SEANCE DU 11 OCTOBRE 2001


M. le président. L'amendement n° 1, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Après l'article unique, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 421-1 du code pénal est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« 6° Les infractions de blanchiment prévues au chapitre IV du titre II du livre III du présent code ;
« 7° Les délits d'initié prévus à l'article L. 465-1 du code monétaire et financier. »
« II. - Il est inséré, après l'article 421-2-1 du même code, un article 421-2-2 ainsi rédigé :
« Art. 421-2-2. - Constitue également un acte de terrorisme le fait de financer une entreprise terroriste en fournissant, en réunissant ou en gérant des fonds, des valeurs ou des biens quelconques ou en donnant des conseils à cette fin, dans l'intention de voir ces fonds, valeurs ou biens utilisés ou en sachant qu'ils sont destinés à être utilisés, en tout ou partie, en vue de commettre l'un quelconque des actes de terrorisme prévus au présent chapitre, indépendamment de la survenance éventuelle d'un tel acte. »
« III. - L'article 421-5 du même code est ainsi modifié :
« 1° Au début du premier alinéa, les mots : "L'acte de terrorisme défini à l'article 421-2-1 est puni" sont remplacés par les mots : "Les actes de terrorisme définis aux articles 421-2-1 et 421-2-2 sont punis" ;
« 2° Il est inséré, dans le premier alinéa, un alinéa ainsi rédigé :
« La tentative du délit défini à l'article 421-2-2 est punie des mêmes peines. » ;
« 3° Dans le dernier alinéa, les mots : "au délit prévu" sont remplacés par les mots : "aux délits prévus".
« IV. - Il est inséré, après l'article 422-5 du code pénal, deux articles 422-6 et 422-7 ainsi rédigés :
« Art. 422-6 . - Les personnes physiques ou morales reconnues coupables d'actes de terrorisme encourent également la peine complémentaire de confiscation de tout ou partie de leurs biens quelle qu'en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis.
« Art. 422-7 . - Le produit des sanctions financières ou patrimoniales prononcées à l'encontre des personnes reconnues coupables d'acte de terrorisme est affecté au fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions. »
« V. - L'article 706-15 du code de procédure pénale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L'instruction des actes de terrorisme définis aux 5° à 7° de l'article 421-1 du code pénal et à l'article 421-2-2 de ce même code peut être confiée, le cas échéant dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 83, à un magistrat du tribunal de grande instance de Paris affecté aux formations d'instruction spécialisées en matière économique et financière en application des dispositions du dernier alinéa de l'article 704. »
« VI. - Il est inséré, après l'article 706-24-1 du même code, un article 706-24-2 ainsi rédigé :
« Art. 706-24-2 . - En cas d'information ouverte pour une infraction entrant dans le champ d'application de l'article 706-16, et afin de garantir le paiement des amendes encourues, ainsi que l'exécution de la confiscation prévue à l'article 422-6 du code pénal, le juge des libertés et de la détention peut, sur requête du procureur de la République, ordonner, aux frais avancés du Trésor et selon les modalités prévues par le code de procédure civile, des mesures conservatoires sur les biens de la personne mise en examen.
« La condamnation vaut validation des saisies conservatoires et permet l'inscription définitive des sûretés.
« La décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement emporte de plein droit, aux frais du Trésor, mainlevée des mesures ordonnées. Il en est de même en cas d'extinction de l'action publique.
