SEANCE DU 29 NOVEMBRE 2001
M. le président.
Nous poursuivons l'examen des dispositions du projet de loi de finances
concernant les affaires étrangères.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Duvernois.
M. Louis Duvernois.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans la
discussion budgétaire en cours me vient à l'esprit cette formule de Jean Jaurès
: « Partir du réel pour aller à l'idéal », que je n'hésite pas, pour une fois,
à faire mienne, tant elle traduit, dans les circonstances actuelles, l'esprit
de mon intervention à propos de deux secteurs d'activité prioritaires pour la
France, pour son rôle et pour son influence : l'enseignement français à
l'étranger et l'audiovisuel extérieur.
Critiques, nous le serons ; constructifs, nous le serons aussi, pour formuler
des propositions à la fois réalistes et enthousiastes, tournées vers
l'avenir.
Le dispositif français d'enseignement à l'étranger repose essentiellement, il
faut le rappeler sommairement, sur l'Agence pour l'enseignement français à
l'étranger, à laquelle la loi du 6 juillet 1990 a confié une triple mission :
assurer en faveur des élèves français résidant à l'étranger les missions de
service public relatives à l'éducation ; contribuer, par l'accueil d'élèves
étrangers, au rayonnement de la langue et de la culture françaises ; concourir
au renforcement des relations de coopération entre les systèmes éducatifs
français et étrangers.
La loi de 1990 confie à l'Agence une autre mission primordiale pour les
Français expatriés : aider les familles à supporter les frais liés à
l'enseignement français à l'étranger.
Comme vous pouvez le constater, la mission de l'Agence est grande et
généreuse. La réalité, elle, est tout autre, car l'engagement financier de
l'Etat ne correspond tout simplement pas à son ambition.
Le premier constat que je ferai concerne la croissance des dépenses ordinaires
et des crédits de paiement du ministère des affaires étrangères, qui exerce la
tutelle sur l'Agence. Ces crédits passeront de 3,37 milliards d'euros à 3,42
milliards d'euros, soit 22,44 milliards de francs, en augmentation limitée de
1,6 %. Cela confirme encore que le ministère des affaires étrangères, il n'est
pas inutile de le répéter, n'est pas un ministère prioritaire.
Mon second constat n'est pas le moindre : les crédits pour l'enseignement
français à l'étranger progresseront de 1,07 %, à peine plus que ceux du
ministère de tutelle. Ils atteindront 313,77 millions d'euros en 2002, contre
310,45 en 2001. L'Agence ne bénéficiera en 2002 d'aucune mesure nouvelle au
titre des crédits d'investissement. Pis encore, le fonds de réserve de
l'Agence, qui s'élevait à une somme confortable de plus de 300 millions de
francs en 2000, sera très vraisemblablement « asséché » à la fin de l'exercice
2002, notre collègue Monique Cerisier-ben Guiga, rapporteur pour avis, l'a
d'ailleurs souligné ce matin dans des termes semblables.
Les chiffres parlent d'eux-mêmes : derrière leur froide logique se cache une
réalité bien vivante sur le terrain des opérations, à savoir la mise à
contribution financière des parents d'élèves français, en augmentation
régulière depuis plusieurs années. Cette contribution est maintenant plus
importante que l'apport financier de l'Etat à notre réseau scolaire
international.
Le succès de notre réseau est pourtant incontestable. Les résultats au
baccalauréat sont très largement supérieurs à la moyenne nationale. Les
demandes d'inscription sont soutenues. De 144 000 élèves scolarisés dans le
réseau de l'Agence à sa création, en 1990, on est passé maintenant à près de
160 000. On note une hausse de 8 000 élèves au cours des toutes dernières
années, la majorité d'entre eux étant français.
Soyons un tant soit peu perfide : si, en France métropolitaine, un recteur
accueillait 8 000 élèves supplémentaires sans se voir attribuer les moyens
correspondants, il y aurait assurément des manifestations publiques !
Concrètement, doit-on comprendre que c'est le manque de capacité à nuire, lié
à la dispersion des parents d'élèves sur tous les continents, qui explique
l'insuffisante attention portée par les décideurs politiques aux problèmes de
leurs compatriotes expatriés, Français à part entière et non entièrement à part
?
Pouvez-vous, monsieur le ministre, vous satisfaire d'une telle situation,
alors qu'il est d'actualité de glorifier la « bataille des idées », celle qui
doit nous conduire à promouvoir notre langue et la diversité culturelle afin de
renforcer notre présence et notre influence à l'étranger ? Pouvez-vous vous
satisfaire du budget de l'Agence, qui, à l'évidence, n'est pas à la hauteur de
la situation, surtout si l'on pense à l'augmentation de 4 % du budget du
ministère de l'éducation nationale ?
Que croyez-vous que pensent les parents d'élèves français de la floraison
actuelle de réclamations catégorielles formulées par les enseignants, les
infirmiers, les médecins, les cheminots, entre autres, qui obtiennent, à l'aide
de porte-voix et sous l'oeil des caméras de télévision, des réajustements
salariaux, des primes de ceci ou de cela, à coup de centaines et de centaines
de millions de francs, et en un temps record inversement proportionnel à leur
capacité de nuisance publique, à la veille, il est vrai d'élections nationales
capitales... ?
Que penseront ces familles expatriées et citoyennes lorsqu'elles apprendront
qu'elles devront, encore et toujours, contribuer substantiellement à couvrir
les charges de personnel enseignant, qui augmentent de 6,44 % pour les seuls
résidents détachés de l'éducation nationale ?
Force est de reconnaître, sans passion mais avec raison, que la dotation qui
doit être versée par le seul ministère des affaires étrangères pour l'année
2002 ne permet pas d'envisager l'avenir de l'Agence pour l'enseignement
français à l'étranger avec sérénité, compte tenu des problèmes financiers
qu'elle rencontre.
Que faire dans un contexte de croissance économique ralentie où la tentation
pour d'aucuns est toujours grande de résoudre les problèmes publics par un
accroissement des dépenses et du nombre de fonctionnaires ? Nous pourrions
rappeler l'engagement du Premier ministre, Lionel Jospin, qui, en 1995, voulait
rendre gratuit l'enseignement à l'étranger pour les enfants français.
Nous devons être responsables et pragmatiques dans l'énoncé de propositions
réformatrices et constructives.
Le Conseil supérieur des Français de l'étranger - que vous présidez, monsieur
le ministre - réclame avec insistance, toutes tendances politiques confondues,
un engagement accru du ministère de l'éducation nationale dans le financement
de l'enseignement français à l'étranger. Cette demande se heurte à
l'organisation administrative et à la conception ministérielle que se font les
uns et les autres de leurs fonctions et qui attribue cette compétence aux
affaires étrangères. On ne sait d'ailleurs plus trop pourquoi l'éducation
nationale a été écartée d'une cotutelle de l'Agence à la création de cette
dernière, en 1990 !
La lecture du rapport d'activité 2000-2001 du ministère de l'éducation
nationale est pourtant explicite : le réseau scolaire à l'étranger est unique
et doit être pleinement partie prenante du système éducatif français ; la
continuité du service public, y précise-t-on, ne peut se réaliser que par des
liens resserrés et permanents entre les établissements scolaires à l'étranger
et les structures du système éducatif en France.
Qu'en peu de mots ces choses sont clairement dites ! Et qu'on ne vienne pas
nous rabâcher que la compétence appartient exclusivement au ministère des
affaires étrangères, puisque, dans ce même rapport d'activité, l'éducation
nationale souligne que l'importance de son action extérieure est liée au
renforcement « des relations bilatérales traditionnelles avec une attention
croissante aux pays en développement » !
Pourquoi, monsieur le ministre, cette cotutelle des ministères des affaires
étrangères et de l'éducation nationale est-elle si difficile à mettre en oeuvre
? L'abondement des crédits consacrés à l'enseignement français à l'étranger, à
la promotion de la langue française, au développement de l'audiovisuel
extérieur - vecteur de promotion culturelle et économique -, concerne d'abord
et avant tout l'ensemble des pouvoirs publics, et non tel ou tel ministère
particulier.
Nous devons ainsi repenser notre organisation administrative et les structures
ministérielles dans lesquelles nous oeuvrons pour faire face aux situations
nouvelles de notre époque où, précisément, les acteurs du monde productif sont
obligés de répondre à de puissants stimuli et de lutter constamment pour leur
survie.
L'avenir, ici comme ailleurs, passe par une volonté politique de bonne
gouvernance à moyens plus ou moins constants, par le redéploiement des crédits
en fonction de priorités politiques concertées et bien définies à l'échelle
gouvernementale.
J'en viens à la seconde partie de mon intervention : l'audiovisuel
extérieur.
Le paysage audiovisuel français à l'étranger peut être envisagé de plusieurs
manières.
La première, c'est de reconnaître que le ministère des affaires étrangères a
réellement pris conscience de l'importance de ce secteur en 1998 avec
l'élaboration du plan d'action de communication et la nomination, à la tête de
TV5 et de CFI, d'un professionnel de haut niveau, venant du secteur privé, en
la personne de Jean Stock.
Le plan d'entreprise qu'il a mis en oeuvre et la restructuration engagée
dernièrement avec d'autres partenaires francophones au sein de TV5 ont abouti,
en août dernier, à la création de TV5 monde. La progression est indéniable.
Deux nouveaux signaux vers les Etats-Unis et l'Amérique latine s'ajoutent, au
sein d'une structure opérationnelle simplifiée et gérée désormais de Paris, aux
cinq signaux qui existaient déjà. Il était impératif de le faire et vous l'avez
fait.
La deuxième manière, c'est de comparer les moyens de l'audiovisuel extérieur -
vous avez dit, monsieur le ministre, qu'ils étaient l'une des principales
priorités de notre action extérieure - avec ceux qu'ont engagés nos partenaires
et concurrents dans l'Union européenne, la Grande-Bretagne et l'Allemagne.
Les moyens français représentent, répétons-le, 38 % des moyens engagés par le
Royaume-Uni et 33 % des moyens engagés par l'Allemagne, même s'il faut tenir
compte de notre participation dans ARTE.
On peut aussi comparer les 90 millions d'euros du budget de TV5 pour le monde
entier avec les 212 millions d'euros de RFO pour les seuls DOM-TOM.
Là encore, le ministère des affaires étrangères supporte pratiquement seul les
charges de développement de l'audiovisuel extérieur.
La troisième manière, c'est, en voyageant, de constater que nos concurrents
sur ce terrain, à savoir les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et l'Allemagne,
sont beaucoup plus présents que nous sur les écrans de télévision extérieurs, y
compris dans des pays francophones comme la Tunisie, où France 2 n'est plus
reçue. En Allemagne, notre premier partenaire, les chaînes du service public ne
sont plus relayées dans plusieurs Länder.
La quatrième et dernière manière, qui résume les trois autres, c'est
d'admettre que, comme l'a souligné récemment, et avec à propos, un grand
quotidien, les événements du 11 septembre aux Etats-Unis ont mis en évidence la
faiblesse de la France sur la scène médiatique, ce qui démontre la nécessité
d'une refonte structurelle de l'audiovisuel extérieur.
L'organisation administrative actuelle, monsieur le ministre, est caractérisée
par l'absence d'un réel fil directeur, l'existence, souvent, d'anciennes
baronnies et un manque de synergie globale. Elle freine l'élan mobilisateur
attendu pour réussir une répartition optimale de toutes les compétences et des
moyens financiers disponibles.
Là où la langue et la culture font défaut, que ce soit dans ou hors de nos
frontières, c'est toute la France qui est absente ! L'Etat, par sa difficulté à
imposer son autorité à ceux-là mêmes qui sont supposés le servir, se place dans
une situation réduite aux acquis, pépinière du conservatisme, facteur de repli
sur soi et source de déclin.
