SEANCE DU 6 FEVRIER 2002
M. le président.
« Art. 57
quater
. - Dans le chapitre Ier du titre II du livre III de la
sixième partie du code de la santé publique, il est inséré, après l'article L.
6321-2, un article L. 6321-3 ainsi rédigé :
«
Art. L. 6321-3
. - La prise en charge psychologique des enfants et
adolescents victimes de maltraitance, ou présentant des risques de suicide,
peut être assurée dans le cadre de réseaux tels que définis à l'article L.
6321-1. Les prises en charge psychothérapeutiques assurées par des
psychologues, à la demande de professionnels de santé, sont rémunérées sur une
base forfaitaire. »
L'amendement n° 198, présenté par M. Dériot, au nom de la commission des
affaires sociales, est ainsi libellé :
« Supprimer l'article 57
quater.
»
La parole est à M. Dériot, rapporteur.
M. Gérard Dériot,
rapporteur.
La commission a adopté cet amendement de suppression de
l'article 57
quater
pour une raison simple : elle estime peu souhaitable
de créer des réseaux dans la loi. Sinon, il faudrait énumérer l'ensemble des
réseaux de santé.
Bien entendu, l'adoption de cet amendement ne signifie pas une opposition sur
le fond. La prise en charge psychologique des enfants et adolescents victimes
de maltraitance, ou présentant des risques de suicide, est tout à fait
prioritaire. La création de réseaux de santé pour assurer cette prise en charge
est très probablement souhaitable.
Par la voie quelque peu étrange d'un communiqué de presse, la défenseure des
enfants, Mme Claire Brisset, s'est émue de l'adoption de cet amendement, en
exprimant « sa vive inquiétude ». Elle considère que la suppression de
l'article 57
quater
« serait le signe d'une grave méconnaissance des
besoins des enfants et des adolescents ».
Je crois très sincèrement que Mme la défenseure des enfants, emportée sans
doute par sa fougue à défendre les droits des enfants, se méprend sur le sens
de notre amendement. Il est faux d'assurer que nous ferions preuve d'une «
grave méconnaissance des besoins des enfants et des adolescents », à moins de
vouloir nous faire un procès quelque peu déplacé !
(M. le ministre s'exclame.)
Nous avons lu le rapport 2001 de Mme la défenseure des enfants, et l'une des
dix propositions - la proposition n° 4 intitulée « Instituer pour les enfants
des prises en charge thérapeutiques, remboursées par la sécurité sociale, par
des psychologues cliniciens sur prescription de psychiatres » - nous paraît
particulièrement intéressante. Permettez-moi de la citer : « De la même façon
qu'un médecin prescrit des séances de kinésithérapie,...
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Mais non !
M. Gérard Dériot,
rapporteur.
... qui sont alors remboursées par la sécurité sociale, un
psychiatre, aussi bien dans le public que dans le privé, devrait pouvoir
prescrire des thérapies effectuées par un psychologue clinicien ». Mme la
défenseure des enfants ajoute ceci : « Cette mesure ne peut-être mise en place
qu'aux conditions suivantes : qu'une formation homogène, sanctionnée par un
diplôme unique, soit organisée ; que cette formation permette d'accéder à un
nouveau statut de psychologue clinicien reconnu par l'ensemble des
administrations concernées ; que cette formation soit à la fois théorique et
pratique ».
Et là, j'avoue ma surprise : le rapport entre la proposition n° 4 de Mme la
défenseure des enfants et le contenu de l'article 57
quater
m'apparaît
pour le moins curieux.
Cela est d'autant plus vrai que la suppression de l'article 57
quater
n'a pas pour conséquence, une fois de plus, d'interdire la création de tels
réseaux, qui ne sont pas obligatoires. Je rappelle les premiers mots de
l'article : « La prise en charge psychologique des enfants et adolescents
victimes de maltraitance, ou présentant des risques de suicide, peut être
assurée dans le cadre de réseaux... ».
L'intérêt de l'article 57
quater
est de préciser que « les prises en
charges psychothérapeutiques assurées par des psychologues, à la demande de
professionnels de santé, sont rémunérées sur une base forfaitaire ». Mais il
s'agit là d'une disposition classique du « droit » des réseaux.
