SEANCE DU 22 JANVIER 2002
M. le président.
La parole est à M. Bailly, auteur de la question n° 1230, adressée à M. le
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
M. Gérard Bailly.
J'ai souhaité attirer l'attention de M. le ministre de l'équipement, des
transports et du logement sur le problème du tracé des branches Sud et Est du
TGV Rhin-Rhône. Mais je suis sûr que M. Mélenchon, qui connaît bien le
département du Jura puisqu'il y vient très souvent, pourra m'apporter une
réponse.
La région France-Comté a récemment demandé aux quatre départements qui la
composent de participer, à hauteur de 30 %, au financement de la première
tranche de la branche Est.
En ce qui le concerne, le conseil général du Jura se voit contraint de refuser
cette proposition, et ce pour plusieurs raisons.
Tout d'abord, force est de constater que le tracé retenu pour la ligne Est
risque de pénaliser durablement le département en le tenant à l'écart du
développement économique franc-comtois.
En effet, non seulement, cette ligne SNCF ne desservira plus Dole mais, qui
plus est, elle générera de réelles nuisances dans le nord du département.
A ce sujet, il convient de souligner que de nombreuses études ont montré que
le Jura ne serait concerné que pour 2 % de la clientèle voyageurs de la
nouvelle ligne Est.
Compte tenu de ces éléments, on peut aisément affirmer que ce projet n'apporte
que des nuisances au département sans la moindre compensation ni le moindre
bénéfice.
Par ailleurs, le conseil général a clairement demandé, en juin 2000, que « le
tronçon au-delà de Besançon et la branche Sud soient examinés et réalisés
concomitamment, condition indispensable pour assurer la cohérence du TGV
Rhin-Rhône », qui devrait relier, à terme, l'aéroport de Lyon - Saint-Exupéry.
Or, malgré de nombreuses relances, cette revendication n'a jamais été prise en
compte.
En ce qui concerne la branche Sud, un grand débat public a eu lieu entre le 15
mars et le 15 juin 2000. Or, plus de dix-huit mois après, personne ne connaît
le résultat de cette consultation, qui a pourtant mobilisé toutes les énergies
tant dans le Jura que dans les départements voisins.
Quelles suites le Gouvernement entend-il donner à ce grand débat public ? Par
ailleurs, quand le tracé de la branche Sud sera-t-il définitivement arrêté et
quel sera-t-il ?
C'est en effet lorsqu'il en aura connaissance que le Jura pourra décider si,
oui ou non, il participe au financement de la totalité de cette infrastructure.
Nous ne pouvons accepter de ne financer qu'une première branche qui
maintiendrait le Jura à l'écart alors que la ligne passe par Dole.
Par ailleurs - j'avais déjà posé la question par écrit à Réseau ferré de
France et à la SNCF, mais sans obtenir de réponse sinon un accusé de réception
-, cette ligne devrait être, nous a-t-on annoncé, mixte, c'est-à-dire à la fois
fret et voyageurs. Ce serait une première dans notre pays ! Néanmoins, de
nombreux élus s'interrogent : est-il possible de concilier une ligne à grande
vitesse à plus de 300 kilomètres-heure et une ligne de fret qui ne doit pas
dépasser 170 kilomètres-heure ?
Je sais, monsieur le président, que vous êtes également concerné, puisque ce
TGV ira de Marseille à Strasbourg, voire au-delà.
Cette ligne mixte est-elle techniquement possible ? Si oui, où passera-t-elle
? Telle était la question que je voulais poser à M. le ministre de
l'équipement, des transports et du logement, mais je suis certain que M. le
ministre délégué à l'enseignement professionnel sera en mesure de m'apporter
des éléments de réponse.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Luc Mélenchon,
ministre délégué à l'enseignement professionnel.
Je vous retrouve avec
plaisir, monsieur le sénateur, et je suis heureux de vous remercier de nouveau
de l'accueil exceptionnellement courtois que vous m'avez réservé lors de ma
dernière visite dans votre - dans notre ! - très beau département.
Comme je l'ai rappelé tout à l'heure, M. Jean-Claude Gayssot est aujourd'hui à
Washington, où il signe un accord aérien franco-américain. Je vais donc vous
transmettre la réponse qu'il avait préparée à votre intention.
M. Jean-Claude Gayssot ne partage pas votre pessimisme sur les conséquences
qu'aura la réalisation du TGV Rhin-Rhône pour le Jura. Les études conduites ont
garanti à la ville de Dole, et plus généralement aux gares du Jura, une
desserte de meilleure qualité, ou au moins équivalente à la desserte
actuelle.