Telle est la raison pour laquelle, monsieur le ministre, je ne voterai pas les
crédits affectés aux affaires étrangères.
(Applaudissements sur les travées
du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. Guy Penne.
C'est du beau ! Vous commencez mal !
M. le président.
La parole est à M. Dulait.
M. André Dulait.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je
souhaiterais, à propos de ce budget, évoquer un point qui n'a pas été beaucoup
évoqué depuis ce matin : il s'agit des organisations non gouvernementales, les
ONG.
Dans un ouvrage paru cette année à la Documentation française sous la
direction de M. Michel Doucin, celui-ci relève que l'« on n'a jamais autant
parlé de société civile internationale, de pouvoir mondial des ONG » alors que
les bases juridiques de ces nouveaux acteurs de la diplomatie demeurent très
fragiles. Cinquante ans après la Charte des Nations unies, « on ne sait
toujours pas très bien de quoi il s'agit et aucun cadre juridique international
ne leur a été organisé ».
Malgré cette carence, les ONG sont devenues des acteurs incontournables de
l'action extérieure. Les Etats n'agissent plus sans les prendre en compte.
Elles ont gagné un énorme pouvoir de mobilisation de l'opinion. Passées de 200
en 1945 à 1 600 aujourd'hui, dotées d'un statut consultatif auprès du Conseil
économique et social de l'ONU, en vertu de l'article 71 de la Charte, leur
place s'est fortement développée avec les grandes conférences des Nations unies
; elles ont su organiser des coalitions sur de grands thèmes tels que la dette
des pays pauvres, la convention d'Ottawa sur les mines antipersonnel, ou encore
le traité sur la Cour pénale internationale.
Forces de proposition, simples sous-traitants, voire partenaires, quelle peut
être leur place ?
Pour la France, une vingtaine d'ONG collectent 80 % des ressources. Le budget
de cinq d'entre elles est de plus de 30 millions d'euros et celui des douze
suivantes oscille entre 7 millions et 30 millions d'euros.
Le budget des ONG françaises de solidarité internationale est évalué à 500
millions d'euros. D'origine privée à hauteur de 56 %, ces fonds, dont les plus
grandes organisations sont, bien entendu, les premières bénéficiaires,
proviennent de collectes de dons encouragées par des campagnes de publicité.
Si les hommes et les femmes qui se dévouent au quotidien ne sont, bien sûr,
pas mis en cause, il n'en demeure pas moins que la montée en puissance des ONG
soulèvent deux questions principales d'ordre différent.
La première concerne les organisations non accréditées à l'ONU que le
secrétaire général, M. Kofi Annan, a largement accueillies. Il semble, et il
est même certain depuis les événements du 11 septembre dernier, que, parmi ces
« invités », des groupes aux buts contestables, voire terroristes, aient trouvé
là une tribune internationale.
Monsieur le ministre, quelles dispositions peuvent être prises pour éviter
toute dérive ? Comment trier le bon grain de l'ivraie ?
La seconde question concerne le financement et le contrôle de l'emploi des
fonds publics, sachant que la France reste très réservée quant aux transferts
aux ONG de l'aide publique au développement. Seulement 0,6 % des fonds sont
ainsi transférés en France, soit dix fois moins que dans certains pays d'Europe
du Nord.
Il apparaît de plus en plus nécessaire, et nous l'avons signalé dans un
rapport sénatorial, de mieux évaluer les interventions et de s'interroger sur
l'impact des « microactions » de développement.
Monsieur le ministre, notre diplomatie n'a peut-être pas toujours pris la
juste mesure de l'influence des grandes ONG internationales, qui ont su
s'ériger en groupes de pression efficaces pouvant amener les décideurs, telle
la banque mondiale, à modifier les conditions qui rendaient certains projets
irréalisables.
A cet égard, la règle des « trois R » établie par un romancier spécialiste de
l'espionnage, à savoir « redondance, rivalité, rationalité », s'applique
peut-être aussi dans le monde des ONG.
Pour conclure, sachez, monsieur le ministre, que ces propos ne sont pas
inspirés par une quelconque défiance ; bien au contraire, ils reflètent le
point de vue d'un élu qui est depuis longtemps persuadé que ces nouveaux
acteurs de la scène internationale que sont les ONG contribuent à
l'humanisation de la société et participent au progrès et à l'avancée
démocratique dans le monde.
J'ai toutefois évoqué des raisons suffisantes pour affirmer que la démarche
des ONG doit faire l'objet de la vigilance des nations et de leurs parlements.
Il ne saurait en effet être question pour les Etats de se laisser diaboliser.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Dauge.
M. Yves Dauge.
Monsieur le ministre, en ouvrant mon intervention, je veux attirer votre
attention sur un sujet qui me tient particulièrement à coeur, celui de la
réforme de votre ministère, car j'estime que, dans votre domaine de compétence
comme dans les autres, il est assez difficile d'aborder les questions
budgétaires sans se poser simultanément la question de la réforme de l'Etat.
C'est, certes, un sujet commun, mais autant il est facile à un ministère de
demander toujours plus, autant il peut lui être difficile de se réformer pour
tendre vers une action plus efficace et plus lisible.
Vous avez, vous, engagé une réforme. Dès votre arrivée, vous et Charles
Josselin avez manifesté la volonté de réunir vos deux ministères. C'est une
bonne chose. Certains le regrettent, et on peut les comprendre car ils
craignent que la coopération ne disparaisse au profit de la diplomatie
traditionnelle. J'estime au contraire que l'institution doit se transformer -
le monde a changé - afin de ne pas se trouver progressivement décalée par
rapport à la réalité.
L'enjeu actuel, les orateurs qui m'ont précédé - et notamment M. Pelletier,
l'ont fort bien fait - c'est la pauvreté, ainsi que les maux qui lui sont
liés.
L'histoire de la coopération au cours des dernières décennies, marquée par le
militantisme, c'est en partie celle des relations de la France avec un
continent en pointe, celui de l'Afrique. En faisant entrer dans votre ministère
le monde de la coopération, vous faites, monsieur le ministre, une bonne
action.
Maintenant, il faut évaluer l'état d'avancement de la réforme : êtes-vous
satisfait, monsieur le ministre, de l'étape à laquelle nous sommes parvenus
?
A mon avis, nous sommes encore loin du but ! Ne perdons pas de vue
l'importance de l'enjeu des réformes institutionnelles engagées. Vous avez
fait, monsieur le ministre, un pari courageux. Maintenant, il faut faire
aboutir la réforme. Or, de par mes contacts avec votre ministère, je sais qu'y
coexistent deux mondes qui ne se reconnaissent pas toujours.
Je ferai quelques suggestions, à propos desquelles je souhaiterais connaître
votre sentiment.
Au-delà de la fusion des affaires étrangères et de la coopération, il me
semble que l'aide au développement manque de lisibilité. On ne sait pas très
bien quelles sont au fond nos priorités. La lecture attentive d'un certain
nombre de documents permet, certes, de les dégager, mais je souhaiterais que
les grands programmes nationaux d'action et d'aide au développement soient
clairement affichés. Point n'est besoin d'en distinguer vingt-cinq, il suffit
de s'en tenir au programme prioritaire de la réforme des institutions.
Comment aider le tiers monde si la France n'est pas capable de jouer un rôle
fondamental dans l'émergence d'institutions démocratiques ? La France peut
légitimement jouer ce rôle, compte tenu de son histoire.
S'agissant du sida, dont on parle constamment aujourd'hui et qui nous choque
tous, comment imaginer que la France joue un rôle majeur, à la hauteur de ses
ambitions, sans un grand programme sur la santé ?
Je pourrai également évoquer l'éducation, mais aussi la politique des villes.
Leur croissance exceptionnelle dans les pays en développement est source de
tous les maux mais, en même temps, une chance de progrès. La France a une
expérience, des choses à dire sur ce sujet exceptionnel. La coopération, et
c'est compréhensible, avait un caractère rural marqué, mais le monde a changé.
Or nous sommes souvent absents lorsqu'il s'agit du développement des villes.
Les enjeux sont pourtant grands.
Tels étaient les grands thèmes que je souhaitais aborder.
Dans chacun des domaines que j'ai évoqués, le partenariat est fondamental.
J'ai entendu ce matin notre collègue Michel Charasse mettre en cause l'Europe.
Je connais par coeur la question de la sous-consommation des crédits, mais je
peux affirmer - et personne ne pourra me contredire - que, si la France ne sait
pas consommer les crédits européens, ce n'est pas la faute de l'Europe mais
bien celle de la France ! C'est notre problème.
C'est autour de projets, et de partenariats, qu'il faut aller chercher les
fonds européens. Les projets européens ne tombent pas du ciel ! Nos projets
peuvent aussi bénéficier d'une forte aide européenne. De nombreux pays s'y
prennent beaucoup mieux que nous en la matière. Pourquoi ne les imiterions-nous
pas ?
Je ne dis pas qu'il ne faut pas faire du « bilatéral », bien au contraire,
mais d'être fort dans ce domaine n'empêche pas de l'être aussi pour monter des
projets financés par l'Europe. Certains l'ont d'ailleurs compris et l'agence
française de développement commence à le faire. Ne disons donc pas que l'Europe
ne sert à rien parce que ses crédits ne sont pas consommés. C'est aussi à nous,
Français, de démontrer que l'Europe peut jouer un rôle important. En Afrique,
la France pourrait servir de pionnière à l'Europe, et je souhaite qu'elle le
fasse. Pourquoi ne pas décider que c'est une priorité ?
En matière de partenariat, je voudrais évoquer les actions qui doivent être
menées à l'échelon interministériel.
A cet égard, je suis choqué de constater que le ministère de l'éducation
nationale ne participe pas au grand projet relatif à l'éducation, alors qu'il
dispose d'un budget de 400 milliards de francs ! Aucune raison ne justifie que
le ministère des affaires étrangères soit à ce point sollicité pour financer
des causes nationales qui excèdent largement les limites de son champ d'action
!
M. Daniel Goulet.
Parfaitement !
M. Yves Dauge.
De même, le grand ministère de l'équipement, des transports et du logement,
auquel j'ai eu l'honneur d'appartenir, pourrait faire davantage s'agissant des
villes. Quant au ministère de la culture et de la communication, il fait tout
son possible, et cela est bien.
Cependant, c'est vous le chef de file, monsieur le ministre, et l'action
interministérielle doit s'articuler autour de l'administration que vous dirigez
pour donner de meilleurs résultats. Chaque ministère doit apporter une
contribution beaucoup plus forte à une grande cause, que votre budget ne peut
seul financer.
Enfin, j'aborderai un sujet sur lequel nous ne sommes pas toujours d'accord,
monsieur le ministre, et qui suscite des réticences de votre part.
Je suis persuadé que l'administration centrale n'a pas vocation à remplir des
missions professionnelles ou techniques. Ce n'est pas son rôle, sans qu'il soit
question d'exprimer ici une quelconque défiance à son égard.
En effet, pourquoi l'Agence française de développement rencontre-t-elle un
succès qui ira en grandissant ? Pourquoi l'Association française d'action
artistique et l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger donnent-elles
satisfaction ? Pour ma part, je suis favorable aux agences, même s'il est
peut-être souhaitable que l'on n'en multiplie pas le nombre, et je souhaiterais
vivement que ce type de structure joue un plus grand rôle en matière de
développement.
Ce n'est pas, je le répète, faire preuve de défiance à l'égard du ministère,
c'est un souci d'efficacité qui m'anime : il faut être professionnel pour mener
des actions et monter des opérations. Une administration centrale peut-elle à
la fois gérer un grand ministère, définir les grandes orientations, concevoir
des politiques et mettre en oeuvre celles-ci ? Je ne le crois pas. Si l'on veut
être moderne, il faut aller jusqu'au bout d'une logique d'organisation. Certes,
ce ne sera pas facile, parce que les réformes que cela suppose seront
douloureuses, mais peut-être pourrons-nous progresser dans cette voie dans les
années qui viennent.
