SEANCE DU 12 JUIN 2001
M. le président.
La parole est à M. Blanc, auteur de la question n° 1080, adressée à Mme le
ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.
M. Paul Blanc.
Madame la ministre, je me fais l'écho des inquiétudes provoquées par le projet
de loi sur l'eau en préparation dans vos services.
J'attire votre attention sur les risques que fait courir celui-ci aux canaux
d'irrigation d'arrière-pays. D'importantes taxes devraient en effet être
prélevées à la fois sur les mètres cubes d'eau utilisés et sur les kilomètres
de canaux.
Chaque commune des cantons de montagne du département des Pyrénées-Orientales,
que j'ai l'honneur de représenter, compte un ou plusieurs canaux encore en
service. Ils ne sont maintenus en activité que grâce au bénévolat et avec des
budgets dérisoires. En effet, les taxes d'irrigation couvrent à peine les frais
de fonctionnement et sont souvent payées par des propriétaires de terrains
actuellement en friche.
Certains canaux ne perçoivent aucune taxe et subsistent uniquement par le fait
de volontaires.
Seuls les quelques agriculteurs qui ont le courage et la nécessité de
maintenir des exploitations dans des conditions économiques difficiles
utilisent l'eau pour les vergers ou les prairies de fauche.
La véritable utilité des canaux dans cette zone en pleine désertification
réside plus dans le maintien de quelques potagers dans les villages ou dans le
maintien de la végétation que dans une fonction véritablement agricole.
Souvent, ces canaux permettent même l'alimentation des sources d'eau potable
des villages, et ils sont indispensables à la préservation de
l'environnement.
Parfois, faute de bénévolat, ce sont les communes qui reprennent à leur compte
les canaux afin de satisfaire aux besoins vitaux. J'en veux pour exemple une
commune dont le budget annuel d'entretien d'un canal est de 32 000 francs ; la
loi sur l'eau exigerait une nouvelle taxe de 30 000 francs. Cette taxe ne
pourrait pas frapper les seuls agriculteurs, et encore moins frapper des
propriétaires qui n'utilisent pas l'eau.
L'effort d'aménagement hydraulique de la seconde moitié du xixe siècle serait
anéanti si le texte de ce projet de loi sur l'eau n'était pas modifié. Il
convient donc de l'aménager afin que ces indispensables canaux d'irrigation
puissent survivre.
Pouvez-vous, madame la ministre, en l'état actuel de votre réflexion, nous
rassurer sur ce sujet ?
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Dominique Voynet,
ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.
Monsieur
le sénateur, vous vous inquiétez des conséquences du projet de réforme des
redevances des agences de l'eau sur les usages liés aux canaux d'irrigation en
zone de montagne.
Faisant suite à un travail de concertation approfondi, au cours duquel
plusieurs hypothèses ont été étudiées, les niveaux de redevance de consommation
d'eau que le Gouvernement envisage de proposer au Parlement ont été établis de
façon à être suffisamment incitatifs pour que les différents préleveurs
participent à une meilleure gestion de l'eau, sans pour autant mettre en danger
l'équilibre économique des activités irriguées.
Beaucoup d'inquiétudes nées de la diversité des hypothèses envisagées au cours
des derniers mois, mais aussi de rumeurs faisant état de sommes absolument
considérables, devraient donc être apaisées.
Dans les zones de montagne où la ressource en eau peut être considérée comme
abondante au regard des prélèvements qui y sont effectués, les redevances
seront plus faibles que dans les zones où la ressource est moins abondante.
En outre, s'agissant de canaux dérivant de l'eau de rivières de montagne pour
permettre une irrigation de terrains plus à l'aval, il est important de noter
que les irrigants seront imposés, non sur le volume dérivé au départ, mais sur
leur consommation effective sur les surfaces bénéficiant réellement de
l'irrigation.
Enfin, les exploitants consommant de petits volumes bénéficieront d'une
taxation minorée. En dessous de 7 000 mètres cubes consommés par an - volume,
vous en conviendrez, amplement suffisant pour l'arrosage d'un potager familial
- les irrigants seront même totalement exonérés de la redevance
consommation.
L'une des incitations majeures à la bonne gestion de l'eau figurant dans le
projet réside dans l'application de taux de redevance plus faibles aux
irrigants s'engageant à respecter un protocole de gestion collective. Dans les
régions où l'irrigation se pratique depuis longtemps à partir d'un réseau de
canaux collectifs, l'organisation traditionnelle des irrigants devrait
faciliter la mise en place de ces protocoles.
La redevance de modification du régime des eaux, que vous n'avez pas évoquée
et qui est applicable aux prises d'eau ayant un effet important sur le régime
du cours d'eau dans lesquels ces prises ont été effectuées, remplacera les
redevances de prélèvement existantes dans certains bassins, dont le bassin
Rhône-Méditerranée-Corse. Ce n'est donc pas un prélèvement supplémentaire mais
une évolution du mode de prélèvement.
M. Paul Blanc.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Blanc.
M. Paul Blanc.
Je rappellerai simplement que le département des Pyrénées-Orientales est un
département méditerranéen, donc sujet à de très grandes sécheresses, et que les
besoins en eau y sont peut-être encore plus importants que dans d'autres
départements.
SERVICE PUBLIC DE L'EAU