SEANCE DU 17 OCTOBRE 2001
M. le président.
L'article 1er C a été supprimé par l'Assemblée nationale.
L'amendement n° 17, présenté par M. Schosteck, au nom de la commission, est
ainsi libellé :
« Rétablir l'article 1er C dans la rédaction suivante :
« L'article 40 du code de procédure pénale est complété par un alinéa ainsi
rédigé :
« A la demande du maire, le procureur l'informe des suites données aux
plaintes formulées pour des infractions commises sur le territoire de sa
commune et des motifs d'un éventuel classement sans suite. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Pierre Schosteck,
rapporteur.
Cet amendement ne devrait pas poser de problème puisqu'il
s'agit de permettre au maire dans l'hypothèse - idéale, selon certains ! - où
il ne serait pas porté partie civile, d'obtenir néanmoins des informations de
la part du procureur. Il faut que le maire puisse - c'est une simple faculté -
demander quelles suites ont été données à une plainte et les raisons d'un
éventuel classement sans suite.
Une telle information ne peut pas seulement résulter des bons rapports que le
maire entretient éventuellement avec son procureur ; il n'est pas concevable de
s'en remettre à un tel aléa.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Défavorable.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 17.
M. Robert Badinter.
Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président.
La parole est à M. Badinter.
M. Robert Badinter.
Je souhaite apporter quelques précisions, parce que nous devons savoir de quoi
nous parlons.
Pour l'ensemble de la France, le nombre de classements sans suite s'est élevé,
en 1998, à 416 000 ; en 1999, il a atteint 410 000. Ce sont donc plus de 400
000 informations que les greffes des parquets devront envoyer aux maires chaque
année ? Annoncez cela aujourd'hui aux greffes, dans la situation où ils se
trouvent, et vous verrez leur réaction !
J'ajoute, monsieur le rapporteur, que, en ce qui concerne le tribunal de
Nanterre, qui nous intéresse l'un et l'autre, 26 000 affaires ont été traitées
en 1999, dont 7 215 classements sans suite. Vous connaissez aussi bien que moi
la situation du tribunal de Nanterre aujourd'hui ! Souhaitez-vous vraiment que
ce tribunal transmette 26 00 dossiers aux maires ?
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Dans le cadre d'un texte qui est actuellement en navette, le Gouvernement
propose que les parquets tiennent au courant les plaignants des décisions
prises ainsi que de leurs motivations. Cela représente déjà un travail énorme,
mais c'est nécessaire car beaucoup de ceux qui ont porté plainte se plaignent à
juste titre de ne pas savoir ce qu'est devenue leur affaire et quelle décision
a été prise par le parquet.
Si vous aviez repris le texte de cet article dans votre amendement, de manière
qu'il soit voté plus vite, je n'y aurais pas vu d'inconvénient. Mais que
demandez-vous ? Que, en cas de conflit de voisinage, le procès-verbal, ou son
contenu, soit envoyé au maire ? Pensez-vous que le maire doive connaître toutes
les plaintes déposées par ses concitoyens ? Est-ce là son rôle ?
M. Jean-Pierre Schosteck,
rapporteur.
Mais non !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
C'est inutile, et inapplicable : on vient de vous donner les chiffres !
Que l'on tienne la commune au courant lorsque c'est elle qui a porté plainte,
je l'admets, mais ne demandez pas que la commune soit informée dans tous les
cas ! Or tel est bien l'objet de votre amendement : « A la demande du maire,...
»
M. Jean-Pierre Schosteck,
rapporteur.
A sa demande !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
« ... le procureur l'informe des suites données aux plaintes formulées pour
des infractions commises sur le territoire de sa commune et des motifs d'un
éventuel classement sans suite. »
Il n'y a pas d'exception !
M. Jean-Pierre Schosteck,
rapporteur.
A sa demande !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
A la demande du maire, soit ! Mais le maire peut demander ce qu'il veut,...
Mme Nicole Borvo.
Il peut demander n'importe quoi !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
... y compris pour des affaires rigoureusement privées !
Mme Nicole Borvo.
Absolument !
M. Robert Bret.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret.
Cet amendement, comme les deux précédents, est l'exemple même de la fausse
bonne idée.
L'objectif, louable, est que le maire dispose d'une meilleure information sur
la réalité de la délinquance au sein de sa commune. C'est, en réalité, un
cadeau empoisonné ! D'abord, ce sera matériellement impraticable, comme
l'indiquait notre collègue M. Badinter, compte tenu de la masse d'informations
en cause, notamment pour les grandes communes ; en outre, cet amendement est
constitutionnellement discutable dans la mesure où il risque de mettre en péril
la confidentialité de certaines affaires privées,...
Mme Nicole Borvo.
Absolument !
M. Robert Bret.
... comme l'avait précisé, lors de la première lecture, M. le ministre de
l'intérieur.
Avec un tel amendement, on remet en cause le respect de la vie privée. Nous ne
pourrons donc que voter contre.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 17, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 1er C est rétabli dans cette rédaction.
Article 1er D