SEANCE DU 4 AVRIL 2001
M. le président.
Sur ce texte, je suis d'abord saisi de six amendements qui peuvent faire
l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 147 rectifié
ter
, MM. César, de Broissia, Cornu,
Goulet, Neuwirth, Valade, Vasselle et de Richemont proposent de rédiger comme
suit la première phrase du premier alinéa du texte présenté par l'article 1er
pour l'article L. 7 du code forestier :
« Le bénéfice des aides publiques destinées à la mise en valeur et à la
protection des bois et forêts est réservé prioritairement aux demandeurs qui
présentent une des garanties ou présomptions de gestion durable décrites à
l'article L. 8 et qui souscrivent l'engagement de ne pas démembrer pendant
quinze ans en deçà d'un seuil minimal fixé par décret, les unités élémentaires
de gestion concernées par les travaux ayant donné lieu à ces aides. »
Par amendement n° 237, M. Poniatowski et les membres du groupe des
Républicains et Indépendants proposent, dans la première phrase du premier
alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 7 du code
forestier, après les mots : « est réservé, », d'insérer le mot : «
prioritairement ».
Par amendement n° 202, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Terrade et les membres du
groupe communiste républicain et citoyen proposent, dans la première phrase du
premier alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 7 du code
forestier, après les mots : « à l'article L. 8 », d'insérer les mots : « , qui
s'inscrivent dans l'objectif de promotion de l'emploi défini à l'article L. 1
».
Les deux suivants sont identiques.
L'amendement n° 17 est présenté par M. François, au nom de la commission des
affaires économiques.
L'amendement n° 238 est déposé par M. Poniatowski et les membres du groupe des
Républicains et Indépendants.
Tous deux tendent, dans la première phrase du premier alinéa du texte présenté
par l'article 1er pour l'article L. 7 du code forestier, à remplacer les mots :
« trente ans » par les mots : « quinze ans ».
Par amendement n° 239, M. Poniatowski et les membres du groupe des
Républicains et Indépendants proposent, dans la première phrase du premier
alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 7 du code
forestier, de remplacer les mots : « les unités élémentaires de gestion » par
les mots : « les parcelles ».
La parole est à M. César, pour défendre l'amendement n° 147 rectifié
ter.
M. Gérard César.
Cet amendement a pour objet de ramener de trente ans à quinze ans l'engagement
de non-démembrement des unités de gestion forestières pour pouvoir bénéficier
des aides publiques. Le Gouvernement avait d'ailleurs proposé lui-même cette
durée de quinze ans, qui correspond finalement à la bonne fin des opérations
d'investissement subventionnées par le fonds forestier.
M. le président.
L'amendement n° 237 est-il soutenu ?
La parole est à M. le Cam, pour défendre l'amendement n° 202.
M. Gérard Le Cam.
L'article L. 7 du projet de loi édicte un certain nombre de règles permettant
aux exploitants forestiers de bénéficier d'aides publiques.
Le bénéfice de ces aides publiques s'appuie sur une présomption de gestion
durable et sur un engagement à ne pas démembrer durant une période de quinze
années. Le marché mondial de la filière bois a participé à de fortes
restructurations des entreprises forestières et, là encore, la concurrence
s'est opérée au détriment de l'emploi avec des recettes qui n'ont pas
grand-chose à voir avec la modernité, à savoir : la réduction de l'emploi,
l'accroissement de la productivité, le développement de la sous-traitance,
etc.
L'instrument des aides financières publiques pourrait servir d'autres modes de
gestion, à condition toutefois que la loi le prévoie.
Aussi, notre amendement vise à assortir l'octroi d'aides publiques à la
condition que l'objectif de promotion de l'emploi est satisfait ; l'on sait
qu'il reste beaucoup à faire dans notre pays en matière de politique
forestière.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 17.
M. Philippe François,
rapporteur.
Le projet de loi initial prévoyait une durée de quinze ans
pour l'engagement de non-démembrement d'une unité de gestion forestière
concernée que devront désormais prendre les propriétaires forestiers pour
bénéficier des aides publiques. Cette durée a été portée à trente ans par un
amendement à l'adoption duquel le Gouvernement s'est d'ailleurs fermement
opposé.
Il faut rappeler, en effet, que, si la loi forestière du 4 décembre 1985 avait
prévu, à l'article L. 101 du code forestier, un engagement de non-démembrement
d'une durée de trente ans, celui-ci n'était pas obligatoire pour obtenir les
aides publiques, puisqu'il ne donnait qu'une priorité pour en bénéficier. De
plus, cette disposition n'a pas été mise en oeuvre, faute de parution du décret
d'application.
