SEANCE DU 30 MAI 2001
M. le président.
« Art. 29. - Après l'article 11 de la loi n° 83-629 du 12 juillet 1983
précitée, il est inséré un article 11-2 ainsi rédigé :
«
Art. 11-2
. - Les agents des services internes de sécurité de la
Société nationale des chemins de fer français et de la Régie autonome des
transports parisiens qui ont fait l'objet d'une condamnation à une peine
correctionnelle ou à une peine criminelle inscrite au bulletin n° 2 du casier
judiciaire ou, pour les ressortissants étrangers, dans un document équivalent,
ne peuvent être affectés ou maintenus dans ce service interne de sécurité. Il
en va de même :
« 1° Si l'agent a fait l'objet d'un arrêté d'expulsion non abrogé ou d'une
interdiction du territoire français non entièrement exécutée ;
« 2° S'il a commis des actes, éventuellement mentionnés dans les traitements
automatisés de données personnelles gérés par les autorités de police,
contraires à l'honneur, à la probité ou aux bonnes moeurs ou de nature à porter
atteinte à la sécurité des personnes ou des biens, à la sécurité publique ou à
la sûreté de l'Etat. »
Par amendement n° 113, M. Bret, Mme Borvo et les membres du groupe communiste
républicain et citoyen proposent, dans le premier alinéa du texte présenté par
cet article pour l'article 11-2 de la loi n° 83-629 du 12 juillet 1983, de
supprimer les mots : « ou, pour les ressortissants étrangers, dans un document
équivalent, ».
La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo.
Grâce à cet amendement, nous souhaitons attirer l'attention sur les
difficultés d'application qui pourraient résulter de l'application littérale de
cet article. Bien entendu, je ne conteste pas la nécessité de recruter un
personnel irréprochable pour exercer des activités de surveillance et de
sécurité à l'intérieur des services publics de la RATP et de la SNCF, mais je
pense que la rédaction mériterait d'être améliorée. C'est la raison d'être de
notre amendement.
En particulier, la référence à un « document équivalent » au bulletin n° 2 du
casier judiciaire pour le recrutement de ressortissants étrangers me semble un
peu elliptique.
Certes, cette rédaction est la reprise quasi-identique des dispositions
actuelles du statut du personnel de la sécurité générale de la SNCF. Cependant,
comme cela nous a été rappelé, elle vise expressément les ressortissants
communautaires, les seuls pouvant être recrutés à l'heure actuelle.
Or, si nous pouvons supposer que les pays de l'Union européenne disposent de «
document équivalent » au casier judiciaire français - je n'en suis même pas
tout à fait sûre, s'agissant des trois niveaux retenus en France ou du régime
juridique applicable -, le problème devient autrement plus complexe s'agissant
des ressortissants extérieurs à l'Union européenne.
Faut-il interpréter alors l'article comme une simple demande aux pays
d'origine ? Qu'en sera-t-il éventuellement des réfugiés ? Comment jugera-t-on
des condamnations s'agissant d'ordres juridiques très différents ? Autant de
questions soulevées par le caractère très général de la rédaction de cet
alinéa, sur lesquelles je souhaiterais connaître l'avis du Gouvernement.
En outre, je m'interroge sur le cas des ressortissants français ayant séjourné
à l'étranger et qui pourraient y avoir commis des infractions. La logique de
l'article ne voudrait-elle pas en effet que l'on puisse demander aux autorités
du pays étranger un document attestant de l'absence de condamnation criminelle
ou correctionnelle ?
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Schosteck,
rapporteur.
Madame Borvo, je suis au regret de vous dire que la
commission n'a pas considéré que cet amendement apportait de la clarté dans le
débat.
En effet, on voit mal comment la SNCF pourrait ne pas soumettre le recrutement
des ressortissants étrangers aux mêmes règles que celui des ressortissants
français. Comment pourrait-elle être plus laxiste à l'égard des étrangers que
des Français, même s'il peut y avoir, c'est vrai, quelques difficultés
administratives à obtenir un document pour un étranger ! Ce serait tout de même
un peu fort de café, si vous me permettez cette expression.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Je voudrais d'abord rectifier une erreur
figurant dans l'argumentaire de l'amendement.
L'exigence de contrôle d'un document équivalant au casier judiciaire pour les
ressortissants étrangers employés dans les services internes de sécurité de la
SNCF ou de la RATP figure bien dans le projet de loi relatif aux activités de
sécurité privée dont est extrait l'article que nous étudions, mais ce par un
jeu de renvoi d'articles qui a sans doute échappé à la vigilance des auteurs de
l'amendement.
Par ailleurs, il n'y a aucune mesure discriminatoire dans cette exigence : la
plupart des pays étrangers disposent d'un équivalent de notre casier
judiciaire.
En outre, il est évidemment souhaitable que l'on puisse s'assurer que les
agents qui exercent des missions de surveillance et qui peuvent être armés
soient exempts de condamnation. Cela me paraît même indispensable.
Dans ces conditions, j'émets un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président.
Madame Borvo, l'amendement n° 113 est-il maintenu ?
Mme Nicole Borvo.
