SEANCE DU 7 DECEMBRE 2001


M. le président. « Art. 70. - L'article 25 de la loi n° 98-657 du 29 juillet 1998 précitée est ainsi rédigé :
« Art. 25 . - Par dérogation aux limites d'âge prévues à l'article L. 980-1 du code du travail, les contrats mentionnés à l'article L. 981-1 du même code sont ouverts aux personnes sans emploi de vingt-six ans et plus rencontrant ou susceptibles de rencontrer des difficultés sociales et professionnelles.
« Les dispositions des articles L. 980-1, L. 981-1, L. 981-2, L. 981-10, L. 981-11 et L. 981-12 du même code ainsi que celles du IV de l'article 30 de la loi de finances pour 1985 (n° 84-1208 du 29 décembre 1984) sont applicables aux contrats conclus en application de l'alinéa précédent. Toutefois, lorsque ces contrats sont financés dans le cadre de l'article 2 de la loi n° 2001-624 du 17 juillet 2001 portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel, les organismes gestionnaires mentionnés à l'article L. 351-21 du même code peuvent prendre en charge directement les dépenses pour des actions de formation qui leur sont afférentes. Ce financement est alors exclusif de tout versement au titre du IV de l'article 30 de la loi de finances pour 1985 précitée.
« Par dérogation aux dispositions de l'article L. 981-1 du même code, ces contrats peuvent prendre la forme d'un contrat de travail à durée indéterminée comportant une période de qualification d'une durée égale à celle du contrat prévu au premier alinéa du même article.
« Les dispositions de l'article L. 981-3 du même code ne leur sont pas applicables.
« Les dispositions de l'article L. 981-4 du même code ne s'appliquent qu'aux contrats conclus avant le 1er janvier 2002.
« Les entreprises de travail temporaire peuvent également embaucher des personnes de vingt-six ans et plus dans les conditions définies au présent article. Les activités professionnelles en relation avec les enseignements reçus sont alors exercées dans le cadre des missions régies par le chapitre IV du titre II du livre Ier du code du travail.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les autres conditions de mise en oeuvre des contrats mentionnés ci-dessus, en particulier les conditions auxquelles doivent répondre les personnes sans emploi susceptibles d'en bénéficier, les conditions de rémunération ainsi que les aides de l'Etat auxquelles ils peuvent ouvrir droit et leurs modalités de versement. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° II-26 est présenté par M. Ostermann, au nom de la commission des finances.
L'amendement n° II-12 est déposé par Mme Bocandé, au nom de la commission des affaires sociales.
Tous deux sont ainsi libellés :
« I. - Supprimer le cinquième alinéa du texte prévu par cet article pour l'article 25 de la loi n° 98-657 du 29 juillet 1998 d'orientation relative à la lutte contre les exclusions.
« II. - En conséquence, dans la première phrase du deuxième alinéa du même texte, après la référence : "L. 981-2," insérer la référence : "L. 981-4". »
La parole est à M. le rapporteur spécial, pour défendre l'amendement n° II-26.
M. Joseph Ostermann, rapporteur spécial. Le présent article tend à pérenniser le dispositif des contrats de qualification-adulte, tout en adaptant les modalités financières des aides de l'Etat.
Il apporte quatre principales modifications.
Premièrement, ces contrats peuvent prendre la forme d'un contrat de travail à durée indéterminée.
Deuxièmement, les entreprises de travail temporaire peuvent conclure des contrats de qualification-adulte.
Troisièmement, l'UNEDIC et les ASSEDIC ont la possibilité de financer les actions de formation dispensées au titre d'un contrat de qualification-adulte qui aura été conclu dans le cadre d'un projet d'action personnalisé établi au titre du PARE.
Enfin, quatrièmement, les allègements de charges sociales liés aux 35 heures remplacent, à compter du 1er janvier 2002, le régime d'exonération spécifique relatif aux contrats de qualification, qui était prévu à l'article L. 981-4 du code du travail, ce dernier continuant de s'appliquer aux contrats conclus avant cette date.
