on ne doit pas non plus céder à la tentation inverse,
c'est-à-dire reporter sans cesse à d'autres temps les décisions, attendre la
discussion de textes ultérieurs quand l'enjeu est aussi important que celui qui
est au coeur de la présente proposition de loi.
Nous avons la chance d'avoir parmi nous le président de l'Association des
maires de France. Est-il meilleur endroit que l'Association des maires de
France pour faire la synthèse de ce que souhaitent les élus locaux,
c'est-à-dire une amélioration de leur statut ?
Etant moi-même membre du bureau de l'AMF, je tiens à saluer l'excellent
travail réalisé par M. le rapporteur et tous ceux qui l'aident dans cette
mission.
Nous avons absolument besoin de ce texte. Il fait l'objet des demandes les
plus pressantes et les plus fréquentes adressées au président de l'Association
des maires de France. Il fallait que ce soit dit.
(Applaudissements sur les
travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
M. Emmanuel Hamel.
Très bien ! Quel grand hommage à notre rapporteur !
Mme Nicole Borvo.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo.
Bien entendu, nous nous engageons à poursuivre le débat lors de l'examen du
projet de loi sur la décentralisation et la démocratie citoyenne.
Il nous a semblé important de donner tout de suite un signal fort aux 500 000
élus municipaux qui vont devoir exercer un mandat électif dans quelques
semaines à peine. Je regrette, bien évidemment, que nous ne puissions aboutir
aujourd'hui à l'adoption dans les mêmes termes de la proposition de loi votée
par l'Assemblée nationale.
Pour cette raison et parce que nous ne voulons pas adopter, par démagogie, des
mesures plus ambitieuses dont le financement n'est pas précisé, le groupe
communiste, républicain et citoyen s'abstiendra.
M. Emmanuel Hamel.
Que c'est triste !
Mme Hélène Luc.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Luc.
Mme Hélène Luc.
Je constate, monsieur le rapporteur, que, bien que vos amis aient été au
gouvernement pendant des décennies, jamais un texte sur le statut de l'élu n'a
été mis à l'ordre du jour du Parlement.
Aujourd'hui, il ne peut être question que de voter la proposition de loi
adoptée par l'Assemblée nationale, puisqu'elle seule a une chance d'aboutir
rapidement ; vous savez très bien que votre proposition de loi, adoptée le 18
janvier, ne sera pas discutée par l'Assemblée nationale...
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
Mais si !
Mme Hélène Luc.
Mais non, puisqu'un projet de loi gouvernemental va être déposé.
Quoi qu'il en soit, nous nous félicitons d'avoir déclenché une discussion qui
a trop tardé à venir et qui, j'en suis persuadée, aura fait prendre conscience
à tous les parlementaires de la nécessité d'élaborer un tel statut.
En tout cas, mes chers collègues de la majorité sénatoriale, les conseillers
municipaux et les conseillères municipales sauront que vous n'avez pas voulu
voter cette proposition de loi dont l'application aurait été immédiate. Vous
auriez pu, aujourd'hui, manifester votre volonté de voir aboutir un tel texte,
malheureusement vous ne l'avez pas fait.
M. Philippe Nogrix.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Nogrix.
M. Philippe Nogrix.
Je suis heureux d'apprendre que Mme Hélène Luc fait partie du Gouvernement
depuis ce matin puisqu'elle nous fait des propositions...
M. le président.
Je vous en prie, mon cher collègue, allez à l'essentiel !
M. Philippe Nogrix.
L'essentiel de mon intervention sera pour dire que le groupe de l'Union
centriste votera le texte modifié par les amendements de la commission des
lois.
M. Emmanuel Hamel.
Très bien, c'est là une grande sagesse !
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
Je n'ajouterai qu'un seul mot à l'intention de Mme Luc, qui,
à ma grande surprise, affirme que la proposition de loi votée par le Sénat ne
sera pas inscrite à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale.
Mme Hélène Luc.
C'est évident !
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
J'avais cru comprendre en écoutant Mme Borvo que vous
souhaitiez au contraire que notre texte soit enrichi de la protection des élus
minoritaires. Or je m'aperçois que vous cultivez plutôt la pratique du mépris
des minoritaires. Je souhaiterais simplement que vous corrigiez cet état
d'esprit, car je crois que la démocratie, c'est le respect de chacun.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 1er est ainsi rédigé.
M. le rapporteur et Mme le secrétaire d'Etat s'étant exprimés sur tous les
amendements déposés, je vais maintenant mettre aux voix les autres articles du
texte et les amendements y afférents.
J'ai bien noté que le groupe communiste républicain et citoyen s'abstenait
alors que le groupe socialiste ne prenait pas part au vote.
Division additionnelle avant l'article 2