SEANCE DU 4 DECEMBRE 2001
PRÉSIDENCE DE M. ADRIEN GOUTEYRON
vice-président
M. le président.
La séance est reprise.
Nous poursuivons l'examen des dispositions du projet de loi de finances pour
2002 concernant la sécurité.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Peyronnet.
M. Jean-Claude Peyronnet.
Monsieur le ministre, vous avez bien du mérite : face à la mauvaise foi, à la
mémoire courte, à la surenchère...
Mme Nelly Olin.
Ça commence mal !
M. Jean-Claude Peyronnet.
... qu'attise chez les hommes politiques comme chez les syndicalistes
l'approche de l'échéance électorale, face aux petites phrases, aux mises en
cause personnelles, vous conservez votre sang-froid, vous gardez le cap, le bon
cap.
Les ministres de l'intérieur qui vous ont précédé, y compris celui qui vous a
immédiatement précédé, ne devraient pas l'oublier, non plus que tous ceux qui
l'ont soutenu.
Au demeurant, cet hommage ne vous est pas seulement destiné. Je pense que,
derrière l'homme « Vaillant »,...
Mme Nelly Olin.
Quelle recherche!
M. Jean-Claude Peyronnet.
... c'est tout le Gouvernement de gauche, en particulier le Premier ministre,
qui est attaqué, à tort.
Il est vrai que les turbulences sont vives parce que la société est malade,
mais ce n'est pas nouveau, et cela ne veut pas dire qu'il faut baisser les
bras.
Il est vrai que l'instituteur, le médecin et, peut-être, le curé ne trouvent
plus dans notre société le respect et la reconnaissance dont ils bénéficiaient
dans le passé. Quand cela touche aux policiers, cela prend un tour plus
apparent, plus spectaculaire, voire, hélas ! plus dramatique parfois.
Il est vrai que tout ne fonctionne pas bien, notamment dans le couple,
pourtant indissociable, police-justice, et il est vrai que, toutes choses
égales, les bavures sont plutôt, depuis quelque temps, du côté de la justice
que du côté de la police.
Mme Nelly Olin.
Oh !
M. Aymeri de Montesquiou,
rapporteur spécial.
Ce n'est pas faux !
M. Jean-Claude Peyronnet.
Quoi qu'il en soit, nos policiers, comme nos gendarmes, se sentent mal aimés.
Pourtant, dans ce monde instable où les corps constitués sont en mal de
reconnaissance, les policiers font globalement bien leur travail, et c'est un
travail dangereux, nous le savons bien.
Raison de plus pour ne pas en rajouter dans la polémique alors que toutes les
personnes de bonne foi savent bien que la question n'est ni seulement policière
ni seulement judiciaire, mais que tout le corps social - et, au premier chef,
la cellule de base qu'est la famille - est directement concerné.
Chacun sait bien aussi que toutes nos difficultés exigent une approche sereine
et cohérente, un dialogue permanent entre tous ceux qui portent une part de
responsabilité au stade de l'éducation, de la prévention et de la
répression.
Alors que personne ne nie l'existence de l'insécurité, alors que la police
doute de l'utilité de sa mission, alors que nos concitoyens s'interrogent, la
droite entretient sur ce sujet une polémique incessante, à vrai dire assez
détestable, et ne propose que des solutions partielles, inefficaces, voire
contradictoires.
Au demeurant, ces solutions sont aussi dangereuses, parce que, en nourrissant
le sentiment d'insécurité chez les Français, qui, hélàs ! sont actuellement
très réceptifs à ce discours, les électeurs, cible principale de ces
manoeuvres, risquent de se tourner nombreux, une fois de plus, vers celui qui
apparaît comme le plus intolérant,...
Mme Nelly Olin.
Oh ! Pitié !
M. Jean-Claude Peyronnet.
... le plus apte à s'en remettre à la solution facile du bouc émissaire.
Mme Nelly Olin.
Vraiment, quel raccourci facile !
M. Jean-Claude Peyronnet.
Madame la sénatrice, peut-être n'est-ce pas ce que vous cherchez, mais, en
mettant en avant le sentiment d'insécurité, vous verrez que - comme il l'a dit
lui même - l'original sera toujours préféré à la copie.
Personne, ni vous ni moi, n'y gagnera. Il convient donc de se garder des
jugements hâtifs sur cette question. La hausse de la criminalité existe à n'en
pas douter. Elle n'est ni de gauche ni de droite. C'est un fait de société. Il
ne s'agit pas du tout de sous-estimer l'insécurité, mais, lorsque l'on examine
les différentes catégories d'infractions, force est de reconnaître que les
résultats sont contrastés : si les chiffres traduisent une évolution de la
criminalité, ils mesurent également le niveau d'activité de la police, et il
n'est pas toujours facile de faire la part des choses.
L'opinion n'en est pas moins inquiète, mais comment pourrait-il en être
autrement alors que la question de la sécurité est devenue un sujet de
polémique, utilisé notamment à des fins électoralistes ?
Pourtant, jamais il n'a été autant fait pour la police nationale depuis le
plan Joxe de 1985. A ce titre, le Gouvernement et, au sein de celui-ci, le
ministre de l'intérieur doivent être salués pour le rôle qu'ils ont joué.
Que reproche donc la majorité sénatoriale à ce projet de budget pour en
proposer le rejet ? J'ai repéré six arguments.
Premier de ces arguments : une hausse insuffisante des crédits.
Il est simple de répondre à cet argument. En 1995, M. Pasqua avait présenté un
budget de la police qui s'élevait à 27 milliards de francs. Ce budget a baissé
sous le ministère de M. Debré, en 1996 et 1997. Il a atteint en 2000 non pas 27
milliards de francs mais 30 milliards de francs, et il s'élevera à 33 milliards
en 2002. Par ailleurs, le total des seules mesures catégorielles et
indemnitaires que vous avez, monsieur le ministre, accordées au personnel
atteindra 1,11 milliard pour l'année 2002.
Deuxième argument : la hausse des effectifs serait insuffisante.
Entre 1997 et 2002, les effectifs ont progressé de plus de 11 % !
M. Philippe Marini.
Tout va bien...
M. Jean-Claude Peyronnet.
Le projet de budget prévoit la création de plus de 3 000 emplois. On ne peut
pas à la fois réclamer des créations d'emplois dans la police nationale - voire
dans d'autres secteurs, et je pense par exemple aux emplois d'infirmières - et
gémir comme le fait la droite lorsque le nombre de fonctionnaires augmente,
tout en profitant de cet argument pour ne pas voter l'ensemble du projet de loi
de finances.
Troisième argument : les crédits de fonctionnement et d'équipement seraient
insuffisants.
Les crédits inscrits dans le projet de budget témoignent pourtant d'un effort
d'autant plus considérable qu'il fait suite à un effort déjà considérable l'an
passé. Il faut, encore une fois, remonter au plan Joxe de 1985, qui a été
exécuté l'année suivante, pour trouver des niveaux d'investissement et
d'équipement aussi importants.
M. Philippe Marini.
Ce sont vos arguments...
M. Jean-Claude Peyronnet.
Quatrième argument : les conséquences de la réduction du temps de travail.
Je trouve amusant, monsieur Marini, que vous nous accusiez de manquer d'esprit
de prévision alors que vous avez été incapables de prévoir les départs massifs
à la retraite qui se produiront dans la police à partir de 2005-2010. C'est
d'ailleurs une raison qui pourrait expliquer le manque d'effectifs que vous
nous reprochez...
Les 3 000 emplois nouveaux serviront notamment à l'application de la réduction
du temps de travail.
Cinquième argument : la faiblesse de la présence des policiers sur le
terrain.
Il s'agit là à vrai dire d'une politique dont la mise en place s'étalera sur
plusieurs années, mais la voie est ouverte.
Les policiers sont moins astreints qu'ils ne l'étaient naguère à exécuter les
tâches indues, notamment dans le domaine administratif, qu'il leur revenait
d'accomplir, là encore parce que la loi d'orientation votée sous le
gouvernement Balladur n'avait pas été réellement appliquée.
Enfin, dernier argument : les emplois-jeunes sont largement critiqués, alors
qu'ils ont constitué un apport considérable, en particulier pour la police de
proximité de par leur présence dans les quartiers auprès des filles et des
garçons de leur âge, qu'ils soient d'origine européenne ou pas.
Quant à leur formation, elle est de mieux en mieux assurée, et ils
constitueront de plus en plus un vivier pour le recrutement des fonctionnaires
de police.
Bref, vos critiques, mesdames, messieurs de la droite, ne sont pas
pertinentes.
J'ai noté que vous proposiez avant tout l'adoption d'une grande loi de
programmation sans vraiment en définir le contenu. J'observe que le
gouvernement Balladur avait élaboré une loi de ce type mais que vous vous étiez
bien gardés de l'appliquer, puisque vous n'aviez pas voté les crédits qui
auraient permis d'améliorer la situation.
M. Philippe Marini.
Cessez de vivre dans le passé !
M. Jean-Claude Peyronnet.
Enfin, s'agissant de la loi sur la présomption d'innocence que les policiers
ont accusée de tous les maux, faut-il rappeler qu'elle a été proposée par le
Président de la République et qu'elle a été adoptée tant par l'Assemblée
nationale que par le Sénat ?
Il est sage néanmoins d'en effectuer une évalution dès maintenant. Ce n'est
pas parce que tel ou tel magistrat, qui n'était peut-être pas très favorable à
la loi - le cas s'est produit - « dérape » qu'elle est nécessairement
mauvaise.
Je rappelle par ailleurs que Mme Guigou avait monté un échafaudage judiciaire
cohérent mais qui s'est écroulé à la suite de la décision du Président de la
République de ne pas nous réunir à Versailles.
En tout état de cause, la police n'est pas seule concernée. Il n'est pas
possible de faire l'économie d'une pédagogie de la violence, car le monde qui
nous entoure et les modes d'expression sont eux-mêmes violents. La sécurité
revêt de multiples aspects. Il convient de les traiter globalement.
M. le président.
Monsieur Peyronnet, je vous prie de conclure. Vous avez dépassé les dix
minutes qui vous étaient imparties.
M. Jean-Claude Peyronnet.
Je ne les ai dépassées que de quelques secondes, monsieur le président. Je
rappelle que le groupe socialiste disposait de vingt-deux minutes et que je
suis le seul inscrit. La décision de la conférence des présidents est très
discutable. Il faudra la revoir, je le dis au passage.
Pour conclure, monsieur le ministre, nous voterons vos crédits, ce qui n'est
pas une grande surprise, tout en sachant que vous avez entrepris une oeuvre de
longue haleine d'autant plus facile à critiquer que l'opposition aspire de
manière pressante au risque zéro, ce qui est irréaliste.
Je ne suis pas convaincu qu'il soit bon pour des parlementaires d'attiser ce
sentiment.
(Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur
celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. Turk.
M. Alex Turk.
Monsieur le ministre, je voudrais, puisque beaucoup de choses ont été dites,
attirer votre attention sur des points peut-être plus techniques mais qui, je
crois, engagent notre avenir puisqu'il s'agit du fonctionnement des systèmes
Schengen et Europol, maintenant au premier plan de l'actualité compte tenu des
événements survenus aux Etats-Unis.
Je voudrais faire ces quelques remarques en tant que membre de l'autorité de
contrôle commune et sachant que, s'agissant d'Europol, on se trouve dans une
situation extrêmement délicate qui pourra peut-être se résoudre lors de la
réunion du Conseil européen à laquelle vous assisterez, je crois, dans deux
jours à Bruxelles.
En ce qui concerne Schengen, mon intervention se résumera à quelques questions
simples mais qui nous préoccupent tous.
Ainsi, serait-il enfin possible d'avoir des informations précises sur la date
à laquelle le problème du système d'information de Schengen, le SIS II sera
enfin réglé ?
C'est un problème certes technique, mais d'une extrême importance. Depuis six
ou sept ans, on nous dit qu'il sera réglé prochainement... J'entends maintenant
parler de 2005 !
Toujours dans le cadre du basculement du SIS sous la responsabilité de la
Commission, nombreux sont ceux qui se demandent, dans les couloirs de
Bruxelles, s'il est vrai qu'il y a un doute quant au maintien à Strasbourg du
système central des fichiers de Schengen.
Est-il vrai par ailleurs que l'on caresse l'éventualité de créer une agence
chargée de la gestion du système à la place du ministère de l'intérieur, qui
l'assure maintenant depuis sept ou huit années ?
En ce qui concerne maintenant Europol, je voudrais formuler deux remarques
précises, monsieur le ministre.
La première a trait à la collaboration qui se met actuellement en place entre
les Etats-Unis, d'une part, et Europol et l'ensemble des Etats membres de cet
office, d'autre part. Les 6 et 7 décembre prochains sera abordée la question de
l'ouverture de la négociation entre les polices américaines - je dis « les
polices », parce que les choses ne sont pas simples dans un système fédéral -
et Europol. Je voudrais attirer votre attention, monsieur le ministre, sur un
fait dont vous êtes peut-être déjà conscient : la convention portant création
d'Europol n'est pas respectée en l'occurrence, puisque la question que
j'évoquais sera traitée entre les ministres concernés alors que la procédure
normale n'a pas été suivie et que l'autorité de contrôle a été tenue à l'écart
du processus. Cela signifie que le contrôle citoyen qui doit intervenir en
matière de données personnelles n'aura pas pu s'exercer, ce qui est tout à fait
regrettable, même si, bien entendu, je ne remets pas en cause l'intérêt d'une
négociation avec les polices américaines. Ma seconde remarque sera pour vous
faire observer qu'il est extrêmement troublant de constater à quel point la
police française recourt peu souvent à Europol, alors même que cet office
connaît une espèce de montée en puissance inavouée.
En effet, le budget d'Europol s'accroît. J'ai appris récemment, à La Haye, que
le développement de l'office était tel qu'il est sur le point de quitter les
locaux qui l'abritent actuellement.
