SEANCE DU 12 JUIN 2001
M. le président.
La parole est à M. Hérisson, auteur de la question n° 1088, adressée à Mme le
ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.
M. Pierre Hérisson.
Madame la ministre, les services chargés de la distribution de l'eau potable
s'inquiètent des conséquences sur la gestion et le fonctionnement de leur
organisation engendrées, d'une part, par l'article 93 de la loi relative à la
solidarité et au renouvellement urbains, qui rend obligatoire, à la demande du
propriétaire, l'individualisation des contrats de fourniture d'eau potable à
l'intérieur des immeubles collectifs d'habitation et des ensembles immobiliers
de logements, et, d'autre part, par le projet de loi sur l'eau, qui complétera
ces dispositions par l'individualisation des compteurs d'eau et la suppression
de la partie fixe ou abonnement de la facture.
En effet, dans un souci de bonne gestion de ce service public, de nombreux
distributeurs ont opté pour la pose de compteurs généraux dans les immeubles
collectifs, laissant aux propriétaires le soin d'organiser la gestion des
compteurs divisionnaires. Cette possibilité, reconnue par le Conseil d'Etat,
est désormais remise en cause par le Gouvernement.
La suppression de la partie fixe de la facture d'eau, pourtant largement
justifiée par les coûts fixes d'exploitation et d'investissement dans les
installations et les dépenses de facturation, de relevé et d'entretien des
compteurs, privera les services gestionnaires de recettes indispensables à leur
équilibre budgétaire.
Enfin, ces textes ne précisent pas qui devra assumer l'entretien des
canalisations à l'intérieur des immeubles, ni les moyens financiers qui seront
mobilisés pour compenser les impayés qui ne manqueront pas de naître en raison
de la politique du « droit à l'eau », fortement recommandée par le Conseil
économique et social.
Si le fondement même de ces mesures est incontestable, puisqu'elles permettent
un égal accès du citoyen au service public de l'eau et de l'eau potable, en
particulier, il n'en reste pas moins qu'elles auront des répercussions directes
sur le prix du mètre cube d'eau facturé à l'usager, qui devra, par conséquent,
être majoré.
Toutes ces nouvelles charges mettront en difficulté les services publics
concernés.
Aussi, je vous demande de bien vouloir me faire part des mesures de
compensation budgétaire que le Gouvernement envisage afin que le prix du mètre
cube d'eau reste abordable pour le consommateur.
M. le président.
Madame la ministre, comme vos collègues qui se sont déplacés ce matin, nous
voulons vous féliciter d'être venue répondre personnellement aux questions qui
vous ont été posées. Mais ce n'est pas une exception pour vous, et la Haute
Assemblée vous en sait gré.
Cela étant dit, je vous donne la parole, madame la ministre.
Mme Dominique Voynet,
ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.
Je vous
remercie, mais c'est bien normal, monsieur le président.
Monsieur le sénateur, vous avez appelé mon attention sur les conséquences,
pour les services publics de distribution d'eau, des dispositions législatives
de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains et du projet de
loi portant réforme de la politique de l'eau en ce qui concerne le comptage de
l'eau en habitat collectif, l'abonnement au service de distribution d'eau et la
facturation de l'eau.
L'article 93 de la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au
renouvellement urbains a, en effet, introduit des dispositions visant à
faciliter le passage à l'abonnement individuel en habitat collectif. Elles
contribueront à l'égalité de traitement des résidents en habitat collectif et
en habitat individuel au regard du service public.
J'avoue ne pas bien comprendre l'inquiétude des distributeurs d'eau sur
l'application de cette disposition, dans la mesure où l'article en question
précise que c'est le propriétaire ayant formulé la demande qui prend à sa
charge les études et les travaux nécessaires, notamment ceux de mise en
conformité des installations aux prescriptions du code de la santé publique et
la pose des compteurs d'eau. Un décret d'application précisera les modalités de
mise en oeuvre de cette mesure ; il est en cours de rédaction.
