SEANCE DU 4 AVRIL 2001


M. le président. Par amendement n° 183 rectifié, MM. Pintat, César, Althapé, Cazalet, Darcos, Doublet, de Richemont et Valade proposent d'insérer, avant l'article 15, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 199 sexies, il est inséré dans le code général des impôts un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. ... - Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier chaque année d'une réduction d'impôt égale au montant de la cotisation acquittée au bénéfice d'une association syndicale, d'un groupement foncier ou d'un comité communal contre les feux de forêts, ayant pour objet la réalisation de travaux de prévention en vue de la défense des forêts contre l'incendie, sur des terrains inclus dans des zones classées en application de l'article L. 321-1 du code forestier ou dans des massifs visés l'article L. 321-6 du même code.
« La réduction d'impôt est accordée sur présentation de la quittance de versement de la cotisation visée par le percepteur de la commune ou du groupement de communes concerné.
« Cette réduction d'impôt s'applique au montant de l'impôt calculé dans les conditions définies à l'article 197. »
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application des dispositions du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Pintat.
M. Xavier Pintat. Cet amendement vise à défiscaliser les cotisations levées sur les propriétaires forestiers du Sud-Ouest par les associations syndicales, les groupements fonciers, les comités contre les feux de forêt qui gèrent pour leur compte les travaux de défense de la forêt contre les incendies.
En effet, les propriétaires forestiers du Sud-Ouest acceptent, pour protéger leur forêt, de « s'auto-taxer » tous les ans, sur chaque hectare possédé dans le périmètre d'une association syndicale.
S'agissant de la forêt des landes de Gascogne, qui couvre les départements des Landes, de la Gironde et du Lot-et-Garonne, les associations sont devenues obligatoires par l'ordonnance du 25 avril 1945.
Ce sont des établissements publics chargés des travaux de prévention sous tutelle du préfet. Par leurs intermédiaires, tous les propriétaires forestiers participent à l'élaboration d'une véritable politique de défense contre l'incendie et ils la financent en permanence au travers d'une cotisation à l'hectare appelée taxe DFCI.
Grâce à ce système, la protection des forêts contre le risque d'incendie - prévention et moyens de lutte - se fait sur plus de un million d'hectares à un coût très économique. C'est ce système, monsieur le ministre, qu'il convient d'encourager en rendant déductibles de l'impôt sur le revenu les taxes DFCI versées par les forestiers.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe François, rapporteur. Voilà une proposition tout à fait judicieuse et à laquelle souscrit totalement la commission des affaires économiques, qui émet donc un avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Certes, la lutte contre les incendies de forêt constitue une préoccupation majeure de l'Etat et des élus, et cette préoccupation est orientée vers un renforcement des moyens accordés à la protection civile.
Toutefois, en visant à accorder aux propriétaires forestiers membres d'une association syndicale, d'un groupement foncier ou d'un comité communal contre les feux de forêt une réduction d'impôt égale au montant de la cotisation acquittée, l'amendement en discussion me semble doublement paradoxal.
D'abord, il est à noter qu'aucune cotisation n'est versée par les propriétaires forestiers à un groupement foncier ou à un comité communal contre les feux de forêt. En effet, les propriétaires membres d'un groupement foncier sont titulaires de parts et les comités communaux sont financés par les communes, voire par les conseils généraux.
Ensuite, monsieur Pintat, une telle disposition créerait une sorte d'inégalité entre les contribuables puisqu'une telle mesure n'aurait d'effet incitatif que pour les seules personnes imposables, et induirait à une différence de traitement entre les propriétaires forestiers qui paient l'impôt et ceux qui ne le paient pas.
J'ajoute que les modalités d'assurance contre les conséquences des incendies de forêt seront évoquées dans le rapport que le Gouvernement remettra au Parlement et qui formulera des propositions en matière d'assurance contre les incendies, compte tenu des dispositions actuelles du code des assurances qui prévoit un lien entre l'assurance incendie et l'assurance contre les effets du vent.
Je demande donc à M. Pintat de retirer cet amendement, sinon je serai obligé d'en demander le rejet.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 183 rectifié.
M. Gérard César. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. César.
M. Gérard César. Je viens d'écouter avec beaucoup d'attention le propos de M. le ministre, comme j'ai noté l'avis très favorable de la commission.
Pour ma part, je voudrais rappeler qu'en 1949 ont eu lieu de graves incendies en Gironde et dans les Landes, incendies qui ont causé de nombreux morts.
Or, nous avons réussi à intervenir préventivement contre les incendies grâce justement à cette taxe DFCI.
Aujourd'hui, les forestiers de la région, qui ont subi les graves conséquences de la tempête, demandent que cette taxe DFCI soit défiscalisée.
Tel est l'objectif de cet amendement, qui me semble tout à fait cohérent par rapport au but que nous visons, à savoir la défense contre l'incendie, qui est notre souci à tous.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le sénateur, vous souhaitez qu'une taxe DFCI soit défiscalisée. Je ne comprends pas ce que cela veut dire.
M. Gérard César. Mais elle existe, monsieur le ministre !
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Peut-être, mais je ne comprends pas comment une taxe peut être défiscalisée. Ce n'est d'ailleurs pas ce que vous proposez.
M. Gérard César. Si !
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Non, vous proposez une réduction d'impôt égale au montant de la cotisation acquittée au bénéfice d'une association, d'un groupement ou d'un comité communal.
Or aucune cotisation n'est acquittée, je viens de vous l'expliquer.
Cet amendement, je le répète, est doublement paradoxale.
Si c'est une taxe de DFCI qui est payée, je ne comprends pas comment on peut défiscaliser cette taxe ; si vous demandez une réduction d'impôt, je ne comprends pas comment elle peut être égale à une cotisation qui, de fait, n'est pas versée.
Je suis prêt à travailler avec vous, avant la deuxième lecture, pour élaborer un texte qui réponde au souci louable que vous exprimez. Mais ce que vous proposez n'est ni fait ni à faire. Travaillons sur le sujet, mais, pour l'instant, je ne peux pas donner mon accord à cette proposition.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 183 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 15.
Mes chers collègues, il est minuit vingt. Nous avons depuis ce matin examiné quelque 230 amendements. Il en reste 108. Je pense qu'il y a lieu de renvoyer la suite de notre discussion à demain matin, d'autant que l'article suivant est un article complexe sur lequel de nombreux amendements ont été déposés.

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