Par ailleurs, il est prévu d'étendre le mandat d'Europol à toute la
criminalité organisée, ce qui recouvre
grosso modo
tous les domaines de
compétence de la police nationale. Je crois savoir que cette question sera
traitée à l'occasion d'un prochain conseil « justice-affaires intérieures ».
On entend également évoquer la mise en place d'équipes communes d'enquête.
J'aimerais que vous nous donniez quelques éclaircissements sur ce point,
monsieur le ministre, car il me semble que la convention portant création
d'Europol comporte très peu d'éléments juridiques permettant de recourir à une
telle option, mais peut-être suis-je insuffisamment informé.
Toutefois, cette rumeur a sans doute quelque fondement, puisque votre collègue
le ministre délégué chargé des affaires européennes déclarait ce matin même
dans la presse qu'il était favorable à la création d'une police européenne. Il
s'agit là d'un sujet extraordinairement important, qui mériterait de faire
l'objet d'une réflexion approfondie, d'autant plus que nous ignorons si cette
police européenne aurait pour base Europol ou une autre structure restant à
définir.
En regard de ce considérable développement, tout nous montre que la police
française est extrêmement réticente à travailler avec Europol. Elle est
d'ailleurs le mauvais élève de la classe à cet égard, vous le savez, et
j'aimerais que vous nous donniez quelques explications.
Je sais bien qu'il existerait un facteur culturel selon lequel les Allemands
auraient une conception d'Europol tendant à rapprocher cet office du FBI, le
Federal Bureau of investigation,
tandis que les Français resteraient
attachés à leur souveraineté, ce que je comprends tout à fait.
Je sais également qu'une différence de culture policière, si j'ose dire, nous
distingue des Anglo-Saxons, qui partiraient du général pour aller vers le
particulier, tandis que la police française garderait un esprit plus tourné
vers la recherche de l'indice et du détail pour accéder ensuite au général.
En tout état de cause, les Français sont toujours très surpris, à Bruxelles,
de constater que, finalement, plus Europol se développe, moins la police
française l'utilise. S'agissant du vote d'un projet de budget, lorsque l'on
considère que l'un des plus gros contributeurs de l'office est aussi l'un des
plus faibles bénéficiaires de ses services, on est amené à s'interroger.
J'aimerais que vous puissiez nous expliquer ce paradoxe, monsieur le ministre.
(Applaudissements sur les travées du RPR et de l'Union centriste, ainsi que
sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Plasait.
M. Bernard Plasait.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les Français
veulent la sécurité, et ils assistent, souvent découragés, de plus en plus
souvent exaspérés, toujours impuissants, à la montée, qui leur semble
inexorable comme celle d'une marée, d'un désordre majeur dans la République.
Le barrage contre l'insécurité et la violence présentait depuis des années des
fissures de plus en plus nombreuses ; aujourd'hui, on a le sentiment que ce
barrage est en train de céder. Les « flics » que l'on abat, les criminels qu'on
libère, la police qui défile dans la rue, les épouses de gendarmes qui
manifestent, ceux-ci qui se font massivement « porter pâles », certains juges
qui appellent à boycotter la loi : la liste est longue de ces éléments
symptomatiques. La machine à produire la sécurité est en panne, elle tombe même
en morceaux la chaîne de production se brise en plusieurs de ses maillons.
La police, pour sa part, traverse l'une des crises les plus graves qu'elle ait
connues. Votre projet de budget apporte-t-il, monsieur le ministre, des
éléments de réponse ? Bien sûr, il ne peut représenter à lui seul la solution,
car il faut tenir compte des autres maillons : la famille, l'école, les cités,
la justice.
La justice, surtout, est sans doute la première clé à faire jouer si l'on veut
inverser le cours des choses. Le 22 novembre dernier, j'ai posé une question
d'actualité au Gouvernement sur cette crise de la police révélée par les
nombreuses et impressionnantes manifestations de rue. Je l'ai adressée au
Premier ministre, parce que la sécurité relève en réalité de plusieurs
ministères. Tout en reconnaissant la qualité de vos efforts pour répondre aux
revendications matérielles des policiers, je croyais pouvoir dire que le
malaise était plus profond, qu'il touchait à la dignité même des policiers.
J'évoquais leur découragement et même leur sentiment d'humiliation de se voir
narguer, l'après-midi, par des voyous arrêtés le matin, des voyous qui ne les
craignent plus puisqu'ils ne craignent plus la justice dans un système où la
punition est presque absente.
J'évoquais aussi les difficultés et les craintes des policiers à l'épreuve de
certaines conséquences de l'application de la loi renforçant la protection de
la présomption d'innocence et les droits des victimes. Je ne croyais pas si
bien dire ; en fait de volonté d'humilier et de provoquer, il est difficile de
faire plus abject que ce livre signé par un magistrat et intitulé :
Vos
papiers ! Que faire face à la police ?
- merci pour le mode d'emploi à
l'usage des voyous ! - qui présente sur sa couverture, comble de l'humour
délicat, une tête de porc avec un groin et une moustache, coiffée d'une
casquette de police. C'est
Hara-Kiri
ou
Fluide glacial
revu par
le Syndicat de la magistrature ! Comment s'étonner, après cela, du divorce du
couple police-justice ?
Quant aux craintes que l'on pouvait nourrir à l'égard de l'application d'une
loi non accompagnée des moyens nécessaires, elles ont été confirmées, jusqu'à
l'ahurissement, par l'extravagante remise en liberté d'un trafiquant de drogue
arrêté en possession d'un kilogramme d'héroïne. On est chez Gribouille ! Le
marchand des produits qui vont tuer nos enfants est remis en liberté au motif
qu'il doit s'occuper de ses propres enfants ! Alors, Gribouille, Kafka, père
Ubu, je ne sais pas, mais voilà pourquoi les policiers n'ont pas le moral ! On
ne peut pas leur demander de risquer leur vie pour rien, d'accepter de tomber
dans des embuscades où ils sont tirés comme à la foire, tout en étant, en
prime, traités d'assassins lorsqu'ils font leur devoir.
Ils comptent aujourd'hui parmi les premières victimes de cette insécurité
qu'ils ne peuvent maîtriser : sept d'entre eux, depuis le début de l'année, ont
ainsi payé de leur vie le désordre qui règne dans les esprits, sans parler des
gendarmes froidement abattus ! Je tiens à m'associer à l'hommage qui a été
rendu à ces hommes, ainsi qu'à leurs familles et à leurs collègues, par notre
éminent collègue Jean-Patrick Courtois. On ne leur exprimera jamais assez la
reconnaissance que leur doit la nation.
Monsieur le ministre, j'aurai l'occasion de m'exprimer devant vos collègues du
Gouvernement sur les causes qui relèvent des compétences de leurs ministères
respectifs, s'agissant de cette crise de la police que j'évoque ce soir. Je
voudrais toutefois vous dire que je ne crois pas que votre budget soit
suffisant pour répondre comme il le faudrait aux questions qui vous sont
posées.
Certes, les crédits de la police nationale augmentent par rapport à l'an
dernier, mais la part du budget de la police dans le produit intérieur brut
stagne.
De la sorte, la police de proximité que vous voulez généraliser ne disposera
pas des moyens nécessaires. Vous créez 3 000 postes supplémentaires, mais
ceux-ci seront en grande partie absorbés par la mise en place de la réduction
du temps de travail. Or le déploiement d'une police de proximité digne de ce
nom exige que des effectifs soient présents sur le terrain, et cette police ne
saurait reposer sur des adjoints de sécurité, pour lesquels le ministère
rencontre de surcroît de sérieuses difficultés de recrutement, l'objectif des
20 000 personnels étant loin d'être atteint.
Dans cette optique, les recrutements annoncés seront très insuffisants et ne
permettront pas de faire face à l'afflux des départs à la retraite, que vient
aggraver le cumul, en fin de carrière, des heures supplémentaires non
rémunérées. A cet égard, monsieur le ministre, je souhaiterais savoir quelles
dispositions précises vous comptez prendre pour régler l'épineuse question du
stock des 9,5 millions d'heures supplémentaires actuellement accumulées.
Outre les recrutements massifs de policiers, en particulier d'agents du corps
de maîtrise et d'application, qui devront être effectués d'ici à 2006, il
serait vraiment nécessaire de libérer un certain nombre de fonctionnaires des
tâches administratives ou indues qui les accaparent. Pour ce faire, il
conviendrait de procéder à des recrutements de personnels administratifs en
nombre suffisant, comme le prévoyait la loi d'orientation du 21 janvier 1995.
Je regrette que l'objectif initial de 4 300 emplois administratifs créés en
cinq ans ne soit pas atteint et que les 243 emplois prévus au projet de budget
pour 2002 ne permettent pas d'y parvenir.
Bien évidemment, la lutte contre l'insécurité passe d'abord et avant tout par
la présence accrue de policiers sur le terrain, au contact des populations,
mais il est primordial que ces personnels se sentent considérés par leur
administration. A ce titre, je crois que les mesures indemnitaires et
catégorielles que vous proposez se révèlent très en deçà de leurs aspirations
légitimes.
Bien évidemment, pour que la police soit efficace, elle doit être bien
équipée, en locaux, en véhicules et en moyens de transmissions. Le programme
ACROPOL de réseau de communications cryptées numériques devrait être achevé en
2007. Même si je partage les regrets déjà exprimés à propos de la lenteur de sa
mise en oeuvre, je m'interroge sur les raisons de l'importante sous-utilisation
des crédits ouverts en 2001. Je souhaiterais, monsieur le ministre, que vous
nous rassuriez sur ce point, tant ce constat pourrait donner à penser que
l'objectif ne sera pas atteint en 2007. La question de la compatibilité de ce
réseau avec celui de la gendarmerie, le réseau RUBIS, est également posée.
Enfin, en raison de la pénibilité de leur travail et de leur exposition
quotidienne au danger, les policiers ont besoin d'être bien préparés, bien
formés et bien protégés.
Quand on parle de protection, on pense bien sûr aux gilets pare-balles et à
l'équipement individuel du policier. Cela est indispensable, mais je pense
aussi et surtout à leur protection juridique.
Vous avez indiqué, monsieur le ministre, devant la commission des lois du
Sénat, avoir proposé aux personnels un plan d'action renforcée contre la
violence, comprenant notamment « une amélioration de la protection physique et
juridique des personnels ».
Par conséquent, et eu égard à la très désagréable impression, que l'on peut
éprouver, que les délinquants seraient juridiquement mieux protégés que les
fonctionnaires de police, je souhaiterais que vous puissiez nous préciser vos
intentions sur ce point.
Le métier de policier est un beau métier, dur et exigeant, au service du
citoyen et indispensable à une société qui veut vivre libre. Pour exercer ce
métier, le policier doit être respecté.
Monsieur le ministre, je regrette sincèrement que ce projet de budget ne soit
pas à la hauteur des véritables enjeux. Il est grand temps, à mon sens, de
sortir de la logique administrative pour imposer une logique de mission, celle
de la reconquête de la sécurité dans notre pays.
(Applaudissements sur les
travées des Républicains et Indépendants et du RPR, ainsi que sur certaines
travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Mercier.
M. Michel Mercier.
Monsieur le ministre, nous aurons naturellement l'occasion de parler de
nouveau des problèmes de sécurité civile, notamment des services départementaux
d'incendie et de secours, à l'occasion de la discussion du projet de loi
relatif à la démocratie de proximité.
Néanmoins, l'examen des crédits de votre ministère me permettra d'intervenir
sur ce sujet et de vous poser quelques questions.
Tout d'abord, pas plus que vous, monsieur le ministre, je n'ai oublié que nous
sommes encore le 4 décembre, jour de la Sainte-Barbe, fête traditionnelle des
sapeurs-pompiers.
(Sourires.)
Je voudrais en profiter pour rendre
hommage à tous les sapeurs-pompiers de France, qui remplissent leurs missions
avec dévouement et enthousiasme.
Aujourd'hui, la loi de 1996 relative à la départementalisation des services
d'incendie et de secours a quasiment produit tous ses effets. Je l'ai souvent
dit, et je ne suis pas le seul, cette loi est critiquable parce qu'elle est
imparfaite. En effet, elle ne prévoyait pas, notamment, les modalités de
financement des dispositifs qu'elle mettait en place. Aussi, nous nous trouvons
toujours aujourd'hui devant un certain nombre de problèmes. Je vais en lister
quelques-uns.
D'abord, la départementalisation repose sur l'idée toute simple de la
mutualisation des services mais aussi sur le fait que nous avons besoin de tous
les sapeurs-pompiers, qu'ils soient professionnels ou volontaires. Monsieur le
ministre, qu'entendez-vous faire pour vivifier le volontariat ?
Aujourd'hui, vos services ont adressé un message aux sapeurs-pompiers. Il
contient, me semble-t-il, cinquante-quatre paragraphes. Or un seul concerne les
sapeurs-pompiers volontaires, les cinquante-trois autres étant relatifs aux
diverses mesures que votre ministère a prises cette année en faveur des
sapeurs-pompiers professionnels. Entendez-vous maintenir un équilibre et faire
en sorte que les sapeurs-pompiers volontaires se sentent, eux aussi, utiles et
indispensables au bon fonctionnement des services départementaux d'incendie et
de secours ?
Toujours sur le même thème, je souhaite vous poser une autre question. Cette
année, de très nombreuses mesures ont en effet été prises en faveur des
sapeurs-pompiers professionnels. La plupart d'entre elles ont des conséquences
financières. Ainsi, le 30 juillet dernier, votre ministère a pris six décrets
en une seule journée, ce qui n'est pas mal pour un 30 juillet ! Le coût des
mesures qu'ils prévoient a été chiffré par vous-même devant la commission des
finances du Sénat à quelque 300 millions de francs. Or ces mesures n'ont pas
fait l'objet d'une véritable concertation avec les collectivités locales, qui
doivent pourtant maintenant les financer. Le temps n'est-il pas venu
d'instaurer une meilleure concertation entre vos services et les collectivités
locales, qui doivent assumer le financement des dispositions que vous prenez
?
