SEANCE DU 13 DECEMBRE 2001


M. le président. La parole est à M. Dufaut.
M. Alain Dufaut. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres et secrétaires d'Etat, mes chers collègues, à l'heure où certaines échéances électorales nous conduisent à faire le bilan de la politique gouvernementale,...
M. Alain Gournac. Ça, c'est quelque chose !
M. Jacques Mahéas. Il est très bon, le bilan !
M. Alain Dufaut. ... l'action du Gouvernement ou, plus exactement, sa totale inertie sur le dossier des retraites devra, sans conteste, être inscrite dans la colonne « débit ». (Exclamations sur les travées socialistes.)
M. Didier Boulaud. Chirac, à la retraite !
M. Alain Dufaut. Le conseil d'orientation des retraites, le COR, mis en place par le Premier ministre au printemps 2000, a remis un énième rapport la semaine dernière.
M. Raymond Courrière. On verra ce que Chirac dira !
M. Alain Dufaut. Or le diagnostic formulé par les experts, les syndicalistes et les parlementaires siégeant au sein du COR est tout aussi alarmiste que celui que présentait, il y a trois ans, le commissaire au Plan, M. Jean-Michel Charpin.
Il vient confirmer quelques évidences connues depuis les travaux effectués sous le gouvernement de Michel Rocard, voilà déjà dix ans, et vérifiées par tous les rapports sérieux commandés depuis.
Dans la meilleure des hypothèses présentées par le COR, c'est-à-dire celle, peu réaliste, où la France retrouverait d'ici à 2010 une situation de plein emploi avec un taux de chômage ramené à 4,5 %, les besoins de financement des retraites des générations à venir sont évaluées à quatre points du produit intérieur brut en 2040.
Autrement dit, à législation inchangée, il faudrait, pour que les niveaux de pension demeurent équivalents à ce qu'ils sont aujourd'hui, que les Français cotisent neuf ans de plus ou voient leurs cotisations augmentées de quinze points !
M. Raymond Courrière. Et en l'an 3000, aussi ?
M. Didier Boulaud. Et que dit Balladur ?
M. Alain Dufaut. Encore un rapport qui démontre que la gravité du problème des retraites ne peut plus être ignorée.
D'ailleurs, le Premier ministre avait promis, dans son discours de politique générale, de le traiter en concertation avec les partenaires sociaux.
M. Jacques Mahéas. Et Chirac ?
M. Raymond Courrière. La question !
M. Alain Dufaut. C'était le 19 juin 1997.
M. Didier Boulaud. Et la fracture sociale de Chirac ?
M. Alain Dufaut. Il a aussi solennellement annoncé qu'il allait ouvrir ce chantier. C'était le 30 août 1998.
M. Jacques Mahéas. La question !
M. Didier Boulaud. Chirac, c'est la galerie farfouille !
M. Alain Dufaut. Il a promis que son gouvernement aborderait la question dans la seconde partie de l'année 1999. C'était le 13 janvier 1999.
M. Didier Boulaud. Chirac, Président-bazar !
M. Alain Dufaut. Il a juré que 2000 serait l'année de la mise en oeuvre progressive des décisions prises en matière de retraite. C'était le 29 août 1999.
M. Alain Gournac. Il a beaucoup promis, mais il n'a rien tenu !
M. Alain Dufaut. Il a enfin annoncé, sans aucun complexe, que le prochain gouvernement, issu des élections de 2002, prendrait « à bras le corps le dossier de la réforme des retraites ». C'était le 6 décembre 2001.
M. Jean-François Picheral. Et la question ?
M. Alain Dufaut. Ce n'est pas dans un an, dix ans ou quinze ans que les retraites poseront un réel problème : c'est aujourd'hui !
Plusieurs sénateurs socialistes. La question ! La question !
M Dominique Braye. Ça les gêne !
M. Alain Dufaut. Je voudrais donc, madame le secrétaire d'Etat, que vous exposiez devant la représentation nationale la politique que compte enfin mener le Gouvernement en la matière. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants, de l'Union centriste et sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Paulette Guinchard-Kunstler, secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Monsieur le sénateur, le conseil d'orientation des retraites... (Exclamations diverses sur les travées du RPR ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président. Messieurs, vous êtes bien nerveux. Que se passe t-il ? (Sourires.)