En ce qui concerne les centres culturels, je ne reviendrai pas sur le rapport
que j'ai rédigé sur ce thème, monsieur le ministre, mais je suis heureux de
voir l'administration centrale réagir de manière positive à un certain nombre
d'idées que nous avions formulées, notamment lors des débats que vous avez
organisés à la porte Maillot, et qui avaient recueilli une assez large
adhésion.
Nous avions en particulier souhaité que les centres culturels bénéficient
d'une plus large autonomie. Il ne s'agit nullement de remettre en cause la
mission de l'ambassadeur : le conseiller et l'ambassadeur doivent rester dans
leurs rôles respectifs, mais ne faisons pas du directeur de centre culturel un
simple exécutant, placé au service d'une hiérarchie et cantonné à de modestes
tâches de documentation. Non, le directeur de centre culturel est un acteur à
part entière, qui assume une mission importante et qui dirige une institution
dont l'oeuvre s'inscrit dans la durée.
L'action des centres culturels doit se placer dans une perspective
fondamentale de partenariat avec les milieux locaux, afin de faire rayonner la
France en profondeur et non pas au détour de quelques événements qui passeront,
promus par quelques ambassadeurs ou conseillers qui, eux aussi, passeront.
Entendre de tels propos ne fera pas plaisir à tout le monde, certes, mais nous
devons faire montre de courage.
En effet, c'est l'identité même de la France qui est ici en jeu, au travers de
la question des centres culturels. Qui sommes-nous et qu'avons-nous à dire aux
autres ? Ce thème devrait être au coeur du débat politique en France ! Il
s'agit non pas de maintenir un réseau pour faire plaisir à quelques-uns, mais
de mettre des moyens au service d'une grande cause nationale.
(Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines
travées du RDSE et de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Cointat.
M. Christian Cointat.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis
toujours, la France a une vocation internationale. Celle-ci doit être non
seulement préservée, mais aussi assurée et développée. Cela suppose que notre
pays se dote de moyens à la hauteur de ses légitimes ambitions, pour reprendre
une expression de M. Paul d'Ornano, à qui j'ai eu l'honneur de succéder et
auquel je tiens à rendre hommage à l'occasion de ma première intervention à la
tribune.
Les Français de l'étranger représentent un vecteur essentiel du rayonnement de
la France sur toute la surface de notre planète. Il faut donc les encourager à
tenter la grande aventure de l'international au service de notre pays : cela
demande effort et imagination, car, contrairement à d'autres nationaux, nos
compatriotes ne s'expatrient pas volontiers. Ils aiment vraisemblablement
sentir la proximité de la mairie et, sur eux, le regard de Marianne !
Au demeurant, notre structure institutionnelle et administrative est l'une des
plus évoluées, pour ne pas dire la plus évoluée du monde, avec un réseau
consulaire étendu, un ensemble étoffé d'établissements scolaires de qualité,
une assemblée élue au suffrage universel, à savoir le Conseil supérieur des
Français de l'étranger, et des sénateurs.
Encore faut-il que cet outil remarquable soit doté de ressources suffisantes
et utilisé au mieux dans l'intérêt général.
A cet égard, les membres du Conseil supérieur des Français de l'étranger
jouent un rôle considérable sur le terrain. Ils vivent au contact non seulement
de nos compatriotes expatriés, mais également de la population des pays
d'accueil, dont ils partagent souvent le quotidien.
De par leur position, leurs connaissances, la légitimité démocratique que leur
confère leur élection au suffrage universel, leur engagement au service de la
France, ils constituent, en complémentarité avec les postes diplomatiques, un
atout remarquable pour notre pays, malheureusement encore trop souvent
sous-exploité, monsieur le ministre, ce qui est dommage. Cette organisation
institutionnelle spécifique mérite que d'importants efforts soient consentis
pour en tirer le plus grand bénéfice. Les membres du Conseil supérieur des
Français de l'étranger sont en quelque sorte les conseillers généraux ou
régionaux de la communauté française établie hors de France. Ils délibèrent sur
toutes les questions relatives à l'expatriation comme à la présence française
dans le monde, conseillent en la matière le Gouvernement et les pouvoirs
publics, reçoivent les doléances de nos compatriotes expatriés en difficulté à
l'étranger, interviennent pour adapter et améliorer les dispositions
applicables.
A l'instar d'élus locaux, ils répondent aux demandes d'information et de
conseil des Français de l'étranger, qui souvent s'adressent à eux, ne sachant
quelles démarches administratives entreprendre pour garantir leurs droits ou
pour satisfaire à leurs diverses obligations.
A l'heure où il est question, en métropole, de renforcer la « démocratie
locale », où le Parlement est saisi d'un projet de loi et de plusieurs
propositions de loi, adoptées par notre assemblée, tendant à conférer aux élus
locaux un véritable statut et de véritables garanties, il serait anormal que
ces élus du suffrage universel que sont les cent cinquante membres du Conseil
supérieur des Français de l'étranger soient laissés pour compte.
Ces derniers représentent de vastes circonscriptions, qui sont parfois à
l'échelle de plusieurs Etats. Ils doivent disposer de moyens suffisants, dans
l'exercice de leur mandat, pour se déplacer dans leurs circonscriptions et
répondre à l'attente de nos compatriotes.
Or, leurs indemnités, qui sont bien loin de couvrir l'ensemble des frais
engagés, ont vu leur montant réévalué pour la dernière fois en 1999. Ce n'est
pas convenable : certes, ce mandat, il faut le souligner, est exercé à titre
bénévole, mais il convient toutefois de poser des limites à ce bénévolat si
l'on souhaite garantir l'efficacité de l'action des élus, ainsi que l'égalité
devant le suffrage universel.
Par ailleurs, les crédits consacrés au Conseil supérieur des Français de
l'étranger stagnent depuis plusieurs années. Etablis à 9,7 millions de francs
dans la loi de finances pour 2000, ils sont restés fixés au même montant dans
la loi de finances pour 2001 et ils demeurent encore inchangés dans le projet
de loi de finances pour 2002. Ce n'est pas normal, monsieur le ministre !
A l'heure où les bouleversements mondiaux que nous connaissons exigent que nos
compatriotes expatriés aient des interlocuteurs proches, est-il opportun de
laisser stagner les crédits d'une assemblée élue au suffrage universel direct,
alors que son rôle pourrait être utilement élargi pour le plus grand bénéfice
de notre pays ? Ces insuffisances existeraient-elles si les Français de
l'étranger, comme les Français de métropole ou de l'outre-mer, constituaient
formellement une collectivité assimilée, dans ses droits et devoirs, à une
collectivité territoriale ?
A cet égard, le moment me semble venu, monsieur le ministre, d'engager une
réflexion de fond sur ce sujet, avec l'objectif de mener à son terme logique
l'oeuvre entreprise depuis 1982, année qui a vu la première élection au
suffrage universel des membres du Conseil supérieur des Français de l'étranger,
à savoir la création d'une collectivité publique rassemblant les Français
établis hors de France.
Ce qui est en jeu, dans ce débat, ce sont les préoccupations quotidiennes très
concrètes de nos compatriotes installés à l'étranger, qui, plus que jamais en
ces heures troublées, ont besoin de la proximité et de l'assistance des
services français et de leurs élus.
Après les attentats du 11 septembre, notre politique d'aide et d'assistance
aux Français de l'étranger doit être dotée de moyens budgétaires et humains
appropriés. Une attention particulière doit être portée aux crédits destinés à
assurer la sécurité des Français à l'étranger, aux crédits de rapatriement et
au fonds de secours pour nos compatriotes.
Les crédits consacrés à la sécurité des Français de l'étranger avaient déjà
fortement diminué dans le budget pour 2000. Malgré les événements du 11
septembre, ils stagnent encore cette année : la situation devrait pourtant
conduire à prévoir une réserve supplémentaire.
Dans le contexte international que nous connaissons, nos compatriotes
s'inquiètent également d'éventuelles spoliations dans des Etats non
démocratiques, qui bafouent les droits de l'homme. Or, en dépit de demandes
réitérées - je parle sous le contrôle de notre doyenne, Mme Brisepierre, qui
s'est totalement impliquée dans ce dossier extrêmement sensible - la mise en
place d'un dispositif de solidarité nationale visant à ce que la France
continue à compter des ressortissants dans ces pays à risques, comme cela est
son intérêt, a régulièrement fait l'objet d'une fin de non-recevoir de la part
du Gouvernement. Ce n'est pas acceptable ! Certes, je n'ignore pas, monsieur le
ministre, que c'est le Gouvernement et non le ministère des affaires étrangères
qui nous oppose ce refus, mais vous en êtes solidaire !
J'espère que les crédits affectés à l'emploi et à la formation professionnelle
permettront de mettre en place, avec le concours des membres du Conseil
supérieur des Français de l'étranger et sur l'initiative des comités
consulaires, des actions-pilotes en direction des entreprises et des Français
de l'étranger qui souhaitent une meilleure formation ou une reconversion.
Je ne m'attarderai pas sur le sujet du budget des bourses scolaires, qui a
déjà été excellemment évoqué tout à l'heure. Si les crédits sont en progression
de 1,52 million d'euros, il reste que cet effort demeure insuffisant devant
l'accroissement important des droits d'écolage. Nous sommes bien loin de la
gratuité de l'enseignement pour nos compatriotes expatriés, qui continuent à
subir une discrimination par rapport aux Français de France.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de
budget est l'expression d'une volonté politique, celle du Gouvernement. Or elle
n'est pas suffisante pour qu'il puisse être fait face aux enjeux auxquels est
confrontée la France, non plus que pour soit donnée réponse aux attentes de nos
compatriotes expatriés, qui, par leur dynamisme, leur esprit d'entreprise, leur
courage, voire les risques qu'ils prennent, portent haut les couleurs de notre
pays.
Rappelons-nous, nous qui sommes présents dans cet hémicycle, cette phrase de
René Coty : « Vous êtes, Français de l'étranger, au premier rang des serviteurs
de la nation. » On semble l'avoir oubliée en élaborant ce projet de budget,
aussi, à mon grand regret, monsieur le ministre, et en dépit de l'estime que je
vous porte pour votre action, ne le voterai-je pas.
(Applaudissements sur
les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste,
ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Boulaud.
M. Didier Boulaud.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon
intervention portera essentiellement sur l'Europe.
Une politique étrangère européenne n'a de sens et ne peut être mise en oeuvre
que si elle prend appui sur un outil de défense intégré, lui aussi, à l'Union
européenne. Ce premier budget en euros pourrait avoir valeur de symbole en
matière de sécurité et de défense européenne. C'est la raison pour laquelle je
situerai volontairement mon propos aux frontières de la défense et des affaires
étrangères, d'autant plus que le contexte international se trouve modifié
depuis le 11 septembre dernier.
Une nouvelle fois, la nécessité d'une Europe cohérente et déterminée dans son
action extérieure a été démontrée. L'Union européenne ne doit pas se cantonner
à un rôle supplétif, mais doit s'affirmer comme un interlocuteur incontournable
dans les questions de sécurité planétaire. Le défi de la construction de
l'Europe de la défense doit être relevé et la consolidation de sa politique
étrangère ainsi assurée.
Les Européens partagent un nombre croissant d'intérêts et de principes
politiques qui constituent le fondement d'une politique extérieure et de
sécurité commune. Ils disposent d'une palette d'instruments politiques,
financiers, commerciaux et humanitaires qui fait l'originalité et la force de
l'action extérieure de l'Union. C'est cet ensemble que doit venir compléter la
politique européenne de sécurité et de défense.
L'Union européenne dispose aujourd'hui des structures nécessaires pour
conduire une opération militaire. Elles ont été mises en place au cours des
trois dernières années.