S'agissant du financement, l'Etat a probablement un rôle à jouer. Dans votre
projet de budget pour 2002, sont prévus 60 millions d'euros pour financer la
brigade des sapeurs-pompiers de Paris et seulement 2,5 millions d'euros pour
l'ensemble des autres services départementaux d'incendie et de secours de notre
pays. Quelles sont les raisons d'une telle situation ? Certes, le problème
n'est pas facile à régler mais il faut, sur ce point, instaurer une égalité de
traitement. En effet, partout, indépendamment du lieu où les sapeurs-pompiers
exercent leurs activités, il y a des dépenses, notamment celles qui
correspondent aux décisions que vous avez prises.
Par ailleurs, l'année n'étant pas terminée, il vous reste probablement encore
une décision à prendre, monsieur le ministre, en ce qui concerne le régime de
travail des sapeurs-pompiers. Vous aviez négocié avec les organisations de
sapeurs-pompiers, sans que nous y soyons le moins du monde associés, un décret
tendant à définir leur régime de travail. Sans être trop exigeants sur la
concertation, pourrions-nous savoir si ce décret a quelque chance d'être publié
avant le 31 décembre 2001 ou si nous commencerons l'année 2002 sans savoir
véritablement vers quoi nous nous orientons. A cet égard, un vrai problème se
pose.
Aussi, ma dernière question est très simple : ne faudrait-il pas rétablir un
vrai contrat de confiance entre le ministère de l'intérieur, les SDIS et les
départements qui doivent largement financer les décisions que vous avez prises
? Ce contrat de confiance est la base même d'une compétence que nous souhaitons
toujours voir partagée entre l'Etat et les collectivités locales.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Vallet.
M. André Vallet.
Monsieur le ministre, l'insécurité n'est plus une menace, c'est une avalanche
: avalanche de mauvais chiffres, avalanche de protestations du personnel chargé
de la sécurité publique allant - fait rare ! - jusqu'à envahir la rue par
dizaine de milliers, avalanche de victimes apeurées, considérant que l'Etat ne
peut plus faire respecter la loi.
Je ne joindrai pas ma voix, monsieur le ministre, à ceux qui, trop hâtivement,
de mon point de vue, attribuent à ce Gouvernement et en particulier à vous-même
l'entière responsabilité de la situation.
Cette responsabilité est très certainement partagée. Cependant, de grâce,
monsieur le ministre, ne laissez plus vos amis politiques dire et écrire qu'il
ne s'agit que d'un phénomène de société, auquel il faudrait se résoudre, comme
si c'était quelque chose d'inexorable. Il s'agit d'un combat dans lequel tous
les responsables politiques, vous et nous, doivent s'impliquer au plus tôt.
C'est un problème de volonté et de courage, de force d'âme. Il faut prendre les
décisions qui s'imposent, et les prendre vite, en associant tous ceux qui, dans
notre pays, sont chargés d'assurer le respect de l'état de droit.
Monsieur le ministre, je vais très brièvement suggérer quelques mesures qui
pourraient, en peu de temps, inverser cette bien pénible situation.
Premièrement, il convient d'assurer, par la loi, l'aggravation des peines
lorsqu'un acte de violence est mené à l'encontre d'un représentant de
l'ordre.
Deuxièmement, il faut réformer l'ordonnance de 1945 quant à la délinquance des
mineurs. Il est certes nécessaire d'engager, quotidiennement, une action
résolue pour assurer l'insertion de la jeunesse en difficulté. Il est tout
autant nécessaire de ne plus permettre aux « sauvageons » d'accomplir leurs
actes en quasi-impunité.
M. Philippe Marini.
Très bien !
M. André Vallet.
Troisièmement, il convient de donner tous pouvoirs aux forces de l'ordre pour
assurer un très strict contrôle des armes à feu.
Quatrièmement, il faut réformer la loi sur la présomption d'innocence, qui a
certes pour mérite de vouloir humaniser la justice, mais qui a trois défauts
majeurs. D'abord, elle ignore totalement les victimes, ceux qui souffrent de la
disparition ou de la destruction de leurs biens, et qui souffrent parfois dans
leur chair. Ensuite, elle jette la suspicion sur le travail des policiers.
Enfin, elle alourdit la procédure.
« Le Parlement est le plus grand organisme qu'on ait inventé pour commettre
des erreurs politiques, mais elles ont l'avantage supérieur d'être réparables,
et ce dès que le pays en a la volonté », disait Clemenceau.
Cinquièmement, il convient d'engager rapidement, dès cette année, un plan
triennal de rénovation des commissariats de police, d'équipement en matériel et
en véhicules.
Sixièmement, il faut mettre les témoins à l'abri de toutes représailles. Qui
ignore, monsieur le ministre, qu'être témoin c'est, le plus souvent, s'exposer
à de longs ennuis et parfois à des représailles ? Dans certains quartiers,
propriété de bandes de jeunes et de moins jeunes, tout le monde sait qu'il vaut
mieux, en cas d'incident, ne rien voir et, surtout, ne rien dire.
Septièmement et dernier point, il faut donner aux maires une meilleure
information et assurer, avec eux, ce que j'appellerai la « tranquillité
publique », tout en laissant à l'Etat la responsabilité de la sécurité des
Français.
Ces mesures, qui n'ont pas obligatoirement une forte incidence financière,
suffiraient, monsieur le ministre, à changer l'opinion des Français sur ces
problèmes, à rassurer les forces de sécurité et à montrer votre volonté de
rétablir l'état de droit.
Monsieur le ministre, le droit à la sécurité a été durement conquis ; il a été
affirmé par la République. Ce n'est ni un don de la nature, ni un privilège du
destin.
(Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste et
du RPR.)
M. le président.
La parole est à Mme Olin.
Mme Nelly Olin.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avant tout,
je tiens à exprimer ma sympathie aux familles des deux policiers morts en
service au début du mois de novembre dernier, et des autres policiers que la
France a perdus cette année, au total, onze. A cet hommage, j'associerai les
gendarmes récemment victimes d'agression.
Monsieur le ministre, le budget qui nous est proposé est, hélas ! loin de
répondre à la triste réalité et au légitime droit qu'est la sécurité et que nos
concitoyens sont en droit d'attendre.
Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Je vous fais grâce de leur énumération,
mais, hélas ! ils sont tous en hausse de 28 % à 30 % depuis quatre ans.
Les premiers chiffres annoncés pour 2001 ne sont guère encourageants. Ils vont
dans le même sens, et aucune amélioration n'est pressentie, bien au
contraire.
La délinquance est, elle aussi, en sérieuse hausse.
Quant aux taux d'élucidation, ils sont en diminution constante.
Pour répondre à cela, que nous proposez-vous, monsieur le ministre ? Un
budget, certes en augmentation, mais en totale inadéquation avec la gravité de
la situation.
Vous annoncez la création de 3 000 postes, dont 1 000 emplois destinés à la
police de proximité, alors que 10 000 créations d'emploi sont nécessaires pour
pallier les 35 heures et les départs en retraite. C'est une annonce que je
qualifierai d'annonce au rabais !
Vous annoncez également un projet de loi de finances rectificative accroissant
les moyens de police. Mais, là aussi, nous attendons, et les policiers plus
encore que nous.
Les effets d'annonce ne suffisent plus. Monsieur le ministre, les policiers
sont dans la rue, et ils vous le font savoir. Ils manquent d'effectifs et de
moyens et leur vie est, chaque jour, mise en danger.
Aujourd'hui, il y a urgence à éliminer les zones de non-droit, mais aussi, ce
qui est nouveau, les zones de non-soins. Par manque de réalisme, par manque de
mesures et par manque de moyens, on voit aujourd'hui le résultat dans nos
villes et dans nos banlieues.
Quotidiennement, les sapeurs-pompiers doivent être escortés pour faire face à
la violence. Les médecins et les infirmières exerçant dans les quartiers
difficiles ont vu leurs missions évoluer. Ils contribuent pourtant à
l'amélioration de l'état des populations en difficulté. Les médecins doivent
pouvoir continuer à exercer dans ces quartiers difficiles, afin que, comme je
l'ai dit, les zones de non-droit ne deviennent pas des zones de non-soins.
Dans nos quartiers, l'insécurité devient envahissante et les populations se
sentent abandonnées. Le plus désolant, monsieur le ministre, c'est que,
aujourd'hui, les policiers se sentent également abandonnés. En 1997, M. Jospin
annonçait qu'après l'emploi la sécurité serait la priorité de son Gouvernement.
Ne mettant pas en doute sa parole, je constate néanmoins que sa politique est
un échec.
Dans le Val-d'Oise, département dont je suis l'élue, tous les commissariats
sont déficitaires s'agissant du personnel administratif, scientifique et
technique. Il manque huit cents agents.
Lorsque M. Jean-Pierre Chevènement a lancé la police de proximité, plus de 4
milliards de francs étaient prévus pour la police nationale ; 800 postes
supplémentaires de personnels administratifs étaient prévus ; nous en sommes
aujoud'hui, au mieux, à 350 postes.
A Garges-lès-Gonesse, ville dont je suis le maire, ou à Sarcelles, ville
voisine, il manque des dizaines d'effectifs et la police de proximité a
disparu. Que sont devenus les contrats locaux de sécurité, sinon des peaux de
chagrin ? La construction du poste de police à la gare de Garges-Sarcelles a
pris plus de deux ans de retard et je sais que, lorsqu'il sera construit, dans
un an peut-être, aucun effectif supplémentaire ne sera donné.
M. Philippe Marini.
Bravo !
Mme Nelly Olin.
Ils seront pris sur les effectifs de Garges-lès-Gonesse déjà en baisse sans
aucun espoir de les voir renforcés. En effet, les deux gardiens de la paix que
nous attendions ne viendront pas début décembre, quatre ADS viennent de
démissionner et cinq gardiens partent en retraite en janvier. Nous en sommes
donc à moins quinze par rapport à l'année dernière.
M. Philippe Marini.
Voilà du concret !
Mme Nelly Olin.
Inutile de vous rappeler, monsieur le ministre, que ce sont pourtant des
villes difficiles et, quels que soient les efforts de redressement entrepris,
tout sera compromis si la sécurité n'est pas assurée.
Vous ne voulez pas modifier l'ordonnance de 1945 sur les mineurs.
M. Roger Karoutchi.
Quelle erreur !
Mme Nelly Olin.
Pourtant, les violences répétées dans les quartiers nous conduiront un jour à
mettre effectivement en place le système de tolérance zéro.
Monsieur le ministre, dans nos quartiers, lorsque nous parlons des mineurs
délinquants, nous parlons de véritables voyous, voire de gangsters, pour la
plupart armés, et non plus de petits sauvageons.
Je vous rappelle que, dans le cadre du pacte de relance pour la ville, lancé
par Alain Juppé, des unités d'encadrement renforcé pour les délinquants mineurs
étaient prévues, ce que Mme Guigou avait largement relayé à la télévision,
lorsqu'elle était garde des sceaux, en annonçant des créations en nombre
important : des centaines par département, selon elle. Or, à ce jour, peu
d'unités ont été créées. Là aussi, ce sont des promesses vaines.
Quant aux sanctions, chacun sait combien de délinquants y échappent, et
l'impunité est donc chaque jour renforcée.
Quant à la mise en place d'une police de proximité, j'avais considéré qu'il
s'agissait d'une bonne idée. Le temps a prouvé que j'avais tort, car elle n'a
pas contribué à une meilleure sécurité de nos concitoyens. En effet, à peine
les effectifs étaient-ils arrivés sur le territoire qu'ils ont pour la plupart
été repris aux communes, très discrètement il est vrai, car le nombre des
effectifs reste un secret pour les maires à qui l'Etat considère qu'il peut
tout demander, mais sans rien justifier.
Les maires que nous sommes avons été contraints - oui, j'insiste : j'ai
personnellement été contrainte - de créer des polices municipales pour pallier
le manque d'effectifs.
Inutile de vous rappeler, monsieur le ministre, qu'une police municipale pèse
bien lourd dans nos finances locales et que pallier la carence de l'Etat n'est
pas un luxe que nous, villes pauvres, pouvons nous offrir.
Je souhaite évoquer un autre problème, aussi grave, mais dont personne n'a
encore parlé ce soir : l'islam intégriste. Il se développe dans nos banlieues,
avec des pouvoirs considérables et des moyens financiers colossaux. Il
constitue un véritable danger tant le travail de déstabilisation est fort.
Comment pouvons-nous tolérer sur notre territoire que des messages de haine
soient diffusés sans que personne n'intervienne ? Comment pouvons-nous garder
sur notre territoire des imams intégristes appelant à une pseudo-guerre sainte,
tenant des discours qui n'ont rien à voir avec le Coran, et payés par des pays
étrangers que je ne citerai pas ?
Monsieur le ministre, les musulmans de France ne le tolèrent pas ! Pourtant,
aucune sanction n'est prise.
Compte tenu du peu de moyens mis en oeuvre dans ce budget et de l'urgence
qu'il y a à régler les problèmes d'insécurité et d'intégrisme dans nos
banlieues, vous comprendrez, monsieur le ministre, que, si vous n'apportez pas
ce soir des preuves concrètes que les policiers pourront espérer demain un
meilleur devenir, je ne voterai pas ce budget.
(Applaudissements sur les
travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi
que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à Mme David.
Mme Annie David.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la sécurité
civile est, depuis plusieurs années, fortement sollicitée. Au-delà des feux de
forêts qui, chaque année, ravagent des milliers d'hectares, la France doit
faire face à des événements inédits : tempêtes spectaculaires de décembre 1999,
inondations de la Somme, naufrage de l'
Erika
, explosion de l'usine AZF
de Toulouse.