La durée de quinze ans, qui correspond à la durée habituelle du contrôle de
l'Etat sur la bonne fin des opérations d'investissement subventionnées par le
fonds forestier national, correspond à un compromis raisonnable et acceptable
entre la nécessité d'assurer la bonne fin des subventions publiques et celle de
préserver la motivation des propriétaires à l'amélioration de leur forêt qu'il
convient de rétablir. Il n'y a pas lieu d'aggraver cette contrainte
initialement prévue. La commission propose donc d'en revenir au texte initial
du projet de loi.
M. le président.
La parole est à M. Poniatowski, pour défendre les amendements n°s 238 et
239.
M. Ladislas Poniatowski.
Les propositions contenues dans le texte gouvernemental s'inspirent du rapport
Bianco, qui tient compte de la réalité du terrain et de la nécessité de
convaincre les propriétaires privés de s'orienter vers une gestion durable.
Pour cela, des aides publiques leur sont réservées. En échange, il leur est
demandé de s'engager à ne pas démembrer leur propriété pendant trente ans, à la
suite d'une modification adoptée par l'Assemblée nationale. Je propose, par
l'amendement n° 238, de revenir à la période de quinze ans que prévoyait le
texte initial.
En termes techniques forestiers, une unité élémentaire de gestion s'appelle
une parcelle. Par l'amendement n° 239, je propose donc d'employer ce dernier
terme. Ainsi, tout le monde saura de quoi il s'agit !
M. Philippe François,
rapporteur.
Tout à fait !
M. Gérard Braun.
Très bien !
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 147 rectifié
ter,
202, 238 et 239 ?
M. Philippe François,
rapporteur.
L'amendement n° 147 rectifié
ter
est partiellement
satisfait par l'amendement n° 17, qui rétablit le délai de quinze ans.
Par ailleurs, le terme « prioritairement » ne me paraît pas devoir être
rétabli puisque même les propriétaires n'offrant des pésomptions de gestion
durable qu'à travers l'adhésion à un simple code des bonnes pratiques
sylvicoles pourront bénéficier d'aides publiques. Par conséquent, personne n'en
est écarté. Cette obligation minimale permet de répondre à l'engagement de
gestion durable souscrit par la France au niveau international. Il conviendrait
de ne pas brouiller le message en laissant supposer que l'on distribue des
subventions sans garantie de gestion aucune.
Après un long débat, la commission a décidé de s'en remettre à la sagesse de
la Haute Assemblée concernant cet amendement n° 147 rectifié
ter.
A titre personnel, je persiste à considérer que le rétablissement du mot «
prioritairement » nuit à la lisibilité de notre engagement en matière de
gestion durable.
La commission est défavorable à l'amendement n° 202, car les documents de
gestion n'ont pas vocation à se justifier sur le plan de la création
d'emplois.
L'amendement n° 238 est satisfait par l'amendement n° 17.
Enfin, la commission est favorable à l'amendement n° 239.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 147 rectifié
ter,
202, 17, 238 et 239 ?
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
Etant favorable à l'amendement
n° 17 de la commission, qui me paraît à la fois pertinent et bien rédigé, je
suis défavorable à tous les autres.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 147 rectifié
ter,
repoussé par le
Gouvernement et pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, les amendements n°s 202, 17, 238 et 239 n'ont plus d'objet.
Je suis saisi maintenant de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une
discussion commune.
Par amendement n° 18, M. François, au nom de la commission des affaires
économiques, propose de rédiger comme suit les deux derniers aliénas du texte
présenté par l'article 1er pour l'article L. 7 à insérer dans le code forestier
:
« Les manquements aux garanties et aux engagements prévus au présent article
ne peuvent être retenus contre le propriétaire lorsque ces manquements
résultent d'éléments qui ne sont pas de son fait.
« Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions dans lesquelles les
opérations concourant au regroupement de l'investissement et de la gestion
peuvent bénéficier d'aides spécifiques. »
Par amendement n° 301, le Gouvernement propose :
I. - Après le troisième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour L. 7 à
insérer dans le code forestier, d'insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les manquements aux garanties et aux engagements prévus au présent article
et à l'article L. 8 ne peuvent être retenus contre le propriétaire lorsque ces
manquements résultent d'éléments qui ne sont pas de son fait. »
II. - Dans le dernier alinéa dudit texte, de remplacer les mots : « de
l'alinéa précédent » par les mots : « du troisième alinéa ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 18.
