SEANCE DU 6 NOVEMBRE 2001
M. le président.
La parole est à M. Masseret, auteur de la question n° 1174, adressée à M. le
ministre de l'agriculture et de la pêche.
M. Jean-Pierre Masseret.
Monsieur le ministre, le 17 octobre dernier, vous avez pris une série de
mesures complémentaires pour faire face à la crise bovine.
Je dois vous dire que ces mesures ont été unanimement appréciées, en tout cas
dans mon département, la Moselle, par les organisations syndicales, les
fédérations départementales et le centre des jeunes agriculteurs. Elles
témoignent, en effet, de l'engagement qui est le vôtre sur ce dossier depuis
plus d'un an déjà, et de votre détermination tout à fait exemplaire.
Vos initiatives, qui sont soutenues par le Gouvernement, ont donné des
résultats. Il restait cependant du chemin à faire, et c'est l'objet des mesures
du 17 octobre.
Permettez-moi de vous interroger plus particulièrement sur la mesure n° 22,
relative aux initiatives prises en faveur du secteur de la vache allaitante.
Evitons, sur ce dossier, toute « discrimination territoriale ». En effet,
quand on évoque le bassin allaitant, on pense naturellement, et légitimement,
au centre de la France. Mais j'appelle votre attention sur le fait que la
Moselle compte 55 000 vaches allaitantes, les producteurs ayant, depuis des
années, organisé une filière complète et cohérente avec, outre les vaches
allaitantes et les broutards à l'engraissement, quatre abattoirs concentrés sur
son territoire qui desservent l'ensemble de la région Lorraine, une industrie
de transformation, de découpe, de conditionnement et de charcuterie ainsi qu'un
label de certification de la qualité de la filière « viande bovine ».
Je souhaite donc que, pour éviter toute « discrimination territoriale », vos
services et vous-même, monsieur le ministre, preniez en considération
l'ensemble des situations.
Permettez-moi de vous interroger également sur la restauration hors domicile,
qui représente 20 % du marché. Il serait important que l'ensemble des
administrations, qui sont des grosses consommatrices de viande du fait de leurs
différentes formules de restauration collective, fassent évoluer leurs cahiers
des charges pour y introduire des conditions tenant au sérieux de la
traçabilité. Aujourd'hui, l'approvisionnement vient, pour beaucoup, de
l'extérieur ; cela n'est pas condamnable en soi, mais n'offre que peu de
garanties sur la sécurité alimentaire.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
Monsieur le sénateur, c'est à
la fois avec plaisir et intérêt que je réponds ce matin à vos deux
questions.
Cette crise bovine, par sa longueur même - elle dure depuis près d'un an - est
beaucoup plus grave que celle que nous avions connue en 1996 et qui avait déjà
causé beaucoup de dommages à la filière bovine française.
Donc, cette crise dure, et ses effets sur les revenus des éleveurs sont de
plus en plus préoccupants.
Je l'ai dit à plusieurs reprises, le Gouvernement veut prendre en compte la
difficulté de la situation et l'angoisse des éleveurs. Je suis frappé de
constater, dans mes rencontre avec les éleveurs, qu'à la colère a succédé une
sorte de résignation déprimée. Les éleveurs vont même jusqu'à se demander s'il
y a encore un avenir pour l'élevage bovin dans notre pays.
Il est de notre devoir tout à la fois de répondre à leur détresse, dans
l'immédiat, et de fixer un cap pour l'avenir, en montrant quelles perspectives
s'offrent à la production de bovins dans notre pays.
S'agissant de la restauration hors domicile, j'ai d'ores et déjà pris
différentes initiatives. Ainsi, j'ai rencontré le syndicat des entreprises de
restauration hors domicile et j'ai encouragé mes interlocuteurs à privilégier
autant que faire se peut - je n'ai pas les moyens d'interdire les importations
- les viandes françaises pour nous aider à passer ce mauvais cap. En effet,
dans ces périodes de difficultés, nous avons des stocks et des surplus à la
fois dans les frigos et sur pieds, dans les exploitations.
J'ai, de même, pris l'initiative d'inciter l'ensemble des maires de notre
pays, notamment ceux qui gèrent des cantines scolaires en direct ou par
l'intermédiaire d'entreprises concessionnaires, à faire preuve, comme vous le
souhaitez, d'une volonté de consommation citoyenne et à modifier en ce sens les
cahiers des charges qu'ils fixent à leurs entreprises ou à leurs fournisseurs
pour que, les yeux ouverts, chacun puisse savoir quelle viande est consommée
dans nos cantines, plutôt que de s'en tenir uniquement au prix de la viande. Je
continuerai à agir dans ce sens.