L'adoption de l'article 57
quater
ne permettrait pas de s'assurer que
ces réseaux se développent sur l'ensemble du territoire national. De surcroît,
on n'y trouvera nulle part la référence à ce qui était une condition
sine
qua non
du point de vue de Mme la défenseure des enfants : la formation.
Je comprends l'émotion de Mme la défenseure des enfants, et je ne voudrais pas
qu'il y ait le moindre malentendu sur nos intentions.
Je ne suis pas non plus un rapporteur « psychorigide ».
(Sourires.)
Aussi suis-je prêt à retirer l'amendement de la commission si les arguments que
va maintenant déployer M. le ministre pour me demander de le faire sont
suffisamment convaincants.
Dans le cas inverse - cela pourrait arriver, même si le talent de M. le
ministre n'est plus à démontrer ! -, j'attire l'attention du Sénat sur le fait
que cet article serait adopté conforme par les deux assemblées, et que nous ne
pourrions donc plus y toucher. Or il me semble qu'une rédaction meilleure, y
compris pour Mme la défenseure des enfants, pourrait être trouvée.
Telles sont les raisons, monsieur le ministre, mes chers collègues, pour
lesquelles la commission a adopté cet amendement de suppression.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Monsieur le rapporteur, votre demande est non seulement
juste mais aussi très courtoise. Je vais donc tenter de déployer non pas mon
faible talent mais ma conviction profonde.
Tout d'abord, je défendrai la défenseure des droits des enfants, Mme Claire
Brisset, qui est issue d'une famille où l'on sait ce que sont la psychiatrie et
la psychologie. Je crois qu'elle a profondément raison, et je vais vous dire
pourquoi.
Ce matin, monsieur le rapporteur, j'étais au Palais des Congrès où sont réunis
des cancérologues internationaux de très haut niveau. L'une de leur demande -
ce n'est bien entendu pas la seule - portait en particulier sur la présence de
psychologues au moment de l'annonce du diagnostic au malade atteint d'un
cancer, présence qu'ils considèrent infiniment utile.
Lors des Etats généraux des malades du cancer, réunis voilà deux ans - j'en
garde d'ailleurs un souvenir très ému et j'y ai appris énormément de choses -,
les militants de la Ligue contre le cancer avaient eux-mêmes formulé une telle
demande.
Monsieur le rapporteur, ce n'est pas seulement le médecin qui, au moment du
diagnostic doit faire preuve d'humanité. Je me souviens d'un infirmier qui
m'avait confié que c'était plus à son retour chez lui que lors de l'annonce de
sa maladie par un médecin bien connu de lui qu'il s'était vraiment senti
seul.
C'est pourquoi il était demandé ce matin non seulement que des psychologues
participent à l'annonce mais aussi qu'ils accompagnent ensuite le malade. Mais,
cela, c'est impossible : je n'ai pas les moyens de les payer, car, en l'absence
de nomenclature de la psychologie, ils n'existent pas !
Le professeur de cancérologie qui me présentait cette demande ce matin - il
est extrêmement connu en France et avait vraiment réuni les meilleurs
cancérologues du monde anglo-saxon, en particulier - paie lui-même les quatre
psychologues dont il a besoin dans son service hospitalier, à Paris.
Monsieur le rapporteur, je ne peux pas faire autrement que de marquer très
précisément dans la loi que les psychologues doivent être pris en charge au
forfait !
Je comprends votre argument : il est juste de dire que, après tout, on devrait
mentionner tous les réseaux et tous les gens que l'on pourrait prendre en
charge.
Mais les psychologues sont des gens très particuliers ! Tout d'abord, dans ce
domaine, les formations sont extrêmement différentes : il y a des cliniciens et
il y a des diplômés universitaires. Ce n'est déjà pas pareil !
Par ailleurs - et c'est très important d'en prendre conscience -, la moitié
des psychologues ne veulent pas que les soins qu'ils prodiguent fassent l'objet
d'une prescription.