Par ailleurs, je suis persuadée que le passage à l'abonnement individuel en
habitat collectif ne pourra se développer que si les futurs abonnés y ont un
intérêt. Là se pose le problème des services qui pratiquent une partie fixe
élevée. Cette dernière constitue évidemment un frein au développement de
l'abonnement individuel.
Le projet de loi portant réforme de la politique de l'eau réaffirme le
principe de la tarification proportionnelle au volume d'eau réellement
consommé. Il précise le mode de calcul d'une éventuelle partie fixe par une
définition claire des charges auxquelles elle pourra correspondre, ce qui
permettra d'éliminer les abus.
Dans certains endroits, vous le savez, la consommation du premier mètre cube
d'eau est extrêmement coûteuse. Les collectivités qui ont choisi de facturer
une partie fixe pourront expliquer à leurs usagers le fondement de celle-ci, ce
qui permettra d'améliorer la transparence et la compréhension de la
tarification de l'eau et de l'assainissement.
En ce qui concerne le comptage de l'eau, le projet de loi complète les
dispositions de la loi sur la solidarité et le renouvellement urbains en
modifiant le code de la construction et de l'habitation, afin que toute
nouvelle construction d'immeuble comporte une installation permettant de
déterminer la quantité d'eau froide fournie à chaque local occupé à titre
privatif, ainsi qu'aux parties communes.
Comme vous le soulignez, le fondement des mesures permettant d'affirmer le «
droit à l'eau » est incontestable. Chacun doit pouvoir disposer d'un accès à
l'eau suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille. Le
problème des impayés, même s'il ne constitue qu'un faible pourcentage du nombre
de factures émises chaque année, ne doit pas être négligé.
Le dispositif pris en application de la loi d'orientation relative à la de
lutte contre les exclusions du 29 juillet 1998 pour les personnes qui
éprouveraient des difficultés pour le paiement de leur facture d'eau du fait
d'une situation de précarité ne répond pas à toutes les attentes et ne peut pas
être mis en oeuvre sur l'ensemble du territoire. C'est pourquoi nous sommes
convenus, la ministre de l'emploi et de la solidarité et moi-même d'organiser
une mission d'inspection conjointe pour examiner les conditions de mise en
oeuvre de ces dispositions. Nous tenons, bien entendu, non seulement à l'accès
de tous à l'eau, mais aussi à la transparence des conditions de gestion du
service public de l'eau. En tout cas, c'est ainsi qu'a été conçu le projet de
loi sur l'eau préparé par le Gouvernement et qui sera examiné par le conseil
des ministres avant la fin de ce mois.
M. Pierre Hérisson.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson.
Madame la ministre, il est vrai que la charge des installations incombe au
propriétaire, mais nous savons bien que celui-ci répartit ensuite cette charge
entre les locataires. Aussi, ne vous faites pas trop d'illusions quant à la
finalité de votre bonne intention !
S'agissant du problème de la partie fixe, malgré la possibilité donnée par la
loi d'appliquer une tarification proportionnelle au volume d'eau consommé, il
existe un phénomène que vous ne pouvez ignorer : dans beaucoup de secteurs, en
particulier dans ceux de notre pays qui sont à dominante d'habitat et de
résidences secondaires, le tarif de l'eau dépassera 100 francs le mètre cube
pour la première partie.
La logique commande aujourd'hui que la partie fixe qui correspondait à un
investissement identique pour chacun des abonnés au réseau d'eau potable, qu'il
s'agisse de la résidence principale ou de la résidence secondaire, soit
répartie équitablement puisque tout le monde paye le même tarif. Il me paraît
regrettable - j'insiste sur ce point - que nous ne puissions pas maintenir
cette partie fixe.
IMPLANTATION DU TROISIÈME AÉROPORT
DE LA RÉGION PARISIENNE