« Pour l'application des dispositions du présent article, le juge des libertés et de la détention est compétent sur l'ensemble du territoire national. »
« VII. - Il est inséré, après l'article 689-9 du même code, un article 689-10 ainsi rédigé, qui sera applicable à la date d'entrée en vigueur de la convention internationale pour la répression du financement du terrorisme ouverte à la signature à New York, le 10 janvier 2000 :
« Art. 689-10 . - Pour l'application de la convention internationale pour la répression du financement du terrorisme, ouverte à la signature à New York, le 10 janvier 2000, peut être poursuivie et jugée dans les conditions prévues à l'article 689-1 toute personne coupable d'un crime ou d'un délit défini par les articles 421-1 à 421-2-2 du code pénal lorsque cette infraction constitue un financement d'actes de terrorisme au sens de l'article 2 de ladite convention. »
« VIII. - L'article L. 465-1 du code monétaire et financier est ainsi modifié :
« 1° Dans le deuxième alinéa, les mots : "de six mois d'emprisonnement et de 100 000 francs d'amende" sont remplacés par les mots : "d'un an d'emprisonnement et de 150 000 euros d'amende" ;
« 2° Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Est puni d'un an d'emprisonnement et d'une amende de 150 000 euros dont le montant peut être porté au-delà de ce chiffre, jusqu'au décuple du montant du profit réalisé, sans que l'amende puisse être inférieure à ce même profit, le fait pour toute personne autre que celles visées aux deux alinéas précédents, possédant en connaissance de cause des informations privilégiées sur la situation ou les perspectives d'un émetteur dont les titres sont négociés sur un marché réglementé ou sur les perspectives d'évolution d'un instrument financier admis sur un marché réglementé, de réaliser ou de permettre de réaliser, directement ou indirectement, une opération ou de communiquer à un tiers ces informations, avant que le public en ait connaissance. Lorsque les informations en cause concernent la commission d'un crime ou d'un délit, les peines encourues sont portées à sept ans d'emprisonnement et à 1 500 000 euros si le montant des profits réalisés est inférieur à ce chiffre. »
« IX. - Les dispositions du présent article sont applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis-et-Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.
« L'article 450-1 du code pénal, dans sa rédaction issue de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques, et l'article 450-2-1 du code pénal, créé par la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 précitée et modifié par le V ci-dessus, sont applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis-et-Futuna, dans les Terres australes et antarctiques françaises et à Mayotte. »
La parole est à M. le ministre.
M. Pierre Moscovici, ministre délégué. Je veux tout d'abord remercier la Haute Assemblée de son vote unanime, qui marque bien l'importance qu'elle attache à la lutte contre le terrorisme.
J'ai bien noté votre insistance au sujet de la mise en oeuvre pratique de ces dispositions et de la détermination qui doit être la nôtre pour combattre ce fléau.
Je remercie le Sénat du travail accompli, en particulier par sa commission des affaires étrangères et par sa commission des lois, mais je n'aurai garde d'oublier sa commission des finances.
Je salue tout spécialement le travail de votre rapporteur, M. Rouvière, notamment sur cet amendement, puisque la commission des affaires étrangères a accepté d'y travailler en urgence compte tenu des circonstances.
Je constate, sur l'amendement n° 1, un large accord sur le fond. Cet amendement vise, je le rappelle, à transcrire en droit interne certaines obligations internationales en matière de lutte contre le terrorisme.
Le contenu de cet amendement est extrêmement important, mais le Gouvernement n'ignore pas qu'une discussion juridique a surgi sur le moyen le plus adapté pour inclure ces modifications dans notre code pénal. J'ai entendu, sur ce point, l'observation de Mme Bidard-Reydet, et je sais que cette observation est partagée par d'autres sénateurs, notamment par certains membres de la commission des lois.
Pourquoi le Gouvernement a-t-il déposé cet amendement ? Je le disais dans mon intervention liminaire, à circonstances exceptionnelles, procédures exceptionnelles. Et il nous semblait, en vérité, à l'analyse du droit, qu'il était possible de procéder ainsi. Si nous ne l'avions pas pensé, nous n'aurions pas déposé cet amendement !
En même temps, on nous opposait d'autres arguments sur le caractère pour le moins inhabituel, j'en conviens, d'une telle procédure et sur le risque de précédent qui aurait pu être fâcheux dans des circonstances différentes de celles qui, à l'évidence, nous rassemblent aujourd'hui.
Dans ces conditions, tout bien réfléchi et compte tenu des rapports que le Gouvernement souhaite entretenir avec le Parlement, non seulement dans cette période mais plus généralement, je ne ferai pas de cette question une question de principe.
Le Gouvernement se félicite de l'accord sur le fond du Sénat, mais il est prêt à retirer son amendement et en reprendre le contenu dans un amendement au projet de loi sur la sécurité quotidienne, qui sera examiné par le Sénat mardi prochain. Nous pourrons ainsi concilier la cohérence juridique et la rapidité.
Je retire donc l'amendement n° 1, et je fais tout à fait confiance à la sagesse et à la célérité du Sénat pour intégrer dans notre droit interne ces dispositions, que je considère tout à fait importantes. (Applaudissements.)
M. le président. L'amendement n° 1 est retiré.
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)
M. le président. Je constate que le projet de loi a été adopté à l'unanimité.

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