Dans ma candeur naïve, j'ai voulu, à un moment, que les séances chez un
psychologue ou les séances de psychothérapie - mais quand on entre dans le
domaine de la psychothérapie, en France, on ne sait plus où l'on en est... -
fassent l'objet, comme c'est le cas pour les kinésithérapeutes, d'une
prescription globale et que, à l'intérieur d'un traitement ou d'une prise en
charge, l'homme de l'art réglemente, ordonne, modèle sa prise en charge comme
il le souhaite.
Mais, je le répète, au moins la moitié des psychologues ne veulent pas que les
séances fassent suite à une prescription : ils veulent en effet - et c'est une
école très répandue en France, respectable sans doute - que le malade les
demande, considérant que c'est ainsi plus efficace qu'une psychothérapie qui ne
serait pas souhaitée.
De plus, ainsi que je l'ai déjà dit, il n'y a pas de nomenclature.
Si je saisis en ce moment, au sujet des psychologues, la CNAM, dont la
commission de nomenclature a été prolongée le 31 janvier dernier sur demande
conjointe d'Elisabeth Guigou et de moi-même en raison d'un conflit que je
souhaite maintenant apaisé - arrivé au terme de son mandat, elle ne pouvait en
effet plus se prononcer sur la revalorisation de l'acte de l'accouchement que
j'avais promis de demander, faute, hélas ! de pouvoir y procéder moi-même -,
cela va prendre des années !
Demain, monsieur le rapporteur, je clôturerai les sixièmes journées
internationales francophones et latines pour la prévention du suicide qui se
tiennent depuis quatre jours à Paris, à l'Unesco.
M. Jean-Louis Lorrain.
Tout à fait !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je ne vous ferai pas l'injure de penser que vous ne
connaissez pas les chiffres : il y a 50 000 tentatives de suicides par an et,
dans notre pays, le suicide est la première cause de mortalité chez les
personnes âgées de moins de 34 ans, essentiellement suite à des violences
sexuelles subies pendant l'enfance. Vous comprendrez donc que, sans vouloir
pour autant vous forcer la main, il me faille entreprendre quelque chose ! Pour
le moment, sachez-le, on ne peut pas, en réalité, faire autrement que d'être un
peu redondant.
Voilà pourquoi l'article 57
quater
prévoit qu'une prise en charge
psychologique peut être assurée dans le cadre de réseaux et que les prises en
charge psychothérapeutiques assurées par des psychologues à la demande de
professionnels de santé - ces derniers garantiront le sérieux de la formation,
laquelle pourra être un peu encadrée au niveau du réseau - sont rémunérées sur
une base forfaitaire.
Dans la prévention du suicide, j'ai voulu faire quelque peu avancer les
choses. En tout cas, les professionnels, je crois, nous en sont gré. Nous avons
ainsi réussi à obtenir la présence d'un psychiatre dans tous les centres
d'urgence somatiques : il y existe maintenant une correspondance psychiatrique,
ou, à défaut, quelqu'un peut arriver très vite. Mais le problème, c'est que,
après avoir été pris en charge pendant quelques jours - et les tentatives de
suicide des jeunes sont très majoritairement prises en charge dans les services
d'urgence -, les jeunes regagnent leur quartier où ils se retrouvent sans
aide.
En réalité, les psychiatres ne sont pas assez nombreux pour le suivi, et il
n'y a de possibilités que des psychiatres s'adressent à des psychologues pour
ce faire.
Voilà où j'en suis. C'est pourquoi je vous force un peu la main en vous
demandant de faire preuve de votre indulgence à l'égard d'une proposition dont
le seul but est une meilleure prise en charge - en tout cas une prise en charge
élémentaire - des jeunes, compte tenu du nombre invraisemblable des tentatives
de suicide dans cette catégorie de la population.
M. Nicolas About,
président de la commission des affaires sociales.
Je demande la
parole.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Nicolas About,
président de la commission des affaires sociales.
Je me souviens de notre
débat sur la restructuration des textes à la suite de l'arrêt Perruche et d'une
discussion avec les juristes de votre cabinet, monsieur le ministre, discussion
au cours de laquelle j'ai appris ce qu'était l'«
a contrario
».
(M.
le ministre sourit.)