Je regrette que le Gouvernement saisisse l'occasion de la réforme et de la pérennisation du contrat de qualification-adulte pour chercher à réaliser une économie d'un montant finalement modique. Je formule la même observation, sur ce point, que sur l'article 68 ci-dessus.
Le présent amendement tend à maintenir le régime actuellement applicable en matière d'exonération de charges sociales pour les contrats de qualification. Je répète qu'il s'agit finalement de petites économies - 113,68 millions de francs - eu égard à l'objectif.
M. le président. La parole est à Mme Bocandé, rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° II-12.
Mme Annick Bocandé, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, pour la formation professionnelle. Je ne peux qu'approuver les conclusions de la commission des finances et de son rapporteur spécial. Bien entendu, la modification qui est proposée par le Gouvernement nous paraît peu acceptable pour quatre raisons.
En premier lieu, elle accroît le coût de l'embauche pour l'employeur.
En deuxième lieu, cette réforme aurait également pour conséquence d'exclure du bénéfice de l'allégement de charges les entreprises qui ne seraient pas passées en temps voulu aux 35 heures. Or on connaît les difficultés d'application de cette mesure dans les petites et moyennes entreprises, qui constituent pourtant les principaux utilisateurs du contrat d'insertion.
En troisième lieu, une telle modification ne ferait que brouiller la lisibilité d'un dispositif que les employeurs commencent à peine à s'approprier.
Enfin, en quatrième lieu, cette modification vise surtout à faire basculer la prise en charge financière de l'aide publique du budget de l'emploi vers le FOREC.
J'observe par ailleurs - et je tiens à insister sur ce point - que ce dispositif s'accompagnera d'une réforme tout aussi inopportune du régime des primes ; vous venez d'en parler, monsieur le secrétaire d'Etat, à l'occasion des CIE. Celles-ci seront versées non plus à la signature du contrat, mais à l'issue de celui-ci ou au bout d'un an. Il en résulte un gain de trésorerie pour l'Etat lié au report du versement de l'aide, mais ce report me paraît totalement inadapté. L'embauche d'un adulte en contrat de qualification nécessite, en effet, de la part de l'employeur, un accompagnement lourd, qui passe souvent par un aménagement des postes de travail et la mise en place d'un tutorat. Or tout cela a un coût immédiat, qui intervient dès l'embauche et que la prime à l'embauche a justement pour vocation de compenser.
Toutes ces raisons conduisent la commission à préférer le maintien du régime existant. Tel est le sens de cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?...
M. Guy Hascoët, secrétaire d'Etat. Ma réponse rejoint celle que j'ai faite sur les CIE : l'adaptation d'un côté, la suppression de l'exonération spécifique de l'autre, mais la revalorisation substantielle de l'aide forfaitaire. C'est ce double mouvement que le Gouvernement a envisagé, et c'est pourquoi il est défavorable aux deux amendements identiques.
M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s II-26 et II-12.
M. Gilbert Chabroux. Je demande la parole contre les amendements.
M. le président. La parole est à M. Chabroux.
M. Gilbert Chabroux. Sur cet article 70 du projet de loi de finances, la critique de la majorité sénatoriale porte à nouveau exclusivement sur la réforme du régime d'exonération des cotisations sociales à l'occasion du passage des entreprises aux 35 heures.
Si vous étiez d'accord avec les 35 heures, comme vous semblez le dire, mes chers collègues, vous seriez forcément d'accord avec les articles qui vous sont présentés. Je n'arrive pas à saisir la nuance ! Il me semble qu'il y a encore et toujours un fossé entre nous.
M. Alain Joyandet. C'est sûr !
M. Gilbert Chabroux. Vous ne voulez toujours pas des 35 heures, mais vous acceptez l'exonération des cotisations patronales, les allégements de charges...