Lors de chacun de ces événements, nous avons pu apprécier la compétence et le
courage de ces professionnels, qui ont payé parfois de leur vie ces
interventions : trente-six sauveteurs sont décédés en service depuis l'année
dernière.
Ces événements ont également mis en lumière les lacunes de nos systèmes
d'intervention, les lourdeurs de nos structures et l'insuffisance de nos moyens
d'équipement.
C'est pourquoi les sénatrices et les sénateurs de mon groupe ne peuvent se
satisfaire d'une augmentation de 1,82 % du budget de la sécurité civile, qui ne
dissimule pas, en réalité, la stagnation des crédits depuis quelques années.
L'ampleur de ces événements, avec ses conséquences humaines, sociales,
économiques et environnementales, exigerait, au contraire, une implication plus
conséquente de l'Etat au titre de la solidarité nationale.
Il est clair, également, que c'est en direction de la prévention et de la
réparation qu'il faudrait concentrer les efforts.
Certes, le Gouvernement a commencé à mettre en oeuvre le vaste plan de
modernisation de la sécurité civile, rendu nécessaire tant par la fin du
service national - dont le présent budget achève le financement - que par
l'augmentation des interventions et l'échéance de la départementalisation.
Au-delà du plan de modernisation de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris,
dont le présent budget engage la première tranche, le projet de loi relatif à
la démocratie de proximité - qui devrait venir en discussion au Sénat en
janvier prochain - prévoit un premier train de réforme des services
départementaux d'incendie et de secours : à compter du 1er janvier 2006, le
département sera l'unique contributeur des SDIS, un système transitoire devant
fonctionner d'ici là.
Parallèlement, le Premier ministre a annoncé, lors du congrès national des
sapeurs-pompiers du 6 octobre 2001, le dépôt du projet de loi relatif à la
modernisation de la sécurité civile pour la fin de l'année ; vous nous avez
annoncé vous-même, monsieur le ministre, une enveloppe de 32,21 millions
d'euros dans l'attente du projet de loi de finances rectificative.
Si les délais apparaissent peu réalistes, il faut insister sur l'importance de
ce projet. Des questions restent cependant en suspens, qui nécessitent une
concertation plus approfondie avec les personnels.
En juin dernier, mon collègue député Bernard Birsinger avait attiré
l'attention sur les remplacements opérés dans les entreprises, depuis plusieurs
années, au nom d'économies budgétaires, des pompiers professionnels par des
personnels polyvalents, ainsi que sur les risques induits par de telles
stratégies.
Après l'accident de Toulouse, il apparaît d'autant plus nécessaire de rappeler
aux entreprises, spécialement aux entreprises à risques, la nécessité
d'accroître les moyens humains et matériels en la matière, sous le contrôle des
directions régionales de l'industrie et de la recherche, en liaison avec les
SDIS.
D'autre part, nous renouvelons le souhait que les compagnies d'assurance et
les sociétés à risques soient mises à contribution pour le financement des
SDIS, dont l'efficacité réduit le coût des sinistres.
Enfin, nous aimerions, monsieur le ministre, que vous nous éclairiez sur la
mise en oeuvre de la réduction du temps de travail chez les sapeurs-pompiers et
sur les moyens qui leur sont accordés compte tenu des sujétions particulières
auxquelles ils sont astreints.
(Applaudissements sur les travées du groupe
communiste républicains et citoyen ainsi que sur les travées
socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod.
Mon intervention, qui sera très brève, monsieur le ministre, sera axée sur
deux points qui tous les deux ont trait à la protection de nos populations.
Le premier concerne la réorganisation des services d'incendie et de
secours.
La réforme récente, avec la « départementalisation », a certes abouti, dans
bien des cas, à une rationalisation très satisfaisante des systèmes
d'intervention, mais, dans des cas beaucoup plus nombreux, semble-t-il, elle a
entraîné une augmentation - toujours justifiée - du coût total des services
départementaux d'incendie et de secours.
Le problème est de savoir si l'accroissement de ce coût est directement et
proportionnellement lié à l'augmentation de l'efficacité. Or je ne suis pas
absolument certain que la multiplication sans frein des états-majors réponde
exactement à cette perspective. Ainsi, pour vous avoir entendu voilà peu de
temps au congrès de la fédération des sapeurs-pompiers, à Rennes, je souhaite
savoir quel « oeil » porte votre ministère, qui assure la responsabilité
générale de notre sécurité, sur un certain nombre de dérives qui, ici ou là,
commencent à prendre des proportions que certains jugent inquiétantes, surtout,
bien entendu, chez ceux qui paient, c'est-à-dire, théoriquement, pour
l'ensemble des communes de chaque département.
Certains départements ont abouti à un
modus vivendi
avec les conseils
généraux, afin que les chocs financiers ne soient pas trop grands. Mais, dans
d'autres départements, que je connais bien, malgré les précautions prises et
l'engagement fort du conseil général, l'augmentation de la contribution
courante des communes a atteint de 20 % à 25 %.
Une telle situation peut être supportée une année, voire deux, mais elle
commence à l'être difficilement la troisième et risque d'être insupportable la
quatrième. Dans la mesure où la qualité de la protection s'améliore, nous
pouvons l'expliquer à nos concitoyens. Mais, si nous leur disons qu'il s'agit
simplement de renforcer les moyens des états-majors, certains d'entre eux
commencent à nous poser des questions parfois gênantes.
Ma seconde question a trait plus largement à ce que l'on appelle la sécurité
civile.
Ayant eu l'honneur de succéder à Maurice Schumann à la tête du Haut comité
français de défense civile, j'ai tendance à étendre un peu la définition que
recouvre le terme pour passer de la simple protection à une conception de
défense, car il faut tenir compte du changement de mentalité qui s'est opéré
chez nos concitoyens dans l'appréhension de l'environnement dans lequel ils
vivent, que cet environnement soit naturel, technologique ou, hélas ! de
caractère terroriste, comme on dit aujourd'hui, même si, pour ma part, je
considère qu'il s'agit moins de terrorisme dans le sens classique du terme que
d'une guerre non déclarée par des moyens conventionnels.
Avons-nous pris, monsieur le ministre, suffisamment conscience - au sein de
votre ministère, en particulier - du fait que l'on ne peut se préparer aux
situations qui vont découler de l'existence de cette menace latente - et
parfois précise - qui pèse sur nous tous ?
Nous devons nous préparer à être en permanence « inquiets », non pas au sens
de la peur ou de la terreur préventive, mais dans le sens du non-repos
intellectuel et de la veille permanente. Or je ne suis pas certain, pour
prendre un exemple, que la manière dont sont menés dans notre pays les
exercices destinés à faire face à des difficultés majeures issues soit d'une
catastrophe naturelle soit d'un acte de malveillance organisé correspondent
exactement à ce que nous devrions en attendre.
J'ai assisté à trop d'exercices de sécurité civile, préparés des semaines,
voire des mois à l'avance, pour savoir que, même lorsqu'ils connaissent la
nature des événements qui vont se dérouler et auxquels il leur faudra faire
face, les responsables s'occupent surtout du positionnement, avant le
déclenchement de l'alerte, de leurs moyens d'intervention et, par conséquent,
de la manière dont ils seront notés une fois que l'on aura fini de lire leur
rapport pour constater que tout s'est bien passé.
Un exercice où tout s'est bien passé est un mauvais exercice ! N'avons-nous
pas, au sein de nos administrations, un peu trop de quiétude et pas assez
d'inquiétude ? S'inspirera-t-on un jour enfin de la manière dont les Américains
mènent ce genre d'exercice, ce qui leur a permis d'évacuer 30 000 personnes du
World Trade Center au cours de l'heure qui s'est écoulée entre le choc des
avions et l'effondrement des tours ?
Des sociétés spécialisées, ne dépendant pas du Gouvernement, devraient
préparer de telles simulations, en en compliquant au fur et à mesure le
déroulement, afin d'anticiper sur les éventuels dysfonctionnements. Mais je ne
suis pas sûr que notre administation soit préparée à une telle éventualité ! Je
souhaite, pour ma part, que le concept d'inquiétude y soit plus largement
développé.
(Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste,
du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Karoutchi.
M. Roger Karoutchi.
Monsieur le président, mes chers collègues, après tout ce qui a été dit ce
soir, je serai relativement bref.
Entre 1996 et 2000, les coups et blessures volontaires et les vols avec
violence, c'est-à-dire les actes qui, en réalité, créent le climat d'insécurité
chez nos concitoyens, ont augmenté de 42 %. Dans le même temps, d'après les
statistiques fournies par le ministère de l'intérieur, les effectifs réels de
police, hors personnel administratif, ont augmenté de 1 %.
Une augmentation des actes violents de 42 %, pour 1 % de policiers
supplémentaires ! En quatre ans, le ratio, diraient les financiers, ne me
paraît pas avoir évolué dans le sens de la maîtrise de la délinquance !
Alors, bien sûr, monsieur le ministre, une augmentation de 2 % des effectifs
pour 2002, ce n'est pas négligeable. Mais est-ce à la hauteur des défis ?
Alors, bien sûr, une augmentation de 4,5 % des engagements financiers, ce
n'est pas négligeable. Mais, lorsque l'on décompte l'inflation, le coût des
mesures salariales, surtout avec les rallonges de ces derniers jours, et le
coût de la réduction du temps de travail, a-t-on plus ou même autant de
policiers sur le terrain ?
Monsieur le ministre, contrairement peut-être à d'autres, quoiqu'en ait dit M.
Peyronnet tout à l'heure, ce n'est pas vous personnellement que nous mettons en
cause. Pour ma part, je considère même, je l'ai déjà dit en d'autres occasions,
que vous avez fait la démonstration, dans le cadre de vos fonctions, de votre
volonté d'accorder des moyens à la police et je n'ignore pas que vous avez, à
plusieurs reprises, manifesté votre attachement à l'autorité de l'Etat
républicain.
Mais, à gauche, vous n'êtes pas seul ! Etes-vous suivi entièrement par vos
amis politiques ?
(Oui ! sur les travées socialistes.)
Mme Nelly Olin.
Sûrement pas tous !
M. Roger Karoutchi.
Etes-vous suivi par Bercy ?
Nous avons tout de même souvent le sentiment que, au sein de la gauche
plurielle, on a davantage tendance à qualifier d'« autoritaires » ceux qui sont
pour l'autorité, et de « sécuritaires » ceux qui sont pour la sécurité. Et,
franchement, ce ne sont pas les récentes prises de position de vos amis Verts
qui peuvent nous rassurer !
Les statistiques du ministère de l'intérieur montrent que le nombre de mineurs
mis en cause a augmenté de près de 80 % entre 1990 et 2000. Mais il ne faut
surtout pas toucher à l'ordonnance de 1945, fût-ce à la marge, sur des points
qui permettraient de régler des problèmes quotidiens de sécurité, et sans qu'il
soit pour autant question d'adopter des solutions extrêmes, dont nous ne
voulons d'ailleurs pas.
Les statistiques du ministère montrent que les crimes et délits ont augmenté
de plus de 9,5 % entre le premier semestre 2000 et le premier semestre 2001.
Mais il ne faut surtout pas trop parler d'insécurité ou de sentiment
d'insécurité, parce qu'on s'expose alors à porter la responsabilité de
l'alarme.
Tout à l'heure, cher collègue Jean-Claude Peyronnet, vous avez dit que la
droite, c'était ça, que c'était elle qui portait cette responsabilité.
Eh bien, pour moi, au moins une partie de la gauche et une partie du
Gouvernement sont affectées par le syndrome de Darios. Chacun se souvient de ce
souverain perse achéménide qui avait pour fâcheuse habitude de faire exécuter
les messagers porteurs de mauvaise nouvelle, considérant que c'était un moyen
d'effacer la nouvelle. C'est ainsi que ce roi ô combien mémorable avait, après
la défaite de Marathon contre les Grecs, fait exécuter le messager.
En fait, la gauche et le Gouvernement accusent la droite d'être la porteuse
des mauvais messages. Comme si c'était la droite qui créait l'insécurité parce
qu'elle la dénonce ! Comme si l'on pouvait faire diminuer la délinquance en
évitant de la signaler ! Tout cela n'est pas très sérieux...
Ces dernières semaines, plus de 40 000 policiers, de droite et de gauche, ont
manifesté dans les rues pour demander des moyens humains et matériels leur
permettant d'accomplir leur mission. Mais il ne faut surtout pas parler de
malaise de la police ou de la gendarmerie !
Les statistiques nous annoncent, concernant la police, 30 000 départs à la
retraite dans les toutes prochaines années. Que se passera-t-il ? Faudra-t-il
fermer des commissariats ou ne les ouvrir qu'à certaines heures ? Je crois
savoir, monsieur le ministre, qu'un commissariat a fermé le 14 octobre dernier
à Poitiers, faute d'effectifs. Tout cela alors que, dans son rapport de 1999,
la Cour des comptes estimait à 10 000 le nombre de policiers affectés à des
tâches indues. Ce serait déjà un vrai soulagement s'ils étaient réaffectés,
notamment grâce à des créations de postes administratifs.
Les actes de délinquance dans le métro parisien ont augmenté de 27 % pour le
seul premier semestre 2001. Certes, un pas a été fait avec la coordination des
forces par le préfet de police, mais il n'y a toujours pas de police régionale
des transports.
Monsieur le ministre, pour apporter des réponses aux policiers, aux gendarmes,
aux juges, à l'ensemble des Français, écoutez donc ce que vous disent les élus,
de droite mais aussi de gauche. Ouvrez donc le débat sans tabou ni
a
priori
. Si nous voulons éviter les surenchères, comme semblait le souhaiter
M. Peyronnet, il faut que tous les thèmes, de la tolérance zéro à
l'accroissement du pouvoir des maires, de la participation financière des
collectivités locales pour les équipements de sécurité - au demeurant, beaucoup
de collectivités en apportent déjà une - à la redéfinition du rôle de la police
nationale, des risques liés à la « ghettoïsation », dont parlait Nelly Olin
tout à l'heure, à l'approche de nouveaux modes de vie de nos concitoyens,
soient abordés de manière ouverte, à la fois sans exclusive et sans excès.