Je dois dire que le non-juriste que je suis a beaucoup
appris de cette démonstration extrêmement rigoureuse.
Si je prends le texte de l'article 57
quater,
j'y trouve deux choses :
une première partie qui est la « noble cause » avancée et une seconde partie
qui est le but recherché plus ou moins caché.
Dans la première partie, énonçant la « noble cause », il est dit : « La prise
en charge psychologique des enfants et adolescents victimes de maltraitance, ou
présentant des risques de suicide, peut être assurée dans le cadre de réseaux
tels que définis à l'article L. 6321-1. » Si l'on suit vos juristes, monsieur
le ministre, cela signifie,
a contrario,
que tous ceux qui n'entrent pas
dans le cas des enfants et adolescents victimes de maltraitance, ou présentant
des risques de suicide, ne peuvent pas obtenir la prise en charge
psychologique.
(M. le ministre manifeste son désaccord.)
Je suis désolé, ce sont vos juristes qui m'ont enseigné cela ! Alors, est-ce
vraiment ce que vous souhaitez, monsieur le ministre, je vous le demande ?
J'en viens à la deuxième partie de l'article, qui précise l'objectif à
atteindre : « Les prises en charge psychothérapeutiques assurées par des
psychologues, à la demande de professionnels de santé, sont rémunérées sur une
base forfaitaire. »
Mais, à partir du moment où la condition préalable qui est posée interdit,
a contrario,
la prise en charge psychologique de tous les cas qui ne
sont pas mentionnés, ne pourront être rémunérées que les prises en charge qui
auront été régulièrement mises en oeuvre.
C'est la raison pour laquelle, monsieur le ministre, je souhaiterais que vous
acceptiez que nous réécrivions cet article de façon à atteindre l'objectif
mentionné dans la deuxième partie de l'article.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je ne vois pas de liste, mais je ne suis pas juriste
!
M. Nicolas About.
président de la commission des affaires sociales.
Moi non plus !
M. Pierre Fauchon,
rapporteur pour avis.
Ce n'est pas une excuse !
(Sourires.)
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Quoi qu'il en soit, je vous crois ! Je ne demande pas
mieux que l'article soit réécrit de façon à être appliqué dans le sens que vous
indiquez. Je pense que cette réécriture pourrait avoir lieu en commission mixte
paritaire.
En tout cas, il faut absolument que la prise en charge soit assurée pour tous
et il n'y a pas d'autre moyen que de la rémunérer au forfait.
(Applaudissements.)
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 198.
M. Louis de Broissia.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. de Broissia.
M. Louis de Broissia.
Ma réflexion s'adresse non pas à M. le ministre, dont je suis la pensée, mais
à M. le président de la commission des affaires sociales.
Je ne suis pas moi-même juriste, mais quand je lis que la prise en charge
psychologique « peut être assurée », je ne pense pas que ce soit restrictif.
Je reviens au fond du sujet.
Nous avons la charge - et quand je dis nous, je sais que je vais encore être
accusé de parler au nom de l'affreux lobby des sénateurs présidents de conseils
généraux...
M. Gérard Dériot,
rapporteur.
Il n'y a pas que vous !
M. Pierre Fauchon,
rapporteur pour avis.
C'est une élite !
M. Louis de Broissia.
A ce titre, nous avons des responsabilités, et Mme Royal a l'air de l'oublier
certains jours...
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Elle n'est pas là, n'invoquez pas ses propos !
M. Louis de Broissia.
Certes, elle n'est pas là, mais je fais cette remarque parce que nous sommes
un peu agacés !
La loi nous a donc chargés du suivi de la maltraitance des enfants : lourde,
très lourde charge, puisqu'il y a plusieurs centaines de cas par département,
donc plusieurs dizaines de milliers en France.
Les départements ont passé des accords avec l'Etat, accords plus ou moins
bons. Nous avons, dans ce cadre, ouvert à l'hôpital de Dijon un centre
d'accueil pour les victimes d'abus sexuels, structure qui marche bien et qui
est l'exemple d'une bonne coopération avec l'Etat ; y sont à l'oeuvre des
psychologues et des psychiatres.