A cet égard, le sommet de Saint-Malo, en décembre 1998, n'a pas été une
illusion. L'impulsion initiale donnée par le couple franco-britannique a été
relayée par les travaux conduits sous la présidence allemande, puis par
l'entrée en vigueur du traité d'Amsterdam.
Le sommet de Cologne a permis, quant à lui, de définir une politique de
défense commune. Il y a été énoncé que l'Union devait pouvoir disposer d'une
capacité d'action autonome soutenue par des forces militaires crédibles, avoir
les moyens d'y recourir et être prête à le faire en cas de crise
internationale, sans préjudice des actions de l'OTAN.
A Helsinki, un an plus tard, deux rapports relatifs à la sécurité et à la
défense, présentés par la présidence finlandaise, ont été avalisés par le
Conseil. Sur cette base, les Quinze ont décidé la création de nouveaux organes
et de nouvelles structures politiques et militaires : un comité politique et de
sécurité, le COPS, où les décisions sont prises au nom des gouvernements, un
comité militaire, un état-major de veille, d'analyse de situation et de
planification stratégique et, enfin, un centre de situation.
Ces structures sont aujourd'hui en fonction et leurs procédures de travail
feront l'objet d'une ultime validation au cours des prochaines semaines.
L'Union européenne dispose désormais des capacités nécessaires pour conduire
une opération de gestion de crise. Placées auprès du Conseil de l'Union
européenne, ces structures permettent aux Quinze de définir l'orientation
politique et la direction stratégique nécessaires à la planification et à la
conduite d'opérations dirigées conjointement par les Etats membres.
Le Conseil européen de Feira, qui a eu lieu le 19 et le 20 juin 2000, a pris
d'importantes décisions pour le développement des capacités militaires, mais
aussi civiles, de gestion de crises par l'Union européenne. Depuis trois ans,
les Etats européens ont obtenu des résultats importants en matière de
coopération et de coordination des choix d'armement.
Enfin, le mois prochain à Laeken, l'Union européenne sera déclarée
opérationnelle, c'est-à-dire capable de suivre l'émergence d'une crise
politico-militaire, d'identifier les options d'actions en fonction d'une
situation donnée et de mobiliser les moyens militaires civils pour y répondre
et coordonner leur emploi.
Dans cette optique, la constitution et l'harmonisation des capacités
militaires de l'Union européenne se poursuivent.
De nombreuses avancées ont ainsi été réalisées, montrant que Saint-Malo, comme
je l'ai dit, n'a pas été un mirage.
L'état-major européen monte doucement en puissance et l'OCCARD, l'organisation
conjointe de coopération en matière d'armement, existe enfin.
L'année 2000 aura été l'année de la ratification du traité sur l'OCCAR.
Appelée à devenir une véritable agence européenne de l'armement, elle opère
aujourd'hui sa montée en puissance, s'apprête à accueillir de nouveaux membres
et à intégrer de nouveaux programmes.
A partir de ce constat, pourquoi ne pas prévoir une grande OCCAR de la
recherche et du développement qui coordonnerait les efforts dispersés, lesquels
ne représentent, au total, que le quart de l'effort américain ?
La signification du prochain programme intégré au cours de l'année 2001 est
particulièrement importante : il porte sur l'avion de transport militaire A 400
M et constituera le plus grand programme d'armement fédérateur pour l'industrie
européenne. Il est également emblématique de la volonté commune des Etats
européens en matière d'armement. Il dotera l'Union européenne d'une capacité
massive pour projeter nos forces.
La France, pour sa part, remplit parfaitement ses engagements : l'autorisation
de programme de 3 049 milliards d'euros, attribuée à la suite d'une décision
gouvernementale prise l'année dernière, sera complétée par la loi de finances
rectificative pour 2001. Même si nous attendons la décision allemande, les
progrès réalisés dans ce domaine ne peuvent être occultés.
Votre projet de budget, quant à lui, permet à la France d'être à la hauteur de
ses ambitions et de ses responsabilités européennes, tout comme le projet de
budget de la défense, par exemple, qui sera examiné dans quelques jours et qui,
bien que très serré, permet une bonne réalisation de la loi de programmation,
l'une des meilleures depuis longtemps, qui consolide et achève la
professionnalisation de notre système de défense facilitant ainsi la mise en
oeuvre de la politique européenne de défense. Cette professionnalisation,
annoncée le 22 février 1996 un peu au petit bonheur la chance a été
heureusement mise en oeuvre par le Gouvernement de M. Lionel Jospin, avec
l'application et le sérieux que chacun s'accorde aujourd'hui à lui reconnaître.
C'est tellement vrai que j'ai pu constater que, dans le contre-bilan établi par
la droite au sujet de la défense, la colonne destinée à mettre en pièces le
bilan du Gouvernement est restée désespérément vide.
La France contribue ainsi à hauteur de 20 % à la constitution des capacités
militaires de l'Union européenne, avec un accent particulier mis sur les
capacités stratégiques, telles que le renseignement, le commandement, la
communication et le contrôle. Des lacunes persistent cependant et elles sont
l'illustration d'autres priorités que se sont données nos partenaires européens
dans leurs choix d'équipement au cours des décennies passées.
En préparation de la conférence de capacité qui a eu lieu à Bruxelles le 19
novembre dernier, les six principales nations européennes ont donc préparé des
contributions additionnelles. La contribution française porte, en particulier,
sur la conduite des opérations et le renseignement, les forces multinationales,
les capacités offensives et la projection des forces.
En outre, en partenariat avec l'industrie, un programme de technologies
cohérent et ciblé est lancé, l'ETAP, programme européen d'acquisition de
technologie, destiné à poser les fondements des systèmes aériens de combat
européens du futur. Il vise à soutenir et à développer les capacités
européennes en matière de systèmes aériens de combat, pendant les deux
prochaines décennies.
Cette approche par capacité repose sur les moyens apportés par les différents
Etats. Or, l'une des difficultés actuelles apparaît sur le plan budgétaire et
sur le plan financier. En ce domaine, on peut nourrir quelques inquiétudes.
La réponse au terrorisme et aux crises internationales doit pouvoir mobiliser
au sein de l'Union tous les efforts en matière de politique étrangère et de
défense. Le prochain traité devra prendre en compte cette réalité. Face aux
nouvelles menaces et aux exigences géopolitiques du XXIe siècle, l'Union doit
renforcer ses politiques, en particulier dans les domaines de la justice et des
affaires intérieures.
Le moment est-il venu d'envisager que l'Union comble son vide institutionnel
actuel pour aboutir à une politique de défense commune relevant de la
compétence communautaire ?
Nous sommes partisans d'un monde multipolaire ; nous souhaitons une
mondialisation maîtrisée et au service des peuples ; nous voulons contribuer à
la paix dans le monde. Il nous faut donc une Union européenne efficace, forte
et démocratique, capable d'assumer pleinement son rôle planétaire. La PESC doit
être l'outil de cette affirmation européenne.
Notre Europe aura bientôt à assumer des responsabilités considérables dans les
Balkans. Les Européens jouent dès à présent un rôle central dans le sud-est du
continent. Prévenir les conflits, endiguer la violence, assurer et consolider
la paix : voilà les tâches que les Européens ont bien assumées dans cette
région si tourmentée ces dernières années.
Nous devons être prêts à prendre toute notre place dans la région. Les
Américains envisagent de partir ; cela doit nous donner l'occasion de tester
les véritables intentions de nos partenaires au sein de l'Union.
Enfin, j'évoquerai nos responsabilités en Méditerranée. Le sud de l'Europe
nous intéresse, monsieur le ministre. En effet, on pourrait penser, d'une
manière un peu simpliste, que l'élargissement de l'Union européenne pourrait se
faire au détriment de notre engagement, de l'engagement européen, avec les pays
de la rive sud de la Méditerranée.
Je pense, au contraire, que cet élargissement à venir sera le moment propice
pour lancer des initiatives fortes vers les pays riverains de la
Méditerranée.
Je pense aussi qu'il est de la responsabilité de notre pays de proposer un
programme d'actions destiné à développer et à consolider les liens, les
coopérations, les associations, de l'Union européenne avec les pays du Maghreb
au moment où nous élargissons notre Europe.
En votant votre budget, nous vous invitons, monsieur le ministre, à faire en
sorte que le sud de l'Europe ne soit pas le grand oublié des prochaines années.
C'est un devoir de solidarité et une exigence de sécurité.
(Applaudissements sur les travées socialistes. - M. André Boyer applaudit
également.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Hubert Védrine,
ministre des affaires étrangères.
Monsieur le président, mesdames,
messieurs les sénateurs, je vais vous présenter les grandes lignes du projet de
budget du ministère des affaires étrangères pour 2002, qui enregistre une
évolution positive, et répondre aux nombreuses remarques de MM. les rapporteurs
ainsi qu'aux questions qui m'ont été posées. Je le ferai sans M. Charles
Josselin, qui est retenu à Toronto pour une réunion concernant TV 5.
Avant d'entrer dans le détail du budget, rejoignant en cela le rapporteur
spécial M. Chaumont, qui soulignait que l'examen du budget des affaires
étrangères ne peut se faire indépendamment du contexte international, je
voudrais d'abord vous donner quelques indications pour rappeler comment la
diplomatie que je conduis, sous l'autorité du Président de la République et du
Premier ministre, fait face au redoutable défi créé ou révélé par la tragédie
du 11 septembre. J'irai à l'essentiel, puisque j'ai pu mesurer, une fois
encore, en vous écoutant attentivement, l'importance que vous accordez à ces
questions et la connaissance que vous en avez. J'ai noté toutes les questions,
notamment celles qui ont été posées par M. de Villepin sur l'Irak et les
différents aspects qui s'y rattachent. Je commencerai, bien sûr, par les
événements du 11 septembre et l'Irak.
Le défi urgent et principal, c'est évidemment la lutte contre le terrorisme.
Nous l'avons dit dès le début. Nous avons été solidaires instantanément et vous
savez que la France a joué un rôle très important pour l'adoption des
résolutions au Conseil de sécurité des Nations unies dès le lendemain du 11
septembre, puis pour les deux autres.
Lutter contre le terrorisme, nous l'avons dit aussi immédiatement, c'est le
punir - l'article 51 de la Charte des Nations unies a été invoqué tout de suite
pour définir le droit à la légitime défense -, c'est aussi l'éradiquer,
c'est-à-dire détruire les réseaux, les financements et traiter les causes
profondes. Pour ce faire, nous avons toute une gamme de moyens, d'enceintes, de
mécanismes, de conventions internationales. Je rappelle que, dès 1999, j'avais
présenté à l'ONU une convention internationale contre le financement du
terrorisme, texte qui faisait encore défaut.
Mais c'est aussi prévenir, en combattant les idéologies de haine, les
dévoiements religieux, fanatisés, dépasser les contradictions réapparues à
l'occasion de la conférence des Nations unies de Durban avant l'attentat du 11
septembre, qui montraient bien toute une série de fractures qui sont encore
présentes dans notre monde, tout en luttant contre le piège de la guerre des
civilisations dans lequel quelques manipulateurs fous voudraient nous
entraîner, à travers ces actes terroristes.
Il convenait d'établir une solidarité large dépassant les Etats-Unis et
l'Europe occidentale : c'était le concept même de coalition, mis en avant très
justement par le secrétaire d'Etat américain Colin Powell, dès le début.
Donc, sur cette affaire du 11 septembre, sur cette réaction immédiate, sur
l'engagement à long terme, il y a eu une solidarité, un engagement et une très
grande clarté des Européens vis-à-vis de leur partenaire américain. Cette lutte
contre le terrorisme se poursuivra bien sûr après que l'objectif de destruction
du réseau Al-Qaida et du système taliban qui l'abritait aura été atteint, et je
crois que cet objectif est maintenant accessible à assez court terme.