La vérité, c'est que la sécurité, et vous avez raison sur ce point, monsieur
le ministre, n'est ni de gauche ni de droite. C'est un bien pour tous les
Français. La difficulté, c'est de les écouter tous.
(Applaudissements sur
les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste,
ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Zocchetto.
M. François Zocchetto.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis
plusieurs années, le Gouvernement affiche la sécurité comme un axe prioritaire
de sa politique.
Or force est de constater que, malgré cet affichage, la volonté politique ne
se perçoit pas sur le terrain.
Les chiffres officiels, que je ne rappellerai pas, sont clairs. Il révèlent
une augmentation, une diffusion de la délinquance et de la criminalité, en même
temps qu'une aggravation dans leurs formes. Parmi les faits constatés, les
actes commis avec violence sont de plus en plus fréquents. Les destructions et
dégradations progressent de façon inquiétante, tout comme les infractions avec
coups et blessures volontaires et les vols à main armée.
L'augmentation préoccupante du nombre de mineurs mis en cause est l'autre
caractéristique de cette recrudescence spectaculaire de la délinquance.
Cette situation nous rappelle une évidence : contrairement à ce que d'aucuns
prétendent, l'insécurité n'est pas un sentiment, c'est bien une réalité
quotidienne pour des millions de Français. Et désormais, ce phénomène ne se
limite pas aux zones urbaines : l'évolution du nombre de faits constatés en
zones rurale et péri-urbaine est alarmante.
Notre conclusion est sans appel : le Gouvernement a échoué dans un domaine
régalien auquel il a pourtant prétendu donner une large priorité.
Il y a quelques années, le redéploiement des effectifs sur la voie publique
était présenté comme un des piliers de l'action gouvernementale en matière de
sécurité publique. En avril 1998, un excellent rapport - un de ses auteurs, M.
Jean-Jacques Hyest, m'a précédé ce soir à cette tribune - se concluait sur
soixante-cinq propositions. Aucune suite sérieuse n'a été donnée à ce travail.
L'abandon de cette réforme me paraît symptomatique de la méthode du
Gouvernement consistant à afficher publiquement des objectifs tout en rejetant
les moyens d'y parvenir.
Autre problème très préoccupant : le profond malaise des fonctionnaires de
police, qui n'ont vraiment pas l'impression, eux, depuis quelques années,
d'être la priorité du Gouvernement.
Il semble que l'approche du printemps prochain ait facilité les contacts et le
déblocage en urgence de crédits supplémentaires. Pourtant, on ne peut qu'être
surpris devant ce qui s'apparente fort à de l'improvisation quand on sait la
gravité de la situation de ces personnels.
Que dire des incohérences de la politique gouvernementale, prise en tenaille
entre des départs massifs à la retraite et la mise en oeuvre chaotique des 35
heures ? Comment ne pas comprendre la réaction des forces de l'ordre face à
cette dégradation continue de leurs conditions de travail ?
Il est vrai que le travail des policiers et des gendarmes n'est pas facilité
par l'attitude de certains magistrats. Sur ce point, je souhaite vous poser une
question, monsieur le ministre : comment peut-on admettre qu'un syndicat qui
dit représenter 30 % des magistrats appelle les juges à ne pas appliquer la loi
?
M. Gérard Longuet.
Oui, c'est surprenant !
M. François Zocchetto.
Je veux parler des mesures antiterroristes que vous nous avez présentées il y
a peu et que nous avons tous, ou quasiment tous, votées avant qu'elles ne
soient définitivement adoptées à l'Assemblée nationale. Là, nous sommes en face
de très graves dérèglements de nos institutions et, malheureusement pour vous
et votre collègue garde des sceaux, ces graves dérèglements doivent être
assumés par le Gouvernement.
Voilà quelques raisons, mais elles sont majeures à mes yeux, pour lesquelles,
monsieur le ministre, je ne pourrai pas apporter mon soutien au budget de la
sécurité que vous nous présentez.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Monsieur le président, messieurs les
rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, comme vous le souhaitez, je ne
vais pas faire devant vous un exposé rappelant les points forts du budget du
ministère de l'intérieur en 2002. Je vais plutôt revenir sur différents sujets
que vous avez évoqués.
J'insisterai, bien entendu, sur les éléments nouveaux intervenus depuis mon
passage devant les commissions des finances et des lois de votre assemblée,
notamment la préparation du projet de loi de finances rectificative et l'accord
conclu le 29 novembre dernier avec les syndicats de police.
Pour simplifier mon propos, je le diviserai en trois parties : premièrement,
les questions de police ; deuxièmement, les questions relatives à la sécurité
civile ; enfin, troisièmement, les moyens et la gestion des préfectures.
Actualité oblige, je commence par les questions de police. Après vous avoir
écoutés, il me semble que plusieurs mises au point sont indispensables pour
éclairer nos débats.
L'accord qui a été passé dans la nuit de jeudi à vendredi dernier avec les
représentants des personnels de la police nationale répond, je crois, à de
nombreuses critiques que j'ai entendues ici aujourd'hui et que j'ai lues dans
les rapports de MM. de Montesquiou et Courtois.
Le Gouvernement a en effet adressé jeudi soir aux policiers un signe fort de
reconnaissance de la qualité et de l'utilité de leur travail au sein de la
société. Car c'est bien au sein de la société que montent la délinquance et la
violence.
En 2002, les mesures nouvelles indemnitaires et catégorielles pour les
personnels de la police nationale atteindront plus de 1,1 milliard de
francs.
C'est la raison pour laquelle une ouverture de crédits supplémentaires de 772
millions de francs vous sera soumise ce soir par voie d'amendement, venant
s'ajouter aux 361 millions de francs déjà prévus dans la loi de finances.
M. Philippe Marini.
Prélevés sur quoi, ces crédits supplémentaires ?
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
J'imagine, monsieur Marini, que vous ne
souhaitez pas une augmentation des dépenses publiques, vous qui êtes plutôt
partisan de les « raccourcir » toujours un peu plus !
M. Jean-Pierre Schosteck,
rapporteur pour avis.
Nous aimerions des redéploiements !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
C'est une manière de répondre également à M. de
Montesquiou, qui parlait du « paradoxe de Vaillant » ; excusez-moi, mesdames,
messieurs de la majorité sénatoriale, mais ce n'est pas un moindre paradoxe que
de vous entendre en permanence dire : « Trop de dépenses publiques ! Trop de
déficits ! » et de vous voir toujours prêts à dilapider les deniers publics !
Il n'y en a jamais assez !
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
Or, nous, nous dotons la police nationale des moyens...
M. Jean-Pierre Schosteck,
rapporteur pour avis.
Nous, nous préférons les redéploiements !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
... que vous lui refusiez à l'époque où vous
étiez aux responsabilités !
M. Philippe Marini.
Les moyens, vous les avez surtout pour les 35 heures !
M. Claude Domeizel.
Vous êtes contre ?
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Ces crédits supplémentaires permettront la
poursuite de la réforme du régime indemnitaire des gradés et des gardiens, avec
en particulier le doublement, au 1er janvier prochain, de l'allocation de
maîtrise.
Les officiers bénéficieront d'une revalorisation très significative de leur
carrière, comme le demandent d'ailleurs vos rapporteurs, et d'une nouvelle
amélioration de leur régime indemnitaire.
La grille des commissaires sera également revue et une nouvelle bonification
indiciaire leur sera attribuée lorsqu'ils occupent les postes les plus
difficiles.
Enfin, les personnels administratifs, techniques et scientifiques se voient
également attribuer une enveloppe significative.
Je précise que toutes ces mesures ont été adoptées par les syndicats
majoritaires dans les trois corps, gradés et gardiens, officiers, commissaires,
ainsi que par les syndicats des personnels administratifs.
Ces mesures supplémentaires visent à mieux compenser les charges de travail et
les risques encourus par les policiers. Les gardiens de la paix auront ainsi
une rémunération augmentée de 8 600 francs par an en 2002. Un gardien de la
paix titulaire affecté à Paris en début de carrière gagnera donc, primes
incluses, plus de 10 000 francs nets par mois l'année prochaine.
Différentes propositions ont également été retenues pour renforcer la place de
la police nationale dans la société. Une mission a été créée à cet effet. Dès
l'année prochaine, une journée de la police nationale sera organisée sur
l'ensemble du territoire. Ces mesures sont utiles pour signifier la
reconnaissance de la société envers les policiers.
Sachez que cet accord a également permis d'adopter un plan d'action renforcée
contre la violence qui prévoit un renforcement de la présence policière sur la
voie publique et un plan de lutte contre le trafic d'armes sur l'ensemble du
territoire. Ce dernier point répond, vous le savez, à une demande forte des
policiers, mais aussi de l'ensemble de nos concitoyens.
Ce plan définit aussi cent nouveaux sites sensibles où seront engagées des
actions ciblées répressives, complémentaires de la police de proximité. J'ai
déclenché cette première expérience en janvier 2001 sur quatorze sites. Et l'on
voit bien à quel point ces opérations, préparées en amont à la fois par la
hiérarchie policière et par la hiérarchie juridiciaire, donnent de bons
résultats. Dans tous les quartiers où elles ont été développées, par exemple,
au Pigeonnier à Amiens, à Nice ou à Strasbourg, les petits caïds de quartier
sont déstabilisés. Il nous faut donc poursuivre.
Je n'admettrai jamais que l'on dise qu'il y a dans notre pays des zones de
non-droit, des zones où les policiers ne peuvent pas aller. C'était ainsi, mais
cela n'est plus possible aujourd'hui et cela ne le sera plus.
(Exclamations
sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants, de l'Union centriste,
ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Robert Bret.
C'était vrai du temps de la droite !
M. Dominique Braye.
Quel angélisme ! Venez chez nous ! Cela dure depuis cinq ans !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Ce plan permettra également d'assurer une
meilleure protection des policiers, avec la dotation en gilets pare-balles de
tous les personnels sur la voie publique et la mise en place d'un dispositif
d'assistance juridique renforcée pour les fonctionnaires de police.
M. Philippe Marini.
Une heureuse découverte !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Si je suis conduit à donner à chaque policier,
sur la voie publique, un gilet pare-balles, c'est bien parce qu'il n'en avait
pas et cela ne date pas d'hier !
(Exclamations sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants, de
l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Philippe Marini.
Cela fait près de cinq ans que vous êtes là ! Vous auriez dû vous en rendre
compte plus tôt !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Sachez également que la Chancellerie a adressé
le 28 novembre dernier une circulaire de politique pénale rappelant aux
parquets les dispositions pénales applicables en cas d'agressions contre des
agents des forces de l'ordre.
Je vous rappelle que le Gouvernement prépare un plan d'action stratégique pour
la police nationale pour les cinq prochaines années, évoqué également dans
l'accord de la semaine prochaine...
M. Bruno Sido.
Trop tard !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
... mais avec une phase d'application immédiate,
celle du plan d'action renforcée qui s'appliquera dès 2002.
Ce document, qui répondra, je l'espère, au souhait de M. Bret, fera un
diagnostic de la situation actuelle et tirera les conséquences pour la sécurité
intérieure des évolutions de la délinquance depuis deux ans et de l'élévation
des menaces terroristes à la suite des attentats du 11 septembre.
A partir de ce constat et de cette analyse prospective, les missions
prioritaires de la police nationale et les adaptations à apporter à
l'organisation et au fonctionnement de ses structures seront définies.
Ce plan d'action stratégique permettra enfin d'apprécier les besoins
supplémentaires à satisfaire dans les cinq prochaines années. Il fournira un
cadre de référence extrêmement utile pour assurer plus de sécurité à nos
concitoyens. Il pourra servir de base à l'élaboration, en 2002, d'une loi de
programmation sur la sécurité intérieure que certains d'entre vous appellent de
leurs voeux, semble-t-il. Le Gouvernement, vous le constatez, prépare
l'avenir.
M. Dominique Braye.
Il est grand temps !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Je veux bien travailler à l'élaboration d'une
loi de programmation, pour peu qu'il y ait les moyens et qu'elle ne reste pas
lettre morte comme la loi d'orientation et de programmation relative à la
sécurité, la LOPS, que vous avez soutenue et votée.
M. Jean-Pierre Bel.
Bravo !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Au total, cet accord répond, je crois, à
plusieurs des causes du malaise policier, souligné dans vos rapports.
Sur un plan strictement budgétaire, l'effort supplémetaire consenti depuis le
vote du budget de l'intérieur à l'Assemblée nationale est très significatif :
680 millions de francs au titre de la loi de finances rectificative pour 2001
et 772 millions de francs de mesures nouvelles supplémentaires pour les
rémunérations des fonctionnaires, présentées par amendement à la loi de
finances initiale.
M. Philippe Marini.
C'est un redéploiement !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Monsieur le sénateur, pour la police nationale,
c'est un élément essentiel, qui va dans le sens de la priorité du Gouvernement
et de ce que vous souhaitez. J'espère donc, bien évidemment, bénéficier de
votre soutien.
Ce sont au total près de 2,5 milliards de francs supplémentaires pour la
police en 2002. L'importance des mesures décidées ne peut être comparée qu'au «
plan Joxe » de modernisation de la police en 1985.
Vous devez, je crois, vous en réjouir. En tout cas, en venant présenter au
Sénat la loi de finances dans ces nouvelles conditions, je pensais recueillir
un assentiment, tant la demande était forte de la part des policiers et de la
majorité à l'Assemblée nationale.