Toutefois, outre ces accords départementaux, qui sont en général de plus en
plus performants, il serait bon que s'engage, au niveau national, une action
destinée à lutter contre ce fléau extrêmement préoccupant.
Il y a encore, paraît-il, 57 000 enfants qui font une tentative de suicide, et
l'on peut considérer qu'il y a au moins autant de victimes d'abus sexuels en
France. Pour ces 100 000 enfants, il me semble opportun d'afficher une volonté
nationale et pas seulement départementale. C'est la raison pour laquelle je
soutiendrai la position du Gouvernement.
M. Jean Chérioux.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux.
J'ai l'intention d'intervenir non pas sur le fond du débat, mais seulement sur
la procédure.
J'ai bien compris qu'il était indispensable, aux yeux du Gouvernement, que ce
texte prévoie la possibilité d'une rémunération sur une base forfaitaire. J'ai
constaté que le président de la commission des affaires sociales en était
d'accord, mais que la rédaction du texte ne lui convenait pas.
Quoi qu'il en soit, comme l'a très justement fait remarquer tout à l'heure M.
le rapporteur - il semble que tout le monde l'ait oublié ! - nous ne pouvons
pas voter conforme le texte qui nous est soumis si nous souhaitons procéder, en
commission mixte paritaire, à une autre rédaction qui convienne et à la
commission et au Gouvernement.
La seule chose qui nous reste à faire, bien entendu avec l'engagement de M. le
rapporteur de revoir le problème, est donc de voter l'amendement de la
commission.
M. Louis de Broissia.
Très bien !
M. le président.
Monsieur le rapporteur, l'argumentation de M. Chérioux est très judicieuse,
mais ne serait-il pas encore mieux de modifier l'amendement dans l'immédiat
?
M. Gérard Dériot,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Dériot, rapporteur.
M. Gérard Dériot,
rapporteur.
Je remercie notre collègue M. Chérioux de sa remarque, mais
je souhaite en effet modifier cet amendement n° 198.
Au lieu de supprimer l'article 57
quater,
il viserait à en supprimer la
première phrase jusqu'à : « peut être assurée ». Le texte proposé pour
l'article L. 6321-3 se lirait ainsi : « Dans le cadre de réseaux tels que
définis à l'article L. 6321-1, les prises en charge psychothérapeutiques
assurées par des psychologues, à la demande de professionnels de santé, sont
rémunérées sur une base forfaitaire. »
Lors de la commission mixte paritaire, nous verrons s'il faut encore revoir
cette rédaction.
M. le président.
Je suis donc saisi d'un amendement n° 198 rectifié, présenté par M. Dériot, au
nom de la commission des affaires sociales, et ainsi libellé :
« « I. - Au début du texte proposé par l'article 57
quater
pour
l'article L. 6321-3 du code de la santé publique, supprimer les mots : "La
prise en charge psychologique des enfants et adolescents victimes de
maltraitance, ou présentant des risques de suicide, peut être assurée".
« « II. - Le début de la seconde phrase du texte proposé par cet article pour
l'article L. 6321-3 du code de la santé publique est ainsi rédigé : "Dans le
cadre de réseaux tels que définis à l'article L. 6321-1, les prises en
charge...". »
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je suis favorable à cet amendement puisqu'il ne
restreint pas le champ de la prise en charge en en maintenant la rémunération
sur une base forfaitaire.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 198 rectifié.
M. Jean-Louis Lorrain.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain.
Nous sommes en train de traiter d'un sujet qui nous tient à coeur, et ce
depuis très longtemps. Nous ne le découvrons pas ce soir même si je suis très
heureux que Mme Brisset ait autant de poids sur notre assemblée !
Je rappelle que le Sénat a créé un groupe « Enfance et adolescence »,
regroupant des membres de la commission des affaires sociales et de la
commission des lois, et que la première personne que ce groupe a reçue fut
justement Mme Brisset ; vous voyez que nous la soutenons dans son combat !
Cela dit, je voterai pour l'amendement n° 198 rectifié.