Le président de la SNCF a confirmé, en septembre 1998, la volonté de
l'entreprise d'assurer la qualité des relations entre Paris et Dole, à la fois
par le prolongement du TGV Paris-Dijon jusqu'à Dole et par l'arrêt des TGV à
destination de la Suisse, pays qui participera également au comité de pilotage
et qui envisage de cofinancer la réalisation du TGV Rhin-Rhône.
Par ailleurs - c'est désormais habituel pour toutes les lignes à grande
vitesse -, la réalisation de cette branche du TGV Rhin-Rhône s'accompagnera
d'une réorganisation des dessertes ferroviaires sur les lignes historiques et
de la recherche de la meilleure complémentarité entre les TGV grande ligne
classiques et les trains express régionaux, les TER.
Cette réorganisation sera menée en concertation avec les collectivités
locales, les conseils régionaux en premier lieu, et devra déboucher sur des
engagements en matière de qualité du service.
Le débat public sur la branche Sud du TGV Rhin-Rhône a été organisé du 15 mars
au 15 juin 2000 et la commission du débat public à remis son rapport en
novembre 2000. Ce débat a montré au public, aux élus et aux représentants des
forces économiques l'intérêt limité d'une ligne à grande vitesse pour les seuls
voyageurs et la nécessité de chercher des solutions nouvelles pour faire face à
l'accroissement attendu du fret.
Mais il ne s'agit pas d'une première, monsieur le sénateur : le projet
Perpignan-Figueras entre la France et l'Espagne et le contournement de Nîmes et
Montpellier sont également des projets mixtes. C'est donc possible !
Avant de faire part à M. Gayssot de ses propositions quant à la suite à donner
au projet, Réseau ferré de France a engagé un programme d'études
complémentaires concernant notamment les conditions d'exploitation d'une ligne
mixte et l'évolution prévisible de la capacité des axes ferrés existants dans
l'attente de la nouvelle infrastructure. Ces études, aujourd'hui en cours
d'achèvement, devraient être remises au ministre des transports dans les toutes
prochaines semaines. Nul doute que vous vous retrouviez alors pour vous
expliquer.
Au regard des conclusions de ces études, le cahier des charges de cette
nouvelle infrastructure sera établi, dans un esprit de concertation. Le parti
retenu devra répondre à la fois aux objectifs de gain de temps pour les
voyageurs et de développement du trafic de fret sur cet axe Nord-Sud.
L'élaboration d'un tel cahier des charges ne peut toutefois s'envisager qu'une
fois connues les conclusions relatives au débat public actuellement en cours
sur le contournement de Lyon pour le fret, afin que la cohérence entre les
différents projets soit assurée.
Enfin, M. Jean-Claude Gayssot précise que les nouvelles lignes à grande
vitesse sont aujourd'hui construites avec des normes élevées de protection
acoustique et environnementale.
Tels sont, monsieur le sénateur, les éléments de réponse que M. Gayssot m'a
chargé de vous transmettre.
M. Gérard Bailly.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Bailly.
M. Gérard Bailly.
Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre réponse. J'insiste cependant
sur la nécessaire prise en compte de l'aménagement du territoire. Nous ne
pouvons pas accepter que des départements soient complètement ignorés dans la
réalisation de cette grande infrastructure Nord-Sud.
J'ai reçu dernièrement les voeux du directeur de la mission Ligne à grande
vitesse Rhin-Rhône, installée à Besançon. Sous forme de boutade, ces voeux sont
ainsi libellés : « L'étoile à trois branches de la mission Ligne à grande
vitesse Rhin-Rhône file à grande vitesse. » Je souhaite avec lui, monsieur le
ministre, que le tracé de la branche Sud soit connu en 2002, de même que son
échéancier. Le président du conseil régional de Franche-Comté souhaite en effet
que le décalage dans la construction entre les branches Est et Sud ne dépasse
pas trois ans, afin de conserver une cohérence régionale.
Le département du Jura ne pourra participer au financement de la totalité de
l'infrastructure, c'est-à-dire de la branche Est et de la branche Sud, qu'à
partir du moment où cette dernière permettra effectivement aux habitants de ce
département de rejoindre Lyon... et Marseille, monsieur le président !
M. le président.
L'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons interrompre nos travaux
; nous les reprendrons à seize heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures cinquante, est reprise à seize heures
dix.)