M. Paul Blanc. C'est normal !
M. Gilbert Chabroux. Bien entendu : on n'allège jamais assez les charges !
M. Alain Gournac. Il y a trop de charges !
M. Gilbert Chabroux. Le travail est devenu une charge toujours trop lourde pour les patrons.
M. Dominique Leclerc. Qu'est-ce que vous en savez ?
M. Gilbert Chabroux. Je suis obligé de réagir, sachant que, par ailleurs, le rapport de Mme Bocandé est mesuré. Mais l'on y retrouve, comme dans vos interventions, mes chers collègues, la référence aux 35 heures. C'est un leitmotiv ! Vous voulez revenir en arrière (Protestations sur les travées du RPR), avec des lendemains où l'on déchante, comme cela a été prédit. Je souhaite que l'on n'en arrive pas là, que le bon sens l'emporte et que l'on se rende compte que les 35 heures constituent une avancée considérable à laquelle tout le monde doit adhérer.
M. Dominique Leclerc. Ce n'est pas vrai !
M. Gilbert Chabroux. La réforme qui est envisagée participe plutôt d'une clarification du dédale des différents régimes encore en cours, que ne fait qu'accélérer la loi de réduction du temps de travail.
Nous estimons que la réforme du contrat de qualification-adultes, le CQA, forme un ensemble, sur lequel les partenaires sociaux sont parvenus à un accord.
L'article 70 prévoit que le CQA peut désormais être un contrat à durée indéterminée, que les entreprises d'intérim peuvent en conclure et que l'UNEDIC, via le PARE, peut en financer la formation.
L'objectif est de lutter contre la précarité et de permettre aux bénéficiaires de connaître une certaine stabilité dans l'emploi. Il est donc tout à fait normal que la prime à l'employeur ne soit versée qu'après un certain délai, ce qui permet de s'assurer de la réalité de l'embauche et de la formation.
Tout cela constitue un progrès pour les personnes en difficulté et ne doit pas servir de prétexte à un débat idéologique. Nous voterons donc contre cet amendement (M. Leclerc s'exclame.)
Mme Annick Bocandé, rapporteur pour avis. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme Bocandé, rapporteur pour avis.
Mme Annick Bocandé, rapporteur pour avis. M. Chabroux parle de débat idéologique. J'ai fait allusion aux primes. D'ailleurs, M. le ministre ne m'a pas répondu. Pourquoi ces primes, destinées à aider les entreprises, seront-elles versées non plus à la signature du contrat mais à son terme, c'est-à-dire au bout d'un an ? Il semble que nous nous éloignions là de l'idéologie, monsieur Chabroux !
M. Gilbert Chabroux. Il faut attendre !
M. Jean Chérioux. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux. Je voterai les amendements identiques n°s II-26 et II-12.
Je suis attristé de constater que nos collègues de l'opposition nous reprochent en permanence notre hostilité aux 35 heures. Certes, nous serons bientôt en période électorale. Ils essaient donc de mettre en avant cette fausse avancée sociale !
M. Gilbert Chabroux. N'inversez pas les rôles !
M. Jean Chérioux. C'est ce qui les gêne !
Ils veulent absolument faire croire au bon peuple que nous sommes opposés aux 35 heures. C'est faux ! Nous sommes simplement hostiles au dispositif tel qu'il a été conçu (Applaudissements sur les travées du RPR), car il a été introduit dans des conditions qui ne sont pas toujours avantageuses pour les salariés. Les accords sur les 35 heures ont été conclus à leur détriment.
M. Gilbert Chabroux. Les salariés sont satisfaits !
M. Jean Chérioux. En contrepartie, ils ont été obligés d'accepter de grands sacrifices (Mme Beaudeau s'exclame) et une diminution de leur pouvoir d'achat, notamment en ce qui concerne les heures supplémentaires.
Il s'agit donc d'une opération purement dogmatique ! En définitive, les salariés n'en tireront aucun bénéfice. Ce que nous voulons, c'est qu'ils puissent travailler 35 heures (Mme Beaudeau s'exclame de nouveau), mais, s'ils veulent gagner plus, rien ne doit les en empêcher !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n° II-26 et II-12, repoussés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 70, modifié.

(L'article 70 est adopté.)

Articles additionnels après l'article 70