M. Dominique Braye.
Vous n'avez que des mauvais résultats !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
C'était aussi une demande de la commission des
finances et de la commission des lois du Sénat. Je pensais donc présenter des
éléments qui allaient donner satisfaction sur toutes les travées de la Haute
Assemblée.
M. Dominique Braye.
Mais on regarde les résultats, monsieur le ministre !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Mais peut-être partagez-vous l'opinion de M.
Nicolas Sarkozy, qui estime que le problème de la sécurité n'est pas une
question d'effectifs et ni de moyens ».
M. Dominique Braye.
Absolument !
M. Philippe Marini.
Il ne faut jamais extraire des propos de leur contexte !
M. Jean-Pierre Schosteck,
rapporteur pour avis.
Il faut tout dire ! Votre citation est partielle
!
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Vous réagissez, mais j'ai constaté un
silence.
M. Philippe Marini.
C'est un problème de justice et non de police !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Je dois dire que le communiqué de votre
commission des finances de ce matin m'a également plongé dans l'expectative.
M. Dominique Braye.
Il faut tout dire. C'était partiel !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Partial, avez-vous dit ?
(Sourires.)
Dans le contexte actuel, comment pouvez-vous dire que le nombre de policiers
augmente et que le nombre d'heures travaillées diminue ?
M. Philippe Marini.
Eh oui !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Les policiers sur le terrain, ceux qui mettent
en oeuvre chaque jour Vigipirate, ceux qui assurent la sécurité du passage à
l'euro et devront à ce titre renoncer à leurs congés cet hiver, ceux, surtout,
qui ont vu leurs collègues tomber à leurs côtés dans la lutte contre la
délinquance, n'apprécieraient pas ces propos s'ils étaient confirmés et encore
moins ces jugements.
M. Dominique Braye.
Pas de violons, de grâce !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Au moment où les métiers de la sécurité
traversent dans nos sociétés une véritable crise morale et où est posée la
question de la place reconnue aux policiers et aux gendarmes dans notre
société, gardons-nous, mesdames, messieurs les sénateurs, d'appréciations
péremptoires qui ne font qu'aggraver le malaise.
La meilleure réponse que nous puissions collectivement apporter, c'est d'abord
de témoigner du respect pour le travail des policiers.
Mme Nelly Olin et M. Dominique Braye.
On en est d'accord !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Pour conclure sur ce point et en revenir au
débat budgétaire, je tiens aussi à souligner que l'accord du 29 novembre doit
trouver son financement dans le cadre du projet de loi de finances initiale
pour 2002. C'est la raison pour laquelle un amendement est, ce soir, soumis à
vos suffrages pour ouvrir 772 millions de francs supplémentaires sur les
chapitres de rémunération de la police nationale.
Le Gouvernement fait ainsi la preuve qu'il a su entendre les revendications
des policiers en réagissant rapidement et conformément au droit budgétaire, en
amendant le projet de loi de finances.
J'ajoute que l'objectif de maîtrise de nos finances publiques n'est pas remis
en cause, puisque cette ouverture de crédits sera gagée. Le budget du ministère
de l'intérieur sera évidemment mis à contribution, avec une annulation de 100
millions de francs soumise à vos suffrages tout à l'heure. Le reste du gage
vous sera prochainement présenté.
Il ne s'agit pas d'un chèque en blanc, encore moins d'une traite sur l'avenir.
Contrairement à ce que vous écrivez, monsieur de Montesquiou, le Gouvernement a
fait de la sécurité une priorité de son action.
(Exclamations sur les travées du RPR.)
MM. Alain Joyandet et Dominique Braye.
Ce n'est pas vrai ! Votre priorité, ce sont les 35 heures !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Il assume pleinement ce choix et le traduit en
actes concrets et en mesures financées.
Je pense que ces propos ne sont pas de nature à vous gêner.
Le Gouvernement a su, en quelques mois à peine,...
M. Dominique Braye.
Vous ne savez pas compter, monsieur le ministre !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
... apporter une réponse législative rapide et
efficace avec le vote de la loi sur la sécurité quotidienne.
Il a également donné une réponse politique forte avec l'accord du 29 novembre
et le plan d'action renforcée contre la violence.
Mme Nelly Olin.
C'est ce que vous dites !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Il apporte ce soir une réponse budgétaire
ambitieuse et concrète aux attentes des policiers et de nos concitoyens avec un
projet de loi de finances renforcé pour 2002.
En vous écoutant et en lisant vos rapports, messieurs Courtois et de
Montesquiou, il m'a également semblé nécessaire de rappeler quelques éléments
précis sur la police de proxmité, qui me semble injustement critiquée
aujourd'hui.
Je dois souligner une nouvelle fois le caractère extrêmement récent de cette
réforme.
La première vague n'a été réellement mise en oeuvre qu'il y a un peu plus d'un
an, à l'automne 2000, au moment même où j'arrivais au ministère de l'intérieur.
La troisième ne se mettra en place qu'au début de l'année prochaine.
S'agissant des moyens des trois vagues de police de proximité, il est faux de
dire ou d'écrire, comme M. Courtois, que cette politique repose entièrement sur
des emplois-jeunes. Sachez que 1 646 gardiens de la paix ont été affectés en
2000 dans les circonscriptions de première phase, puis 1 150 dans celles de la
deuxième phase, auxquels s'ajoutent plus de 500 personnels administratifs
permettant de redéployer des personnels actifs vers la voie publique.
M. Dominique Braye.
On doit être dans la dixième phase !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Enfin, il est prévu d'affecter au début de
l'année prochaine 1 000 gardiens supplémentaires dans les 219 circonscriptions
non couvertes à ce jour.
Pour que votre information soit complète, sachez également qu'entre le 1er
janvier 2000 et le 1er janvier 2002, les effectifs opérationnels de gardiens de
la paix, c'est-à-dire sans compter les élèves, seront passés de 89 998 au 1er
janvier 2000 à 93 587 au 1er janvier 2002, soit une hausse de 3 589 en 2 ans.
J'ai ainsi l'occasion de répondre à MM. Karoutchi et Zocchetto, que, avec ce
gouvernement, tous les départs à la retraite sont compensés et que les chiffres
mentionnés à l'instant correspondent à des effectifs supplémentaires.
M. Philippe Marini.
Pour compenser les 35 heures !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Or, vous le savez bien, la politique budgétaire
du gouvernement Juppé que vous souteniez n'avais pas prévu les remplacements
des départs à la retraite.
(Protestations sur les travées du RPR, de l'Union centriste, des Républicains
et Indépendants ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Dominique Braye.
Cela fait cinq ans que vous nous dites cela !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Je sais bien que cela vous gêne ! Mais je ne
suis pas là simplement pour vous donner raison quand vous ne dites pas la
vérité !
M. Philippe Marini.
Assumez vos cinq années de responsabilité ! C'est vrai que c'est difficile
!
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Depuis que ce gouvernement est en place, sa
politique vise à remplacer les départs à la retraite, ce que vous n'aviez pas
prévu.
M. Jean-Pierre Schosteck,
rapporteur pour avis.
Mais non !
M. Dominique Braye.
La délinquance n'a jamais autant augmenté !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Les adjoints de sécurité viennent renforcer ces
forces avant de rejoindre, pour un grand nombre d'entre eux, les rangs des
gardiens de la paix.
Quant aux moyens de fonctionnement de la police de proximité, une mesure
nouvelle est prévue dans ce budget, en plus des dotations des deux premières
phases qui sont consolidées. Les dotations en moyens logistiques se situent à
un niveau conforme aux nécessités opérationnelles.
M. Alain Joyandet.
C'est dramatique d'entendre cela !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Sachez, notamment, que, au terme de la réforme,
ce sont près de 900 implantations immobilières nouvelles qui auront été créées
dans les secteurs de la police de proximité.
M. Dominique Braye.
C'est scandaleux !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Non, ce n'est pas scandaleux de créer 900
implantations nouvelles au service de la sécurité de nos concitoyens !
M. Philippe Marini.
C'est ce qu'on entend globalement qui est scandaleux !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Près de 4 000 véhicules supplémentaires à deux
et quatre routes auront également été achetés en deux ans.
M. Dominique Braye.
Il faut parler globalement ! Ce que vous dites est scandaleux !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
J'ajoute que les coûts de la police de proximité
sont parfaitement connus et à la disposition de la représentation nationale.
Je m'étonne donc de la remarque de M. de Montesquiou.
M. Philippe Marini.
Pas moi !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Je préside moi-même chaque trimestre depuis un
an un comité de pilotage qui fait le point sur l'avancement précis de cette
réforme, à partir de documents très détaillés. J'ai encore tenu une réunion
hier sur ce sujet, pendant plus de deux heures.
Enfin, je crois qu'il est inexact de dire que les personnels n'adhèrent pas à
cette réforme. Lors de mes visites fréquentes sur le terrain, j'entends plutôt,
pour ma part, des encouragements à continuer et, bien entendu, à aller plus
loin.
Notre objectif est qu'à l'issue de la mise en place de la troisième phase, les
effectifs aient augmenté de 7 à 8 % dans chaque zone, dans chaque
circonscription de police de proximité. Voilà pourquoi nous procédons à des
recrutements supplémentaires, voilà pourquoi les écoles de police tournent à
plein, alors qu'elles ne tournaient qu'à moitié il y a quelques années.
L'effort de formation très important qui accompagne cette réforme de fond
permettra de lever les derniers doutes si, par malheur, ils subsistaient
encore.
Au total, vos critiques sur la police de proximité me semblent, très
honnêtement, contestables, d'autant plus qu'elles ne s'accompagnent d'aucune
proposition novatrice, d'aucune piste de réflexion sur l'avenir de la police
nationale.
J'ai bien lu vos rapports. J'ai bien cherché. Mais je n'ai rien trouvé, à part
le rappel des propositions de M. Schosteck sur la « municipalisation » de la
police nationale, propositions sur lesquelles je me suis longuement exprimé
lors de l'examen de la loi sur la sécurité quotidienne. C'est dommage ; c'est
même préoccupant.
Monsieur Schosteck, si j'ai signé un accord avec des organisations
majoritaires le 29 novembre, l'ensemble des syndicats, y compris ceux qui n'ont
pas signé l'accord que je leur ai proposé, sont contre une politique visant à
municipaliser la police, donc à la démanteler. Je tiens à le dire devant la
Haute Assemblée.
M. Philippe Marini.
Qui a le pouvoir ? Les ministres ou les syndicats ?
M. Jean-Pierre Schosteck,
rapporteur pour avis.
Ce n'est pas ce qu'on avait proposé !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
C'est pourtant bien comme cela que les choses
ont été perçues !
M. Jean-Pierre Schosteck,
rapporteur pour avis.
Par vous !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
J'en viens à l'aménagement et à la réduction du
temps de travail dans la police nationale.
Vos rapporteurs estiment qu'il est impossible de maintenir le potentiel
opérationnel de la police tout en passant aux 35 heures. Pour analyser
complètement cette question - analyse qui ne figure pas, sauf erreur, dans vos
rapports, faute sans doute d'une connaissance précise de l'activité des
services de police -, je vous rappelle qu'il faut d'abord partir de la
situation réelle du temps de travail des agents et, ensuite, prendre en compte
la durée du nouveau cycle de travail, l'octroi des jours ARTT, les créations
d'emplois, les jours rachetés et, enfin, la mise en place d'outils comme le
compte épargne-temps, qui permettra de lisser dans le temps l'effet de cet
ARTT. La concertation en cours avec les personnels, dont certains éléments
fondamentaux ont été fixés dans l'accord du 29 novembre, porte sur l'ensemble
de ces points.
M. Philippe Marini.
Si vous vous occupiez de sécurité pendant ce temps-là ?
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
La question des heures supplémentaires, évoquée
à plusieurs reprises par vos rapporteurs, est également posée. Un groupe de
travail a été créé afin d'en évaluer l'importance, de façon précise et
contradictoire, et de faire des propositions sur les modalités d'une résorption
progressive.
M. Philippe Marini.
C'est vraiment du temps de perdu !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Je relève d'ailleurs une discordance entre les
travaux de vos rapporteurs sur ce point, puisque le stock d'heures
supplémentaires est évalué à 9,5 millions par M. Courtois et à 8,18 millions
par M. de Montesquiou.
M. Aymeri de Montesquiou,
rapporteur spécial.
Il faut voir les dates de référence !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Cet écart entre vos deux rapports montre qu'il
est indispensable d'expertiser plus précisément encore ce sujet. Je ne crois
pas ouvrir de polémique...
(Exclamations sur les travées du RPR et des
Républicains et Indépendants),
je dis simplement que cela mérite d'être
expertisé davantage.
J'apporterai enfin une précision, toujours en réponse à M. de Montesquiou.
Le coût du plan Vigipirate renforcé comme celui du passage à l'euro seront
pris en compte dans le projet de loi de finances rectificative pour 2001 et non
dans le projet de loi de finances pour 2002, comme il est de règle, puisque
celui-ci a été préparé avant même les événements dramatiques du 11 septembre et
le déclenchement du plan Vigipirate renforcé.
M. Philippe Marini.
Il est dépassé avant d'être voté !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Le texte qui vous sera prochainement soumis
prévoit d'ouvrir 500 millions de francs de crédits de fonctionnement pour la
police et 180 millions de francs pour les grands projets immobiliers de la
police nationale. Vous en serez, je pense, satisfaits.
Pour conclure sur le budget de la police nationale, permettez-moi, enfin, de
répondre rapidement à plusieurs des interventions que vous avez faites lors de
la discussion générale.
Je dirai un mot, d'abord, sur la prétendue « insincérité » du budget de la
police, en réponse à M. de Montesquiou. Retenez qu'en quelques années les mises
à disposition ont été réduites de façon significative, de plus de 10 %. De
même, les surnombres de gardiens de la paix, autorisés en gestion par tranches
successives depuis 1998, sont également en voie de résorption, puisque 1 000
d'entre eux seront consolidés en 2002.
