SEANCE DU 26 JUILLET 2002
M. le président.
Je suis saisi de trois amendements présentés par M. Alain Vasselle.
L'amendement n° 207 est ainsi libellé :
« Avant le chapitre premier du titre IV, insérer une division additionnelle
ainsi rédigée :
« Chapitre...
« Dispositions relatives à l'information du maire sur l'action publique. »
L'amendement n° 208 est ainsi libellé :
« Avant le chapitre premier du titre IV, insérer un article additionnel ainsi
rédigé :
« L'article 19 du code de procédure pénale est complété par un alinéa ainsi
rédigé :
« Le procureur de la République informe le maire des crimes, délits et
contraventions de cinquième classe dont il a connaissance sur le territoire de
la commune. »
L'amendement n° 209 est ainsi libellé :
« Avant le chapitre premier du titre IV, insérer un article additionnel ainsi
rédigé :
« L'article 40 du code de procédure pénale est complété par un alinéa ainsi
rédigé :
« A la demande du maire, le procureur l'informe des suites données aux
plaintes formulées pour des infractions commises sur le territoire de sa
commune et des motifs d'un éventuel classement sans suite. »
La parole est à M. Vasselle, pour défendre ces trois amendements.
M. Alain Vasselle.
Il s'agit, en définitive, de reprendre des dispositions que la Haute Assemblée
avait adoptées à l'occasion d'un texte précédent dont M. Jean-Pierre Sckosteck
était également le rapporteur.
L'amendement n° 207 vise à créer une division additionnelle, avant le chapitre
premier, qui s'intitulerait : « Dispositions relatives à l'information du maire
sur l'action publique ».
Rappelez-vous, mes chers collègues, nous avions eu un très long débat sur ce
sujet. Nous souhaitions notamment que le maire puisse disposer des informations
sur toutes les infractions de cinquième classe qui auraient été établies par
les magistrats. En effet, ce dont souffrent les élus locaux, c'est de constater
que, alors qu'ils sont responsables de la sécurité, donc des faits et des
délits divers commis sur le territoire de leur commune, ils ne sont souvent pas
du tout informés de la suite qui leur est donnée.
S'ils le sont, c'est parce qu'ils entretiennent eux-mêmes des relations
personnelles avec le commissaire de police, avec le commandant de brigade,
voire avec le procureur. Malheureusement, dans la plupart des cas, un certain
nombre de ces faits sont classés sans suite. C'est la raison pour laquelle
l'amendement n° 208 prévoit que « Le procureur de la République informe le
maire des crimes, délits et contraventions de cinquième classe dont il a
connaissance sur le territoire de la commune. »
A la fin mai 2001, lors de l'examen en première lecture du projet de loi
relatif à la sécurité quotidienne, deux amendements présentés par M. Schosteck
tendant à instituer un véritable droit à l'information du maire sur les
questions de sécurité avaient été adoptés. Le premier d'entre eux permettait
d'informer, dès l'origine, les maires des problèmes apparaissant dans la
commune.
Aucune disposition législative impérative ne prévoit cette information sur
les questions de sécurité. Il s'agit, bien entendu, non pas de recueillir les
relevés de main courante ou les procès-verbaux, qui relèvent du secret de
l'enquête, mais simplement d'être légitimement tenu au courant des faits
intervenus dans la commune. Cet amendement reprend les termes de celui que le
Sénat a adopté en mai 2001.
L'amendement n° 209 est un amendement de conséquence. Il précise que, à la
demande du maire, le procureur doit informer celui-ci des suites données aux
plaintes formulées pour les infractions commises sur le territoire de sa
commune et des motifs d'un éventuel classement sans suite.
Permettez-moi, monsieur le ministre, d'insister sur un point sur lequel je
vous ai déjà sensibilisé. Vous savez que, aujourd'hui, nombre de procès-verbaux
dressés par les maires, voire par les gardes champêtres ou les agents
assermentés de nos communes, rurales, petites ou moyennes, sont souvent classés
sans suite et ne sont pas pris en considération par le procureur. Seuls sont
pris en considération les procès-verbaux dressés soit par un officier de police
judiciaire appartenant à la gendarmerie, soit par un commisaire de police.
Les maires sont réellement découragés de constater que, bien qu'ayant le
titre, lorsqu'ils tentent d'assumer leurs responsabilités et d'exercer leurs
fonctions aucune suite n'est donnée à leurs décisions, ce qui leur fait perdre
toute autorité auprès d'une partie de la population, tout au moins celle qui
tombe dans la délinquance.
Voilà les raisons qui ont motivé le dépôt de ces trois amendements, qui sont
tout à fait dans l'esprit de ce que souhaitait la majorité sénatoriale en son
temps, et je ne peux imaginer qu'elle ait changé d'avis en si peu de temps !
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains
et Indépendants.)
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Schosteck,
rapporteur.
La commission est favorable à ces trois amendements.
Les difficultés que présente cette communication de la part des représentants
de la justice est un problème dont nous avions beaucoup discuté, Alain Vasselle
a raison de le rappeler, et j'en sais quelque chose puisque j'étais le
rapporteur du texte sur la sécurité quotidienne.
Alain Vasselle a très bien évoqué les difficultés dans lesquelles se débattent
les maires au quotidien. On nous cite quelques exemples concernant les maires
de grandes villes. Effectivement, celles-ci connaîtront peut-être un amas de
communications. Mais je vous rappelle, mes chers collègues, que la France
compte quelque 36 000 communes, dont un certain nombre de villes moyennes. Si
je prends l'exemple de la commune que je représente - on ne parle bien que de
ce que l'on connaît - je recevrai une information, je l'espère, tous les quinze
jours, ou tous les mois.