Je le redis devant vous, dans la procédure d'appel d'offres pour ses marchés
publics, une collectivité n'est pas contrainte au choix du moins-disant. Elle a
simplement obligation, si elle ne retient pas le moins-disant, d'expliquer
pourquoi. Un cahier des charges qualitatif peut être et doit être une très
bonne raison pour cela.
J'agirai de même, avec mon collègue Michel Sapin, ministre de la fonction
publique et de la réforme de l'Etat, en direction de l'ensemble de la
restauration collective dépendant de l'Etat dans les différents ministères,
qu'il s'agisse de la défense ou de la santé, notamment, de sorte que nous
puissions donner l'exemple.
Effectivement, il faut que nous puissions faire progresser cette exigence de
qualité et promouvoir une consommation citoyenne qui nous permette de
privilégier les viandes de qualité d'origine française.
S'agissant maintenant du bassin allaitant, je veux vous rassurer, monsieur
Masseret.
Ce bassin allaitant est presque une spécialité française. Seuls deux autres
pays européens en ont un je veux parler de l'Irlande, qui connaît, avec ses
races à viande, une situation aussi dramatique que la France et, dans une
certaine mesure, la Belgique. Le bassin allaitant français est, certes,
principalement situé dans le grand Massif central, mais il y a des troupeaux
allaitants à peu près dans tous les départements de France.
C'est une grande force pour nous en termes d'élevage extensif, d'élevage de
qualité et d'aménagement du territoire, et une grande faiblesse aussi, en cas
de crise. En effet, comme ce bassin allaitant produit des « maigres », des
broutards destinés à l'engraissement en Italie ou en Espagne, en cas de crise
et de fermeture des frontières, des surplus considérables s'accumulent dans nos
exploitations. Donc, il faut traiter ce problème.
Nous nous y attelons. Ainsi, s'agissant des aides directes, je veux vous
rassurer : nous avions mis en place un premier plan d'aide au mois de février
qui privilégiait les éleveurs du bassin allaitant, puisque c'était autour du
taux de spécialisation qu'avaient été définis les critères d'éligibilité. Donc,
les éleveurs du bassin allaitant, où qu'ils soient en France, avaient tous été
traités sans aucune discrimination géographique.
S'agissant du nouveau plan d'aide que je mets en oeuvre, nous faisons, à
l'heure actuelle, réaliser une étude dans tous les départements par les
directions départementales de l'agriculture, les DDA.
Cette étude fera l'objet d'une négociation, d'une concertation avec les
organisations professionnelles à partir du 15 novembre, de sorte que nous
puissions, sur la base des statistiques concernant les revenus des éleveurs au
mois de décembre, bâtir définitivement ce plan, les fonds étant disponibles au
début de l'année 2002. Ce plan sera ciblé sur ceux qui en ont le plus besoin,
c'est-à-dire sur les éleveurs de bovins allaitants.
Cela étant, il faudra aussi, et c'est ma conclusion, s'interroger sur l'avenir
de ce bassin allaitant. J'ai confié à un ingénieur général du génie rural des
eaux et des forêts, M. Mordant, une mission en ce sens. Il convient, en effet,
de réfléchir aux nécessaires mesures structurelles qu'il faut prendre pour
assurer l'avenir de ce bassin.
Cet ingénieur général s'est déjà mis au travail et sillonne le bassin
allaitant au sens large, c'est-à-dire, en fait, tous les départements de
France, pour entendre et consulter. Il nous remettra ses propositions avant la
fin de l'année, de sorte que nous pourrons fixer un cap pour ce troupeau
allaitant français qui est, comme je le disais, une grande force pour nous et,
en même temps, une fragilité en cas de crise, raison pour laquelle nous devons
être vigilants.
M. Jean-Pierre Masseret.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Masseret.
M. Jean-Pierre Masseret.
S'agissant de la restauration hors domicile, je vous remercie, monsieur le
ministre, des précisions que vous venez d'apporter. Il me semble que l'on
pourrait, sans se placer en contradiction avec les règles de la concurrence,
faire évoluer les cahiers des charges - dans nos départements, pour les
collèges, dans nos régions, pour les lycées - en introduisant des clauses sur
la traçabilité dont la valeur juridique est, à mon sens, évidente. Cela
permettrait un meilleur choix, et ce au bénéfice de la production nationale,
sans préjudice pour la liberté du commerce international.
RESPECT DU CALENDRIER DE RÉALISATION DU PONT SUD À MÂCON FAISANT LA JONCTION DE
L'AUTOROUTE A 6 ET DE LA FUTURE AUTOUROUTE A 40