SEANCE DU 31 JANVIER 2002
M. le président.
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer.
Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
Le Conseil constitutionnel vient de censurer l'article 107 de la loi de
modernisation sociale tendant à rendre plus difficiles les « licenciements pour
convenance boursière ».
Cette décision, réclamée par la droite, donne satisfaction au MEDEF et
encourage le cynisme des milieux financiers, pour lesquels les salariés sont
une simple « variable d'ajustement ».
(Murmures sur les travées du RPR, de
l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.)
J'ai déjà évoqué ici un exemple emblématique de cette pratique, je veux parler
de la décision prise par le groupe multinational BSN Glasspack, en avril 2001,
de fermer VMC, verrerie de Givors, et de licencier 880 personnes.
Aucun argument économique ne peut justifier cette fermeture : le marché est en
croissance, le niveau de rentabilité se situe à 15 %, l'outil de travail est
performant. Ce plan vise exclusivement à réaliser un effet de levier au
bénéfice des actionnaires.
Dès l'annonce du projet de fermeture, le comité de soutien et l'intersyndicale
CGT-CFDT ont rédigé un document présentant des solutions économiques
alternatives et ont organisé un référendum d'initiative sociale. J'ai moi-même
saisi le Premier ministre à plusieurs reprises.
Pour que le dispositif anti-licenciement voté par la représentation nationale
soit réaffirmé, je souhaiterais connaître les mesures que le Gouvernement
entend prendre afin d'empêcher la suppression des 880 emplois.
S'il est une mesure législative urgente à l'heure où le chômage est à la
hausse, c'est bien celle qui consisterait à stopper les licenciements
boursiers.
Il reste trois semaines au Parlement avant la suspension de ses travaux en
raison des élections.
Nous pouvons donc agir, monsieur le Premier ministre, mais il faut faire vite
!
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat à l'industrie.
Monsieur le sénateur, le Gouvernement,
qui pense comme vous que l'emploi ne peut pas être une variable d'ajustement
économique, a rappelé au groupe BSN ses responsabilités vis-à-vis des salariés
et des bassins d'emplois dans lesquels il opère.
Les salariés de l'entreprise et les élus de la région ont d'ailleurs été reçus
à mon ministère à plusieurs reprises pour parler du cas précis que vous
évoquez.
S'il ne faut pas ignorer les difficultés du secteur verrier - concurrence
d'autres matériaux, pression sur les prix exercée par des clients de plus en
plus concentrés et puissants - les autorités judiciaires ont été amenées à
annuler en juillet 2001 les procédures lancées par BSN dont vous avez parlé,
fondant leur décision sur l'évolution des effectifs dans une autre filiale que
celle de Givors et sur les engagements qui avaient été pris par BSN.
L'entreprise a lancé une nouvelle procédure, considérant que le marché verrier
le nécessitait. Nous verrons si les autorités judiciaires jugent cette nouvelle
procédure compatible avec le droit positif.
Les dispositions de la loi de modernisation sociale relative aux licenciements
validées par le Conseil constitutionnel donnent de nouveaux outils aux
salariés, notamment au comité d'entreprise ; celui-ci a la possibilité de
saisir un médiateur.
Je rappelle que les exigences concernant les actions de reclassement et de
réindustrialisation, lorsqu'aucune autre issue n'est possible, ont été très
significativement renforcées par la majorité qui soutient le Gouvernement à
l'Assemblée nationale et par votre groupe ici même.
S'agissant de l'article 107 de la loi de modernisation sociale, le
Gouvernement ne peut que prendre acte de la décision du Conseil
constitutionnel. Il faut souligner - et c'est un élément d'espoir - que
celui-ci a confirmé la jurisprudence de la Cour de cassation qui, je cite, «
censure les licenciements dictés par la seule volonté de majorer le profit de
l'entreprise ».
M. Jean Chérioux.
Voilà !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement souscrit à cette orientation. Il
veillera à ce qu'elle soit strictement appliquée dans le sens qui sous-tendait
votre question.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
EXPLOSION DE LA DÉLINQUANCE