SEANCE DU 10 MAI 2001


M. le président. La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.
Alors que nous travaillons depuis plusieurs années à l'élaboration des textes législatifs et réglementaires concernant les gens du voyage, gouvernements successifs, parlementaires, associations d'élus, services de l'Etat, nous nous sommes focalisés sur leur accueil et leur stationnement. Dans le même temps, nous n'avons rien fait pour stopper les dérives extrêmement graves qui se sont produites dans leur comportement, s'agissant plus particulièrement des migrants qui deviennent rapidement des clandestins. La plupart d'entre eux sont originaires d'ex-Yougoslavie, de Roumanie, de Tchéquie, de Slovaquie, d'Albanie et du Kosovo.
Nous sommes aujourd'hui confrontés, nous les maires, mais également les forces de police et de gendarmerie ainsi que la justice, au problème suivant : ces personnes viennent, en partie, de pays où les droits de l'homme sont rarement respectés. Aussi, dès qu'elles se trouvent sur notre notre territoire, elles comprennent rapidement que les crimes ou délits qu'elles peuvent commettre sont beaucoup moins lourdement sanctionnés. Je n'entrerai pas dans le détail s'agissant de la façon dont elles sont traitées chez elles.
Très rapidement, nous avons atteint l'inacceptable, aujourd'hui l'intolérable : vols de voitures, cambriolages, recel, trafics en tout genre, chantage, à tel point que, dans nos départements savoyards, les gens du voyage ont, par riposte à des contrôles tout à fait réguliers, poussé la provocation jusqu'à cambrioler les appartements des officiers de gendarmerie et menacé les épouses de gendarme de représailles s'ils étaient à nouveau contrôlés.
Nous avons aujourd'hui, n'en déplaise à certains, la preuve de ce que nous dénoncions hier. En effet, depuis quelque temps aussi, il n'est pas rare de voir des élus agressés physiquement. Ainsi, l'un de nos collègues maires de Haute-Savoie, M. Raymond Bardet, a été lâchement agressé par plusieurs hommes et laissé sans secours sur le terrain.
Autre fait précis : en Savoie, lors d'un contrôle, ont été repérés, d'une part, un ressortissant d'un pays d'Europe de l'Est possédant quatre comptes bancaires au Luxembourg largement approvisionnés et, d'autre part, un autre ressortissant circulant en Mercedes 500, la treizième du nom achetée par lui et payée en espèces en Italie !
Monsieur le ministre, la France, ses élus, ses forces de police, sa justice ainsi que l'ensemble de nos concitoyens sont aujourd'hui en situation d'insécurité notoire, dans la crainte et dans la peur, et pour certains, les plus exposés comme les forces de police, en danger de mort.
Aussi, monsieur le ministre, il est maintenant urgent de mettre en place des moyens plus importants et de faire intervenir en même temps les forces de police et de gendarmerie, les services fiscaux et les douanes afin de faire respecter les lois de la République comme elles s'appliquent à nous tous. Que comptez-vous faire, monsieur le ministre ? Il y a extrême urgence. Il s'agit d'un véritable péril social. Nous ne l'accepterons pas ! (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur, je voudrais préalablement rappeler - parce que c'est la vérité des chiffres - que 80 % des gens du voyage ont la nationalité française. En ce qui concerne les 20 % restants, la plupart d'entre eux disposent de véhicules immatriculés dans un pays de la Communauté européenne et sont inscrits au registre du commerce, ce qui permet la libre circulation.
M. Alain Gournac. Ce n'est pas exact !
M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur. Je vous décris une réalité qui ne date pas d'hier !
Les gens du voyage sont assujettis aux mêmes obligations et aux mêmes contrôles que les autres citoyens,...
M. Patrick Lassourd. Sûrement pas !
M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur. ... ce qui est normal.
La seule situation particulière que prend en compte la législation provient de leur absence de domicile fixe. Celle-ci leur impose la possession de titres de circulation subordonnés au choix d'une commune de rattachement. Ces titres doivent, en outre, être visés périodiquement par un commissaire de police ou un commandant de brigade de gendarmerie.
Un sénateur du RPR. Ce n'est pas la question !
M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur. Les personnes qui n'ont pas fait viser leur titre de circulation dans les délais prévus sont passibles de lourdes amendes et d'un emprisonnement de dix jours à un mois. (Exclamations sur plusieurs travées du RPR.)
M. Patrick Lassourd. Il n'est jamais sorti du ministère !
M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur. Les gens du voyage ne sont donc pas exempts de contrôles, bien au contraire. (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)
M. Patrick Lassourd. Cela reste à voir !
M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur. Si vous souhaitez que je ne réponde pas, dites-le ! (Protestations sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Patrick Lassourd. Répondez à la question !
M. Alain Gournac. Il faut répondre à la question !
M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur. En ce qui concerne plus précisément les actes de délinquance que commettraient les gens du voyage, les règles fixées dans le code de procédure pénale et les sanctions prévues par le code pénal s'appliquent aux gens du voyage comme à toute personne commettant une infraction pénale sur le terrain national.
M. Alain Vasselle. Ce n'est jamais appliqué. !
M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur. S'agissant des mesures d'ordre public lors d'installations irrégulières, vous savez bien, monsieur Hérisson, que, dans votre département notamment, le préfet fait appel systématiquement et rapidement aux forces de l'ordre pour appliquer les ordonnances d'expulsion émises par la justice. (Sourires et exclamations sur plusieurs travées du RPR.)
Voilà les éléments de réponse précis que je voulais vous donner.
Par ailleurs, si vous aviez à me signaler des situations particulières, comme vous l'avez fait dans votre question, je vous propose de me les adresser, et je verrai avec le préfet ce qu'il en est, pour vous répondre précisément sur chacune d'entre elles. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Alain Vasselle. Sur le terrain, ce n'est pas ainsi que cela se passe !
M. Patrick Lassourd. C'est se moquer du monde !

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