M. Dominique Braye. Ils vont s'énerver de plus en plus avec les questions qui viennent.
M. Raymond Courrière. Et Braye braille !
Mme Paulette Guinchard-Kunstler, secrétaire d'Etat. Ils font la neige, comme on dit en Franche-Comté ! (Rires.)
M. le président. Mes chers collègues, je vous en prie.
Veuillez poursuivre, madame le secrétaire d'Etat.
Mme Paulette Guinchard-Kunstler, secrétaire d'Etat. Le conseil d'orientation des retraites vient de produire un premier rapport - un document remarquable - et a pleinement répondu aux attentes qui étaient les nôtres. Chacun s'accorde à reconnaître la qualité de ses travaux et la façon dont il a su, sans tabou, examiner l'ensemble des sujets.
En rupture avec la méthode du précédent gouvernement rappelons-nous 1995... (Exclamations sur les travées du RPR.)
M. Didier Boulaud. Epargnez-nous le cauchemar !
Mme Paulette Guinchard-Kunstler, secrétaire d'Etat. ... le Gouvernement a choisi la concertation. Le conseil d'orientation des retraites, composé de l'ensemble des partenaires sociaux, à l'exception du MEDEF, qui n'a pas souhaité y participer, a remis, le 6 décembre dernier, son premier rapport au Premier ministre.
M. Alain Gournac. C'est le magnéto, elle se répète !
M. Dominique Braye. Plus de rapports, toujours plus de rapports...
Mme Paulette Guinchard-Kunstler, secrétaire d'Etat. Ce rapport marque une nouvelle étape, alors que le débat sur les retraites était encore bloqué au début de l'année 2000.
Le premier apport du conseil d'orientation des retraites a été d'aboutir à une estimation consensuelle des besoins de financement des régimes et de l'ensemble des solutions envisageables pour réformer notre système de retraite.
Le conseil d'orientation des retraites a également montré un élément du débat essentiel aux yeux des Français, à savoir le niveau de leurs retraites comparé au niveau de leurs dernières rémunérations.
M. Dominique Braye. Quelle découverte ! Il a réinventé la pourdre !
Mme Paulette Guinchard-Kunstler, secrétaire d'Etat. Seule une réforme d'ensemble permettra d'atteindre ce double objectif :...
M. Dominique Braye. Grande découverte !
Mme Paulette Guinchard-Kunstler, secrétaire d'Etat. ... garantir les retraites et trouver comment le système peut être assoupli pour permettre à chaque individu une marge de choix autour d'une garantie générale.
La consolidation de nos régimes de retraite par répartition passe aussi, on le sait, par l'amélioration de l'emploi, notamment l'emploi à cinquante ans.
M. Dominique Braye. C'est important ! C'est une grande découverte !
Mme Paulette Guinchard-Kunstler, secrétaire d'Etat. C'est d'ailleurs pour cette raison qu'Elisabeth Guigou a confié une mission au rapporteur du Conseil économique et social. Ainsi, grâce à l'approche retenue par le COR, qui nous a montré que la garantie de notre système était possible,...
M. Dominique Braye. Que de nouveautés !
Mme Paulette Guinchard-Kunstler, secrétaire d'Etat. ... et une fois le chantier « âge et travail » engagé, le prochain gouvernement...
M. Paul Raoult. Et ce sera un gouvernement de gauche !
Mme Paulette Guinchard-Kunstler, secrétaire d'Etat. ... aura en main l'ensemble des éléments nécessaires pour engager les négociations immédiatement après l'échéance électorale et renouveler, c'est essentiel, le pacte social entre les générations. (Applaudissements sur les travées socialistes. - Rires et brouhaha sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Dominique Braye. Que de découvertes !
M. le président. Mes chers collègues, je vous informe que l'on vous regarde !
M. Henri de Raincourt. Justement !
M. le président. Je vous prie donc de veiller à votre comportement. La façon de se conduire de certains ne valorise pas notre institution.
MM. Claude Estier et Jacques Mahéas. Ils sont à droite !
M. le président. Je leur demande donc de bien vouloir faire un effort.
Nous sommes des gens sérieux, qui faisons un travail sérieux. Par conséquent, écoutons la question, puis la réponse, et ce dans la sérénité.
M. Hilaire Flandre. Regardez à gauche, monsieur le président !
M. le président. Je vous remercie à l'avance pour notre institution. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines travées de l'Union centriste et du RPR.)

REFUS DE CERTAINS MAGISTRATS D'APPLIQUER LA LOI