J'en viens à l'Afghanistan, parce qu'il ne faut pas que nous nous concentrions
uniquement sur la lutte contre le terrorisme en refaisant l'erreur commise en
1992, le monde entier avait alors abandonné les Afghans à leur sort, ce qui
avait enclenché les guerres civiles que l'on sait, que les Afghans ne veulent
pas connaître à nouveau.
En Afghanistan, l'effondrement du régime des talibans, que j'avais qualifié de
répugnant voilà plusieurs mois, bien avant le 11 septembre, se confirme.
L'aide humanitaire donnée sans conditions commence à être acheminée à partir
du Turkménistan et de l'Iran : 13 000 tonnes d'aide alimentaire arriveront le
12 décembre prochain. A la suite de la visite de M. Josselin, nous avons obtenu
l'accréditation des ONG françaises en Ouzbékistan. MSF, Acted, Solidarités,
pour n'en citer que quelques-unes, sont déjà de retour à Mazar-e-Charif. Voilà
quelque temps déjà, j'ai envoyé une mission pour évaluer la situation dans les
pays voisins à partir desquels on peut travailler, ainsi qu'une autre mission
pour évaluer la situation de l'hôpital de Kaboul. Grâce aux ONG françaises,
trois cliniques fonctionnent déjà à Kaboul.
Donc, sur le plan humanitaire, nous avons été rapides et généreux, soit
directement à titre bilatéral, soit dans le cadre européen, soit par le biais
des organismes spécialisés.
Sur le plan politique, je voudrais rappeler ici que, dès le 1er octobre, la
France a été le premier pays à dire qu'il n'y avait pas seulement une question
humanitaire d'urgence, une action militaire prévisible et que nous devions nous
préoccuper de l'après-guerre. L'action militaire n'avait pas encore commencé à
ce moment-là, mais nous avions anticipé son déclenchement, son résultat, sa
réussite et nous nous sommes tout de suite penchés sur la question politique,
puis sur la question de la reconstruction. C'est pour cela que, dans le plan
d'action pour l'Afghanistan du 1er octobre, j'avais souligné l'importance du
processus politique permettant aux Afghans, aux Pachtouns et aux autres groupes
de trouver un équilibre entre eux, de bâtir une autorité représentative de
transition, puis un Gouvernement pour commencer à reconstruire ce pays.
On retrouve les principes du plan français dans le travail remarquable de M.
Brahimi, le représentant spécial pour l'Afghanistan du secrétaire général des
Nations unies, et dans la troisième résolution votée par le Conseil de
sécurité. C'est autour de ces principes que tentent de se rapprocher les
Afghans, qui sont en train de négocier à la conférence de Petersberg.
La France a été généreuse sur le plan humanitaire. Mais je ne dis pas cela
pour que l'on se vante. C'est bien normal, et cela ne suffit pas. Nous avons
été, je crois, inventifs et rapides sur le plan politique. Nous avons été
disponibles sur le plan militaire, mais les Etats-Unis ont fait un choix qui
est le leur, que je respecte, et qui consiste à agir essentiellement par
l'armée américaine. On a pu parler d'une « guerre du Pentagone ». Mais ce sont
eux qui avaient été blessés, humiliés et touchés directement. On le sait, les
militaires américains trouvent plus commode d'agir ainsi que d'avoir à discuter
de la stratégie, de la tactique et des cibles, comme cela avait été le cas lors
de la guerre du Golfe, et plus encore dans l'affaire du Kosovo. Il n'y a pas à
se sentir vexé du choix fait par l'armée américaine et par les dirigeants des
Etats-Unis, qui découle d'une commodité dans la conduite des opérations. Il
n'en demeure pas moins que les propositions françaises ont été appréciées sur
plusieurs plans, notamment en matière de reconnaissance aérienne, en matière
navale, et plus encore en matière de renseignements. J'ajoute que c'est
exactement la même chose pour tous les autres pays ?
En ce qui concerne l'aide immédiate ou la reconstruction - beaucoup d'entre
vous en ont parlé, notamment MM. Plancade, Mathieu et de Montesquiou ainsi que
Mme Luc - je voudrais distinguer deux choses, et je l'ai dit voilà quelques
jours déjà. L'aide humanitaire doit être accordée sans conditions, de notre
part en tout cas, et si des pays voisins ou des autorités de fait locales
afghanes mettent des obstacles, ce que nous regrettons, c'est tout à fait
navrant compte tenu des besoins des populations. En tout cas, de notre part,
c'est un geste spontané, généreux, il n'y a pas de conditions à l'aide
humanitaire.
En revanche, en ce qui concerne la construction de l'Afghanistan - je ne dis
même pas « la reconstruction », car il y a tellement peu à reconstruire qu'il
vaut mieux parler de la construction d'un pays nouveau, sur tous les plans -,
nous ne sommes pas prêts à aider au retour à l'Afghanistan d'hier ou
d'avant-hier, c'est-à-dire à l'Afghanistan des guerres civiles, à l'Afghanistan
des femmes opprimées sous les talibans, à la régression. Ce pays a connu une
époque moderne, avec une constitution libérale, une époque où il n'y avait pas
de discrimination et où des femmes étaient ministres, parlementaires et
exercaient tous les métiers ; c'était certes surtout vrai en ville, mais
c'était un mouvement qui commençait.
Il a été affirmé clairement - et je l'ai fait dire à Washington voilà quelques
jours dans une conférence sur l'aide, comme on l'avait fait dire à New York et
comme on l'a fait redire par les Quinze - que notre aide - je ne veux pas le
dire d'une façon trop brutale ou trop cynique, car il faut aussi tenir compte
du chaos et de l'héritage de la guerre - veut s'inscrire dans un mouvement de
construction d'un pays nouveau.
Nous attendons des chefs afghans, qui sont aujourd'hui réunis sous l'égide de
M. Brahimi, qu'ils se mettent d'accord sur une administration provisoire. A
partir de là, nous aurons un interlocuteur pour travailler. Toutes les
suggestions ont été notées - je pense en particulier au lycée de Kaboul, qui
était d'ailleurs afghan plutôt que franco-afghan, mais on verra dans le détail
comment agir après - et, dès que nous aurons des responsables - dans tous les
sens du terme - afghans en face de nous, nous réenclencherons immédiatement ce
processus de coopération. Croyez-moi, nous ne serons pas absents sur ce plan,
pas plus que sur les autres ; de même, j'ai parlé longuement de la situation
des femmes en Afghanistan avec une délégation que j'ai reçue voilà quelques
jours.
Mais, comme je l'ai déjà dit très récemment devant l'assemblée générale des
Nations unies, la lutte nécessaire contre le terrorisme, à court terme et dans
la durée, ne nous dispense pas d'agir sur d'autres plans. Là est le point
central ! La France ne fait pas partie des pays qui ont découvert les maux du
monde le 11 septembre ; c'est vrai sur à peu près tous les conflits de la
planète. Nous n'avons donc pas à être gênés par des raisonnements du genre : «
Le fait de s'intéresser à tel ou tel sujet comme le conflit du Proche-Orient
n'est-il pas une façon de donner raison au terrorisme, et n'est-ce donc pas
moralement inacceptable ? » On ne peut pas dire cela de la politique étrangère
française, car voilà déjà fort longtemps que nous avons mis l'éclairage sur des
problèmes dramatiques comme celui du Proche-Orient. Rappelez-vous que la
demande par la France d'un Etat palestinien remonte au discours de François
Mitterrand à la Knesset en mars 1982.
(Marques d'approbation sur les travées socialistes.)
Il a fallu attendre
1999 pour que les autres pays européens rejoignent la France sur ce point ; et
il a fallu attendre le mois d'octobre 2001 pour que cela devienne un objectif
de la diplomatie américaine et du président Bush. Tant mieux, car cela nous
donne une base commune pour travailler.
Mais, en ce qui concerne le Proche-Orient, le Moyen-Orient, la situation de la
société irakienne, la Méditerranée, l'Afrique subsaharienne ou l'Afrique des
grands lacs - j'ai retenu ce qu'a dit M. Del Picchia à cet égard -, tous ces
sujets dont vous avez parlé sont des préoccupations constantes de la diplomatie
française. Nous ne cessons d'attirer l'attention de nos partenaires dans le
monde entier sur les situations intolérables qui subsistent et sur la nécessité
de s'en occuper pour des raisons tant humaines et morales que de sécurité. Nous
le faisons en permanence.
J'espère que le choc du 11 septembre, non seulement ne fera pas oublier ces
autres nécessités mais aboutira également à ce que nos partenaires, et
notamment les grands pays riches occidentaux qui ont évidemment plus de moyens,
fassent preuve d'une énergie accrue dans le traitement de ces questions.
J'ai cité des conflits particuliers, mais j'étends mon propos à la situation
du monde en général. Nous constatons bien - nous l'avons vu à Seattle, à Gênes
et à Durban - qu'il y a une contestation sur la façon même dont se déroule la
mondialisation. Nous dépassons la période un peu euphorique de ces dernières
années, pendant laquelle la mondialisation était considérée comme parée de
toutes les vertus, comme si le monde entier partageait de façon consensuelle
une vision unique sur notre conception de la démocratie occidentale, de
l'économie de marché, de nos principes moraux. Tout le monde était d'accord,
sauf quelques pays « voyous », comme disaient les Etats-Unis. Il y avait donc
un grand consensus.
Mais - nous le voyons bien - c'était une vision prématurée, et ce consensus
reste à bâtir. C'est cela le sens des propositions que ce gouvernement, en
particulier, a multipliées en ce qui concerne la réforme du Conseil de
sécurité, la réforme du Fonds monétaire international, la réforme de la Banque
mondiale, l'élargissement des critères à prendre en compte dans la négociation
de l'Organisation mondiale du commerce.
En effet, autant ceux qui contestent l'OMC comme instrument de régulation ont
évidemment tort, car un instrument de régulation vaut mieux qu'une guerre
commerciale, autant, c'est évident, on ne peut pas régler tous les problèmes du
monde sur une base commerciale étroite et être aveugle au reste.
Tel est le sens de notre engagement pour la Cour pénale, pour le protocole de
Kyoto, pour tant d'autres instruments multilatéraux qui, évidemment, ne sont
pas prisés par les pays qui mènent une politique unilatérale ; mais nous devons
oeuvrer dans ce sens, de même que nous devons travailler avec plus d'énergie
que jamais sur chacun des conflits que j'ai cités précédemment.
C'est la politique étrangère française. Vous n'avez d'ailleurs pas émis de
critiques à cet égard, bien que vous n'en ayez pas été avares sur d'autres
points particuliers - j'y reviendrai tout à l'heure -, conformément à
l'atmosphère du moment. En tout cas, s'agissant de la politique étrangère
française, j'ai entendu vos propos comme autant d'encouragements, de
suggestions très utiles et de discussions, et je vous en remercie.
S'agissant de l'Europe, il n'y a aucune raison que, dans cette affaire
afghane, et dans ses suites, les Européens se sentent délaissés et manifestent
un quelconque vague à l'âme.
L'Europe a bien réagi. Les Européens ont été instantanément solidaires. Ils
ont pris des dispositions efficaces et intelligentes pour assurer le maximum de
sécurité aux citoyens européens. Les Européens ont immédiatement accéléré les
procédures d'harmonisation et de coopération en matière de justice et
d'affaires intérieures - c'est ce que l'on appelle « JAI » dans le jargon
communautaire.
L'Europe a fait des propositions aux Etats-Unis. Pour des raisons techniques
que j'ai indiquées, les Etats-Unis, sur le plan militaire, n'ont pas
spécialement eu besoin de qui que ce soit - marginalement un ou deux pays -,
mais cela ne remet rien en cause. Le but de l'Europe n'était pas d'avoir
constitué ces dernières années un corps expéditionnaire pour aller dans
l'Hindoukouch. Par conséquent, ce n'est pas parce que les choses se déroulent
dans ce lieu et dans ce contexte que cela change quoi que ce soit aux ambitions
européennes, qui sont toujours aussi justifiées, et que cela modifie en quoi
que ce soit l'agenda européen, qui est toujours aussi chargé et aussi important
et que nous allons traiter avec autant d'ambition.