Par conséquent, il faut bien comprendre - et je m'adresse aux représentants de
la chancellerie -, les difficultés quotidiennes auxquelles se heurtent le
maire, à qui l'on vient s'adresser parce qu'il représente le seul recours. Il
est, selon une formule dont j'ai oublié l'auteur, la relation de celui qui n'en
a pas.
M. Michel Charasse.
Il est l'Etat !
M. Jean-Pierre Schosteck,
rapporteur.
Vous avez raison !
Vous interrogez le maire parce que vous avez lu dans la presse qu'il s'est
passé quelque chose dans sa commune et il vous répond qu'il n'est pas informé,
qu'il va se renseigner. Il appellera peut-être le procureur, qui lui répondra
peut-être... C'est une situation intenable, à laquelle il faut mettre un
terme.
Je ne méconnais pas les difficultés, mais je rejoins tout à fait la
préoccupation exprimée par Alain Vasselle : c'est véritablement la
préoccupation de la grande majorité des maires.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben,
garde des sceaux.
Je comprends la préoccupation de M. Alain Vasselle :
j'ai été maire, moi aussi, et je sais combien il est agaçant d'apprendre les
choses uniquement par la presse ou par le qu'en-dira-t-on.
Avant d'en venir aux mesures que nous avons déjà prises, je souhaite souligner
les difficultés de la rédaction que vous proposez, monsieur le sénateur : ces
dispositions me paraissent inapplicables.
Votre amendement n° 208 prévoit : « Le procureur de la République informe le
maire des crimes, délits et contraventions de cinquième classe dont il a
connaissance sur le territoire de la commune. » Les fonctionnaires
supplémentaires dans les juridictions, que je vous propose, risquent de passer
beaucoup de temps à répondre à cette obligation d'informer de tout et
régulièrement. Je ne pense pas que tel soit votre souhait, monsieur Vasselle
!
Quelles mesures avons-nous déjà prises ?
Le 17 juillet dernier, nous avons publié un décret qui fixe les conditions de
mise en place des nouveaux dispositifs locaux de sécurité et de prévention de
la délinquance. Avec Nicolas Sarkozy, nous avons envoyé une circulaire
interministérielle aux procureurs de la République, aux préfets et aux
sous-préfets, qui explicite ce décret et qui, en particulier, prévoit que, dans
le respect de l'article 11 du code de procédure pénale relatif au secret de
l'enquête, bien entendu, les procureurs doivent informer les maires des suites
réservées aux procédures concernant les infractions ayant troublé l'ordre
public dans le ressort de leur commune.
Cette circulaire prévoit également que les maires ne doivent pas, en
permanence, être obligés de solliciter ces services pour obtenir des
informations sur les actes de délinquance commis dans leur commune.
Ce dispositif devrait commencer à se mettre en place.
L'étape suivante consistera à organiser la coordination du travail entre la
police et la gendarmerie, d'une part, et les parquets, d'autre part. Car il ne
faut pas passer d'un extrême à l'autre : les différents services ne doivent pas
passer leur temps à envoyer les mêmes informations aux mêmes destinataires !
Je souhaiterais, monsieur Vasselle, que cette question ne soit pas tranchée à
l'occasion de cet amendement, dont la formulation me paraît trop large et les
conditions d'application confuses. Il faudrait préciser très clairement qui
fait quoi, et ce en concertation avec le ministère de l'intérieur : quelles
sont les informations que la police ou la gendarmerie donne aux maires et
quelles sont celles que les procureurs donnent aux maires ? En effet, il est un
certain nombre d'informations dont la police a connaissance bien avant les
procureurs, alors que les informations en termes de suivi d'enquête relèvent de
la compétence des procureurs.
Je vous propose donc la création rapide d'un groupe de travail avec l'équipe
de Nicolas Sarkozy, pour bien expliciter la circulaire et se mettre d'accord
sur qui fait quoi, afin que l'ensemble fonctionne convenablement.
M. le président.
Les amendements n°s 207, 208 et 209 sont-ils maintenus, monsieur Vasselle ?
M. Alain Vasselle.
Je souhaite éviter à mes collègues une longue discussion, qui attendent avec
impatience la fin du débat de ce soir pour pouvoir partir en week-end ou en
vacances !
M. Michel Charasse.
Dans nos mairies !
M. Alain Vasselle.
Je sais que, si je maintenais mes amendements, nous n'éviterions pas le
débat-fleuve que nous avons déjà connu - M. le rapporteur et M. le président de
la commission des lois s'en souviennent sûrement - ce que mes collèges de
l'opposition espèrent sans doute. Je vais donc les priver de ce plaisir.
Mais ce n'est pas uniquement la raison pour laquelle je retire mes amendements
: je le fais surtout parce que vous venez de prendre devant nous, monsieur le
garde des sceaux, des engagements clairs. Toutefois, sachez que je suis en
général assez tenace et têtu
(Sourires.)
et que si je ne constate pas
rapidement une suite donnée à ces engagements, je ne manquerai pas de revenir à
la charge.
(Applaudissements sur les travées du RPR.)
Par conséquent, monsieur le garde des sceaux, je vous fais confiance - je
crois qu'il serait malvenu de ma part de ne pas le faire - et je retire mes
amendements.
M. Lucien Lanier.
Très bien !
M. Alain Vasselle.
Nous pouvons nous donner rendez-vous dans les semaines ou, tout au moins, dans
les mois à venir pour traduire concrètement notre action dans ce domaine en
faveur des maires
(Nouveaux applaudissements sur les mêmes travées)
M. le président.
Les amendements n°s 207, 208 et 209 sont retirés.
Chapitre Ier
Dispositions relatives à la composition pénale
Article 21