Quant à la transmission des rapports d'inspection, vous savez que, jusqu'à
présent, le Gouvernement ne communique pas ces documents qui relèvent, selon la
loi du 17 juillet 1978, du « secret des délibérations du Gouvernement ».
Je n'ignore pas qu'une nouvelle disposition a été adoptée sur ce sujet à
l'article 57 de la loi organique du 1er août dernier, qui impose cette
transmission avec une réserve, toutefois, pour la sécurité intérieure. J'ai
saisi le secrétaire général du Gouvernement sur cette question.
Par ailleurs, j'ai trouvé M. Hyest quelque peu sévère avec la LOPS qui avait
été votée en 1995...
M. Jean-Pierre Schosteck,
rapporteur pour avis.
Et que vous n'avez pas appliquée !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Je ne l'ai pas votée parce que je ne la croyais
pas applicable.
M. Jean-Pierre Schosteck,
rapporteur pour avis.
C'était pourtant une loi de la République !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Je recrute des personnels administratifs pour
redéployer des policiers sur le terrain.
Je regrette, je l'avoue à M. Hyest à titre personnel, que les propositions
contenues dans le rapport qu'il a rédigé avec son regretté collègue, Roland
Carraz, n'aient pas été mises en oeuvre comme nous l'espérions. Il faudra
revenir sur ces questions, mais vous savez bien à quel point il est
difficile...
M. Jean-Jacques Hyest.
De réformer l'Etat !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
... de lutter contre des situations acquises.
Nous poursuivons cette tâche, vous l'avez dit vous-même, monsieur Hyest, à bas
bruit, car il est difficile de restructurer brigades et commissariats. Mais, je
vous rassure, des redéploiements sont effectués au sein de la police nationale,
notamment grâce à la police de proximité et au recrutement de personnels
administratifs permettant de remettre des policiers sur le terrain. J'essaie
toujours d'alléger les charges indues des policiers. Ce n'est jamais simple,
vous l'avez rappelé, mais, bien évidemment, c'est la politique que je veux
mener, car il y va de la sécurité de nos concitoyens.
Je tiens à rappeler à M. Delevoye ce qu'il semble avoir oublié, à savoir que
la loi sur la présomption d'innocence a été votée de façon quasi unanime tant
par l'Assemblée nationale que par le Sénat. En outre, elle a pour origine le
rapport commandé à un haut magistrat, M. Truche, par le Président de la
République, lui-même très attaché, à l'époque, à l'adoption de cette loi.
Puis-je ajouter un regret à titre personnel ? Cette loi sur la présomption
d'innocence, pour laquelle le Gouvernement a décidé - j'étais d'ailleurs
intervenu en ce sens - de nommer un parlementaire en mission pour l'évaluer,
comme doit l'être toute loi, avait un pendant : la réforme du CSM et une loi de
responsabilisation des magistrats, qui n'ont pu aboutir, car la réforme
d'ensemble de la justice a été bloquée. Si nous avions avancé sur ces plans, je
pense qu'un certain nombre de questions qui font l'actualité aujourd'hui
auraient trouvé des réponses.
M. Dominique Braye.
Sûrement pas !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Je regrette que vous ayez bloqué la poursuite de
la réforme de la justice et que M. le Président de la République n'ait pu
convoquer le Congrès le 24 janvier !
(Protestations sur les travées du RPR
et des Républicains et Indépendants.)
M. Jean-Pierre Schosteck,
rapporteur pour avis.
Faux !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Mais nous aurons l'occasion d'y revenir si vous
voulez que nous continuions ce débat.
M. Jean-Pierre Schosteck,
rapporteur pour avis.
C'était prématuré !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
M. Turk a évoqué un certain nombre de sujets
plus précis.
A propos du système d'information Schengen, je tiens tout d'abord à rappeler
que nos partenaires, notamment mes homologues européens, se satisfont de ce
système basé à Strasbourg. Bien évidemment, le SIS II devra être mis en oeuvre.
Il sera déployé dès 2003, après qu'un certain nombre de tests auront été
vérifiés. Le gouvernement français, dont j'ai été le porte-parole, demande de
rester dans un système intergouvernemental qui a montré, notamment à
Strasbourg, son efficacité, cela à la satisfaction de tous. J'espère que mes
homologues européens iront dans ce sens. J'essaye en tout cas, à l'occasion des
réunions auxquelles je participe du conseil Justice et affaires intérieures, le
JAI, de trouver les soutiens nécessaires. Je souhaite la pérennisation à
Strasbourg de ce système d'information, dont la technicité donne de très bons
résultats.
Une agence va-t-elle être créée ? Une réflexion est ouverte sur ce point mais,
pour l'instant, aucune décision n'a été prise. Sur le plan budgétaire, la
contribution de la France à EUROPOL passera de 35 millions à 47 millions de
francs en 2002.
M. Plasait a évoqué la question du dispositif d'assistance juridique renforcé,
que j'ai annoncé et qui figure dans l'accord du 29 novembre, pour les
policiers. Une cellule d'appui à la direction générale de la police nationale
sera créée, un numéro vert sera ouvert. Il est prévu également l'assistance
d'un avocat pour les personnels qui ont été victimes d'agression ou qui sont
appelés à témoigner. Des instructions précises seront adressées aux chefs de
service sous un mois.
Je ne peux que vous rappeler les instructions adressées par Mme Lebranchu aux
procureurs afin que les dispositions légales soient appliquées avec rigueur
s'agissant de policiers victimes, dans le cadre de leur travail, d'agressions,
d'insultes ou de caillassages.
M. Jean-Pierre Schosteck,
rapporteur pour avis.
Espérons qu'elles seront appliquées !
M. Philippe Marini.
Heureusement qu'on a gardé la possibilité d'envoyer des instructions !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Concernant le livret, l'opuscule du syndicat de
la magistrature, j'ai eu l'occasion de m'exprimer cet après-midi à l'Assemblée
nationale après ma collègue Mme Marylise Lebranchu.
M. Alain Joyandet.
Ce sont vos copains !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Ecoutez, monsieur le sénateur, un peu de
retenue, s'il vous plaît !
M. Alain Joyandet.
Vous nous provoquez !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Vous me posez une question, je vous réponds. En
quoi je vous provoque en évoquant ce document que j'ai trouvé pour ma part
insultant, scandaleux, et que je réprouve ?
M. Alain Joyandet.
Bravo !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
En accord avec les syndicats de police, j'estime
qu'il doit faire l'objet d'une réprobation générale et, éventuellement, de
poursuites.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des
Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. Jean-Pierre Schosteck,
rapporteur pour avis.
Et au-delà !
M. Philippe Marini.
Très bien !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Je voudrais au moins que vous m'en donniez
acte.
De la même manière, j'ai dit à l'Assemblée nationale cet après-midi que la loi
relative à la sécurité quotidienne votée par le Parlement, devenue loi de la
République puisqu'elle a été promulguée par M. le Président de la République,
doit s'appliquer et elle le sera par les policiers et les magistrats, qui ont
le devoir de le faire.
(Très bien ! Bonne nouvelle ! sur les mêmes
travées.)
Mais c'est normal, n'applaudissez pas à des choses banales, ou qui devraient
l'être.
Concernant les crédits ACROPOL, monsieur Plasait, la sous-utilisation relative
ne vaut que pour l'année 2000. En effet, faute de marché disponible, il n'a été
possible de consommer des crédits que de manière marginale en 2000, à savoir
160 millions de francs. En 2001, en revanche, le retard a été rattrapé et près
de 700 millions de francs ont été engagés, la consommation des crédits de
paiement a donc été normale.
A quelle date le déploiement sera-t-il achevé ? La carte du déploiement a été
modifiée en octobre 2000. Dès l'année prochaine, quatorze départements seront
équipés. Je confirme que le système sera entièrement déployé en 2007.
S'agissant de la compatibilité ACROPOL-RUBIS - évoquée par M. Courtois -, les
deux systèmes sont interopérables grâce à des passerelles techniques, car il
s'agit de la même technologie TETRAPOL.
Monsieur Karoutchi, vous êtes intervenu dans des termes que j'ai trouvés
responsables et que je partage en grande partie.
A propos des notions de sécurité et de partenariat, vous avez évoqué la
coordination dans les transports en Ile-de-France. Cela montre que la sécurité
- c'est en tout cas mon point de vue - c'est créer les conditions de la
tranquillité de chacun dans la société ; mais cela veut dire aussi que nos
concitoyens doivent être placés sur un pied d'égalité !
M. Alain Joyandet.
C'est donc la fin de l'angélisme ! (
Sourires.
)
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Je ne vous ai pas attendu ! La différence entre
nous, c'est que, pour moi, ce n'est pas sur la police seule, même si elle est
en première ligne, que reposent les conditions nécessaires pour créer une
sécurité collective au sein de laquelle chacun trouverait sa tranquillité
individuelle. Il y a aussi l'Etat, la justice, l'éducation et tous les acteurs
de l'Etat dans la société, et, au-delà, les familles, les parents et bien
d'autres !
Je ne crois pas à la thèse d'une sécurité individuelle que l'on pourrait
s'offrir en fonction de ses capacités.
M. Bruno Sido.
Personne n'a dit le contraire !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
C'est aussi l'une des raisons pour lesquelles,
en dehors de la conception que je me fais d'une police nationale et des
politiques de sécurité, je ne suis pas d'accord avec la proposition que vous
faites de placer ce que vous appelez la police territoriale sous l'autorité des
maires. En effet, cela créerait une inégalité entre les citoyens...
M. Jean-Pierre Schosteck,
rapporteur pour avis.
Non !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
... alors que l'insécurité frappe déjà en
premier lieu les populations défavorisées socialement ! (
Applaudissements
sur les travées socialistes.
)
M. Jean-Pierre Schosteck,
rapporteur pour avis.
Non ! Vous déformez !
M. Philippe Marini.
On pourrait au moins s'obliger à informer mieux ! On pourrait créer la
transparence !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Cet élément me conduit à dire, comme M.
Karoutchi, que la sécurité n'est ni de droite ni de gauche. C'est une valeur
républicaine qui mérite mieux que des polémiques inutiles !
M. Jean-Pierre Schosteck,
rapporteur pour avis.
Très bien !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
La situation des effectifs de police au
commissariat de Garges-lès-Gonesse évolue, vous le savez bien, de façon
régulière. Au 1er janvier 2000, ce service disposait de 90 policiers, de tous
corps et grades, dont 81 gradés et gardiens de la paix. Au 1er novembre 2001,
on comptabilise 94 policiers, dont 85 gradés et gardiens de la paix. A ces
personnels, il convient d'ajouter vingt adjoints de sécurité et trois
personnels administratifs.
Mme Nelly Olin.
Non !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Le potentiel de ce service n'a donc pas
diminué.
De façon générale, les effectifs du Val-d'Oise ont évolué d'une façon très
positive. Le 1er janvier 1999, ce département comptait 1 156 policiers de tous
corps et grades. A la date du 2 décembre, il en avait 1 276, soit un gain de
120 postes.
Mme Nelly Olin.
Ils ne sont pas à Garges-lès-Gonesse ! Je vous invite à y venir !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Au cours de la même période, le nombre
d'adjoints de sécurité est passé de 145 à 276, soit un gain de 131 postes.
J'en arrive à la sécurité civile.
Nous discuterons de façon plus approfondie tout à l'heure, avec MM. Hoeffel et
Mercier en particulier, des conséquences sur les budgets des collectivités
locales du renforcement de la sécurité civile dans notre pays. Je me
contenterai, pour le moment, de répondre aux observations qui concernent les
services placés directement sous mon autorité.
Permettez-moi au préalable, mesdames, messieurs les sénateurs, de rendre
hommage devant vous à l'ensemble des acteurs de la sécurité civile, à tous les
sapeurs-pompiers, militaires de la sécurité civile, démineurs, pilotes,
secouristes, bref, à toutes celles et à tous ceux qui, par leur dévouement,
assurent la protection de nos concitoyens et leur portent secours au quotidien
ou lors de catastrophes comme celle de Toulouse, où l'efficacité de
l'organisation des secours a été saluée unanimement ; je m'adresse notamment à
M. Girod.
S'agissant de l'intervention de M. Schosteck, je lui rappellerai tout ce que
ce Gouvernement aura fait pour améliorer l'efficacité de notre système de
sécurité civile : l'achèvement et l'amélioration de la départementalisation
décidée en 1996 ; la création d'une dotation globale d'équipement d'un milliard
de francs au profit des services départementaux d'incendie et de secours ; la
réforme, attendue depuis dix ans, du statut des sapeurs-pompiers
professionnels.
N'oubliez pas non plus la refonte de l'alerte météorologique, la modernisation
du service du déminage, le début du renouvellement complet de la flotte
d'hélicoptères, enfin le renforcement des moyens et des compétences des préfets
de zone de défense.
Tous les engagements que j'ai pris à titre personnel depuis un an ont été
tenus et mis en oeuvre rapidement.
Quant aux moyens de la sécurité civile, je peux vous indiquer que les crédits
ouverts pour la sécurité civile en loi de finances rectificative viendront
utilement compléter ceux qui sont inscrits dans ce projet de loi de finances
pour 2002. En effet, il est prévu d'ouvrir 212 millions de francs
supplémentaires.
Ces crédits permettront, en premier lieu, de faire face, dans le cadre du plan
Vigipirate, aux besoins de la lutte contre le risque nucléaire, bactériologique
et chimique, notamment pour acheter des tenues de protection pour les
personnels.
Enfin, ces crédits permettront également à la DDSC, la Direction de la défense
et de la sécurité civiles, de faire face aux dépenses prévues pour les
activités de déminage, pour la campagne de feux de forêt de cette année et pour
la maintenance de ses aéronefs.
Les crédits de fonctionnement de la DDSC, qui augmentaient déjà dans le projet
de loi de finances pour atteindre 209 millions de francs en 2002, seront ainsi
nettement améliorés.