Nous avons devant nous - cela a encore été redit avec force lors des 78es
consultations franco-allemandes de Nantes, comme avec les Italiens, comme tout
à l'heure à Londres - deux grands processus que nous devons réussir.
Tout d'abord, nous devons réussir l'élargissement - la France ne se lasse pas
de le répéter - qui est entamé depuis longtemps et que demande toute l'Europe.
Il ne s'agit pas d'être pour ou contre. Le traité de Rome a ouvert l'Europe à
tous les pays démocratiques d'Europe. Mais l'élargissement, cela se négocie,
cela se réussit dans l'intérêt des pays membres comme dans l'intérêt des pays
candidats et dans l'intérêt de l'avenir de l'Union européenne.
Par ailleurs, il nous faut réussir le processus politique lancé en conclusion
du traité de Nice, qui doit aboutir en 2004. Ce processus, qui commence par une
convention l'an prochain, se poursuiva par une conférence intergouvernementale
l'année suivante ; il doit apporter une réponse à toute une série de questions,
telle la question clé de la répartition des compétences, en vue d'une
clarification et d'une meilleure « lisibilité » du mécanisme européen.
C'est dans cet esprit que, à Nantes, le Président de la République, le Premier
ministre et le Chancelier allemand ont rappelé que ce traité devant découler de
l'accord de 2004, que nous voulons réussir, devrait prendre la forme d'une
Constitution pour l'Europe qui serait compréhensible par tous les citoyens.
Dans le débat à propos de l'avenir de l'Europe, engagé dans toutes les régions
françaises et animé par Pierre Moscovici, nous avons constaté que les Français,
contrairement à ce que l'on dit, étaient très intéressés, très curieux et très
demandeurs à cet égard. Ils en viennent cependant - et ils ont raison - aux
conclusions institutionnelles, en partant des objectifs. Ils attendent de
l'Europe toute une série d'avancées précises et concrètes en rapport avec leur
vie quotidienne. C'est donc à ce titre qu'ils se posent la question du
fonctionnement des institutions. C'est à mon avis un bon message qu'ils nous
envoient ainsi.
Mesdames, messieurs les sénateurs, comme vous le savez bien, et comme le
montrent vos interventions, la France est animée par une diplomatie globale
complète et présente sur tous les fronts, une diplomatie de mouvement qui
s'efforce de gérer les urgences les plus graves comme les grands intérêts
permanents.
J'en viens maintenant à la suite de mon propos, à savoir la présentation des
grandes lignes du projet de budget du ministère des affaires étrangères pour
2002.
Ce projet de budget enregistre pour la troisième année consécutive - vous ne
pouvez pas ne pas le reconnaître - une évolution positive, avec une
augmentation de 1,3 % à structure constante par rapport à la loi de finances de
2001, et une stabilisation des effectifs qui confirme un renversement de
tendance durable après l'hémorragie des moyens de ce ministère enregistrée
entre 1994 et 1998. Je crois que tout le monde le sait ici !
Mme Danièle Pourtaud,
rapporteur pour avis.
Exactement !
Mme Monique Cerisier-ben Guiga,
rapporteur pour avis.
Très bien !
M. Hubert Védrine,
ministre des affaires étrangères.
Le projet de budget pour 2002 s'établit
à 22,4 milliards de francs et, si l'on y ajoute la contribution française au
Fonds européen de développement, il atteint 23,8 milliards de francs. Bien
entendu, ce budget ne satisfait pas toutes les demandes que Charles Josselin et
moi-même avons présentées pour que la France renforce sa présence, son
influence, son appui au développement dont vous avez à juste titre constamment
souligné la nécessité, et encore moins l'addition de toutes vos demandes.
Mais l'augmentation du budget de loi de finances pour 2001 a reflété
essentiellement la forte progression des contributions obligatoires destinées
aux organisations internationales dont le niveau est d'ailleurs reconduit -
nous avons en effet remonté ce niveau ces trois dernières années - tandis que
le nouveau projet de budget représente une augmentaion de crédits de l'ordre de
285 millions de francs, à structure constante, qui permet de poursuivre la mise
en oeuvre des priorités que nous avons données à notre action, même si une
partie de ces moyens est absorbée par les effets négatifs des changes.
S'agissant des contributions volontaires dont la progression est jugée
insuffisante par MM. Chaumont et Dulait, je rappelle qu'elles ont fortement
augmenté en 1999, en 2000 et en 2001.
Je reviens un instant sur la remarque de M. Chaumont concernant l'insuffisance
des crédits des opérations de maintien de la paix. Ces contributions
obligatoires, comme vous le savez, sont par nature imprévisibles. Depuis 1999,
la tendance est à la hausse. Malgré la remise à niveau des crédits pour la loi
de finances de 2001, il est exact que des crédits complémentaires sont
nécessaires : 950 millions de francs sont prévus dans le collectif budgétaire.
La situation pour 2002 est difficilement prévisible.
Ainsi, on ne peut pas dire à ce stade quelle sera l'incidence exacte des
événements qui ont lieu en Afghanistan. Si nécessaire, la dotation sera ajustée
en conséquence. C'est pour cette raison que ce chapitre a un caractère
provisionnel.
J'en viens maintenant aux axes prioritaires, qui sont au nombre de quatre : la
coopération internationale, l'accueil et l'asile, les Français à l'étranger, la
modernisation.
Avant tout, la coopération internationale prise comme un ensemble voit ses
moyens augmenter de façon sensible. Ce n'est pas un hasard. En effet, l'une des
réponses à la montée des critiques sur la mondialisation réside dans notre
politique de coopération internationale sous toutes ses facettes.
Au niveau multilatéral d'abord, cela se traduit dans les orientations
défendues par la France dans les différentes instances internationales et dans
l'impulsion donnée aux mécanismes financiers de types nouveaux.
Sur le plan des mécanismes financiers nouveaux, avec l'annulation de la dette
des pays les plus pauvres, la France s'est engagée à un effort total, qui
représente plus de 10 milliards d'euros ! Pour le Fonds mondial santé-sida, le
Premier ministre a annoncé une contribution de 150 millions d'euros sur trois
ans. Les pays favorables à l'application de la convention de Kyoto, dont la
France, se sont engagés par ailleurs à une augmentation substantielle d'ici à
2005 de leurs contributions au Fonds mondial pour l'environnement.
S'agissant de la promotion du dialogue des cultures, de la diversité
culturelle et de la francophonie, sur le plan multilatéral, la France travaille
aux côtés de ses partenaires de la francophonie et a choisi avec eux l'UNESCO
comme le cadre privilégié de son action. Par ailleurs, comme vous le savez, la
France et l'Europe défendent aussi ces valeurs en refusant que le secteur
culturel fasse l'objet d'offres de libéralisation à l'OMC - c'est ce que l'on
appelle l'« exception culturelle », et que je qualifie plutôt, pour ma part, de
« diversité culturelle », expression qui me paraît plus attractive. C'est grâce
à notre action principalement que ce sujet n'a pas figuré à l'ordre du jour de
la conférence de Doha. Nous avons d'ailleurs été peu nombreux, en Europe,
lorsque nous avons élaboré le mandat de négociation du commissaire Lamy, pour
refuser que cela y soit. Et si nous avions dû nous prononcer à la majorité
qualifiée sur ce point, la question culturelle ferait partie des discussions de
l'OMC.
Sur le plan européen, la France contribue pour plus de 24 % au budget du FED.
Certains s'en réjouissent, d'autres le regrettent. En réponse à Michel
Charasse, qui critique la part et l'efficacité de l'aide européenne, je
rappelle que la réforme de l'aide communautaire engagée sous présidence
française par le Conseil de développement du 10 novembre 2000 et mise en oeuvre
activement par le commissaire européen M. Patten, qui est lui-même vraiment
convaincu de la nécessité absolue de réformer ce système, se met
progressivement en place : agence EuropeAid et début, en ce moment même, de la
déconcentration dans cinq délégations couvrant huit pays ACP. La France sera
très attentive à la mise en oeuvre de cette réforme qui doit nous permettre de
mieux faire jouer l'effet de levier de notre contribution aux dépenses du FED.
Cette contribution est dorénavant inscrite dans le budget du ministère des
affaires étrangères.
Pour 2002, 3358 millions d'euros sont ouverts en autorisations de programme et
218,5 millions d'euros le sont en crédits de paiement. Cet écart entre les
autorisations de programme et les crédits de paiement peut entraîner des
incertitudes sur le niveau des décaissements. C'est pourquoi nous avons demandé
et obtenu des engagements du ministère des finances pour que soient mis à notre
disposition, en temps utile, les abondements qui pourraient s'avérer
nécessaires.
La conviction de l'importance renouvelée de la coopération s'exprime également
sur le plan bilatéral ; je dis cela pour tous ceux qui s'inquiètent de la
répartition entre le bilatéral et le multilatéral. Globalement, les crédits de
la coopération internationale et du développement du ministère, avec 129,53
millions de francs de mesures nouvelles nettes, hors transferts, marquent une
progression qui, nous l'espérons ne sera pas remise en cause par des mesures de
régulation comme en 2001.
(MM. Chaumont et Charasse, rapporteurs spéciaux,
font un signe d'approbation.)
Vous vous associez certainement à ce
souhait.
Les crédits de la DGCID prévus pour 2002 s'élèvent ainsi à 9,447 milliards de
francs avant transferts, en augmentation de 1,8 % par rapport à 2001.
Au total, le besoin de politiques de coopération et d'aide au développement
efficaces et appuyées sur des outils adaptés est plus fort que jamais. Notre
politique le prend en compte.
MM. Chaumont et Charasse, Mme Brisepierre ainsi que MM. Pelletier et Demuynck
se sont inquiétés de l'évolution de l'aide publique française au
développement.
Après la baisse observée depuis 1994, dont vous connaissez les raisons, une
quasi-stabilisation est intervenue en 2000, et les dernières estimations pour
2001 indiquent que l'aide publique au développement française remontera
légèrement à 0,34 % du PIB contre 0,32 % en 2000.
Avec la progression de nos contributions au FED et les nouveaux mécanismes
financiers - PPTE, fonds santé-Sida, environnement - je souhaite que cette
tendance se confirme dans les années qui viennent. Cela me paraît, comme à
vous, indispensable même si, lors de mes voyages en Afrique, je constate que
les Africains ne demandent plus seulement de l'aide. Ils demandent autant
d'accès aux marchés. Il faut avoir une vision globale de la façon dont nous les
accompagnons dans leur développement.
La conversion des créances en dons dans le cadre de l'initiative PPTE se fera
selon le principe de l'additionnalité.
La France reste l'un des principaux fournisseurs d'APD. Elle était en 2000 le
cinquième pays donateur en volume, derrière les Etats-Unis, le Japon,
l'Allemagne et presque à égalité avec le Royaume-Uni. Elle reste, en
pourcentage du PIB - 0,32 % - le plus généreux des pays du G7 et se situe
largement au-dessus de la moyenne des pays membres du CAD de l'OCDE, soit 0,22
%.
S'agissant de notre aide aux pays les moins avancés, qui préoccupe M.
Charasse, je précise que, au-delà des chiffres sur l'importance de l'aide, les
choix qui sont faits - lutte contre la pauvreté, initiatives contre le sida -
confirme l'attention que la France porte aux pays les plus pauvres.
Enfin, la France s'attache à une approche plus qualitative de l'APD. Elle
plaide pour une régulation pertinente de la mondialisation qui prenne en compte
les problèmes spécifiques des pays en développement et encourage la réflexion
internationale sur le financement du développement, y compris par l'émergence
de nouvelles approches telles que l'hypothèse d'une taxation internationale
pour le financement des biens publics mondiaux.