Je le retire, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° 113 est retiré.
Par amendement n° 114, M. Bret, Mme Borvo et les membres du groupe communiste
républicain et citoyen proposent de supprimer le deuxième alinéa (1°) du texte
présenté par l'article 29 pour l'article 11-2 de la loi n° 83-629 du 12 juillet
1983.
La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo.
Cet amendement a un tout autre objet que celui que je viens d'évoquer à
l'instant.
Il vise à supprimer le 1° de l'article 29, qui interdit l'embauche dans un
service de sécurité interne de la SNCF ou de la RATP et le maintien dans son
poste d'un agent qui « a fait l'objet d'un arrêté d'expulsion non abrogé ou
d'une interdiction du territoire français non entièrement exécutée ».
Je dois dire que la lecture de cette disposition m'a laissée pour le moins
perplexe. Rappelons en effet le droit applicable : l'arrêté d'expulsion ou la
mesure d'interdiction du territoire empêchent la délivrance ou le
renouvellement d'un titre de séjour ou emportent son retrait. Par conséquent,
ils entraînent l'impossibilité d'embauche et l'annulation du contrat de
travail.
En outre, ces deux mesures sont inscrites au bulletin n° 2 du casier
judiciaire.
Il est donc clair que toute personne qui a fait l'objet de l'une ou l'autre de
ces mesures ne peut être employée dans un service de sécurité de la RATP ou de
la SNCF : cette disposition apparaît donc redondante et inutile eu égard à
l'état actuel du droit.
La seule explication me semble donc résider dans la volonté d'éviter les
situations dans lesquelles une personne faisant l'objet d'une mesure
d'interdiction du territoire français ou d'un arrêté d'expulsion pourrait, en
infraction à la législation sur les étrangers, se maintenir illégalement dans
son poste, faute pour l'entreprise d'avoir eu connaissance de ladite mesure.
Les sénateurs communistes sont pour le moins surpris qu'on demande à
l'entreprise publique de se faire juge de l'applicabilité ou de l'exécution
d'une mesure d'éloignement du territoire français !
C'est aux préfectures ou aux parquets qu'il revient de s'assurer de
l'exécution des mesures administratives ou judiciaires prises à l'encontre des
ressortissants étrangers sur le fondement de l'ordonnance de 1945.
Il ne nous semble donc pas judicieux de faire de la direction de la SNCF ou de
la RATP des auxiliaires de la police des étrangers.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Schosteck,
rapporteur.
La commission est défavorable à cet amendement parce que les
renseignements concernant les mesures d'éloignement du territoire peuvent tout
à fait être recueillis auprès des préfectures. Celles-ci disposent des moyens
pour le faire. Par conséquent, l'entreprise ne se transforme pas en juge.
En tout état de cause, dans un amendement qui viendra ultérieurement en
discussion, nous avons prévenu les inconvénients qui pourraient résulter de
cette situation en disant que l'employeur ne peut être sanctionné que s'il a
recruté en connaissance de cause.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Il s'agit d'une règle générale qui me paraît
aller de soi.
Par ailleurs, contrairement à ce qu'indiquent les auteurs de cet amendement,
ce ne sont pas la SNCF ou la RATP qui seront juges de l'applicabilité ou de
l'inexécution d'une mesure d'éloignement du territoire. Ce contrôle sera non
pas le fait des entreprises mais celui des services de l'Etat auxquels les
entreprises s'adresseront pour contrôler les conditions d'honorabilité et de
moralité.
Je pense donc que les auteurs de cet amendement ont toutes assurances leur
permettant de le retirer.
M. le président.
Madame Borvo, l'amendement est-il maintenu ?
Mme Nicole Borvo.
Je le retire, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° 114 est retiré.
Par amendement n° 70, M. Schosteck, au nom de la commission des lois, propose,
dans le dernier alinéa (2°) du texte présenté par l'article 29 pour l'article
11-2 de la loi n° 83-629 du 12 juillet 1983, après les mots : « traitements
automatisés », d'ajouter les mots : « et autorisés ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Pierre Schosteck,
rapporteur.
L'article 29 interdit notamment de recruter comme agents des
services de sécurité internes de la SNCF ou de la RATP des personnes ayant
commis certains actes, « éventuellement mentionnés dans les traitements
automatisés de données personnelles gérés par les autorités de police ».
La commission a admis l'idée selon laquelle certains faits, même s'ils n'ont
pas donné lieu à condamnation, peuvent empêcher le recrutement dans des
services de sécurité très sensibles. Mais elle a souhaité qu'au minimum on ne
puisse se référer qu'à des traitements de données autorisés selon les formes
légales et réglementaires.
On rappellera à cet égard que le système de traitement de l'information
criminelle n'a pas encore fait l'objet d'une autorisation réglementaire.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Il va de soi que les fichiers de police visés ne
sont et ne peuvent être que les fichiers autorisés au sens de la loi de 1978
relative à l'informatique et aux libertés. Je pense donc que tous les éléments
sont réunis pour donner un avis favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 70, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 29, ainsi modifié.
(L'article 29 est adopté.)
Article 30