Par ailleurs, n'oubliez pas que ce budget prévoit également une amélioration
sensible des régimes indemnitaires des métiers les plus difficiles avec la
création d'une prime, fortement attendue, pour les démineurs et l'achèvement de
la réforme du régime indemnitaire des personnels navigants de la sécurité
civile.
Enfin, je souhaite vous rappeler que ce budget permet de lancer, avec
l'ensemble des élus parisiens et des département de la petite couronne, un
vaste plan de modernisation de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris, qui
prévoit, sur six ans, environ 500 millions de francs supplémentaires pour le
renouvellement des matériels de la brigade et 750 nouveaux emplois de
militaires, soit plus de 10 % d'effectifs supplémentaires.
Je dirai aussi quelques mots sur les nouveaux hélicoptères, en réponse à M.
Schosteck. Je vous indique que c'est l'industriel qui est responsable des
retards enregistrés par ce programme ; il me l'a d'ailleurs confirmé pas plus
tard qu'hier, puisque je le recevais place Beauvau : le président-directeur
général d'Eurocopter reconnaît effectivement que la société a livré avec retard
le matériel correspondant à la demande. Pour ma part, je souhaite que le
matériel livré à nos pilotes corresponde à la qualité attentue et à
l'engagement pris.
Je peux vous préciser que la réception des premiers appareils aura lieu à
partir de janvier et que quinze appareils seront livrés en 2002.
Quant à l'état major de zone de Lille, monsieur Schosteck, je vous informe
que, depuis le 1er septembre dernier, une équipe de trois militaires a été
affectée au secrétariat général de la zone de défense et est actuellement en
formation au centre interrégional de coordination des opération de sécurité
civile, le CIRCOSC, de Rennes. Un quatrième militaire et trois officiers de
sapeurs-pompiers professionnels arriveront prochainement. Le chef d'état-major
zonal prendra ses fonctions le 15 janvier prochain.
Enfin, le projet de loi de modernisation de la sécurité civile, première loi
de ce type depuis quinze ans, permettra de poursuivre cette évolution attendue
par tous nos concitoyens. Je tiens à vous indiquer sur ce point que ce texte
sera déposé dans les délais prévus. Nous sommes actuellement dans une phase de
concertation, notamment avec les grandes associations d'élus.
Quant à la coexistence de deux textes traitant au même moment ou presque de la
sécurité civile, vous savez monsieur Schosteck, qu'ils ne sont pas tous les
deux de même nature : le projet de loi relatif à la démocratie de proximité
vise à améliorer le fonctionnement des SDIS ; le projet de loi de modernisation
de la sécurité civile aura un champ beaucoup plus large et concernera
l'ensemble des acteurs de la sécurité civile.
Nous avons voulu introduire dans le projet de loi relatif à la démocratie de
proximité, suivant en cela les recommandations des rapports du sénateur Pierre
Mauroy et du député Jacques Fleury, la partie sur les SDIS. J'avais annoncé, le
6 octobre dernier, à Strasbourg, lors du congrès des sapeurs-pompiers, une loi
pour la fin de l'année 2001, après toutes les concertations et les travaux
nécessaires. Ce texte sera soumis au conseil des ministres et, je l'espère,
adopté avant la fin de l'année 2001, pour que la prochaine législature s'en
saisisse. C'est toujours ce que j'ai dit ! Je n'ai pas dit que ce texte serait
voté avant la fin de cette législature ! Vous pouvez reprendre toutes mes
interventions sur ce point : je n'ai aucun risque d'être pris en défaut.
En ce qui concerne le volontariat, monsieur Mercier, sur les cinquante-quatre
paragraphes du message de la Sainte-Barbe, nombreux sont ceux qui traitent à la
fois des volontaires et des professionnels, même si un seul porte, c'est vrai,
sur les volontaires.
(M. Mercier acquiesce.)
L'année 2002 sera celle des
dossiers du volontariat. Comme vous le savez, cela a déjà été annoncé,
notamment à Saint-Brieuc.
M. Michel Mercier.
On en reparlera tout à l'heure !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
La concertation, notamment avec les élus, avec
l'Association des présidents des conseils d'administration des services
départementaux d'incendie et de secours, les CASDIS, et avec l'Association des
maires de France a été permanente au cours de ces derniers mois.
M. Michel Mercier.
Ah oui !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Il est difficile de discuter avec des
associations - vous pouvez très bien le comprendre - dont les exécutifs sont en
cours de renouvellement. Mais toutes les concertations sont possibles et je les
souhaite, car c'est la meilleure manière d'avancer.
Mme David, MM. Mercier et Girod se sont exprimés à propos de la réduction du
temps de travail chez les sapeurs-pompiers. Le décret sera soumis au Conseil
d'Etat dans le courant de la semaine prochaine et je souhaite très vivement
qu'il puisse être publié avant la fin de l'année. Quoi qu'il en soit, j'ai déjà
fait diffuser les principales dispositions de ce texte, de telle sorte que les
discussions puissent s'engager sans tarder. Je sais d'ailleurs que tel est le
cas.
Le projet de décret vise à adapter la nécessité de la réduction du temps de
travail aux contraintes opérationnelles et à permettre à chaque CASDIS de
négocier avec les syndicats, avec une certaine souplesse, en fonction de la
situation propre à chaque département.
Quant aux suites de l'explosion de l'usine chimique de Toulouse, des mesures
importantes seront prises, dans le cadre de la loi de finances rectificative,
pour l'acquisition de matériels, et des tenues de protection nucléaires,
bactériologiques et chimiques seront proposées pour protéger les sauveteurs,
aussi bien les policiers que les pompiers.
En ce qui concerne la prévention, de nombreuses réflexions sont en cours, qui
se traduiront très concrètement dans des projets de loi que préparent les
ministères intéressés, sous la conduite de mon collègue ministre de
l'aménagement du territoire et de l'environnement.
Monsieur Girod, le renforcement des états-majors de zone était une nécessité
et il sera poursuivi. Des mesures seront notamment prévues dans la loi sur la
modernisation de la sécurité civile.
Les exercices en matière de sécurité civile sont, heureusement, de plus en
plus nombreux. Je sais à quel point vous vous intéressez à ces sujets, monsieur
le sénateur ; nous avons eu l'occasion de les évoquer ensemble. Ces exercices
concernent l'ensemble des acteurs des crises potentielles. Ils sont
nécessaires, vous avez raison, car il faut se mettre en situation de pouvoir
répondre aux situations de crise.
Cela ne signifie pas qu'il ne faut pas améliorer les dispositifs, et les
expériences dans les pays voisins que vous avez citées doivent être examinées
avec soin. Il faut prendre le meilleur partout, de manière que notre système,
déjà considéré comme performant, puisse être encore amélioré.
Je terminerai, avant de conclure, avec le budget des préfectures, qui
bénéficient, elles aussi, de mesures nouvelles très significatives l'année
prochaine, comme l'ont d'ailleurs observé MM. Hoeffel et de Montesquiou dans
leurs rapports.
Le Gouvernement a en particulier décidé de stabiliser les emplois des
préfectures, tout comme ceux de l'administration centrale, en 2002. C'est la
fin d'un long mouvement de suppression d'emplois dans ces services. Cette
stabilité permettra d'engager en 2002 une gestion plus active du personnel des
préfectures, avec en particulier des renforts ciblés dans les services qui en
ont le plus besoin, notamment ceux qui sont responsables de l'accueil des
publics défavorisés, du contrôle de légalité, de l'asile territorial et du
contrôle de gestion.
Par ailleurs, le projet de loi de finances prévoit près de 125 millions de
francs de mesures catégorielles pour les personnels placés sous l'autorité du
directeur général de l'administration. Les personnels des préfectures
bénéficieront, à eux seuls, de plus de 100 millions de francs de mesures
catégorielles, soit trois fois plus qu'en 2001 et presque sept fois plus qu'en
2000.
C'est une étape très importante vers la parité avec les régimes indemnitaires
des services déconcentrés de l'Etat.
Ce projet de loi de finances permet également de poursuivre l'expérience de
globalisation des crédits des préfectures, lancée pour trois ans en 2000 et
dont l'évaluation sera conduite au cours de l'année 2002.
Les rapporteurs vous en ont parlé, mais je tiens à insister sur ce point : les
préfectures sont les seuls services de l'Etat à expérimenter ce nouveau mode de
gestion qui anticipe la mise en oeuvre de la nouvelle loi organique relative
aux lois de finances, adoptée en juillet dernier. D'ailleurs, je remercie les
sénateurs, notamment M. de Montesquiou, qui l'ont souligné et qui ont reconnu
que le ministère de l'intérieur était à la pointe à cet égard.
En 2002, le champ de cette expérimentation s'étendra à quatre nouvelles
préfectures : le Calvados, l'Oise, la Haute-Vienne et l'Yonne.
Mesdames, messieurs les sénateurs, voilà un an, le 23 novembre 2000, à Lyon,
je m'étais engagé devant les représentants de toutes les préfectures à lancer
un plan d'action pluriannuel pour les préfectures.
Le projet de la loi de finances pour 2002 crédibilise de façon décisive
l'ensemble de cette démarche qui vise à simplifier les tâches des préfectures
et à renforcer leurs moyens d'intervention.
Par ailleurs, je tiens, comme je l'ai fait à l'Assemblée nationale, à vous
informer qu'un accord sur la politique de gestion prévisionnelle de l'emploi,
des effectifs et des compétences au sein de la direction générale de
l'administration, pour améliorer la qualité du service rendu aux usagers, a été
signé, comme dans la police, par les principales organisations syndicales
représentatives des personnels.
Je rendrai prochainement public le plan d'action pluriannuel pour les
préfectures et je dresserai le bilan des initiatives déjà engagées.
Mesdames, messieurs les sénateurs, j'espère avoir répondu à l'essentiel de vos
interrogations et vous avoir démontré la qualité et la pertinence du projet de
budget du ministère de l'intérieur pour 2002, encore amélioré par les
amendements soumis à votre examen ce soir.
Ce projet de budget sans précédent mérite, je le crois, un vote favorable de
votre part.
Comme je l'ai dit tout à l'heure, pour moi, le mot « sécurité » recouvre aussi
bien la police que la sécurité civile. De ce point de vue, les efforts qui sont
faits doivent être salués, non pas pour satisfaire le Gouvernement, mais parce
que la question des moyens humains et matériels mis au service de la sécurité
de nos concitoyens doit nous rassembler. En effet, monsieur Karoutchi, la
sécurité n'est ni de gauche, ni de droite. C'est un valeur républicaine. C'est
un devoir pour l'Etat, et j'espère que vous en tiendrez compte dans votre vote.
Par avance, je vous en remercie.
(Applaudissements sur les travées
socialistes ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et
citoyen.)
M. Aymeri de Montesquiou,
rapporteur spécial.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Aymeri de Montesquiou,
rapporteur spécial.
Monsieur le ministre, j'ai été surpris que, dans un
discours de quarante-cinq minutes sur la police, vous n'ayez fait référence ni
à l'insécurité, ni à l'efficacité de l'utilisation des crédits.
C'est peut-être cela aussi, le « paradoxe Vaillant » !
Paradoxe encore dans le fait que le nombre de policiers augmente mais que le
nombre total d'heures de travail effectuées par la police diminue ; comme dans
le fait que, si les crédits augmentent, l'insécurité, elle aussi, augmente !
Je trouve extraordinaire que vous ayez senti le besoin de rappeler qu'il
fallait sévir lorsque les forces de police étaient attaquées, alors que c'est
une évidence.
Vous avez dit qu'un effort considérable était consenti en faveur des
commissariats. En réalité, les crédits baissent de 17 %.
Pour ce qui est des heures supplémentaires, il y a une divergence entre mes
chiffres et ceux qu'a cités M. Schosteck. Pour ma part, je n'ai fait que
reproduire les réponses à mon questionnaire que m'ont fournies vos services.
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Cela me paraît heureux !
M. Aymeri de Montesquiou,
rapporteur spécial.
La divergence vient non pas de nous mais de vos
services, monsieur le ministre.
Vous avez mis, c'est vrai, la sécurité au rang des priorités, mais ne
niez-vous pas la hausse de l'insécurité ?
Vous dites que les zones de non-droit n'existent plus, mais, monsieur le
ministre, je vous invite à aller avec moi dans une voiture de la BAC ou une
voiture de police à Bagatelle ou à Empalot, mais, je vous le demande, portez un
casque, car les boules de pétanque pleuvent !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Je ne vous ai pas attendu pour y aller !
M. Aymeri de Montesquiou,
rapporteur spécial.
Pas dans une voiture marquée « Police » !
Pour ce qui est de la police de proximité, les rapports d'évaluation m'ont été
refusés. Vous dites que c'est une anomalie. J'en suis d'accord, d'autant que
des extraits sont parus dans la presse.
Monsieur le ministre, à plusieurs reprises, vous avez fait allusion au fait
que nous n'aurions pas assez anticipé les départs en retraite. Je voudrais
rappeler que, sur les vingt dernières années, vous avez été quatorze ans au
pouvoir !
M. Philippe Marini.
Il est temps de partir en retraite !
M. Aymeri de Montesquiou,
rapporteur spécial.
Au-delà des crédits, ce qui me semble important,
c'est l'état d'esprit des policiers. Aujourd'hui, ils ne se sentent pas
soutenus politiquement, et les manifestations de masse sans précédent
démontrent mieux que tous les discours qu'ils n'ont pas du tout le sentiment
d'être considérés.
(Applaudissements sur certaines travées du RDSE ainsi que
sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
M. le président.
Je rappelle au Sénat que les crédits concernant la sécurité inscrits à la
ligne « Intérieur et décentralisation » seront mis aux voix aujourd'hui à la
suite de l'examen des crédits affectés à la décentralisation.
ÉTAT B
M. le président. « Titre III : 210 771 640 euros. »