Dans ce contexte, le projet de loi de finances pour 2002 exprime bien,
contrairement à ce qu'ont dit certains de vos rapporteurs, nos priorités pour
la coopération internationale.
Par ailleurs, les crédits d'aide au développement s'inscrivent dans des
priorités sectorielles et géographiques claires. Je ne suis donc pas d'accord -
et je le regrette - avec ce qu'ont écrit Mme Brisepierre, MM. Penne et Dulait,
qui regrettent l'absence de priorité.
S'agissant des crédits de coopération technique et d'aide au développement mis
en oeuvre directement par le département, pour 2002, les priorités sectorielles
sont doubles : il y a, d'une part, la lutte contre la pauvreté et les
inégalités, et pour le développement durable ; d'autre part, l'aide à
l'organisation de l'Etat, dont le rôle et la responsabilité sont essentiels à
nos yeux - soutien à l'Etat de droit et aux droits de l'homme, bonne
gouvernance, réformes institutionnelles.
Tout à l'heure, nous avons eu un débat sur la société civile. Je crois qu'on a
un peu dépassé le temps où celle-ci et les ONG étaient considérées comme la
panacée ; on en est arrivé à une position plus équilibrée : si l'action des ONG
est tout à fait remarquable dans certains cas, ce n'est pas une raison pour
affaiblir les gouvernements. Ce serait une erreur fatale. La plupart de ces
pays sont sous-administrés, sous-gérés, ils ont besoin à la fois
d'administrations renforcées, d'un Etat qui fonctionne bien et d'une société
civile qui se développe. C'était une grande erreur conceptuelle d'opposer les
deux, comme on l'a fait, ces cinq ou dix dernières années.
Toujours dans les priorités sectorielles, j'en viens à l'Agence française de
développement.
Une lettre de mission pour son nouveau directeur général vient d'être signée.
Elle fixe les priorités stratégiques de l'agence : promotion d'un développement
économique stable et efficace, qui soit respectueux de l'environnement et plus
soucieux de cohésion sociale. Cette précision rassurera certainement M.
Charasse, qui craignait que ce soit l'agence qui fasse elle-même sa stratégie
et plus largement celle de la coopération au développement de la France.
J'en viens aux priorités géographiques.
Le comité interministériel de la coopération internationale et du
développement a fait le choix en 2000 de maintenir le périmètre initial de la
zone de solidarité prioritaire, ZSP. Celui-ci tient compte de la situation
économique des pays, mais aussi des liens traditionnels de la France avec tel
ou tel Etat. Compte tenu de notre histoire, du poids de notre aide au
développement et de nos responsabilités mondiales, il n'est pas anormal que la
zone prioritaire de la France soit plus étendue que celle d'autres bailleurs de
fonds. Au demeurant, rien n'interdit une sélectivité interne à la ZSP, ce qui
est déjà le cas, certains pays recevant plus que d'autres. L'appartenance à la
ZSP, si elle confère vocation à bénéficier de certains instruments, n'y donne
pas un droit automatique. C'est l'intérêt intrinsèque du projet ou du programme
qui détermine l'aide.
Par ailleurs, la modernisation de nos instruments se poursuit.
Je veux m'arrêter un instant sur la réforme de l'assistance technique, qui a
fait l'objet de nombreuses remarques de vos rapporteurs, Mme Brisepierre et M.
Charasse, par exemple, qui donnent l'impression de regretter, plus que les
Africains eux-mêmes, les mécanismes des années 1970 ou 1980.
La coopération française disposait, en début d'année, de 2 200 assistants
techniques. S'ils sont numériquement en poste à 75 % dans les pays de la zone
de solidarité prioritaire, les assistants sont aussi affectés dans des pays
émergents, en transition et développés. Leur nombre a effectivement décru
depuis le début des années quatre-vingt, car nous avons renoncé à la
coopération dite de substitution initiée au début des années soixante et qui
était terriblement critiquée à l'époque, il faut se le rappeler. Leurs
fonctions ont connu une évolution en profondeur.
Comme le notent de nombreux rapporteurs, cette forme de coopération technique
constitue un avantage comparatif majeur pour notre action extérieure. Elle
figure donc parmi les priorités du budget de la DGCID, qui a maintenu en 2002
les moyens qu'elle y a consacrés en 2001. Elle a en outre prévu une dotation de
58 millions de francs pour financer le développement de l'expertise de courte
et moyenne durée et le redéploiement de certains postes vers de nouveaux pays
bénéficiaires du fonds de solidarité prioritaire.
Par ailleurs, le ministère a procédé, après une concertation avec les
assistants techniques, à l'harmonisation indispensable du régime de ces
personnels. A la fin de 2003, à l'issue d'une période de transition, l'ensemble
des assistants techniques sera régi par le décret du 28 mars 1967.
La promotion de la coopération non gouvernementale est aussi un élément clé de
notre dispositif rénové.
Ces moyens augmentent de 6 millions de francs, partagés entre la coopération
décentralisée et les associations de solidarité internationale.
La réforme de la coopération a modifié les domaines d'action du fonds de
solidarité prioritaire et de l'agence française de développement : l'AFD étend
son champ d'intervention aux domaines sociaux et éducatifs, tandis que le FSP
se concentre sur les projets de coopération institutionnelle. Cette répartition
nouvelle nécessite un rééquilibrage des dotations budgétaires ; ainsi,
s'agissant du fonds de solidarité prioritaire, les crédits de paiement sont
abondés de 35 millions de francs alors que les autorisations de programme sont
réduites de façon à mieux ajuster le rapport entre les deux.
L'adaptation du dispositif se traduit aussi par la création d'un article au
titre IV pour les opérations exceptionnelles liées aux sorties de crises. Ce
dispositif, qui réunit la cellule de crise du ministère et le secrétariat
général de la défense nationale, est accompagné d'une dotation budgétaire de 50
millions de francs. Il comble le vide qui existait jusqu'alors dans le
dispositif budgétaire en assurant une continuité depuis les situations
d'urgence financées par le fonds d'urgence humanitaire jusqu'à l'aide au
développement.
S'agissant de la coopération militaire et de défense, dont Mme Brisepierre,
MM. Boulaud, Charasse et Dulait ont regretté les baisses de crédit, je souligne
que, malgré les réductions, la coopération militaire s'adapte aux nouveaux
besoins tels que la prévention des crises et la formation régionale des élites,
grâce à un effort de rationalisation et de modernisation.
Le projet de loi de finances pour 2002 apporte aussi des moyens
supplémentaires au service de la « bataille des idées » et de la
francophonie.
La recherche d'une mondialisation plus équilibrée et plus équitable repose sur
la coopération au développement, mais aussi sur notre capacité à faire valoir
nos idées et nos valeurs dans les débats mondiaux et la promotion de la
diversité culturelle et linguistique.
La programmation des crédits de coopération et d'action culturelle pour 2002
reflète nos objectifs en ce domaine : rénover notre réseau culturel tout en
soutenant la pensée française dans la bataille des idées, former en France les
élites mondiales, en tout cas en plus grand nombre, renforcer l'audiovisuel
extérieur.
Comme le relève Mme Pourtaud, des mesures nouvelles sont ainsi prévues en
faveur de l'agence pour l'enseignement français à l'étranger, l'AEFE, des
établissements culturels - répondant ainsi aux suggestions du rapport Dauge -,
des bourses d'excellence Major visant à permettre aux meilleurs élèves des
lycées français à l'étranger de poursuivre leurs études en France, de la
diffusion des revues françaises et des opérateurs de l'action audiovisuelle
extérieure. Sur ce point, je suis d'ailleurs surpris du vote de la commission
des affaires culturelles, qui aurait dû se féliciter de telles augmentations de
crédits au lieu de se prononcer contre eux.
La priorité affichée pour 2002 c'est la relance de TV5 sur le continent
américain qui s'appuie sur le nouvel accord conclu en 2001 avec nos
partenaires. Cela a permis une rationalisation du dispositif et la création
d'une entité nouvelle baptisée TV5 Monde, basée à Paris, qui a désormais la
responsabilité de l'ensemble des signaux de la chaîne, mis à part celui qui est
destiné au Canada.
Puisque certains d'entre vous en ont parlé, je voudrais moi aussi, alors que
Jean Stock quitte ses fonctions, le féliciter pour le travail formidable qu'il
a accompli à la tête de TV 5. Je regrette qu'il parte mais, au moment où il est
arrivé, sur ma requête, il s'était engagé pour deux ans ; il est resté
davantage, je l'en remercie.
En réponse à Mme ben Guiga, je précise que l'idée de la création d'une chaîne
franco-arabe est actuellement étudiée avec la plus grande attention. Compte
tenu de ces efforts, il me paraît difficile de soutenir, comme l'a fait M.
Chaumont, que « l'audiovisuel public extérieur est un instrument délaissé ».
Qu'on ne fasse pas tout ce qu'il faudrait faire et ce que je souhaiterais que
l'on fasse, cela est vrai. Mais de là à dire que c'est un instrument délaissé,
il y a une marge !
Je partage tout à fait les préoccupations de M. Hoeffel sur la nécessité de
favoriser les réseaux culturels franco-allemands.
S'agissant de notre réseau en Allemagne, je précise que la réforme de la carte
ne signifie aucunement un désengagement ni en moyens ni en implantations. Nous
prévoyons, en effet, au moins une implantation dans chaque langue et des
ouvertures vers la partie Est de l'Allemagne. L'Allemagne bouge, et il serait
étonnant que notre réseau ne bouge pas ; je crois qu'il sera désormais beaucoup
plus adapté à l'objectif visé.
Je poursuis avec la programmation relative à la francophonie, qui traduit la
poursuite des axes du mouvement francophone.
Je confirme à M. Legendre que le report d'un an du sommet de Beyrouth n'aura
pas d'incidence sur le développement de la francophonie ni sur la programmation
de ses opérateurs, qui sera, comme pour chaque
biennum
, adoptée par la
conférence ministérielle budgétaire qui va se tenir prochainement. Cette
programmation devrait confirmer les orientations qu'a suivies le mouvement
francophone ces dernières années et qui sont au nombre de quatre :
l'approfondissement de l'Etat de droit et de la démocratie ; la diversité
culturelle et linguistique ; la modernisation des opérateurs et des procédures
; enfin, le renforcement de la concertation entre francophones à l'occasion des
grands rendez-vous de la vie internationale.
Pour répondre à tous ces besoins, la France annoncera à tout le moins le
maintien de sa contribution lors de la conférence budgétaire de Paris, soit
248,6 millions de francs. Il me paraît en outre utile, pour le prochain
biennum
, de renforcer nos concours aux programmes de l'Agence pour la
francophonie en faveur de l'Etat de droit et de la démocratie, pour répondre
aux attentes légitimes suscitées par le symposium et la démocratie de
Bamako.
Pour terminer avec le volet coopération et pour répondre aux observations
concernant la fusion du ministère de la coopération avec celui des affaires
étrangères, je voudrais rappeler que les arguments qui avaient conduit le
Premier ministre à décider cette réforme n'ont rien perdu de leur pertinence,
comme l'a tout à l'heure très justement rappelé Yves Dauge.
Rappelez-vous l'absence d'unité dans les démarches, la sclérose de nombreuses
pratiques de coopération dans les pays du champ, l'absence de complémentarité
des outils, l'absence de rationalisation du dispositif : nous avons pu nous
attaquer à toutes ces déficiences grâce à cette réforme.
Sur le plan administratif, j'indique que la réforme, désormais achevée, s'est
effectuée dans d'excellentes conditions : fusion des administrations, des
budgets, des corps. Elle est même donnée par le ministère de la fonction
publique comme un exemple de réforme réussie au sein de l'Etat.