Je comprends la démarche de M. le ministre, qui souhaite remédier à un système
n'apportant pas de réponse. Il nous dit : approuvez ma démarche, ce sera au
moins un pas de fait ; le coeur peut peser sur la raison.
En fait, si nous en sommes là, c'est parce que nous avons un système
pédo-psychiatrique insuffisant depuis une vingtaine d'années, ce que l'on ne
peut imputer au gouvernement actuel, bien entendu.
Lorsque, voilà deux ou trois ans, nous évoquions la prise en charge des
maladies addictives, nous nous faisions « jeter ». Il n'y avait aucune prise en
compte éducative, rien au niveau des soins et aucune coordination sur le plan
social.
On parle des psychologues. Mais on pourrait évoquer les psychologues
scolaires, quasiment absents de notre discours, et qui pourtant devraient être
les premiers au contact de ces enfants en état de manque.
Le secteur associatif, lui, n'a pas attendu. L'origine du mouvement remonte à
l'école de Bordeaux, liée à la réflexion menée par les Québéquois, qui s'est
diffusée. Ainsi sont nées en France des associations qui comprennent en leur
sein des psychologues pris en charge, entre autres, par les conseils généraux.
Il faut poursuivre dans ce sens.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Vous avez raison !
M. Guy Fischer.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer.
Je me réjouis de la nouvelle proposition qui a été formulée et les membres du
groupe communiste républicain et citoyen voteront l'amendement tel qu'il a été
modifié.
M. Bernard Cazeau.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Cazeau.
M. Bernard Cazeau.
Nous souscrirons finalement à la proposition qui nous est faite parce qu'il
faut bien en terminer.
M. Lorrain a dit l'essentiel, je serai donc très bref.
Pour ma part, je souhaiterais que l'on prévoie une exception, dont la
formulation serait à trouver. Il est en effet important, pour les 50 000
adolescents concernés, de trouver une solution malgré le manque de
pédopsychiatres. Je fais confiance pour cela à la commission mixte
paritaire.
En tout cas, je regrette que nous ayons eu un débat de forme si long sur une
question de fond si essentielle !
M. Jean-Pierre Godefroy.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Godefroy.
M. Jean-Pierre Godefroy.
A titre personnel, j'ai beaucoup de mal à souscrire à cet amendement.
Je comprends parfaitement les arguments de M. le rapporteur mais, si nous
supprimons la référence aux enfants victimes de maltraitance ou présentant des
risques de suicide, je crains - je le dis du fond du coeur car cette question
me concerne beaucoup - que nous n'ajoutions au drame de ces enfants le silence
de la société, du monde médical, des parents et de leur entourage. Le suicide
est un silence dans le silence. Que l'on y ajoute encore du silence me choque
profondément !
M. Nicolas About,
président de la commission des affaires sociales.
Je demande la
parole.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Nicolas About,
président de la commission des affaires sociales.
Telle n'est pas notre
intention. Dans son amendement, M. le rapporteur a souhaité rédiger un texte
cohérent et non un texte qui nous lie et qui empêche d'apporter un soutien
psychologique à tous les enfants qui en ont grandement besoin. Lors de la
commission mixte paritaire, nous allons nous efforcer de mettre en valeur
l'intérêt du soutien psychologique, selon les orientations que vous avez
évoquées, mon cher collègue.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je comprends bien la préoccupation qu'a exprimée M.
Godefroy, et je remercie M. le président de la commission des affaires sociales
d'avoir précisé quelles seront ses intentions lors de la commission mixte
paritaire. Je vous remercie tous d'ailleurs d'avoir compris les nécessités de
l'heure. Les propos que vous avez tenus sur la pédopsychiatrie sont exacts,
notamment par rapport à l'ensemble de la psychiatrie, qui se cherche et ne sait
plus où est sa place dans cette société. Il est très difficile maintenant de
rétablir la confiance, ce qui est l'objectif de ce projet de loi.
En conclusion, on pourrait peut-être se demander pourquoi, dans notre société
riche, nous avons tant besoin de psychiatres et d'accompagnement psychologique.
Mais c'est un autre débat !
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 198 rectifié, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 57
quater,
modifié.
(L'article 57
quater
est adopté.)
Article 57 quinquies