M. Philippe François,
rapporteur.
L'article L. 7 du code forestier définit des mécanismes de
conditionnalité qui subordonnent le bénéfice des aides publiques à des
garanties de gestion durable et à l'engagement de ne pas démembrer.
La commission propose de préciser que, comme cela est prévu dans l'actuel
article L. 101 du code forestier, des manquements aux engagements ou aux
garanties de gestion durable ne peuvent être retenus losqu'ils résultent
d'événements qui ne sont pas imputables au propriétaire, notamment en cas de
force majeure. Cette disposition, inscrite dans le projet de loi à l'article L.
8, est plus à sa place à la fin de l'article L. 7.
En outre, il convient de préciser que le morcellement des propriétés
forestières implique de favoriser, par des aides publiques spécifiques, le
développement du regroupement des travaux d'investissement et de gestion
forestière, par exemple les dessertes collectives, les regroupements de
chantiers de plantations, d'éclaircies, de travaux de défense contre
l'incendie, la réalisation de plans simples de gestion groupée, etc.
C'est une nécessité à la fois économique, pour réduire le coût de travaux et
des intervenants, et pratique, pour simplifier les procédures d'aides publiques
et les rendre accessibles aux propriétaires de petites parcelles.
Cet effort de regroupement sera particulièrement nécessaire pour la
reconstitution des parcelles sinistrées par les tempêtes de décembre 1999,
compte tenu du nombre considérable de petites parcelles forestières
concernées.
Enfin, cet amendement ne prévoit pas de reprendre deux alinéas introduits par
l'Assemblée nationale contre l'avis du Gouvernement et précisant que
l'attribution des aides publiques doit, dans des conditions fixées par un
décret en Conseil d'Etat, tenir compte des difficultés particulières de mise
valeur des forêts de montagne ou méditerranéennes. En effet, cette disposition
est largement redondante avec le principe déjà énoncé à l'article L. 1er du
code forestier relatif à l'ensemble de la politique forestière, et qui
s'applique
a fortiori
aux aides publiques.
M. le président.
La parole est à M. le ministre, pour présenter l'amendement n° 301 et donner
l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 18.
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
Je partage totalement les
préoccupations du rapporteur et suis donc favorable à cet amendement.
Toutefois, son libellé conduit à supprimer l'actuel troisième alinéa de cet
article alors qu'il me paraît indispensable d'ouvrir la possibilité de
modulation des aides publiques en fonction des difficultés particulières de
mise en valeur de certaines forêts ou de l'intérêt qu'elles présentent
vis-à-vis de la gestion durable.
J'ajoute que, conformément à l'actuel article L. 101 du code forestier, la
non-mise en cause d'un propriétaire du fait d'éléments qui ne sont pas de son
fait doit également concerner les engagements pris au titre de l'article L.
8.
Voilà pourquoi j'ai déposé, au nom du Gouvernement, l'amendement n° 301, qui
va, selon moi, dans le sens souhaité par M. François, tout en prenant ces deux
précautions supplémentaires.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 301 ?
M. Philippe François,
rapporteur.
Je maintiens l'amendement n° 18, monsieur le président, car
ce point est traité à l'article L. 1er. La commission est donc défavorable à
l'amendement n° 301.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 18.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'amendement n° 301 n'a plus d'objet.
Par amendement n° 148 rectifié
ter
, MM. César, de Broissia, Cornu,
Goulet, Neuwirth, Valade, Vasselle et de Richemont proposent de compléter
in
fine
le texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 7 du code
forestier par un alinéa rédigé comme suit :
« Les opérations qui concourent au regroupement de l'investissement et de la
gestion bénéficient d'aides spécifiques. »
La parole est à M. César.
M. Gérard César.
Compte tenu du morcellement des propriétés forestières, il faut favoriser, par
des aides publiques spécifiques, le regroupement d'un certain nombre de
travaux, notamment par le biais de la constitution de CUMA ou d'autres
coopératives.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe François,
rapporteur.
Je me permets de proposer à mon collègue M. César de retirer
son amendement, qui est satisfait par l'amendement n° 18, que nous venons
d'adopter.
M. le président.
Monsieur César, votre amendement est-il maintenu ?
M. Gérard César.
M'en remettant à la sagesse de notre rapporteur, je le retire, monsieur le
président.
M. le président.
L'amendement n° 148 rectifié
ter
est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article L. 7 du code
forestier.
(Ce texte est adopté.)
ARTICLE L. 8 DU CODE FORESTIER