L'essentiel est de faire vivre le dispositif actuel tant dans la dimension «
affaires étrangères », incluant la coopération, que dans la dimension
interministérielle, c'est-à-dire le pôle « affaires étrangères », le pôle «
Bercy » et l'interministériel, en développant l'articulation avec les autres
bailleurs de fonds - en particulier l'Union européenne et les organismes
multilatéraux - la communication et l'évaluation. Cela fait partie du travail
global que j'anime au sein du ministère.
Le deuxième axe, sur lequel je serai beaucoup plus bref, concerne
l'amélioration des procédures d'accueil et le traitement de la demande d'asile,
pour lesquel des moyens supplémentaires sont dégagés.
Vous évoquez souvent ce sujet à propos de l'office français de protection des
réfugiés et apatrides, l'OFPRA. Pour que l'office puisse répondre aux 39 000
demandes nouvelles qui ont été enregistrées en 2000 - 4 000 dossiers nouveaux
ont été déposés chaque mois depuis le début de 2001 - , une mesure nouvelle de
38 millions de francs destinée à assurer 94 recrutements, a été inscrite dans
cette loi de finances. L'office a pour objectif de traiter, dans un délai
inférieur à quatre mois, le flux des demandeurs d'asile et de résorber, avant
la fin de 2002, les 21 500 dossiers en attente.
Ce budget maintient globalement l'effort engagé pour améliorer la situation
des Français de l'étranger, en particulier en matière de protection sociale,
d'enseignement et de sécurité. Deux millions de Français environ en vivent en
permanence à l'étranger. Ils sont représentés par le Conseil supérieur des
Français de l'étranger, le CSFE, dont M. Cointat a rappelé les missions. Mme
Cerisier-ben Guiga, dans son rapport, a souligné la situation de précarité dans
laquelle se trouvaient certains d'entre eux.
Je précise, à l'attention de vos rapporteurs et de M. Cantegrit, que, suivant
les recommandations de ce rapport, les moyens consacrés à l'aide aux Français
de l'étranger en matière d'aide sociale et de formation professionnelle
augmentent de nouveau en 2002.
Contrairement à ce qu'a dit M. de Montesquiou, que je suis heureux de
rassurer, les crédits consacrés à la sécurité des Français à l'étranger ne
diminuent pas : ils sont maintenus.
L'Agence pour l'enseignement français à l'étranger, l'AEFE, qui accueille 158
000 élèves français et étrangers dans 270 établissements répartis dans le
monde, voit également ses moyens augmenter, une part significative de ceux-ci
étant affectée aux bourses scolaires destinées aux élèves français. A la
dotation allouée à l'AEFE dans le projet de loi de finances pour 2002, il
convient d'ajouter près de 20 millions d'euros en autorisations de programme
pour les investissements des établissements en gestion directe.
S'agissant des moyens de l'AEFE, je tiens, là encore, à rassurer - mon
discours se veut décidément rassurant !
(Sourires)
- Mmes Brisepierre et
Cerisier-ben Guiga, ainsi que MM. Chaumont, Penne, Duvernois et Dauge : j'ai
proposé la co-tutelle au ministère de l'éducation nationale. Vous pensez bien
que cette idée m'a traversé l'esprit ! Ce n'est pas encore fait mais le
problème est clairement posé.
Le niveau de la subvention pour 2002 et le fonds de réserve permettent
d'assurer le financement de la réforme sur les rémunérations des résidents
ainsi que la poursuite de la politique d'augmentation des bourses.
Les crédits consacrés à la sécurité des Français à l'étranger ont connu une
progression constante. Ils seront renforcés pour améliorer et compléter le
dispositif existant : cellule de veille, plans de sécurité, cellule de crise,
site « conseil aux voyageurs », qui ont démontré leur efficacité à la suite des
événements tragiques du 11 septembre.
Afin de ne pas ajouter des retards dans la mise en oeuvre de la réforme
concernant la caisse des Français de l'étranger, des instructions seront
adressées aux postes et des formations sur les modalités d'application mises en
place.
Enfin, ce budget permet de poursuivre la modernisation du ministère par la
valorisation et une mobilisation plus grande des ressources humaines ainsi que
par la mise en oeuvre de la déconcentration.
Pour la troisième année consécutive, avec 9 466 emplois inscrits au projet de
loi de finances pour 2002, les effectifs sont stables et permettent, grâce à
des mesures de redéploiement interne et à une politique dynamique de
recrutement, de respecter les priorités que constituent l'encadrement dans les
services des visas, les fonctions de gestion, tant à l'administration centrale
que dans les postes à l'étranger, et le renforcement des directions
politiques.
Ainsi, je précise, à l'attention de Mme ben Guiga et de MM. Dulait et del
Picchia, que vingt-trois emplois de titulaires et vingt-huit recrutés locaux
ont pu être dégagés en 2000 et 2001 pour renforcer les services des visas. J'en
profite pour dire à M. Pelletier que le nombre de visas délivrés aux étudiants
étrangers a plus que doublé depuis cinq ans et a été multiplié par trois pour
les Africains.
L'ouverture de concours portant sur plus de 200 emplois de catégorie C
permettra de poursuivre le renforcement des postes consulaires, notamment en
Algérie.
Le renforcement de la politique de formation figure aussi parmi nos priorités
: une enveloppe unique de crédits, hors rémunérations, a été inscrite au titre
III pour un montant de 4 millions d'euros, afin de couvrir les besoins de
formation de l'ensemble des personnels, y compris le personnel recruté
localement. En outre, comme je m'y étais engagé l'an dernier, un institut
diplomatique a été créé pour compléter et couronner le dispositif global de
formation, lui-même sensiblement renforcé, et répondre à une exigence
croissante de professionnalisme.
S'agissant de la situation des agents de recrutement local à l'étranger, je
vous rappelle que, dès 1998, j'ai engagé une étude qui a débouché sur des
propositions très concrètes. Le plan d'action pour la valorisation du
recrutement local, d'une part, et l'amélioration de la gestion et de la
situation de ces personnels, d'autre part, ont été très rapidement mis en
place.
Dans son rapport, M. Chaumont s'inquiète de l'insuffisance des moyens affectés
à ces personnels. Je lui précise que la dotation budgétaire pour la
rémunération des 5 850 recrutés locaux du réseau diplomatique et consulaire a
été très substantiellement augmentée pour mettre en oeuvre ce plan d'action et
compenser l'effet-change : aux 40 millions de francs supplémentaires accordés
en base budgétaire en 1999, le ministère a ajouté par redéploiement 63 millions
de francs en gestion 2000 et 2001.
En 2002, la dotation budgétaire sera à nouveau abondée de 20 millions de
francs afin de prendre en compte la hausse du dollar et de poursuivre les
améliorations considérables réalisées en faveur des rémunérations, de la
protection sociale et de la situation juridique de ces agents. Au total, 573
millions de francs sont destinés à rémunérer ces agents, qui représentent plus
de 70 % du personnel d'exécution du réseau diplomatique et consulaire.
Enfin, nouvelle étape dans la déconcentration, le regroupement des moyens de
fonctionnement et de rémunération des recrutés locaux au sein d'un chapitre
unique permettra une gestion plus simple et plus efficace, grâce à des reports
de crédits, et facilitera une déconcentration de la gestion. La réforme
comptable, d'ores et déjà appliquée à 99 postes répartis dans quarante-trois
pays, sera ainsi étendue à 50 nouveaux postes.
En conclusion, je voudrais souligner, mesdames, messieurs les sénateurs, qu'à
bien des égards, ce projet de loi de finances constitue un aboutissement de la
logique de réforme et de fusion des moyens de la coopération internationale que
nous avons mise en oeuvre. Je pense notamment à l'adaptation du dispositif
d'assistance technique, au dispositif nouveau de sortie de crise, à la fusion
du chapitre de coopération culturelle et scientifique et du chapitre de
coopération technique et au développement en un grand chapitre 42.15 global et
cohérent, qui facilitera la gestion.
Il est impératif que nous nous attachions, dans le cadre des travaux
préparatoires, à la mise en oeuvre de la nouvelle loi organique relative aux
lois de finances, à adopter des cadres et des méthodes qui permettront une plus
grande lisibilité du budget, en particulier la traçabilité - pour parler comme
dans l'élevage - des dépenses relevant de l'APD.
Au total, si ce budget n'est pas de nature à déclencher l'enthousiasme des
parlementaires avertis que vous êtes, viscéralement attachés, comme je le suis
moi-même, à l'influence et à la présence de la France dans le monde, il ne
mérite pas pour autant l'excès de critiques que j'ai pu entendre aujourd'hui ou
lire dans les rapports.
M. Guy Penne.
Bravo !
M. Hubert Védrine,
ministre des affaires étrangères.
Ce budget est en effet objectivement
meilleur, Guy Penne l'a souligné à juste titre, que celui qui était présenté
l'année passée et qui avait été voté à l'unanimité par le Sénat.
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes
économiques de la nation.
Nous vous avions donné une chance !
M. Hubert Védrine,
ministre des affaires étrangères.
Le budget des affaires étrangères a
d'ailleurs toujours été voté par le Sénat,...
M. Michel Charasse,
rapporteur spécial.
Absolument !
M. Hubert Védrine,
ministre des affaires étrangères.
... qu'il soit bon, parfois, ou qu'il
soit mauvais, le plus souvent.
(Murmures amusés.)
Et voilà que, cette année, comme par hasard, alors qu'il est relativement
meilleur que ceux qui l'ont précédé, notamment entre 1993 et 1997, vous le
jugez inacceptable. En novembre 2001, votre patience cède brusquement...
Vous me dites que c'est pour provoquer une réaction, pour que la France se
dote enfin des moyens d'influence dont elle a besoin aujourd'hui. Qui ne serait
d'accord ? Mais je m'interroge : n'est-ce pas plutôt un effet du calendrier ?
(Sourires et exclamations.)
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Ce n'est pas le genre de la
maison !
M. Didier Boulaud.
Oh ! Ils n'oseraient pas !
(Nouveaux sourires.)
M. Hubert Védrine,
ministre des affaires étrangères.
J'ai en effet du mal à le croire...
M. Alain Vasselle.
Vous êtes un bon diplomate !
(Nouveaux sourires.)
M. Hubert Védrine,
ministre des affaires étrangères.
Je ne sais pas si vous pensez à la
France ou au printemps prochain...
MM. Jacques Chaumont,
rapporteur spécial,
Nicolas About et Louis Moinard.
Au printemps de la France !
(Nouveaux
sourires.)
M. Hubert Védrine,
ministre des affaires étrangères.
En réalité, la progression des crédits
de coopération et d'action culturelle, la poursuite de la modernisation de nos
instruments et le développement de mécanismes financiers nouveaux nous
permettent de traduire concrètement les axes prioritaires de notre politique de
coopération, conjuguant aide au développement et solidarité, influence dans les
débats mondiaux, dans la bataille des idées, et défense de la diversité
culturelle. Cette politique traduit notre objectif fondamental.
Comme l'a dit M. le Premier ministre voilà quelques jours, nous devons
prolonger la coalition contre le terrorisme - qui est la priorité d'aujourd'hui
- par une coalition pour un monde plus équitable. C'est cet objectif que sert
la politique étrangère de la France.
(Applaudissements sur les travées
socialistes.)
Mme Hélène Luc.
Monsieur le ministre, qu'en est-il de la reconstruction du lycée de Kaboul
?
M. Hubert Védrine,
ministre des affaires étrangères.
Cela fait partie, madame la sénatrice,
des projets dont nous parlerons avec les nouvelles autorités afghanes.
M. le président.
Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits figurant aux états B et
C concernant les affaires étrangères.
ÉTAT B
M. le président.
« Titre III : 38.643.690 euros. »
Sur le titre III, la parole est à M. le président de la commission des
finances.