SEANCE DU 26 JUILLET 2002
M. le président.
« Art. 21. - I. - L'article 41-2 du code de procédure pénale est ainsi modifié
:
« 1° Il est ajouté au premier alinéa, après la référence à l'article 314-6 du
code pénal, une référence à l'article 321-1 de ce code ;
« 2° Au 3°, les mots : "quatre mois" sont remplacés par les mots : "six mois"
;
« 3° Il est ajouté, après le 4°, un 5° ainsi rédigé :
« 5° Suivre un stage ou une formation dans un service ou organisme sanitaire,
social ou professionnel pour une durée qui ne peut excéder trois mois dans un
délai qui ne peut être supérieur à dix-huit mois. »
« 4° Cet article est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les compositions pénales exécutées sont inscrites au bulletin du casier
judiciaire de l'intéressé qui n'est accessible qu'aux seules autorités
judiciaires, dans les conditions prévues à l'article 769. Cette inscription est
sans incidence sur l'application des règles sur la récidive. »
« II. - Le premier alinéa de l'article 41-3 du même code est complété par les
mots : "ainsi que pour les contraventions dont la liste est fixée par décret en
Conseil d'Etat".
« III. - L'article 768 du même code est complété par un 9° ainsi rédigé :
« 9° Les compositions pénales, dont l'exécution a été constatée par le
procureur de la République. »
« IV. - L'article 769 du même code est complété par un 6° ainsi rédigé :
« 6° Les mentions relatives à la composition pénale, à l'expiration d'un délai
de trois ans à compter du jour où l'exécution de la mesure a été constatée, si
la personne n'a pas, pendant ce délai, soit subi de condamnation à une peine
criminelle ou correctionnelle, soit exécuté une nouvelle composition pénale.
»
« V. - L'article 775 du même code est complété par un 14° ainsi rédigé :
« 14° Les compositions pénales mentionnées à l'article 768. »
Sur l'article, la parole est à M. Robert Bret.
M. Robert Bret.
Une fois encore, nous nous retrouvons pour modifier la loi du 15 juin 2000
renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des
victimes, à peine six mois après le vote de sa modification législative. Une
fois encore, nous ne pouvons que le déplorer.
A l'occasion du vote de la loi dite « Dray », nous avions souhaité dire
combien il nous apparaissait inutile, dangereux et de fort mauvaise méthode
législative de procéder ainsi à des remises en cause successives. Il s'agissait
d'une loi souhaitée par le Président de la République, M. Chirac, et votée avec
l'enthousiasme, dont on se rappelle voilà un peu plus de deux ans, et à la
quasi-unanimité du Parlement. Elle marquait pourtant un tournant important dans
notre procédure pénale en la mettant au niveau des exigences européennes.
Je rappellerai, pour mémoire, les apports fondamentaux de cette loi :
l'augmentation des droits de la défense et des droits des victimes pendant tout
le procès pénal ; la « juridictionalisation » de l'application des peines ;
l'appel des décisions de cour d'assises. Ainsi, c'est toute notre justice
pénale qui était revisitée.
Nous avions regretté avec force dans cet hémicycle, au mois de février
dernier, que l'on ne tente pas de faire vivre la loi et que l'on procède à des
retouches que seule une évaluation peut justifier. Une telle évaluation avait
été prévue pour le 30 juin 2003 par le précédent gouvernement.
Le présent projet de loi permettrait à un gouvernement si préocupé de
l'affichage sécuritaire de s'engouffrer sans complexe dans la brèche ainsi
ouverte et de remettre en cause ces avancées. Qu'on en juge !
On assiste à l'inversion d'un principe fondamental en matière pénale, à savoir
que la détention devient le principe et la liberté l'exception. Je rappelle que
la détention provisoire avait déjà été modifiée lors de la réforme de 2002.
Aujourd'hui, on allonge considérablement les délais en permettant d'étendre la
prolongation de huit mois supplémentaires en matière correctionnelle et de
douze mois en matière criminelle.
La commission des lois, à qui les contraintes du « délai raisonnable » n'ont
pas échappé, a limité cette possibilité de prolongation par voie d'amendement,
pour bien en signifier le caractère exceptionnel. Cependant, même ainsi, le
texte n'est pas satisfaisant, car cela nous renvoie notamment au problème des
délais d'instruction, dont pâtissent finalement les mis en examen.
Il y a aussi le renforcement du rôle du parquet. La commission des lois a vu,
là encore, qu'il posait problème et a cherché à l'encadrer. Quoi qu'il en soit,
cela aboutit à créer un titre de détention pour le parquet, comme tel,
contraire à l'article 64 de la Constitution. Les exigences du Conseil
constitutionnel ne sont pas satisfaites par le texte.
Un autre amendement restreint le référé-détention au cas où deux critères de
placement en détention provisoire sont réunis.
Tout cela révèle les difficultés de la commission des lois en la matière,
confrontée de toute façon à un recul.
En outre, la diminution des garanties données par la loi du 15 juin 2000
touche également les victimes par la généralisation des comparutions immédiates
- nous aurons l'occasion d'y revenir - et au travers de la systématisation des
amendes civiles en cas d'ordonnance de refus d'informer, qui fera obstacle à la
saisine du juge d'instruction et limitera très certainement la constitution de
parties civiles, notamment par les associations, je pense, par exemple, à
l'affaire du sang contaminé.
Ainsi que je le rappelais lors de la séance du 29 mars 2000, « au-delà des
proclamations généreuses, les règles de la procédure pénale révèlent très
précisément l'idée que l'Etat se fait de la liberté individuelle. Elles en
constituent le miroir impitoyable : qu'elles permettent à un coupable de
glisser au travers des mailles du filet et l'on demandera de les resserrer ;
qu'elles aboutissent à priver un innocent de sa liberté et nous tenterons de
les élargir ». Avec cette loi, nous en avons une triste preuve.
C'est pourquoi les sénateurs communistes voteront contre tous les articles du
titre IV.
M. le président.
L'amendement n° 178, présenté par M. Estier et les membres du groupe
socialiste, apparentés et rattachée, est ainsi libellé :
« Dans le texte proposé par la 3° du I de l'article 21 pour insérer un 5° à
l'article 41-2 du code de procédure pénale, après les mots : "sanitaire, social
ou professionnel", insérer les mots : ", dont la liste est fixée par décret en
Conseil d'Etat,". »
La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Cet amendement se justifie par son texte même.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Schosteck,
rapporteur.
Défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben,
garde des sceaux.
Défavorable.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 178.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
L'amendement n° 53, présenté par M. Schosteck, au nom de la commission des
lois, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le 4° du I de l'article 21 :
« 4° Avant le dernier alinéa de cet article, il est inséré un alinéa ainsi
rédigé :
« Les compositions pénales exécutées sont inscrites au bulletin n° 1 du casier
judiciaire. »
La parole est à M. Jean-Pierre Schosteck, rapporteur.
M. Jean-Pierre Schosteck,
rapporteur.
Il s'agit d'une simplification rédactionnelle. Il nous paraît
préférable de viser le bulletin n° 1 du casier judiciaire plutôt que le
bulletin du casier judiciaire de l'intéressé, qui n'est accessible qu'aux
seules autorités judiciaires.
En outre, il est inutile de préciser que l'inscription des compositions
pénales est sans incidence sur l'application des règles de la récidive. Seules
les condamnations définitives peuvent constituer l'un des termes de la
récidive.
Enfin, le présent amendement tend à corriger une erreur d'insertion.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben,
garde des sceaux.
Favorable.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 53.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 21, modifié.
(L'article 21 est adopté.)
Article additionnel après l'article 21