SEANCE DU 31 JANVIER 2002
M. le président.
L'amendement n° 329, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article L. 1122-1 du code de la santé publique est ainsi modifié :
« 1° Le neuvième alinéa est complété par la phrase suivante : "A l'issue de la
recherche, la personne qui s'y est prêtée est informée des résultats globaux de
cette recherche."
« 2° Dans la première phrase du dernier alinéa, après les mots "et que seul
sera sollicité celui des membres de sa famille s'ils sont présents," sont
insérés les mots : ", et à défaut, l'avis de la personne de confiance prévue à
l'article L. 1111-5".
« II. - Dans la première phrase de l'article L. 1123-7 du même code, après les
mots : "la pertinence générale du projet", sont insérés les mots : ", notamment
la qualité de sa conception scientifique".
« III. - L'article L. 1124-6 du même code est complété par un alinéa ainsi
rédigé :
« Par dérogation aux dispositions du premier alinéa, les recherches sans
bénéfice individuel direct en épidémiologie, génétique, physiologie,
physiopathologie, peuvent être réalisées par des professionnels de santé, dans
leurs lieux d'exercice habituel lorsque ces recherches ne nécessitent pas
d'actes autres que ceux qu'ils pratiquent usuellement dans le cadre de leur
activité médicale. Le comité consultatif de protection des personnes dans la
recherche biomédicale s'assure alors, avant de rendre son avis, que les
conditions du présent article sont satisfaites. »
La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Les modifications proposées constituent des
aménagements mineurs cohérents avec le projet de loi et envisageables dès à
présent sans attendre la révision globale de la loi du 20 décembre 1988
relative à la protection des personnes qui se prêtent à des cherches
biomédicales, et que la Haute Assemblée connaît particulièrement bien.
Tout d'abord, les modifications proposées pour l'article L. 1122-1 prévoient
que, à l'issue de la recherche, les personnes qui s'y sont prêtées, soient
informées des résultats globaux de cette recherche, ce qui est tout à fait
naturel. C'est une exigence des chercheurs qui se voient interrogés, par
exemple, dans les conditions que vous avez citées tout à l'heure, monsieur
Fischer. Cette disposition, souhaitée notamment par les associations de
malades, s'inscrit dans une démarche plus générale visant à considérer les
sujets participant à une recherche comme des collaborateurs actifs de cette
recherche.
Ensuite, il est proposé, à l'article L. 1122-1, que, pour les recherches mises
en oeuvre dans des situations d'urgence et pour lesquelles le consentement
préalable de la personne ne peut être recueilli, soit introduite la possibilité
de demander l'avis de la personne de confiance prévue à l'article L. 1111-5.
Cette disposition constitue une alternative intéressante, plus protectrice pour
la personne.
En outre, la modification proposée pour l'article L. 1123-7 du code de la
santé publique impose au comité consultatif des personnes dans la recherche
biomédicale d'évaluer la qualité de la conception scientifique du projet de
recherche au regard de la protection de la personne. Cette disposition se fonde
sur la notion selon laquelle les risques et les contraintes auxquels sont
exposés les participants à une recherche biomédicale ne sont acceptables que
dans la mesure où la qualité scientifique du protocole permet de garantir la
production de résultats contribuant effectivement au développement des
connaissances biologiques ou médicales. Pardonnez-moi d'être un peu long sur ce
sujet, mais ce sont des données extrêmement précises, que demandent les
chercheurs et les associations de malades.
Enfin, la modification présentée pour l'article L. 1124-6 dispense
d'autorisation de lieu de recherche sans bénéfice individuel direct les
recherches en épidémiologie, bien entendu, mais aussi en génétique, en
physiologie ou en physiopathologie et qui ne comportent pas d'actes autres que
ceux qui sont par ailleurs habituellement pratiqués dans le cadre de l'activité
de soins quotidienne. C'est au comité consultatif de protection des personnes
dans la recherche biomédicale de s'assurer, avant de rendre son avis, de la
conformité à la loi.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Francis Giraud,
rapporteur.
J'ai eu l'honneur de présider le CCPRB, le comité consultatif
de protection des personnes dans la recherche biomédicale, de la région
Provence-Alpes-Côte d'Azur pendant quelques années, et je crois que
l'amendement que vous présentez est bienvenu. Aussi, la commission émet un avis
favorable.
Toutefois, je me permets de vous signaler, monsieur le ministre, en faisant
référence aux travaux du « père » de ces organismes, M. Huriet, et à son
rapport d'information du printemps dernier au nom de notre commission, que nous
serons peut-être amenés, lors de la commission mixte paritaire, à discuter le
II de cet amendement s'agissant du rôle des CCPRB : analysent-ils la pertinence
générale des projets dont ils sont saisis ou peuvent-ils porter un jugement sur
la qualité de la conception scientifique desdits projets ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Tout à fait !
M. Francis Giraud,
rapporteur.
En clair, le danger serait de transformer les CCPRB en
comités scientifiques tels que ceux qui existent, par exemple, à l'INSERM,
l'Institut national de la santé et de la recherche médicale.
Nous émettons donc aujourd'hui un avis favorable, mais, si nous obtenions des
précisions lors de la commission mixte paritaire, nous pourrions demander au
Gouvernement d'accepter des remarques à ce propos.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je les accepte d'avance !
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 329.
M. Jean-Louis Lorrain.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Jean-Louis Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain.
Mon attention a été attirée par le II de cet amendement. Monsieur le ministre,
mon propos n'a pas pour objet de mettre quelqu'un en valeur, car le problème
n'est pas là. J'ai eu l'occasion de créer une fondation de recherche en
neurosciences. Nous avions mis en place des comités consultatifs, que l'on
appelait « comités d'éthique locaux », à l'intérieur de l'établissement, avant
qu'ils ne soient créés. Ensuite, les comités consultatifs sont devenus
départementaux puis régionaux. Pour évaluer la conception scientifique d'un
projet, il faut tout un arsenal, il faut certains équipements et des
personnalités compétentes que vous n'avez pas obligatoirement car les
recherches sont très variées. Le comité consultatif a des moyens très limités.
Il faut être vigilant.
De plus, en matière d'évaluation, on a affaire aussi à des hommes. Lorsque des
scientifiques sont évalués par des personnes trop proches, des rivalités
peuvent exister. On a vite fait de faire comprendre à telle ou telle personne
qu'elle est incompétente.
Je suis, bien sûr, tout à fait favorable à ce comité. Cependant, soyons très
prudents en matière d'évaluation. En effet, la recherche est un monde très
cruel et difficile.
Voilà le modeste témoignage que je souhaiterais livrer en cet instant,
monsieur le ministre. Je suis très heureux de la remarque qui a été faite, mais
je pense que, d'ici à la commission mixte paritaire, on devrait aboutir à
quelque chose qui ira dans ce sens-là.
M. Nicolas About,
président de la commission des affaires sociales,
et M. Bernard
Kouchner,
ministre délégué.
Ce n'est que transitoire !
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 329, accepté par la commission.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 7.
Articles 8 et 9