SEANCE DU 29 MAI 2001
M. le président.
La parole est à M. Huriet, auteur de la question n° 1067, adressée à Mme le
secrétaire d'Etat au logement.
M. Claude Huriet.
Madame le secrétaire d'Etat, le 15 février dernier, j'avais adressé à votre
prédécesseur, sur le même sujet, une question écrite, mais celle-ci n'a pas, à
ce jour, reçu de réponse. Or la situation que je veux évoquer est
particulièrement urgente, tout au moins dans mon département.
Je souhaite attirer votre attention sur les graves conséquences, pour les
communes, du refus de la direction départementale de l'équipement de
Meurthe-et-Moselle d'appliquer l'article L. 113-3 du code rural, tel que
modifié par la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 sur la solidarité et le
renouvellement urbain.
Je rappelle, en premier lieu, que la possibilité d'accorder des dérogations
aux dispositions législatives ou réglementaires soumettant à des conditions de
distance l'implantation de bâtiments agricoles vis-à-vis des habitations, et
réciproquement, a été le résultat d'une collaboration fructueuse entre les deux
assemblées et le Gouvernement.
Je souligne, en second lieu, que M. Louis Besson, à l'époque secrétaire d'Etat
au logement, avait déclaré, lors du débat parlementaire, que cette disposition
serait d'application immédiate.
Or, dans le département de Meurthe-et-Moselle, toutes les demandes de
dérogation sont systématiquement refusées, sans motivation suffisante,
contrairement à ce que prévoit l'article R. 421-29 du code de l'urbanisme. Les
circonstances de fait et de droit locales ne sont jamais examinées, le seul
rappel des textes - parfois mal compris, semble-t-il - paraissent justifier les
décisions de refus.
Madame le secrétaire d'Etat, estimez-vous normal que la DDE puisse limiter
ainsi les compétences des maires dans le domaine de l'urbanisme, en s'appuyant
sur une lecture parfois erronée des textes législatifs et en appliquant
aveuglément une mesure réglementaire, l'article R. 111-2 du code de
l'urbanisme, dont l'objet même est de garantir la salubrité et la sécurité
publiques, mais en aucun cas d'empêcher tout projet d'urbanisme ?
M. le président.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat,
Mme Marie-Noëlle Lienemann,
secrétaire d'Etat au logement.
Monsieur le sénateur, comme vous l'avez
indiqué, l'article L. 111-3 du code rural, modifié par la loi sur la solidarité
et le renouvellement urbains, est le résultat d'un travail fructueux mené par
le Gouvernement et les assemblées, en particulier le Sénat.
Il prévoit que, lorsque des dispositions législatives ou réglementaires
soumettent l'implantation ou l'extension de bâtiments agricoles à des
conditions de distance vis-à-vis d'immeubles ou d'habitations habituellement
occupés par des tiers, la même distance d'éloignement doit être imposée à ces
derniers.
Ce même article prévoit la possibilité de déroger à cette exigence, une
distance d'éloignement inférieure pouvant être admise par l'autorité qui
délivre le permis de construire.
Il appartient à cette autorité d'examiner la demande en fonction des
spécificités locales, de l'urbanisation déjà existante, du relief, et de
vérifier si la dérogation accordée n'est pas susceptible de soumettre les
habitants et usagers de la construction proposée à un risque qui serait de
nature à porter atteinte à leur santé ou à la salubrité publique. L'article R.
111-2 du code de l'urbanisme impose, à juste titre, au maire ou au préfet de
refuser le permis de construire dans le cas où un tel risque serait avéré. Bien
évidemment, cette disposition n'est pas de nature à priver les maires de leur
compétence en matière de dérogation de permis de construire.
S'agissant du cas particulier du département de Meurthe-et-Moselle, j'ai fait
procéder à une enquête auprès de mes services. Il en ressort que le service
chargé de l'instruction de ces demandes a, conformément aux prescriptions de
l'article L. 111-3, consulté la chambre d'agriculture sur chacune des demandes
de dérogation formulées et que les dérogations ont été refusées eu égard à des
risques sanitaires.
J'ai bien noté que vous entendiez que ces décisions de refus soient motivées
de manière plus explicite. C'est pourquoi je m'attacherai à ce que, à l'avenir,
les services de l'Etat veillent à fournir des argumentaires plus étoffés sur
les raisons précises du refus.
Cela étant, il s'agit de dispositions encore récentes, et les dépôts de
demandes de permis de construire ou d'extension n'ont pas été suffisamment
nombreux pour permettre de dire que, dans tel ou tel cas, les refus sont
systématiques.
Quoi qu'il en soit, je veillerai personnellement à ce que les services de
l'Etat appliquent rigoureusement l'esprit de loi - protéger contre des risques
sanitaires - mais rien que l'esprit de la loi.
Si vous souhaitez obtenir des informations un peu plus précises sur les
raisons justifiant les refus en ce qui concerne le département de
Meurthe-et-Moselle, mes services et moi-même sommes à votre disposition.
M. Claude Huriet.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet.
Madame le secrétaire d'Etat, je vous remercie de votre réponse.
Il est vrai que, pour l'instant, on ne peut faire état d'un nombre de dossiers
significatifs. Il n'en reste pas moins que l'ensemble des demandes dont j'ai
été saisi par les maires se sont toutes vu opposer une réponse négative,
réponse qui, en outre, n'était jamais motivée. Il y a tout de même là quelque
chose de frappant, qui m'a amené à poser une question écrite, puis cette
question orale.
J'ajoute que, dans la dernière réponse en date qui m'ait été communiquée, et
que je tiens moi aussi à votre disposition, il n'est pas du tout fait état de
la procédure qui a été voulue par le législateur, à savoir une saisine de la
chambre d'agriculture. On a donc le sentiment, à travers la formulation de la
réponse de la DDE, d'être devant une sorte de « fait du prince », ne tenant
aucun compte de la volonté du législateur.
On se souvient que celui-ci, confronté à une situation difficile, avait
cherché un équilibre entre la nécessité de satisfaire aux impératifs d'hygiène
et de sécurité et celle d'éviter le blocage des opérations de construction ou
de rénovation de bâtiments anciens dans de petites communes. On risque donc de
voir désormais, au coeur des villages, des immeubles qui auraient pu être
réhabilités et qui ne le seront pas, parce que le permis de construire aura été
refusé en vertu d'une interprétation trop rigide des textes, et rarement
argumentée, de la part des services extérieurs de l'Etat, du moins dans le
département de Meurthe-et-Moselle.
C'est là un vrai problème que sont ainsi confrontées le petites communes
rurales, et c'est bien pour les défendre que j'ai souhaité intervenir auprès de
vous.
UTILISATION DES CRÉDITS PALULOS